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31/03/2023 | FRANCE | N°20/02245

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 31 mars 2023, 20/02245


ARRÊT DU

31 Mars 2023







N° 460/23



N° RG 20/02245 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TI3B



GG/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Octobre 2020

(RG 19/00156 -section )







































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GROSSE :



aux avocats



le 31 Mars 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [J] [M]

[Adresse 1]

représenté par Me Natacha MAREELS-SIMONET, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉES :



Association L'UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA D'[Localité 4]

[...

ARRÊT DU

31 Mars 2023

N° 460/23

N° RG 20/02245 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TI3B

GG/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Octobre 2020

(RG 19/00156 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 31 Mars 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [J] [M]

[Adresse 1]

représenté par Me Natacha MAREELS-SIMONET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉES :

Association L'UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA D'[Localité 4]

[Adresse 2]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

S.C.P. [S] [V] es-qualité de mandataire liquidateur de la SARL TEAM ETANCH

[Adresse 3]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS : à l'audience publique du 04 Janvier 2023

Tenue par Gilles GUTIERREZ

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Angelique AZZOLINI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 17 février 2023 au 31 mars 2023 pour plus ample délibéré.

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 14 décembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

La SARL TEAM ETANCH' a engagé par contrat à temps complet et à durée indéterminée du 04/09/2015 M. [J] [M], né en 1982, en qualité d'étancheur/bardeur.

Le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL TEAM ETANCH' par jugement du 04/01/2017 et désigné en qualité de liquidateur la SCP [S] [V].

Par lettre du 18/01/2017 Me [O] [S] a procédé au licenciement du salarié pour cause économique. Puis, par lettre du 14/02/2017, le liquidateur a informé M. [M] que sa qualité de salarié était contestée, la SARL TEAM ETANCH' étant soupçonnée de fraude et de transfert d'activité.

Suivant requête reçue le 24/04/2018, M. [J] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Lannoy pour faire reconnaître sa qualité de salarié, et obtenir la fixation au passif de diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 13/10/2020 le conseil de prud'hommes a :

-constaté que la SARL TEAM ETANCH' a été mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de COMPIEGNE en date du 04 janvier 2017 et que la SCP [S]-[V], représentée par Me [O] [S], a été désignée liquidateur judiciaire,

-dit et jugé que M. [J] [M] n'avait pas la qualité de salarié de la SARL TEAM ETANCH',

En conséquence déclaré son action irrecevable, ou, en tout état de cause, mal fondée,

-débouté M. [J] [M] de l'ensemble de ses demandes,

-débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples ou contraires au présent dispositif,

-condamné M. [J] [M] aux entiers dépens de la présente instance.

Suivant déclaration reçue le 15/11/2020, M. [M] a régulièrement interjeté appel de la décision précitée.

Selon ses conclusions n° 3 reçues le 29/07/2021, M. [J] [M] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de lui reconnaître la qualité de salarié au sein de la société TEAM ETANCH' et de :

-fixer au passif de la société TEAM ETANCH' les sommes suivantes :

-523,62 € à titre d'indemnité de licenciement,

-1.570,83 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

-157,08 € au titre des congés payés y afférent,

-9.340 € au titre du rappel de salaire pour la période de juillet 2016 à décembre 2016,

-1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner le CGEA à lui payer les sommes précitées, fixées au passif de la société TEAM ETANCH', à titre de garantie de la créance salariale.

Selon ses conclusions n° 2 reçue le 05/08/2021 la SCP [S] [V] représentée par Me [O] [S], ès qualités de liquidateur de la SARL TEAM ETANCH' demande à la cour de confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions, de débouter M. [J] [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et

conclusions, et en toute hypothèse, de le condamner au paiement de la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et statuer ce que de droit quant aux dépens.

Selon ses conclusions reçues le 05/08/2022, l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 4] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et en toute hypothèse de :

-dire que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D.3253-5 du code du travail, et ce toutes créances du salarié confondues,

-dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du code du travail,

-statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par ordonnance du 02/03/2022 le conseiller de la mise en état a joint la procédure inscrite sous le numéro N° RG 20/02246 avec celle inscrite sous le numéro 20/02245, l'instance étant en définitive disjointe par ordonnance du 11/05/2022.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 14/12/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère, en vertu de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la preuve du contrat de travail

L'appelant indique avoir travaillé pour la SARL TEAM ETANCH' qui l'a recruté et payé pendant plusieurs mois, les salaires étant irrégulièrement payés, être victime des agissements de la société, dont les carences ne peuvent lui être imputables, qu'il n'est pas soutenable qu'il aurait été rémunéré sans contrepartie de travail, qu'une étude de comptabilité de la société suffirait à démontrer la réalité de sa prestation de travail, qu'il a bien travaillé sur plusieurs chantiers, qu'il ne suffit pas de soutenir que les contrats sont fictifs mais qu'il incombe au liquidateur de démontrer qu'il n'a effectivement pas exercé d'activité ce qui n'est pas fait.

Le liquidateur fait valoir que les éléments versés par l'appelant sont insuffisants à prouver une relation de travail subordonnée, que le contrat de travail à durée indéterminée et les fiches de paie comportent des informations différentes, la relation de travail ayant débuté le 06/10/205 et non le 11/09/2015 comme indiqué au contrat, que la réalité d'une prestation de travail n'est pas démontrée, que les attestations versées sont insuffisantes à établir la réalité d'un travail.

Le CGEA s'associe à cette argumentation.

Sur ce, il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En présence d'un contrat de travail écrit ou apparent, il appartient à celui qui entend en contester l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif. En l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Outre le contrat de travail du 04/09/2015à effet au 11/09/2015, M. [J] [M] verse un certificat de congés payés non daté établi par la SARL TEAM ETANCH' pour la période du 06/10/2015 au 31/03/2016 ainsi que les bulletins de paie pour la période d'octobre 2015 au mois de décembre 2016. Ces éléments permettent de présumer l'existence d'un contrat de travail.

Il est exact que le bulletin de paie et le certificat de congés payés font apparaître le 06/10/2015 comme date du début de la relation de travail et non le 11/09/2015 comme indiqué au contrat, l'appelant indiquant que son employeur l'a contacté pour décaler la début de la relation de travail. Cette même date se trouve sur la liste générale des salariés de la société TEAM ETANCH' versée par le liquidateur. Toutefois cette incohérence ne permet pas d'établir que le salarié n'a pas travaillé à compter du 6 octobre 2015.

L'appelant verse plusieurs pages internet avec des photographies du chantier de la piscine [X] à [Localité 5] avec des annotations (ex : «travail sur l'étanchéité» en octobre 2016), ainsi que la déclaration de sous-traitance du 08/10/2015 acceptée par les société TEAM ETANCH', SERGEANT et BC NORD pour la construction d'un centre aquatique à [Localité 6]. Il produit ses relevés de compte pour la période concernée faisant état des paiements par chèque des salaires d'octobre 2015 à juin 2016, outre le paiement le 20/06/2016 de la somme de 280,32 € de la caisse de congés pour intempéries. Enfin, l'appelant verse plusieurs attestations (M. [U], M. [R], M. [I]) les témoins attestant avoir travaillé avec ce dernier et M. [K] [M] sur le chantier de la piscine [N] [X] à [Localité 5] d'octobre à novembre 2016 pour des travaux de couverture étanchéité.

Face à ces éléments, les intimés n'apportent pas d'éléments suffisamment probants pour démontrer que le contrat de travail est fictif. M. [M] ne peut en effet être tenu responsable des incohérences affectant les bulletins de paie (mention d'un contrat à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité, salaire net sans décimale) qui sont établis par l'employeur.

Le fait que la gérante de la société, Mme [Z] [B], et son conjoint M. [A] [E], ont géré des sociétés ayant fait l'objet de liquidation judiciaire (SARL COUVERTURE BARDAGE ETANCHEITE 23/10/2013, SARL BRC NOYON 08/07/2015, SARL COUVERTURE ET CIE 14/11/2018) est insuffisant à établir une collusion frauduleuse entre l'appelant et la société TEAM ETANCH' qui doit être prouvée et non présumée. En définitive, au regard des ces éléments, la preuve de la fictivité du contrat de travail n'est pas rapportée, les éléments versés par le liquidateur et l'Unedic ne permettant pas d'aller au-delà d'une simple interrogation. Il s'ensuit que le salarié est bien lié à la SARL TEAM ETANCH' par un contrat de travail. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement.

Sur les conséquences indemnitaires

La demande en paiement d'une indemnité de licenciement calculée sur la base d'un salaire moyen de 1.570,83 € pour une ancienneté de 1 an et 3 mois sera accueillie pour la somme réclamée de 523,62 €, le calcul du salarié n'apparaissant pas critiquable.

L'indemnité compensatrice de préavis s'établit, en vertu de l'article L1234-1 du code du travail à la somme de 1.570,83 €, outre 157,08 €.

Enfin, il n'est pas justifié du paiement du salaire pour les mois de juillet 2016 à décembre 2016. En conséquence la demande en paiement de la somme de 9.340 € sera accueillie, le salarié ayant effectué son calcul en net.

Ces sommes seront fixées à l'état des créances du passif de la liquidation judiciaire de la SARL TEAM ETANCH'.

Le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC délégation AGS, CGEA d'[Localité 4], qui devra sa garantie conformément aux plafonds et limites des articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail.

Par infirmation, les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Il convient de fixer au passif de la SARL ETANCH' une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Dit que M. [J] [M] a la qualité de salarié de la SARL TEAM ETANCH',

Fixe à l'état des créances salariales de l'état du passif de la liquidation judiciaire de la SARl TEAM ETANCH' les sommes qui suivent :

-523,62 € d'indemnité de licenciement,

-1.570,83 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre 157,08 € de congés payés afférents,

-9.340 € nets de rappel de salaires impayés,

-1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC délégation AGS, CGEA d'[Localité 4], qui devra sa garantie conformément aux plafonds et limites des articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail,

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

LE GREFFIER

Séverine STIEVENARD

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 20/02245
Date de la décision : 31/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-31;20.02245 ?
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