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31/03/2023 | FRANCE | N°22/00694

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 31 mars 2023, 22/00694


ARRÊT DU

31 Mars 2023







N° 461/23



N° RG 22/00694 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIMB



GG/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Octobre 2020

(RG 19/00155 -section )







































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GROSSE :



aux avocats



le 31 Mars 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [U] [D]

[Adresse 3]

représenté par Me Natacha MAREELS-SIMONET, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉES :



Association L'UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA D'AMIENS

[Adress...

ARRÊT DU

31 Mars 2023

N° 461/23

N° RG 22/00694 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIMB

GG/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Octobre 2020

(RG 19/00155 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 31 Mars 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [U] [D]

[Adresse 3]

représenté par Me Natacha MAREELS-SIMONET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉES :

Association L'UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA D'AMIENS

[Adresse 1]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

S.C.P. ANGEL-HAZANE

[Adresse 2]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS : à l'audience publique du 04 Janvier 2023

Tenue par Gilles GUTIERREZ

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Angelique AZZOLINI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 17 février 2023 au 31 mars 2023 pour plus ample délibéré.

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 14 décembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

La SARL TEAM ETANCH' a engagé par contrat à durée déterminée et à temps partiel de 24 heures du 08/06/2015 M. [U] [D], né en 1988, en qualité d'ouvrier niveau 1, coefficient 1. Un second contrat a été établi aux mêmes conditions le 14/07/2015 avec un terme fixé au 24/07/2015.

Les parties ont ensuite régularisé un contrat à durée indéterminée, M. [D] étant engagé à compter du 07/09/2015 en qualité d'étancheur/bardeur à temps complet.

Les parties ont convenu d'une modification du temps de travail par avenant du 29/04/2016, à hauteur de 20 heures par semaine, le temps de travail étant à nouveau porté à temps complet selon avenant du 30/09/2016

Le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL TEAM ETANCH' par jugement du 04/01/2017 et désigné en qualité de liquidateur la SCP [K] HAZANE.

Par lettre du 18/01/2017 Me [J] [K] a procédé au licenciement du salarié pour cause économique. Puis par lettre du 04/02/2017, le liquidateur a informé M. [D] que sa qualité de salarié était contesté, la SARL TEAM ETANCH' étant soupçonnée de fraude et de transfert d'activité.

Suivant requête reçue le 24/04/2018, M. [U] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Lannoy pour faire reconnaître sa qualité de salarié, et obtenir la fixation au passif de diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 13/10/2020 le conseil de prud'hommes a :

-constaté que la SARL TEAM ETANCH' a été mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de COMPIEGNE en date du 04 janvier 2017 et que la SCP [K]-HAZANE, représentée par Me [J] [K], a été désignée liquidateur judiciaire,

-dit et jugé que M. [U] [D] n'avait pas la qualité de salarié de la SARL TEAM ETANCH',

En conséquence déclaré son action irrecevable, ou, en tout état de cause, mal fondée,

-débouté M. [U] [D] de l'ensemble de ses demandes,

-débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples ou contraires au présent dispositif,

-condamné M. [U] [D] aux entiers dépens de la présente instance.

Suivant déclaration reçue le 15/11/2020, M. [D] a régulièrement interjeté appel de la décision précitée.

Selon ses conclusions n° 3 reçues le 29/07/2021, M. [U] [D] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de lui reconnaître la qualité de salarié au sein de la société TEAM ETANCH' et de :

-fixer au passif de la société TEAM ETANCH' les sommes suivantes :

-905,33 € à titre d'indemnité de licenciement,

-2.716 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

-2.716 € au titre des congés payés y afférent,

-10.440 € au titre du rappel de salaire pour la période de juillet 2016 à décembre 2016,

-1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner le CGEA à lui payer les sommes précitées, fixées au passif de la société TEAM ETANCH', à titre de garantie de la créance salariale.

Selon ses conclusions n° 2 reçues le 05/08/2021, la SCP [K] HAZANE représentée par Me [J] [K], ès qualités de liquidateur de la SARL TEAM ETANCH' demande à la cour de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions, de débouter M. [U] [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et en toute hypothèse, de le condamner au paiement de la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et statuer ce que de droit quant aux dépens.

Selon ses conclusions reçues le 05/08/2021 l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'Amiens demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et en toute hypothèse de :

-dire que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D.3253-5 du code du travail, et ce toutes créances du salarié confondues,

-dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du code du travail,

-statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par ordonnance du 02/03/2022 le conseiller de la mise en état a joint la procédure inscrite sous le numéro N° RG 20/02246 avec celle inscrite sous le numéro 20/02245, l'instance étant en définitive disjointe par ordonnance du 11/05/2022.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 14/12/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère, en vertu de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la preuve du contrat de travail

L'appelant indique avoir travaillé dans un premier temps pour la SARL TEAM ETANCH' qui l'a recruté à nouveau après une période d'intérim, les salaires étant irrégulièrement payés, précise verser contrats de travail, bulletins de paie et relevés de compte, indique être victime des agissements de la société, dont les carences ne peuvent lui être imputables, qu'il a bien travaillé sur plusieurs chantiers, qu'il a perçu des sommes de la part de la société intérimaire qui l'embauchait jusqu'en septembre 2015, puis a reçu un complément de pôle emploi à la suite de ses déclarations de revenus auprès de cet organisme, qu'il a pu tenir financièrement grâce à l'indemnité de 10.399,74 € perçue en septembre 2016.

Le liquidateur fait valoir que les éléments versés par l'appelant sont insuffisants à prouver une relation de travail subordonnée, que le premier contrat de travail à durée déterminée comporte de nombreuses contradictions, tout comme le second, que le contrat de travail à durée indéterminée du 07/09/2015 et les fiches de paie comportent des informations différentes, ce qui laisse penser qu'ils sont fictifs et ont été établis pour les besoins de la cause, que les attestations versées sont insuffisantes à établir la réalité d'un travail, que toutes les fiches de paie sont arrondies à l'euro près et ne comprennent jamais de décimales, que les relevés bancaires sont incomplets.

Le CGEA s'associe à cette argumentation.

Sur ce, il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En présence d'un contrat de travail écrit ou apparent, il appartient à celui qui entend en contester l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif. En l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Outre le contrat de travail à durée indéterminée à temps complet du 04/09/2015, à effet au 07/09/2015, M. [U] [D] verse les avenants emportant modification du temps de travail du 29/04/2016 et du 30/09/2016. Il verse également les bulletins de paie de septembre 2015 à décembre 2016. Ces éléments permettent de présumer l'existence d'un contrat de travail. L'appelant verse également deux contrats à durée déterminée à temps partiel du 08/06/20156 et du 14/07/2015, la cour n'étant pas saisie de prétentions relativement à l'exécution de ces deux contrats.

Il est exact que les bulletins de paie font état d'un contrat de travail pour accroissement d'activité, alors que l'appelant invoque un contrat à durée indéterminée. Toutefois, M. [D] ne peut être tenu responsable des incohérences affectant les bulletins de paie qui sont établis par l'employeur, en particulier du fait que les salaires nets sont dépourvus de décimales.

L'appelant verse plusieurs pages internet avec des photographies du chantier de la piscine Guynemer à [Localité 4] avec des annotations (ex : «travail sur l'étanchéité» en octobre 2016), ainsi que la déclaration de sous-traitance du 08/10/2015 acceptée par les sociétés TEAM ETANCH', SERGEANT et BC NORD pour la construction d'un centre aquatique à [Localité 5]. Enfin, l'appelant verse plusieurs attestations (M. [M], M. [H], M. [W]) les témoins attestant avoir travaillé avec ce dernier et M. [U] [D] sur le chantier de la piscine George Guynemer à [Localité 4] d'octobre à novembre 2016 pour des travaux de couverture étanchéité.

Face à ces éléments, les intimés n'apportent pas d'éléments suffisamment probants pour démontrer que le contrat de travail de l'appelant est fictif. Ce dernier produit ses relevés de compte pour la période concernée démontrant des paiements par chèque des salaires de décembre 2015 à septembre 2016, le relevé pour le mois de mars 2016 n'étant pas produit. Il en ressort plusieurs paiements correspondant aux bulletins de paie des mois de septembre 2015 à juin 2016 faisant apparaître des paiements tardifs

du salaire. Un virement de 584,56 € pour intempéries est crédité le 20/06/2016. Il est exact que les relevés de compte font également apparaître des paiements par le Pôle emploi (450,94 € le 04/08/2015 ; 773,04 € le 03/05/2016 ; 579,78 € le 01/06/2016 ; 644,20 € le 04/08/2016 ; 289,89 € le 16/11/2016). Toutefois, l'appelant indique avoir perçu ces sommes à la suite de la déclaration des revenus, étant observé qu'un avenant a été signé portant le temps de travail à 20 heures par semaine à compter du 01/05/2016, jusqu'au 01/10/2016 où le salarié est passé à nouveau à temps complet, ce qui peut expliquer les versements.

Le fait que la gérante de la société, Mme [C] [E], et son conjoint M. [Z] [I], ont géré des sociétés ayant fait l'objet de liquidation judiciaire (SARL COUVERTURE BARDAGE ETANCHEITE 23/10/2013, SARL BRC NOYON 08/07/2015, SARL COUVERTURE ET CIE 14/11/2018) est insuffisant à établir une collusion frauduleuse entre l'appelant et la société TEAM ETANCH' qui doit être prouvée et non présumée. En définitive, au regard des ces éléments, la preuve de la fictivité du contrat de travail n'est pas rapportée, les éléments versés par le liquidateur et l'Unedic ne permettant pas d'aller au-delà d'une simple interrogation. Il s'ensuit que le salarié est bien lié à la SARL TEAM ETANCH' par un contrat de travail. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement.

Sur les conséquences indemnitaires

La demande en paiement d'une indemnité de licenciement calculée sur la base d'un salaire moyen de 2.716 € pour une ancienneté de 1 an et 4 mois sera accueillie pour la somme réclamée de 905,33 €, le calcul du salarié n'apparaissant pas critiquable.

L'indemnité compensatrice de préavis s'établit, en vertu de l'article L1234-1 du code du travail à la somme de 2.716 €, outre 271,06 €.

Enfin, il n'est pas justifié du paiement du salaire pour les mois de juillet 2016 à décembre 2016. En conséquence la demande en paiement de la somme de 10.440 € sera accueillie, le salarié ayant effectué son calcul en net.

Ces sommes seront fixées à l'état des créances du passif de la liquidation judiciaire de la SARL TEAM ETANCH'.

Le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC délégation AGS, CGEA d'Amiens, qui devra sa garantie conformément aux plafonds et limites des articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail.

Sur les autres demandes

Par infirmation, les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Il convient de fixer au passif de la SARL ETANCH' une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Dit que M. [U] [D] a la qualité de salarié de la SARL TEAM ETANCH',

Fixe à l'état des créances salariales de l'état du passif de la liquidation judiciaire de la SARl TEAM ETANCH' les sommes qui suivent :

-905,33 € d'indemnité de licenciement,

-2.716 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre 271,06 € de congés payés afférents,

-10.440 € nets de rappel de salaires impayés,

-1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC délégation AGS, CGEA d'Amiens, qui devra sa garantie conformément aux plafonds et limites des articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail,

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

LE GREFFIER

Séverine STIEVENARD

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 22/00694
Date de la décision : 31/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-31;22.00694 ?
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