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14/04/2023 | FRANCE | N°21/01058

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 14 avril 2023, 21/01058


ARRÊT DU

14 Avril 2023







N° 380/23



N° RG 21/01058 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TVWV



PL/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

27 Mai 2021

(RG F 20/00333 -section 2)











































GROSSE :



aux avocats



le 14 Avril 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-



APPELANT :



M. [T] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Benjamin MILLOT, avocat au barreau de LILLE



INTIMÉS :



Me [M] [Y] Es qualité de « Mandataire liquidateur» de la « ...

ARRÊT DU

14 Avril 2023

N° 380/23

N° RG 21/01058 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TVWV

PL/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

27 Mai 2021

(RG F 20/00333 -section 2)

GROSSE :

aux avocats

le 14 Avril 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [T] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Benjamin MILLOT, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Me [M] [Y] Es qualité de « Mandataire liquidateur» de la « SASU APREVIA ASSURANCES »

[Adresse 2]

[Adresse 2]

n'ayant pas constitué avocat - assigné le 19 août 2021 à personne habilitée

UNEDIC DÉLÉGATION AGS, CGEA DE [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substituée par Me Cécile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS : à l'audience publique du 01 Mars 2023

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge LAWECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Réputée contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 08 Février 2023

EXPOSE DES FAITS

 

[T] [L] a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée par la société par action simplifiée APREVIA ASSURANCES à compter du 12 septembre 2018 en qualité de technico-commercial itinérant. Il était assujetti à la collective des entreprises de courtage d'assurances et de réassurances

La relation de travail a pris fin le 20 mai 2019 à la suite de la conclusion d'une rupture conventionnelle homologuée. Par courrier recommandé du 19 juin 2019, le salarié a dénoncé le reçu pour solde de tout compte.

La société APREVIA ASSURANCES a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire simplifiée prononcé le 17 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Douai qui a désigné également un mandataire liquidateur.

Par requête reçue le 5 mai 2020, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Lille afin d'obtenir des rappels de commissions, de frais professionnels, de tickets restaurant et de salaire et le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

 

Par jugement en date du 27 mai 2021, le conseil de prud'hommes l'a débouté de sa demande mais laissé les dépens à la charge de chaque partie.

Le 18 juin 2021, [T] [L] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 8 février 2023, la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 1er mars 2023

 

Selon ses conclusions récapitulatives et en réplique reçues au greffe de la cour le 17 août 2021, [T] [L] appelant, sollicite de la cour l'infirmation du jugement entrepris, l'inscription de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société APREVIA à la somme de :

- 4101,85 euros à titre de rappel de salaire du mois de mai 2019

- 1578,30 euros à titre de rappel de prime d'activité sur commissionnement

- 8426,47 euros à titre de rappel de frais kilométriques

- 293,42 euros à titre de rappel de frais professionnels

- 256,34 euros à titre d'indemnité de rupture conventionnelle

- 5000 euros à titre de dommages et intérêts s'agissant de la carence Pôle Emploi subie

et la condamnation du liquidateur judiciaire et du CGEA à lui verser 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelant expose qu'il n'a pas été réglé de son salaire du mois de mai, que le reliquat dû s'élève à la somme de 4101,85 euros bruts, déduction faite de la prime sur activité de 891,50 euros conformément au solde de tout compte, que ni le liquidateur judiciaire ni le CGEA ne démontrent qu'il a bien été réglé de ce solde, que depuis son entrée au sein des effectifs jusqu'à son départ, il a généré une activité correspondant à 15783 euros de produits d'assurance conduisant à un commissionnement à hauteur de 10 %, soit 1578,30 euros, que la société s'était engagée, pour le commissionnement, « à ne mettre en place aucun palier », qu'il n'a jamais été indemnisé de ses déplacements correspondant à 19860 kilomètres, qu'il lui est dû de ce fait la somme de 8053 euros calculée sur la base du barème appliqué par les services fiscaux, à laquelle doivent s'ajouter les cotisations d'assurances pour les mois de janvier à mai 2019 que la société n'a pas réglées et d'un montant total de 373,47 euros, qu'il justifie de frais s'élevant à 293,42 euros, liés directement à l'exercice de son activité et dont il n'a jamais été remboursé malgré les engagements de la société, que celle-ci lui est encore redevable d'un reliquat d'indemnité de rupture conventionnelle de 256,34 euros, que la société ayant prétendu de façon mensongère auprès du Pôle Emploi qu'elle lui avait versé la somme de 6632,46 euros, il lui a été appliqué une carence maximale entre la date de rupture de son contrat de travail et le 11 octobre suivant, qu'étant père de cinq enfants, il a été privé de toute ressource et obligé de contracter des emprunts auprès de proches pour subvenir aux besoins les plus élémentaires de sa famille, qu'une telle situation lui a occasionné un préjudice considérable évident.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 01 février 2023, l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 4] intimée sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris, et en toutes hypothèses qu'elle dise que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D3253-5 du code du travail, et ce toutes créances du salarié confondues, que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du code du travail.

L'intimée soutient que l'appelant ne démontrait pas ne pas avoir perçu son salaire du mois de mai 2019, qu'il n'a produit ses relevés de banque que pour la période postérieure au mois de juin 2019, qu'ayant commencé à travailler pour l'entreprise le 12 septembre 2018, il devait justifier d'un chiffre d'affaires de 40000 euros pour pouvoir prétendre au versement de commissions, qu'il n'a pas atteint ce chiffre puisqu'il indique avoir généré une activité de 15783 euros se décomposant en différents produits d'assurance, que l'annexe au contrat de travail prévoyait un mode de commissionnement calculé sur la base d'un chiffre d'affaires minimum, que l'appelant ne justifie pas avoir parcouru 19860 kilomètres, qu'il ne se prévaut que d'un tableau réalisé par ses propres soins, qui n'est accompagné d'aucune pièce justificative, que les documents qu'il produit ne permettent pas d'établir un rapport entre les frais allégués et son activité professionnelle, qu'il ne justifie pas du non-versement de l'indemnité de rupture conventionnelle, qu'il ne justifie pas non plus ne pas avoir été réglé des sommes qui lui étaient dues au titre du solde de tout compte et ne démontre pas le préjudice qu'il prétend avoir subi, que l'AGS dispose d'un droit propre pour contester les modalités de mise en 'uvre de sa garantie, que l'arrêt à intervenir ne pourra lui être opposable que dans la limite de ses garanties légales.

Le mandataire liquidateur de la société APREVIA ASSURANCES à la personne duquel ont été notifiées la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant et du CGEA, respectivement les 19 août et 18 novembre 2021, n'a ni constitué avocat ni conclu.

 

MOTIFS DE L'ARRÊT

 

Attendu que par courrier recommandé du 19 juin 2019 dénonçant le solde de tout compte, l'appelant a contesté le paiement de son salaire du mois de mai 2019, les congés payés, le montant de sa prime exceptionnelle, de ses primes sur activité, de son indemnité de licenciement, de ses tickets repas pour les mois de février, mars et mai 2019 et de ses frais kilométriques ;

Attendu, sur le rappel de salaire, que le reçu pour solde de tout compte fait apparaître que l'appelant aurait dû percevoir, au titre du salaire de base, la somme de 1943,98 euros conformément au bulletin de paye établi pour la période du 1er au 25 mai 2019 ; qu'il n'est pas démontré que cette somme ait réellement été versée à l'appelant ; qu'en outre celui-ci produit un courriel de [H] [B], dirigeant de la société, en date du 28 juin 2019, dans lequel ce dernier l'informe que les sommes correspondant au reçu pour solde de tout compte seraient versées en dix tranches en raison des défaillances de la trésorerie de l'entreprise ; que les relevés de compte versés aux débats ne font apparaître aucun versement entre le 5 juin et le 4 octobre 2019, date postérieure au jugement de liquidation judiciaire ; que par ailleurs, il résulte du contrat de travail que la rémunération de base nette de l'appelant était fixée à 1700 euros ; que celui-ci n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle devait s'élever en réalité pour le mois de mai à la somme revendiquée de 4101,85 euros ; que la société reste donc redevable de la somme de 1943,98 euros ;

Attendu, sur le rappel de commissions, qu'il résulte de l'article 4 du contrat de travail que pour pouvoir prétendre à une commission brute, l'appelant devait réaliser un chiffre d'affaires minimum évalué pour l'année 2018 à 40000 euros et, pour les années successives, à 120000 euros ; que par ailleurs, selon le mode de commissionnement sur la production trimestrielle arrêté par la société et versé aux débats, celle-ci s'engageait à ne fixer aucun palier et à ne pas diminuer la grille de rémunération ; que ce dernier engagement était sans effet sur le chiffre d'affaires minimum à réaliser puisque selon le même document, le montant de la commission généré par les primes d'assurances n'était calculé qu'à partir d'un chiffre d'affaires de 120000 euros au moins ; que l'appelant ne démontrant pas avoir réalisé au moins la somme prévue au contrat de travail, aucun rappel de commission ne lui est dû ;

Attendu, sur le rappel d'indemnités kilométriques, qu'il résulte du courriel du 25 mars 2019 de l'appelant qui, selon le contrat de travail, aurait dû disposer d'un véhicule de fonction, qu'il devait utiliser son véhicule personnel pour se livrer à ses activités de prospection ; que le 8 juin 2019, à la demande de [H] [B], il a communiqué le nombre de kilomètres parcourus au moyen de son véhicule, évalué à 19860 kilomètres ; que ce chiffre est corroboré par les tableaux versés aux débats ; qu'il résulte des bulletins de paye produits que, durant la relation de travail, il n'a perçu aucune indemnité kilométrique ; que la somme de 2660,27 euros figurant sur le reçu pour solde de tout compte au titre des indemnités kilométriques, dont il n'est pas démontré qu'elle a été versée, ne correspond pas à celle à laquelle il aurait pu prétendre compte tenu du nombre de kilomètres parcourus et du barème appliqué par les services fiscaux pour le type de véhicule utilisé par l'appelant, d'une cylindrée de 7 chevaux ; que la société est donc bien redevable de la somme de 8053 euros ;

Attendu, sur le rappel de frais professionnels, qu'il résulte du courriel du 25 mars 2019 de [H] [B] que la carte essence attribuée à l'appelant ayant été plafonnée, ce dernier avait dû prendre en charge des frais d'essence qui devaient être remboursés par la société ; que la copie du ticket de caisse de 33,58 euros a été adressée par l'appelant à son employeur le 27 mars 2019 et n'a pas fait l'objet d'un remboursement ; que de même, il se déduit du courriel du 27 mars 2019 adressé à [H] [B] que la franchise de 100 euros imputée sur la facture établie à la suite d'un bris de glace du véhicule de l'appelant devait être prise en charge par la société ; qu'en revanche aucune pièce versée aux débats n'est de nature à démontrer que cette dernière serait redevable de la somme de 140,95 euros due à la suite d'un rejet d'une mutuelle ; qu'en conséquence, le montant des frais professionnels dus s'élève à la somme de 133,58 euros ;

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que le montant de l'indemnité de rupture conventionnelle à hauteur de 256,34 euros n'a pas été versé à l'appelant ;

Attendu qu'il résulte du courrier de notification de la reprise de droit à l'allocation de retour à l'emploi, adressé le 27 juin 2019 par les services de Pôle emploi à l'appelant, que les vingt huit jours de différé affectant le versement de ladite allocation ont été calculés sur la base de l'indemnité compensatrice de congés payés et de l'indemnités de rupture, figurant sur le reçu pour solde de tout compte et censées avoir été versées au salarié ; que le défaut de paiement de ces sommes a bien occasionné un préjudice à l'appelant qui a dû subir l'imputation d'un délai injuste de paiement de l'allocation chômage du fait de son employeur et a été privé de toute ressource durant près d'un mois ; qu'il convient d'évaluer le préjudice ainsi subi à la somme de 1100 euros ;

Attendu qu'il convient de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS dans les limites de sa garantie;

 

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'appelant les frais qu'il a dû exposer tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de condamner le liquidateur à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

INFIRME le jugement déféré

 

ET STATUANT A NOUVEAU,

FIXE la créance de [T] [L] au passif de la liquidation judiciaire de la société par action simplifiée APREVIA ASSURANCES à la somme de :

- 1943,98 euros à titre de rappel de salaire du mois de mai 2019

- 8053 euros à titre de rappel d'indemnités kilométriques

- 133,58 euros à titre de rappel de frais professionnels,

- 256,34 euros au titre de l'indemnité de rupture conventionnelle

- 1100 euros en réparation du préjudice consécutif au défaut de paiement du solde de tout compte,

DÉCLARE l'arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 4],

 

DIT qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-8 et suivants du code du travail que dans les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 à L3253-17, L3253-19 à L3253-21 et D3253-2 dudit code,

DÉBOUTE l'AGS CGEA de sa demande tendant à subordonner ses avances à la justification par le mandataire de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder au paiement des sommes garanties mais rappelle que l'obligation au paiement de l'AGS-CGEA ne pourra s'effectuer que sur présentation par le mandataire d'un relevé de créance,

DÉBOUTE [T] [L] du surplus de sa demande,

CONDAMNE le mandataire liquidateur de la société APREVIA ASSURANCES à verser à [T] [L] 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

 

MET les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la société APREVIA ASSURANCES.

LE GREFFIER

S. LAWECKI

LE PRÉSIDENT

P. LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/01058
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;21.01058 ?
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