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17/02/2023 | FRANCE | N°20/01875

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 17 février 2023, 20/01875


ARRÊT DU

17 Février 2023







N° 336/23



N° RG 20/01875 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TFBX



GG/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Lille

en date du

23 Juillet 2020

(RG 18/00783 -section 3 )






































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GROSSE :



aux avocats



le 17 Février 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes



APPELANT :



M. [W] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Bertrand DANSET, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Victor FLEURET, avocat au barreau de LILLE



INTIMÉ...

ARRÊT DU

17 Février 2023

N° 336/23

N° RG 20/01875 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TFBX

GG/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Lille

en date du

23 Juillet 2020

(RG 18/00783 -section 3 )

GROSSE :

aux avocats

le 17 Février 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes

APPELANT :

M. [W] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Bertrand DANSET, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Victor FLEURET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉES :

L'association GROUPEMENT PART'AGE

en liquidation judiciaire

SELARL PERIN ET BORKOWIAK Mandataire liquidateur judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Alexandre BAREGE, avocat au barreau de LILLE

Association L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS, CGEA DE [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substituée par Me Cécile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS : à l'audience publique du 16 Novembre 2022

Tenue par Gilles GUTIERREZ

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 27 janvier 2023 au 17 février 2023 pour plus ample délibéré

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Février 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 26 Octobre 2022

EXPOSE DU LITIGE

L'association GROUPEMENT PART'AGE, a engagé par contrat à durée indéterminée du 01/06/2016 M. [W] [T], né en 1977, en qualité d'animateur en temps partagé, auprès du centre social des Bois Blancs à [Localité 3] et de l'association AVENIR ENFANCE, à temps complet, groupe 4, coefficient 280 de la convention collective de l'animation.

Cette embauche faisait suite au transfert du contrat de travail au sein de l'association AVENIR ENFANCE.

Par lettre du 23/09/2015, M. [T] s'est rapproché de son employeur pour définir précisément ses missions et son indice, demande réitérée le 21/01/2016. Une réunion fixée le 21/04/2016 était reportée sine die.

Le tribunal de grande instance de Lille par jugement du 02/10/2015 a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de l'association GROUPEMENT PART'AGE.

Par requête reçue le 30/05/2016, M. [W] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille d'une demande de classification en qualité de directeur, responsable de secteur ALSH, au coefficient 350.

Par jugement du 07/10/2016, le tribunal de grande instance a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 21/10/2016, et désigné la SELARL Yvon Perin-Jean Philippe Borkowiak en qualité de liquidateur judiciaire.

Le liquidateur a notifié à M. [T] son licenciement pour motif économique par lettre du 20/10/2016.

Par jugement du 23/07/2020, le conseil de prud'hommes a :

-débouté M. [W] [T] de sa demande de requalification au coefficient 350 de la convention collective nationale de l'animation,

-dit et jugé que M. [W] [T] doit être reclassé au coefficient 300 de la convention collective de l'animation,

-fixé au passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE la somme de 991,49 € à titre de rappel de salaire et la somme de 99,15 € de congés payés y afférents pour une reclassification au coefficient 300 de la convention collective nationale de l'animation,

-débouté M. [W] [T] de ses demandes de rappel d'indemnité de préavis, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-laissé à chacune des parties la charge de ses propres frais sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-dit le jugement à intervenir opposable au CGEA de [Localité 3] et qu'il est tenu dans la limite de ses garanties légales et réglementaires,

-rappelé que l'ouverture de la procédure collective interrompt le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retards et majorations,

-ordonné la remise des documents de fin de contrat et des bulletins de paie rectifiés selon le présent jugement et sans astreinte,

-déboute les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif,

-laissé à chacun des parties la charge de ses propres dépens.

Suivant déclaration reçue le 26/08/2020, M. [T] a régulièrement interjeté appel de la décision précitée.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues le 05/10/2021, M. [T] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau de :

-dire et juger qu'il occupait les fonctions de directeur-responsable de secteurs ALSH/Périscolaire au sein de l'association GROUPEMENT PART'AGE,

en conséquence, à titre principal :

-procéder à la reclassification au coefficient 350 de la convention collective nationale de l'animation,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 26.762,40 € bruts à titre de rappel de salaires, outre 2.676,24 € bruts de congés payés y afférents,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 923 € bruts à titre de rappel sur indemnité de préavis, outre 92,30 € bruts de congés payés y afférents,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 1.592,97 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

A titre subsidiaire, de :

-procéder à la reclassification au coefficient 300 de la convention collective nationale de l'animation ;

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 7.646,40 € bruts à titre de rappel de salaires, outre 764,64 € bruts de congés payés y afférents,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 323 € bruts à titre de rappel d'indemnité de préavis, outre 32 € bruts de congés payés y afférents,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE à verser 355,10 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

En tout état de cause, de :

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE au paiement de 10.000 € pour exécution déloyale du contrat de travail,

-dire et juger que le licenciement économique est sans cause réelle et sérieuse, faute de recherche loyale et sérieuse de reclassement, et en conséquence de :

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE au versement de 33.600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamner l'association GROUPEMENT PART'AGE au versement de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux éventuels dépens de procédure,

-fixer l'ensemble des créances au passif de l'association GROUPEMENT PART'AGE,

-dire l'arrêt à venir opposable au CGEA DE [Localité 3],

-ordonner la rectification des documents de fin de contrat, avec astreinte de 50 € par jour à compter de l'arrêt à intervenir.

Selon ses conclusions reçues le 14/12/2020, la SELARL PERIN ET BORKOWIAK, ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé que M. [W] [T] doit être reclassé au coefficient 300 de la convention collective nationale de l'animation ; fixé au passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT ET PARTAGE la somme de 991,49 € à titre de rappel de salaire et la somme de 99,15 € de congés payés y afférents, pour une reclassification au coefficient 300 de la convention collective nationale de l'animation ;

Et statuant de nouveau,

-débouter M. [W] [T] de l'ensemble de ses demandes,

-A titre subsidiaire,

-limiter les demandes indemnitaires à de plus justes proportions,

En tout état de cause,

-condamner M. [W] [T] à lui verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses conclusions reçues le 20/10/2022, l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA de [Localité 3] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

-dit et jugé que M. [W] [T] doit être reclassé au coefficient 300 de la convention collective de l'animation,

-fixé au passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE la somme de 991,49 € à titre de rappel de salaire à M. [W] [T] et la somme de 99,15 € de congés payés y afférents, pour une reclassification au coefficient 300 de la convention collective de l'animation,

-confirmer le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau,

-débouter M. [W] [T] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire :

-confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

-débouter M. [W] [T] du surplus de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire :

-Si par extraordinaire, la cour estimait que l'association GROUPEMENT PART'AGE a manqué à son obligation de loyauté, débouter M. [W] [T] de sa demande indemnitaire faute de justifier du préjudice subi,

«'Très très subsidiairement'»,

-dire et juger que les dommages et intérêts sollicités par M. [W] [T] sont manifestement disproportionnés,

En conséquence :

-réduire le quantum de la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail à de plus justes proportions,

-si par extraordinaire, la cour estimait que le licenciement de M. [W] [T] est sans cause réelle et sérieuse, dire et juger que les dommages et intérêts sollicités par M. [W] [T] sont manifestement disproportionnés,

En conséquence :

-réduire le quantum de la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au minimum légal,

En toute hypothèse :

-Juger que l'AGS ne garantit pas l'astreinte

-lui donner acte qu'elle a procédé aux avances au profit de M. [W] [T] d'un montant de 21.259,31 €,

-dire que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D.3253-5 du code du travail, et ce toutes créances du salarié confondues,

-dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du code du travail,

-statuer ce que de droit quant aux dépens.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 26/10/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur l'exécution du contrat de travail

1) Sur la classification

L'appelant explique avoir été affecté à compter du mois de septembre 2009 aux fonctions de directeur de secteur (secteur enfance en accueil de loisir sans hébergement et partie péri-scolaire), que dans ce contexte il a mis en place des projets éducatifs et pédagogiques, a participé au recrutement et management des animateurs, a géré le budget et réalisé la communication externe et la gestion des salles, que pour autant il a conservé le même salaire que les animateurs qu'il encadrait, qu'il a été présenté auprès de l'administration comme directeur du centre social des bois-blancs, et justifie des projets pédagogiques élaborés, que plusieurs salariés attestent de son activité de directeur et de son positionnement hiérarchique, que la prime d'ancienneté n'a pas à être intégrée dans le calcul de la rémunération, pas plus que la prime de reconstitution de carrière, que sa demande n'est pas prescrite.

La SELARL PERIN ET BORKOWIAK indique que la classification au coefficient 300 n'a pas été justifiée, que l'appelant a été recruté en qualité d'animateur, qu'il ne produit aucun élément permettant de s'assurer du contenu exact des missions, ceux versés aux débats étant insuffisants (courrier et copies d'écran), qu'il n'est pas établi qu'il exerçait un encadrement hiérarchique de façon permanente, ni responsable de manière permanente d'une équipe, compte-tenu des pièces produites portant sur des périodes de temps limitées.

L'UNEDIC fait valoir que les pièces produites ne permettent pas de vérifier les fonctions exercées, le degré d'autonomie du salarié dans la réalisation de ses fonctions, le niveau de hiérarchie et les responsabilités exercées dont il se prévaut aujourd'hui, et qu'il qu'il ne suffit pas de disposer d'un titre de directeur d'un centre social ou d'une maison de quartier pour pouvoir prétendre au coefficient 350, qu'il semble que M. [T] n'a exercé ces missions que de manière ponctuelle chez différents employeurs.

Sur ce, il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.

Il ressort de l'article 1.5 de l'annexe I de la convention collective nationale des métiers de l'éducation, de la culture, des loisirs et de l'animation agissant pour l'utilité sociale et environnementale, au service des territoires du 28 juin 1988, étendue par arrêté du 10 janvier 1989, dans sa version modifiée par avenant du 18 mai 2009, étendu par arrêté du 8 octobre 2009 les classifications qui suivent :

-groupe C, coefficient 280 (si le poste comporte habituellement la coordination du travail de quelques personnes, le salarié bénéficie d'au moins 10 points complémentaires)

-définition : exécution de tâches qui se différencient des précédentes par une technicité supérieure et une plus grande autonomie laissée à l'exécutant dans le choix des moyens qu'il met en 'uvre.

-critères de classification : le salarié peut exercer un rôle de conseil et de coordination d'autres salariés, mais il n'exerce pas d'encadrement hiérarchique. Le salarié peut être responsable du budget prescrit d'une opération.

Le salarié est autonome dans la mise en 'uvre des moyens nécessaires à l'exécution de son travail. Le contrôle du travail ne s'exerce qu'au terme d'un délai prescrit.

-position D coefficient 300 :

-définition : prise en charge d'un ensemble de tâches, d'une équipe ou d'une fonction impliquant une conception des moyens et une bonne maîtrise de la technicité requise par le ou les domaines d'intervention.

-critères de classification : le salarié peut participer à l'élaboration des directives et des procédures de l'équipe ou de la fonction dont il a la charge. Il peut planifier l'activité d'une équipe et contrôler l'exécution d'un programme d'activité. Il peut participer à des procédures de recrutement, mais ne peut avoir une délégation de responsabilité dans l'embauche du personnel. Sa responsabilité est limitée à l'exécution d'un budget prescrit pour un ensemble d'opérations. Sa maîtrise technique lui permet de concevoir les moyens et les modalités de leur mise en 'uvre avec une assez large autonomie.

-position E coefficient 350

-définition : l'emploi implique soit la responsabilité d'une mission par délégation, requérant une conception des moyens ; soit la responsabilité d'un service ; soit la gestion d'un équipement (immobilier) de petite taille.

-critères de classification : le salarié peut être responsable de manière permanente d'une équipe. Il définit le programme de travail de l'équipe ou du service et conduit son exécution. Il peut avoir la responsabilité de l'exécution d'un budget de service ou d'équipement. Il peut bénéficier d'une délégation de responsabilité dans la procédure de recrutement. Il peut porter tout ou partie du projet à l'extérieur dans le cadre de ses missions. Son autonomie repose sur une délégation hiérarchique, budgétaire et de représentation sous un contrôle régulier du directeur ou d'un responsable hiérarchique.

L'appelant produit plusieurs copies d'écran d'un «'tam.extranet.jeunesse.gouv.fr'» pour le centre social Rosette de Mey (maison de quartier des bois blancs) de déclarations par Mme [A] [K], des effectifs présents pour assurer l'accueil de loisir périscolaire à compter du 03/09/2009, pour chaque année scolaire jusqu'en 2016, ainsi que l'accueil de loisir du mercredi et des vacances scolaires. M. [T] est déclaré par l'employeur pour chaque document comme «'directeur'», les autres salariés désignés comme «'animateurs'».

De plus, M. [T] verse les rapports d'évaluation d'un accueil collectif de mineurs du préfet du Nord (direction départementale de la cohésion sociale du Nord) faisant suite aux visites de contrôle du 09/03/2012 et du 30/01/2013 de la maison de quartier des Bois Blancs, le désignant comme directeur et mentionnant son diplôme (brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport ' BPJEPS). Il justifie du projet pédagogique pour l'année 2012-2013 de l'accueil périscolaire, rappelant les fonctions du directeur à savoir l'encadrement des animateurs et des enfants, la gestion des plannings, l'animation de l'équipe, l'animation des activités, l'interface avec les partenaires, la coordination et la sécurité.

Il ressort des différentes attestations versées (M. [B], Mme [X], Mme [I], M. [J], Mme [Z], Mme [L], M. [Y]) que M. [T] a recruté des animateurs, qu'il est identifié par ces derniers comme «'directeur'», qu'il organisait les planning et était considéré comme «'supérieur hiérarchique'» (confer notamment Mme [M] pour la période du décembre 2012 à juillet 2016).

De plus, M. [T] verse les courriels de candidatures qui lui ont été adressés après la parution d'annonces de recrutement.

Il s'ensuit que M. [T] justifie de la responsabilité permanente d'un service, au sens de la définition des fonctions de la convention collective, et que manifestement ce dernier a été à compter de 2009 responsable d'une équipe d'animateurs et identifié auprès de tiers comme directeur de la structure d'accueil périscolaire.

Il convient d'ajouter que les intimés ne précisent pas quel autre salarié aurait assuré à la place de M. [T] les fonctions de direction du centre d'accueil. Ce dernier est donc fondé à prétendre à une reclassification en qualité de directeur au coefficient 350. Le jugement est infirmé.

2) Sur les conséquences indemnitaires de la reclassification

La fin de non recevoir tirée de la prescription n'est pas invoquée par les intimés, et n'est pas mentionnée au dispositif de leurs conclusions en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'en étant pas saisie.

La demande apparaît au demeurant recevable au regard des dispositions transitoires de l'article 21, V, de la loi du 14/06/2013. L'absence de réclamation écrite du salarié préalablement à sa correspondance du 23/09/2015 ne le prive pas du droit de former une demande de rappel de salaire pour la période du 01/06/2011 au 21/10/2016.

En revanche, le liquidateur explique que la rémunération versée au titre de l'ancienneté, et de la reconstitution de carrière doit être prise en compte, pour déterminer si le salarié a perçu le minimum conventionnel, le salarié ayant exclu ces éléments de son calcul.

Cependant, l'article 1.7.1 de la convention collective dans sa rédaction issue de l'avenant du 18/05/2009, antérieur à sa rédaction issue de l'avenant du 12/04/2022, stipule que le «'salaire minimum conventionnel est défini de la manière suivante : il résulte du produit du coefficient affecté à chaque groupe ou niveau par la valeur du point fixée par les partenaires sociaux'».

Le salaire conventionnel ainsi défini n'inclut donc pas les points supplémentaires liés à l'ancienneté de l'article 1.7.2, ni la prime de déroulement de carrière de l'article 1.7.6, le salarié expliquant que celle-ci vient indemniser son ancienneté à compter du 03/12/2001 acquise auprès de l'association AVENIR ENFANCE.

Le rappel de salaire s'établit en conséquence à la somme de 26.762,40 € au titre du coefficient 350 outre 2.684,64 €.

Compte-tenu du rappel de salaire alloué, les demandes de rappel d'indemnité compensatrice de préavis (923 € bruts et 92,30 € bruts) et de licenciement (1.592,97 €) doivent être accueillies, le calcul du salarié n'apparaissant pas critiquable.

3) Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

L'appelant invoque une application déloyale du contrat de travail, ainsi qu'un défaut d'application de la convention collective.

Les intimés font valoir l'absence de mauvaise foi de l'employeur, de réclamation avant le mois de septembre 2015, et de preuve du préjudice.

Sur ce, l'article 1231-6 alinéa 3 du code civil modifié dispose que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

Les démarches de M. [T], qui a toujours été déclaré auprès de l'administration comme directeur de la structure, sont restées vaines. S'il peut être entendu, au terme de la correspondance du président du groupement (M. [U]) du 11/03/2016 que des vérifications devaient être effectuées relativement à l'ordre de mission entre le groupement et la maison de quartier des bois blancs, cette correspondance est restée sans suite, la réunion prévue le 12/05/2016 ayant été annulée et reportée sine die, contraignant le salarié à engager une action en justice.

Le fait de confier pendant plusieurs années au salarié un travail ne correspondant pas à sa qualification lui a cause un préjudice distinct qui sera réparé par une indemnité de 1.500 € de dommages-intérêts.

Ces créances seront inscrites à l'état des créances du passif de l'association GROUPEMENT PART'AGE. L'Unedic délégation CGEA de [Localité 3] devra sa garantie dans les limites et plafonds légaux, conformément aux articles L3253-6 à L3253-21 du code du travail.

Sur la rupture du contrat de travail

L'appelant fait valoir un défaut de reclassement, qu'en matière de groupement d'employeur un reclassement devait être recherché auprès de l'ensemble des partenaires.

Le liquidateur rappelle que l'association était un groupement d'employeurs, c'est à dire une structure qui permet aux entreprises de se regrouper pour employeur une main d''uvre qu'elle n'aurait pas, seule, les moyens de recruter, qu'au surplus une recherche de reclassement a été effectuée.

L'Unedic indique qu'un reclassement n'était pas envisageable au sein des adhérents du groupement d'employeur.

L'article L1233-4 du code du travail dans sa rédaction applicable dispose que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Il est de principe que les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Il ressort des pièces produites que l'association PART'AGE est un groupement d'employeurs sous forme associative, que 18 associations de [Localité 3] 'uvrant dans le secteur social sont adhérentes du groupement, outre des centres sociaux hors [Localité 3]. Cependant, le liquidateur est bien fondé à faire valoir que ces structures se sont regroupées précisément pour employer une main d''uvre qu'elle n'auraient pu, seules, recruter. Le liquidateur n'était donc pas tenu de consulter l'ensemble des associations et centres sociaux adhérents, étant ajouté'qu'il est justifié d'une recherche auprès du MEDEF, de la chambre de commerce et d'industrie de Lille, de l'association [Localité 3] Orientation Emploi, de l'association Flase, ce qui démontre une recherche de reclassement. La demande est rejetée, et le jugement est confirmé.

Sur les autres demandes

Il sera enjoint au liquidateur de remettre à M. [T] une attestation Pôle emploi et un bulletin de paie conformes au présent arrêt, sans astreinte.

Les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Il est équitable d'allouer à M. [T] pour ses frais irrépétibles une indemnité de 2.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, qui seront fixés au passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 23 juillet 2020 par le conseil de prud'hommes de Lille, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Dit que M. [W] [T] doit être reclassé au coefficient 350 de la convention collective nationale des métiers de l'éducation, de la culture, des loisirs et de l'animation agissant pour l'utilité sociale et environnementale, au service des territoires (ÉCLAT) du 28 juin 1988,

Fixe à l'état des créances salariales du passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE les sommes qui suivent :

-26.762,40 € de rappel de salaire au titre du coefficient 350, outre 2.684,64 € de congés payés afférents,

-923 € de rappel de salaire d'indemnité compensatrice de préavis et 92,30 €

-1.592,97 € de rappel d'indemnité de licenciement,

-1.500 € de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat,

Dit que l'Unedic délégation CGEA de [Localité 3] devra sa garantie dans les limites et plafonds légaux, conformément aux articles L3253-6 à L3253-21 du code du travail,

Dit que la SELARL PERIN ET BORKOWIAK devra remettre à M. [W] [T] une attestation Pôle emploi et un bulletin de paie conformes au présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Fixe à l'état des créances salariales du passif de la liquidation judiciaire de l'association GROUPEMENT PART'AGE une indemnité de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

LE GREFFIER

Nadine BERLY

LE PRÉSIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 20/01875
Date de la décision : 17/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-17;20.01875 ?
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