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17/02/2023 | FRANCE | N°21/01176

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 17 février 2023, 21/01176


ARRÊT DU

17 Février 2023







N° 13/23



N° RG 21/01176 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TXEB



PL/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de HAZEBROUCK

en date du

31 Mai 2021

(RG 20/00101 -section 4)






































>GROSSE :



aux avocats



le 17 Février 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-



APPELANT :

M. [C] [B]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Emmanuel FOSSAERT, avocat au barreau de LILLE



INTIMÉES :

S.A. CATTEAU en Liquidation Judiciaire

S.E.L.A.F.A. MJA ...

ARRÊT DU

17 Février 2023

N° 13/23

N° RG 21/01176 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TXEB

PL/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de HAZEBROUCK

en date du

31 Mai 2021

(RG 20/00101 -section 4)

GROSSE :

aux avocats

le 17 Février 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [C] [B]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Emmanuel FOSSAERT, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉES :

S.A. CATTEAU en Liquidation Judiciaire

S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Maître [F] [I] es-qualité de liquidateur de la SA CATTEAU

[Adresse 1]

[Localité 7]

représentée par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS

S.C.P. [U] ET ROUSSELET prise en la personne de Maître [U] administrateur judiciaire de la SA CATTEAU

[Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS

Association CGEA ILE DE FRANCE OUEST

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée par Me Tal LETKO BURIAN, avocat au barreau d'ARRAS, substitué par Me MIART Ancel

DÉBATS : à l'audience publique du 14 Décembre 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Février 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 23 Novembre 2022

EXPOSE DES FAITS

 

[C] [B] a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 22 mai 2017 par la société CATTEAU en qualité de directeur des opérations, statut cadre, position B échelon 2, catégorie 1, coefficient 108 de la convention collective nationale des cadres du bâtiment.

Le 2 mars 2010, la société avait fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par le tribunal de commerce de Paris et bénéficié d'un plan de continuation jusqu'en 2021. Toutefois le 5 juillet 2019, elle a déposé au greffe du tribunal une déclaration de cessation des paiements aux fins de liquidation judiciaire. Par jugement du 25 juillet 2019, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan de continuation et ouvert une procédure de liquidation judiciaire avec une poursuite d'activité pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 25 octobre 2019. Par jugement du 14 novembre 2019, il a arrêté, dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société, un plan de cession en faveur de la société MWI, prévoyant notamment la reprise des 42 salariés, dont [C] [B], avec les avantages acquis depuis l'ouverture de la procédure.

Cette dernière disposition n'étant pas considérée conforme à l'offre proposée par la société MWI, celle-ci a interjeté appel de ce jugement. Par arrêt du 10 mars 2020, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement déféré en ce qu'il avait dit que le plan de cession de la société CATTEAU comprenait la reprise des 42 salariés avec les avantages acquis depuis l'ouverture de la procédure, a dit que le plan de cession de la société CATTEAU comprenait la reprise des 42 salariés avec, d'une part, les droits créés au titre d'un compte épargne temps à compter du 25 juillet 2019, d'autre part, les congés payés et la cotisation économique territoriale à compter de la prise de possession.

Considérant que le solde de ses droits acquis au titre de son compte épargne temps faisait apparaitre qu'il n'avait pas obtenu du mandataire-liquidateur leur paiement de son intégralité, [C] [B] a saisi, par requête reçue le 18 septembre 2020, le conseil de prud'hommes d'Hazebrouck afin d'obtenir la fixation à 14520,20 euros de la conversion monétaire de ses droits acquis au titre du compte épargne temps et l'opposabilité de la décision à l'AGS.

Par jugement en date du 31 mai 2021, le conseil de prud'hommes a fixé la créance de [C] [B] à la somme de 14540,20 euros brut au titre du solde du compte épargne temps, dit que le salarié avait déjà bénéficié d'une avance de 9258,71 euros à valoir sur le plafond d'indemnisation de l'AGS, fixé à 8936,29 euros la somme opposable au CGEA-AGS de Levallois-Perret, ordonné la remise d'un bulletin de paie conforme à la décision, dit que le présent jugement était opposable au CGEA-AGS de Levallois Perret dans la stricte limite de sa garantie légale, débouté les parties de leurs autres demandes et laissé les dépens à la charge de chacune d'elles.

Le 8 juillet 2021, [C] [B] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 23 novembre 2022, la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 14 décembre 2022

 

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 7 décembre 2021, [C] [B] appelant, sollicite de la cour la réformation du jugement entrepris et la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société à la somme de :

- 14540,20 euros au titre de la conversion monétaire des droits acquis par ce dernier au titre du compte épargne temps à la date du 25 juillet 2019, la décision devant être déclarée opposable à l'AGS,

- 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi que la remise d'un bulletin de paie conforme à la décision.

L'appelant expose que lorsque le plan de cession d'une société mise en liquidation judiciaire ne comporte aucune mention sur le sort des jours épargnés en compte épargne temps par les salariés transférés au sein d'une entreprise repreneuse, le régime de la rupture du contrat de travail est alors applicable ; que les salariés concernés peuvent donc prétendre au versement d'une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l'ensemble des droits acquis, que les droits acquis par les salariés dans ce cadre sont garantis par l'AGS dans les conditions fixées aux articles L3253-6 et L3253-8 du code du travail, que de la comparaison du bulletin de paie de juillet 2019 avec celui de novembre 2019, il résulte que l'appelant n'a acquis aucune heure de ce compte à la charge du repreneur, qu'en revanche il a pris 28 heures entre le 25 juillet 2019 et le 14 novembre 2019, que le solde du compte dû est donc de 474,26 heures, soit la somme de 14540,20 euros, que par ailleurs, il n'a pas obtenu le paiement des heures dépassant les 120 heures, que son employeur a continué à abonder le compte du nombre d'heures supplémentaires effectuées au-delà des 120 heures et ne les a jamais payées, qu'à la date du jugement prononçant la liquidation judiciaire, il disposait d'une ancienneté de deux ans et deux mois, que le montant maximum de la garantie de l'AGS s'élève à six mois et non à cinq mois comme l'a retenu le conseil de prud'hommes, qu'en outre en 2019, les plafonds de garantie de l'AGS était de 81048 euros pour un salarié ayant une ancienneté supérieure à deux ans, que n'ayant bénéficié que d'une avance de 9258,71 euros, sa créance de 14540,20 euros brut due au titre du solde de son compte épargne temps doit donc être garantie entièrement par l'AGS.

Selon leurs conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 6 octobre 2021, l'administrateur judiciaire et le liquidateur judiciaire de la société CATTEAU sollicitent de la cour la mise hors de cause de l'administrateur judiciaire, l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de l'appelant à verser 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimés soutiennent que le plan de cession étant devenu définitif les missions de l'administrateur judiciaire ont pris fin, que les heures comptabilisées dans le compte épargne temps n'ont pas la nature d'heures supplémentaires, que la monétisation dudit compte ne peut être effectuée qu'en cas de rupture du contrat de travail, que du fait du transfert, le contrat de travail n'était pas rompu, que l'AGS n'était pas tenue à garantie, que le compte épargne temps est composée d'éléments de salaire à caractère différé, que le paiement des sommes dues à ce titre relève du cessionnaire, à titre subsidiaire qu'il est impossible de déterminer si l'appelant n'a pas utilisé son compte épargne temps d'août à novembre 2019 en l'absence de production des bulletins de paye correspondant à cette période, qu'en outre le nombre maximum d'heures à conserver sur le compte conformément à l'article 3-3 de l'accord du 15 février 2013 mettant en place le compte épargne temps est de 120 heures, que l'appelant ne peut prétendre qu'à la somme de 3679,044 euros.

Selon ses écritures récapitulatives reçues au greffe de la cour le 26 novembre 2021, l'UNEDIC délégation AGS CGEA IDF OUEST, conclut à titre principal au débouté de la demande tenant à la conversation monétaire du compte épargne temps du fait que le contrat de travail de [C] [B] a été transféré, à titre subsidiaire à la limitation de l'éventuelle créance de [C] [B] à la somme de 3679,04 euros du fait que l'accord sur la mise en place du compte épargne temps prévoyait un maximum de 120 heures, que le CGEA n'a pas vocation à garantir les indemnités au titre de l'article 700 car elles ne sont pas inhérentes à la formation, l'exécution ou la rupture du contrat de travail et en tout état de cause sollicite de la cour qu'elle déclare que la décision sera opposable au Centre de Gestion et d'Etudes AGS par application de l'article L3253-14 du code du travail et à l'AGS, dans les limites prévues aux articles L3253-1 et suivants du code du travail et des plafonds prévus aux articles L3253-17 et D3253-5 du code du travail, que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Le Centre de Gestion et d'Etudes AGS fait valoir que l'appelant ne peut ignorer que son contrat n'a pas été rompu puisqu'il a fait l'objet d'un transfert au sein de la société MWI, qu'en conséquence, il ne peut solliciter la conversation monétaire des droits acquis, à titre subsidiaire qu'il ne justifie pas du quantum de ses demandes, qu'en outre, en raison l'article 3-1 de l'accord sur la mise en place du compte épargne temps qui prévoit que lorsque le compte épargne temps d'un salarié atteint le nombre de 120 heures, les heures effectuées au-delà par ce salarié lui sont payées dans le mois correspondant, qu'il ne peut solliciter une allocation supérieure à 120 heures, que sa créance éventuelle devra être limitée à la somme de 3679,04 euros, que le CGEA n'a pas vocation à garantir les indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

 

MOTIFS DE L'ARRET

Attendu que le plan de cession étant devenu définitif, il convient de mettre hors de cause l'administrateur judiciaire

Attendu que par arrêt infirmatif définitif en date du 10 mars 2020 la cour d'appel de Paris a dit que le plan de cession de la société CATTEAU comprenait la reprise de 42 salariés avec d'une part les droits créés au titre d'un compte épargne temps à compter du 25 juillet 2019, correspondant à la date d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, et d'autre part les congés payés et la cotisation économique territoriale à compter de la prise de possession ;

Attendu qu'il résulte du bulletin de paye de l'appelant du mois de juillet 2019 que le solde de son compte épargne temps s'élevait à cette date à 502,26 heures ; qu'à la date du transfert du contrat le solde de ce compte était de 474,26 heures, compte tenu des 28 heures dudit compte prises par le salarié entre le 25 juillet 2019 et le 14 novembre 2019 ;

Attendu qu'en application du plan de cession, la société CATTEAU continuait d'être redevable des heures dues au titre du compte épargne temps pour la période antérieure au 25 juillet 2019, celles-ci n'étant pas transférées à la société MWI ; qu'elles s'élèvent à 474,26 heures ; que selon l'article 3-1 de l'accord d'entreprise sur le compte épargne temps, celui-ci était alimenté par les heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale ; que lorsque ledit compte avait atteint 120 heures, le nombre d'heures effectuées en sus devait être payé dans le mois correspondant ; qu'il n'est pas contesté que ce règlement n'a pas été effectué ; qu'il s'ensuit que la société était redevable de la

somme correspondant à la conversion monétaire de 120 heures du compte épargne temps, soit 3679,44 euros, et à un reliquat de 356,26 heures supplémentaires qu'il convient d'évaluer à 10860,76 euros ;

Attendu qu'il convient d'ordonner la remise par le liquidateur judiciaire d'un bulletin de paye conforme au présent arrêt ;

Attendu en application de l'article D3253-5 alinéa 1er du code du travail que l'ancienneté de l'appelant à la date du jugement prononçant la liquidation judiciaire était supérieure à deux années ; qu'en conséquence, le montant maximum de la garantie prévue à l'article L3253-17 applicable à l'espèce correspondait à six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage ; qu'il s'ensuit que l'AGS est tenu à garantir le paiement des sommes allouées à l'appelant ;

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'appelant les frais qu'il a dû exposer tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer une somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

ORDONNE la mise hors de cause de Maitre [P] [U] en qualité d'administrateur judiciaire de la société CATTEAU,

INFIRME le jugement déféré

ET STATUANT A NOUVEAU,

 

FIXE la créance de [C] [B] au passif de la liquidation judiciaire de la société CATTEAU à la somme de :

- 3679,44 euros correspondant à la conversion monétaire de son compte épargne temps

- 10860,76 euros à titre de reliquat d'heures supplémentaires,

ORDONNE la remise par le liquidateur judiciaire d'un bulletin de paye conforme,

DECLARE l'arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA IDF OUEST,

 

DIT que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-8 et suivants du code du travail que dans les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 à L3253-17, L3253-19 à L3253-21 et D3253-2 dudit code et que le montant de sa garantie n'excédera pas six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage,

Déboute l'AGS CGEA de sa demande tendant à subordonner ses avances à la justification par le mandataire de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder au paiement des sommes garanties mais rappelle que l'obligation au paiement de l'AGS-CGEA ne pourra s'effectuer que sur présentation par le mandataire d'un relevé de créance,

CONDAMNE le mandataire liquidateur de la société CATTEAU à verser à [C] [B] 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

MET les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la société CATTEAU.

LE GREFFIER

N. BERLY

LE PRESIDENT

P. LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/01176
Date de la décision : 17/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-17;21.01176 ?
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