La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2023 | FRANCE | N°21/01118

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 14 avril 2023, 21/01118


ARRÊT DU

14 Avril 2023







N° 554/23



N° RG 21/01118 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TWKQ



PL/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

20 Mai 2021

(RG F 19/00366 -section 2)







































r>


GROSSE :



aux avocats



le 14 Avril 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [X] [Y]

Chez Monsieur [O] [R], [Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Marine MARQUET, avocat au barreau de LILLE



INTIMÉE :



S.A.S. BOIS & MATÉRIAUX

[Adress...

ARRÊT DU

14 Avril 2023

N° 554/23

N° RG 21/01118 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TWKQ

PL/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

20 Mai 2021

(RG F 19/00366 -section 2)

GROSSE :

aux avocats

le 14 Avril 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [X] [Y]

Chez Monsieur [O] [R], [Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Marine MARQUET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A.S. BOIS & MATÉRIAUX

[Adresse 9]

[Localité 1]

représentée par Me Jérôme ARTZ, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Annabelle MOLLET, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 29 Mars 2023

Tenue par Muriel LE BELLEC

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge LAWECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: CONSEILLER

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 08 Mars 2023

EXPOSE DES FAITS

 

[X] [Y] a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée par la société BOIS & MATÉRIAUX à compter du 1er septembre 2010 en qualité de chauffeur livreur.

A la date de son licenciement, il percevait un salaire mensuel brut moyen de 1812,03 euros bruts par mois et relevait de la convention collective nationale des salariés du négoce des matériaux de construction. L'entreprise employait de façon habituelle au moins onze salariés.

Le 4 février 2019, la société lui a remis en main propre un avertissement reposant sur la détérioration, le 22 janvier 2019, du camion mis à sa disposition dans le cadre de ses fonctions ayant nécessité des réparations d'un montant total de 3044,28 euros.

En vue d'un éventuel licenciement, il a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 avril 2019 à un entretien qui s'est tenu le 29 avril 2019. Il a été a nouveau destinataire d'une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 mai 2019 en vue d'un nouvel entretien le 15 mai 2019, qui n'a pas lieu du fait de l'absence de l'intéressé. Son licenciement pour faute grave lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 mai 2019.

 

Les motifs du licenciement tels qu'énoncés dans la lettre sont les suivants :

«Nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'une éventuelle sanction par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 15 avril 2019. Cet entretien, auquel vous n'étiez pas assisté, s'est tenu le 29 avril 2019 avec [P] [U], Responsable Plate-forme et Logistique.

Or, suite à la survenance de faits nouveaux en cours de procédure, nous avons été amené à vous convoquer à un nouvel entretien préalable en vue d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 02 mai 2019, courrier que vous n'avez ni réceptionné, ni récupéré dans votre bureau de poste.

Cet entretien, auquel vous ne vous êtes pas présenté, devait se tenir le 15 mai 2019 afin de vous demander des explications sur votre comportement.

Nous vous informons par la présente que nous sommes amenés à poursuivre la procédure et à notifier votre licenciement pour faute grave pour les motifs suivants :

Retards répétés et injustifiés lors de vos prises de poste

Le 28 février 2019 vous avez pris votre poste avec 1h30 de retard.

Le 05 mars 2019, vous avez pris votre poste avec 1h20 de retard.

Le 18 mars 2019, vous avez pris votre poste avec 1h00 de retard.

Nous vous rappelons que le Règlement Intérieur qua vous connaissez parfaitement dispose notamment en son article 11 :

« Chaque salarié doit se trouver à son poste, le cas échéant en tenue de travail, aux heures fixées pour le début et pour la fin du travail.

Chaque salarié doit se conformer aux horaires de travail affichés dans l'entreprise. Le non-respect des horaires est passible de sanctions disciplinaires.

En fonction des nécessités du service, exceptionnelles ou imprévues, les horaires de travail sont susceptibles d'être modifiés, ceci moyennant un délai de prévenance

Les salariés doivent se conformer aux modifications de ces horaires et da l'organisation du travail ainsi décidées par la direction.

Las salariés sont tenus d'effectuer les heures supplémentaires ou de récupération décidées dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. »

Ces retards répétés ne sont pas tolérables et désorganisent le fonctionnement de l'agence.

Un tel comportement nuit à la bonne organisation de l'agence et est un manque de respect manifeste vis-à-vis de votre hiérarchie et de vos collègues, ce que nous ne pouvons tolérer, d'autant que vous avez déjà été averti oralement à plusieurs reprises par votre manager.

Lors de l'entretien du 29 avril 2019, vous avez reconnu avoir été en retard à plusieurs reprises et n'avez pas donné d'explication, ni justification.

Absences injustifiées

Le 21 mars 2019, vous ne vous êtes pas présenté à votre formation recyclage pour le CACES organisée par l'[4] à [Localité 10]. Vous avez expliqué à votre supérieur ne pas avoir de réveil ce jour-là et avoir par conséquent, oublié de vous lever.

Le 11 avril 2019, vous ne nous êtes pas présenté à votre poste de travail et n'avez prévenu votre hiérarchie qu'à partir de 14h00. Vous n'avez à nouveau fourni aucun justificatif pour cette absence.

Nous vous rappelons, conformément à l'article 12 du Règlement Intérieur dont vous avez parfaitement connaissance que :

« Pour assurer le bon fonctionnement du service tout salarié absent, devra prévenir sa hiérarchie le jour même de son absence par tout moyen adéquat, sauf cas de force majeure. Dans la mesure où elle est connue, il précisera la durée de l'absence.

Dans les meilleurs délais, le au p/us fard sous 48 heures, le salarié fournira un justificatif de son absence. En cas de maladie ou d'accident, cette justification se fera par l'envoi d'un certificat médical indiquant la durée de l'arrêt. En cas de prolongation, le salarié préviendra sa hiérarchie, au plus tôt si possible la veille prévue pour la reprise, au plus tard le jour même. La justification de la prolongation doit par ailleurs être fournie par renvoi d'un certificat médical.

A défaut, at après mise en demeure, l'absence injustifiée pourra faire l'objet d'une sanction disciplinaire ».

Un tel comportement est inacceptable, et entraîne nécessairement des perturbations dans le fonctionnement de l'Agence, ainsi qu'une charge de travail supplémentaire pour vos collègues contraints de faire vos tâches à votre place.

Lors de l'entretien du 29 avril 2019, vous avez reconnu avoir été absent à plusieurs reprises sans donner d'autres explications.

Mauvaise manipulation de la grue entraînant la casse de la marchandise

Le jeudi 14 mars 2019, alors que vous étiez en train d'effectuer un déchargement lors d'une livraison sur un chantier à [Localité 5] (BL : Y936689), vous avez renversé une palette de blocs à bancher occasionnant la casse de 30 blocs.

Lors de l'entretien du 29 avril 2019, vous avez expliqué avoir appuyé sur un bouton involontairement en tombant du camion.

Votre fonction de Chauffeur implique de votre part une vigilance lors des livraisons de commande, et plus particulièrement lors des déchargements. En effet, il en va de votre sécurité, et de celles des personnes présentes lors des déchargements et du maniement de la grue. D'autant plus que ce manque de vigilance entraîne inévitablement des coûts supplémentaires pour l'agence.

Détériorations des véhicules mis à votre disposition pour l'accomplissement de vos missions.

Le 10 avril 2019, alors que vous veniez de rentrer de vos livraisons, Monsieur [I], Chef de cour a constaté que vous aviez endommagé votre camion au niveau du phare, ainsi que sur le c6té au niveau du coffre.

Le 30 avril 2019 vers 11h39, alors que vous circuliez sur la N41 à hauteur de [Localité 11] avec votre camion (immatriculé [Immatriculation 6]) pour livrer un client (BL. EC 74798), vous avez frappé le terre-plein en béton séparant les deux chaussées. Suite au choc, le lève palette s'est retrouvé sur l'autre chaussée ainsi qu'une partie du bloc béton du terre-plein central. Vous avez expliqué vous être endormi au volant.

Le 13 mai 2019, en fin de matinée, vous aviez une livraison d'ossature en bois de prévue pour un client à [Localité 7] (BL: ED38674). Lors de votre déplacement, vous avez percuté avec votre camion, l'arrière de la voiture qui se trouvait devant vous, au niveau d'un feu tricolore situé à [Localité 8].

Ces faits ne sont pas isolés puisqu'en effet, par un avertissement du 1er février 2019, vous aviez déjà été sanctionné pour la détérioration de votre camion.

Nous tenons à vous rappeler qu'en qualité de Chauffeur, nous attendons de vous, une conduite exemplaire dans le respect le plus strict du code de la route ainsi que de l'ensemble des règles de sécurité.

D'une part, ces incidents ont des répercussions financières sur l'agence. D'autre part, l'accident du 30 avril2019 aurait pu avoir pour vous des conséquences bien plus graves. Il en va de votre sécurité mais également de celles des autres usagers de la route.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise s'avère impossible. Votre licenciement prend donc effet dès notification de courrier, sans indemnité de préavis ni de licenciement. »

Par requête reçue le 27 septembre 2019, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Roubaix afin d'obtenir l'annulation de l'avertissement, de faire constater l'illégitimité de son licenciement et d'obtenir le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

 

Par jugement en date du 20 mai 2021, le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de sa demande, l'a condamné à verser à la société 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais a laissé les dépens à la charge de chaque partie.

Le 28 juin 2021 [X] [Y] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 08 mars 2023 la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 29 mars 2023.

 

Selon ses conclusions récapitulatives et en réplique reçues au greffe de la cour le 24 septembre 2021 [X] [Y] appelant, sollicite de la cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société à lui verser,

- à titre principal, de 22 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- à titre subsidiaire, 14 496,24 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- à titre infiniment subsidiaire, la constatation que le licenciement de Monsieur [X] [Y] repose sur une cause réelle et sérieuse et non une faute grave,

en tout état de cause, l'annulation de l'avertissement, la condamnation de la société à lui verser :

- 3923,05 nets euros à titre d'indemnité légale de licenciement

- 3624,06 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 362,41 euros bruts à titre de congés payés afférents

- 5000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour sanction abusive,

- 2000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ainsi que la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes à la décision rendue sous astreinte de 15 euros par jour et par document, le report du point de départ des intérêts à la date de la saisine de la juridiction, la capitalisation judiciaire des intérêts et le remboursement par la société des indemnités chômage au Pôle emploi, dans la limite de six mois.

L'appelant expose qu'alors qu'il donnait entière satisfaction à son employeur depuis plus de huit ans, ce dernier n'a pas hésité à le sanctionner en l'absence de toute faute de sa part, que la lettre de recadrage du 4 octobre 2018 ne constitue pas une sanction disciplinaire, qu'il ne présentait donc aucun antécédent disciplinaire, que le fait de dégrader, de manière vraisemblablement involontaire, un véhicule mis à sa disposition dans le cadre de ses fonctions ne saurait constituer une faute, qu'il conteste la validité de son licenciement pour faute grave, que les griefs formulés constituent un prétexte pour se séparer de lui, sur le grief de 1h30 de retard le 28 février 2019, que celui-ci n'a eu aucun impact sur l'organisation de l'entreprise, qu'il était exceptionnel et lié à une difficulté rencontrée avec son véhicule, l'ayant obligé à se rendre sur son lieu de travail en transports en commun, sur le retard de 1h20 le 5 mars 2019, qu'il le conteste, qu'il s'est bien présenté à son poste de travail à 7 heures, que cette heure de prise de poste figure sur la fiche de pointage qui a été ultérieurement corrigée par la société, sur le retard d'une heure le 18 mars 2019, qu'il le conteste également, qu'une modification de la fiche de pointage produite a été effectuée par l'entreprise pour les besoins de la cause et concerne le 19 et non le 18 mars 2019, que suite à ce retard, la relation de travail s'est poursuivie néanmoins normalement pendant près de deux mois, sur les absences injustifiées, que la société ne démontre ni l'avoir informé de la date et du lieu de la formation recyclage pour le CACES organisée par l'[4] à [Localité 10] le 21 mars 2019, ni que l'organisme de formation ait attendu vainement qu'il s'y présente, que son employeur ne lui a jamais demandé de lui fournir un justificatif de l'absence du 11 avril 2019, sur une mauvaise manipulation de la grue entraînant la casse de la marchandise, qu'il reconnaît avoir, le 14 mars 2019, malencontreusement renversé une palette de blocs à bancher alors qu'il effectuait un déchargement lors d'une livraison, que toutefois, la sécurité de tiers n'a pas été menacée, que la casse de trente blocs à bancher n'est pas de nature à causer un préjudice important à l'entreprise, sur les détériorations des véhicules mis à sa disposition pour l'accomplissement de ses missions, qu'il conteste fermement la matérialité et l'imputabilité des faits survenus le 10 avril 2019, qu'en revanche il reconnaît la réalité de l'accident qu'il a occasionné le 30 avril 2019, sans pour autant être en mesure d'expliquer la raison pour laquelle il a perdu le contrôle du véhicule, qu'il reconnaît aussi la réalité de l'accident survenu le 13 mai 2019, sans être non plus en mesure d'expliquer la raison pour laquelle il n'est pas parvenu à freiner suffisamment tôt pour l'éviter, qu'en revanche il conteste fermement l'affirmation de la société selon laquelle il ne lui aurait jamais remis le constat amiable réalisé, qu'en outre elle ne lui a jamais demandé officiellement de lui remettre ce constat, que de l'ensemble des griefs formulés dans le courrier de licenciement, seuls subsistent une mauvaise manipulation de la grue le 14 mars 2019 ayant entraîné de la casse de marchandise pour un coût faible pour l'entreprise et deux accidents de la circulation, les 30 avril et 13 mai 2019, que face à cette situation son employeur aurait dû solliciter une visite supplémentaire ou en urgence auprès de la médecine du travail d'autant qu'il faisait partie des salariés bénéficiant d'un suivi individuel renforcé, qu'il est bien fondé à solliciter la condamnation de la société au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, de congés payés, d'une indemnité légale de licenciement calculée sur la base d'une ancienneté de 8 ans et 8 mois à la date à laquelle son préavis aurait dû se terminer, que le barème prévu par l'article L1235-3 du code du travail devait être écarté car il ne conduit pas à appliquer une indemnité proportionnée, concrètement au préjudice subi, le plafonnement violant en outre les dispositions de l'article 24 de la

Charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l'Organisation internationale du travail et le droit au procès équitable, que célibataire et sans enfants, il assume seul ses charges, qu'il ne touche qu'une faible indemnité chômage, équivalant à seulement la moitié de son ancien salaire.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 20 décembre 2021, la société BOIS & MATÉRIAUX sollicite de la cour, à titre principal, la confirmation du jugement entrepris, à titre subsidiaire, la fixation à une plus juste valeur de la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en tout état de cause, la condamnation de l'appelant à lui verser 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée soutient que, par courrier du 4 octobre 2018, l'appelant a fait l'objet d'un recadrage, qu'il lui était reproché un défaut d'entretien du camion mis à disposition pour l'exercice de ses fonctions, que le règlement intérieur a bien été soumis à l'avis des représentants du personnel, plus particulièrement au comité d'entreprise et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qu'il a été déposé auprès du secrétariat greffe du conseil des prud'hommes et communiqué à l'inspection du travail, qu'il a été porté à la connaissance du personnel par voie d'affichage, que l'appelant l'avait bien reçu et en avait personnellement connaissance comme en témoigne l'attestation signée à son embauche, que les stipulations de son contrat de travail le mentionnaient également, que l'avertissement du 1er février 2019 est consécutif à la détérioration du camion mis à sa disposition pour l'accomplissement de ses missions, à la suite d'un accident survenu le 22 janvier 2019 dont les circonstances mettent en cause son comportement, que les photographies versées aux débats démontrent les dommages occasionnés au véhicule, notamment au niveau de l'enjoliveur droit, que le montant du préjudice pour la société s'est élevé à 3044,28 euros T.T.C, que la facture du garage Renault fait également apparaître les dommages au niveau du marchepied du côté droit du véhicule, que le camion endommagé est resté en réparation et immobilisé pendant trois semaines, qu'en application des articles 5.2 et 15 du règlement intérieur, la société n'a fait qu'utiliser son pouvoir disciplinaire afin de sanctionner un agissement fautif par un avertissement d'autant que l'appelant avait fait l'objet précédemment d'une lettre de recadrage, qu'il lui est reproché, dans la lettre de licenciement, des retards répétés et injustifiés les 28 février, 5 et 18 mars 2017, que ce dernier retard a eu lieu en réalité le 19 mars 2019, qu'il ne s'agit que d'une simple erreur matérielle, que la société communique les feuilles de pointage signées par l'appelant, qu'ils ont désorganisé le fonctionnement de l'agence, qu'ils sont l'expression d'un manque de respect manifeste vis-à-vis de la hiérarchie et de ses collègues, que le 21 mars 2019, l'appelant ne s'est pas présenté à sa formation recyclage, que s'il n'avait pas été informé de la date et du lieu de la formation, il aurait dû être à son poste de travail ce qui n'a pas été le cas, que le 11 avril 2019, il ne s'est pas présenté à son poste de travail et n'a prévenu sa hiérarchie qu'à partir de 14 heures, qu'un tel comportement entrainait nécessairement des perturbations dans le fonctionnement de l'agence, que le 14 mars 2019, il a renversé une palette de blocs à bancher occasionnant la casse de trente blocs, que sa fonction de chauffeur impliquait de sa part une vigilance lors des livraisons de commande, et plus particulièrement lors des déchargements, que le 10 avril 2019, alors qu'il venait de rentrer de ses livraisons, le chef de cour a constaté qu'il avait endommagé son camion au niveau du phare ainsi que sur le côté au niveau du coffre, que la société communique deux photographies attestant de la gravité de l'incident, que le 30 avril 2019, au volant du même camion, il a heurté un terre-plein en béton séparant les deux chaussées, qu'à la suite du choc, le lève-palette s'est retrouvé sur l'autre chaussée ainsi qu'une partie du bloc béton du terre-plein central, que l'appelant a prétendu s'être endormi, que le montant total des dégradations s'élevait à 22469,72 euros, que le 13 mai 2019, lors d'une livraison d'une ossature en bois, il a percuté avec son camion l'arrière de la voiture qui le précédait, que la société communique une attestation de suivi individuel de l'état de santé de l'appelant datée du 19 mars 2019, que celle-ci n'était accompagnée d'aucune proposition de mesures individuelles par le médecin du travail, que la prochaine visite n'était prévue qu'au plus tard le 31 mars 2022, que l'imputabilité et la matérialité des faits dont il est fait mention au sein de la lettre de licenciement sont caractérisées, à titre subsidiaire, que le licenciement reposant sur une faute grave, aucune indemnité compensatrice de préavis et de licenciement n'est due, que l'appelant n'apporte aucune preuve de ses recherches actives d'emploi, de réponses négatives qu'il aurait pu recevoir et de sa situation financière actuelle, que le quantum des dommages et intérêts sollicités présente un caractère parfaitement arbitraire.

 

MOTIFS DE L'ARRÊT

 

Attendu en application de l'article L1333-2 du code du travail que l'avertissement en date du 1er février 2019 est motivé par la détérioration du marchepied et de l'enjoliveur du camion conduit par l'appelant le 22 janvier 2019, l'absence de constat amiable dressé à la suite de ce dommage et de communication de tout élément d'identification du véhicule qui, selon la version de l'appelant relatée dans l'avertissement, après la man'uvre de dépassement, se serait rabattu précipitamment, l'obligeant à se déporter sur la droite et à accrocher la rambarde de sécurité ; que la société produit la facture de réparation du véhicule du 28 février 2019 d'un montant de 3044,28 euros, qu'elle a dû prendre en charge en totalité du fait de l'absence de constat ; qu'elle communique également les photographies des dégâts occasionnés au camion qui correspondent au réparations ayant dû être effectuées, selon la facture précitée ; que lors de la notification de l'avertissement par sa remise en main propre, l'appelant n'a jamais contesté avoir conduit le véhicule le 22 janvier 2019 ni avoir tenu les propos qui lui étaient attribués sur l'origine des dommages ; que cette sanction, au demeurant peu sévère compte tenu du préjudice subi par la société et de la lettre de recadrage, remise en main propre le 16 octobre 2018 à la suite de la constatation le 7 août 2018 d'un défaut d'entretien du camion de location mis à sa disposition pour effectuer des livraison, n'est nullement injustifiée ni disproportionnée par rapport à la faute commise ;

Attendu en application de l'article L1234-1 du code du travail, qu'il résulte de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que les motifs y énoncés sont des retards répétés et injustifiés lors de prises de poste, des absences sans motif légitime, une mauvaise manipulation de la grue entraînant la casse de la marchandise et des détériorations des véhicules mis à la disposition du salarié pour l'accomplissement de ses missions ;

Attendu sur la mauvaise manipulation de la grue, qu'il résulte de l'attestation de [J] [V] que l'appelant l'a averti qu'il avait renversé une palette lors d'un déchargement le 14 mars 2019 sur le chantier de [Localité 5] ; que cette mauvaise man'uvre a endommagé trente blocs de coffrage, dénommés blocs à bancher ; que de nouveaux blocs ont dû être livrés le lendemain ; que l'appelant reconnaît une maladresse de sa part à l'origine de ces dégradations, tout en la minimisant, compte tenu de la modicité de la valeur du matériel endommagé et de l'absence de risque encouru par le personnel présent sur le lieux ; que toutefois l'absence d'accident du travail n'est due qu'au hasard ; qu'elle ne saurait relativiser la gravité de la maladresse commise par l'appelant et qui ne peut être imputée à son inexpérience ;

Attendu sur la détérioration de véhicules, qu'il résulte de l'attestation de [G] [I], chef de cour, qu'il a constaté le 10 avril 2019, au retour d'une livraison effectuée par l'appelant, que le camion que celui-ci avait piloté présentait des dommages au niveau du phare arrière et du coffre ; que selon le témoin, ces derniers avaient été occasionnés par les fourches du chariot élévateur ; que l'appelant se borne à nier la matérialité de ces faits alors que ceux-ci sont établis par la description précise par [G] [I] des dommages et de leur cause, et les photographies produites, le salarié ne niant pas par ailleurs que le jour de leur commission il se trouvait au volant du camion ; que celui-ci ne conteste pas que le 30 avril 2019, alors qu'il circulait avec le même camion sur la route nationale dans la commune de [Localité 11] en vue d'une livraison, il a heurté le terre-plein en béton séparant les deux chaussées ; que le choc a été si violent qu'une partie du bloc béton du terre-plein central a été projeté sur la chaussée ; que les photographies produites font apparaître que le train avant du camion a été partiellement désarticulé ; que selon le courrier de la compagnie d'assurance IARD auto, le coût total des réparations s'est élevé à la somme de 22449,72 euros, la responsabilité du conducteur étant jugée entière ; que tout en reconnaissant les faits, l'appelant ajoute qu'il ne s'expliquait pas la raison pour laquelle il avait perdu le contrôle du véhicule ; qu'il résulte de l'attestation de [J] [V] et du constat amiable dressé que, le 13 mai 2019, lors de la livraison d'une ossature en bois à [Localité 7], l'appelant, au volant d'un camion de l'entreprise, a percuté une voiture à l'arrêt à un feu de signalisation rouge ; que cet accident a occasionné des dommages aux deux véhicules ; que l'appelant reconnaît également la réalité de l'accident et par conséquent sa responsabilité exclusive, ajoutant là aussi qu'il n'était pas en mesure d'expliquer la raison pour laquelle il n'était pas parvenu à freiner suffisamment tôt pour éviter la collision ; que par ailleurs, il résulte de ses écritures que l'appelant reproche à son employeur un manque de vigilance sur sa santé, qui aurait dû être éveillée par la multiplication de ces accidents ; que toutefois la société produit une attestation de suivi individuel de l'état de santé du salarié délivrée le 19 mars 2019 s'inscrivant dans le cadre de visites périodiques ; que le médecin du travail n'émet aucune recommandation particulière et ne prévoit une nouvelle visite que le 31 mars 2022 ; que l'appelant ne démontre nullement qu'il occupait un poste entrant dans la catégorie de ceux définis à l'article R4624-23 du code du travail lui permettant de bénéficier d'un suivi individuel renforcé de son état de santé ; que, sans qu'il soit nécessaire d'analyser les autres griefs reprochés, il résulte de l'ensemble de ces éléments, que la multiplicité des dégradations dont s'est rendu responsable l'appelant en l'espace de deux mois seulement et après un précédent avertissement infligé peu de temps auparavant pour des faits similaires, caractérise des négligences fautives graves compte tenu en outre de leurs répercussions financières et de la gêne qu'elles ont occasionné à la société ; qu'elles rendaient bien impossible le maintien de l'appelant dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ;

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de la société les frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer une somme complémentaire de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré à l'exception des dépens,

 

ET Y AJOUTANT,

CONDAMNE [X] [Y] à verser à la société BOIS & MATÉRIAUX 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

LE CONDAMNE aux entiers dépens.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRÉSIDENT

Philippe LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/01118
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;21.01118 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award