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16/12/2022 | FRANCE | N°20/01048

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 16 décembre 2022, 20/01048


ARRÊT DU

16 Décembre 2022







N° 2100/22



N° RG 20/01048 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S536



GG/AA





























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

10 Février 2020

(RG 19/00003 -section )



































GROSSE :



Aux avocats



le 16 Décembre 2022



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [S] [R]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Stephane DOMINGUEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 5917...

ARRÊT DU

16 Décembre 2022

N° 2100/22

N° RG 20/01048 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S536

GG/AA

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

10 Février 2020

(RG 19/00003 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 16 Décembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [S] [R]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Stephane DOMINGUEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/20/03230 du 26/05/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

INTIMÉE :

S.A.S. CRM 59

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Julie VALLEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Angelique AZZOLINI

DÉBATS : à l'audience publique du 28 Septembre 2022

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 25 novembre 2022 au 16 décembre 2022

pour plus ample délibéré

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Gaetan DELETTREZ, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 7/09/2022

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS CRM 59, assure une activité de prise en charge de la gestion de l'accueil téléphonique d'entreprises, emploie habituellement plus de 10 salariés, et applique la convention collective des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire. Elle a engagée Mme [S] [R] née en 1976 par contrat à durée déterminée du 28/08/2017 au 27/09/2017 en qualité de téléconseiller, statut employé niveau I. Le contrat a été renouvelé à deux reprises suivant avenants des 26/09/2017 et 20/12/2017 avec un terme prévu au 28/03/2018.

Par lettre du 27/01/2018, Mme [R] a informé l'employeur de son intention de démissionner au 27/01/2018, et sollicité l'accord de l'employeur pour ne pas effectuer de préavis.

L'employeur a accepté la rupture anticipée du contrat de travail par lettre du 30/01/2018.

Par lettre du 13/03/2018, la salariée a indiqué que sa démission avait été forcée par les conditions de travail infligées par l'employeur : absence de visite médicale en dépit d'une situation de handicap, conditions de travail « inhumaines (pression du supérieur, rythme exigé insoutenable, horaires 10h/20h insoutenables durant des mois, heures supplémentaires non payées sauf en fin de contrat), coupure repas non payée, tension continuelle, suppression facile des primes ».

En vue d'obtenir la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, et la requalification de la démission en prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur, Mme [R] a saisi le 08/01/2019 le conseil de prud'hommes de Valenciennes de diverses prétentions indemnitaires afférentes à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 10/02/2020, le conseil de prud'hommes a :

-dit n'y avoir lieu à requali'er le contrat de travail à durée déterminée de Mme [R] en un contrat de travail à durée indéterminée,

-dit n'y avoir lieu à constater la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Mme [R] avec la société B2S (sic) aux torts exclusifs de l'employeur,

-débouté Mme [R] de l'intégralité de ses demandes,

-condamné Mme [R] à restituer à la SAS CRCM 59, prise en la personne de son représentant légal, le matériel resté en sa possession (casque et badge) sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification du jugement,

-condamné Mme [R] à payer à la SAS CRCM 59, prise en la personne de son représentant légal, les sommes suivantes : 281,37 € à titre de remboursement du trop-perçu, 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté la SAS CRCM 59 du surplus de ses demandes,

-condamné Mme [R] aux dépens.

Par déclaration reçue le 04/03/2020 Mme [S] [R] a régulièrement interjeté appel du jugement précité.

Aux termes de ses conclusions reçues le 06/10/2020, Mme [S] [R] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de :

-requalifier le contrat de travail à durée déterminée ratifié en contrat à durée indéterminée,

-constater la prise d'acte du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur,

En conséquence,

-juger que la prise d'acte produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamner la SAS CRM 59 à lui payer les sommes suivantes :

-5.000 € de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse issu de la prise d'acte aux torts de l'employeur,

-2.000 € au titre du harcèlement moral,

-5.000 € au titre du manquement à l'obligation de sécurité et de résultat,

-2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Selon ses conclusions reçues le 17/07/2020, la SAS CRM 59 demande à la cour de confirmer le jugement et de,

-à titre principal,

-débouter Mme [R] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

-la condamner au paiement de la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance outre 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, et les entiers dépens

-à titre subsidiaire :

-si par impossible, la Cour estimait devoir réformer le jugement entrepris et considérait devoir faire droit aux demandes de Madame [S] [R], il conviendrait de limiter ces demandes comme suit :

-dommages-intérêts pour prise d'acte aux torts de l'employeur assimilée à un licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1 € symbolique conformément à l'article L.1235-3 du code du travail,

-dommages-intérêts pour harcèlement moral : 1 € symbolique,

-dommages-intérêts au titre de l'obligation de sécurité : 1 € symbolique,

En tout état de cause, il est demandé à la Cour de confirmer le jugement rendu le 10 février 2020 par le Conseil de prud'hommes de Valenciennes en ce qu'il a :

-condamné Madame [S] [R] à verser à la société CRM 59 la somme de 281,37 € net à titre de remboursement du trop-perçu,

-condamné Madame [S] [R] à restituer le matériel resté en sa possession (casque et badge), ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification du jugement du 10 février 2020,

-débouter Madame [S] [R] de l'intégralité de ses autres demandes.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 07/09/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère, en vertu de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

Au préalable, le contrat de travail mentionne comme employeur la société « CRM59 ' b2s Valenciennes », les parties s'accordant sur la dénomination sociale réelle de la société à savoir la SAS CRM 59.

Sur la demande de requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée

L'appelante expose avoir été recrutée au motif d'un accroissement temporaire d'activité, que l'employeur ne connaissait pas à cette époque d'activité exceptionnelle, que les campagnes de « phoning » font partie de son activité normale, que la pièce produite par l'employeur fait apparaître le relevé de charges d'août 2017 à février 2018, et fait apparaître un pic d'appel en décembre ce qui ne justifie pas de l'accroissement allégué.

L'intimée explique que le contrat et ses avenants font apparaître le motif de l'accroissement temporaire d'activité, que si elle répond à des appels d'offre pour des missions de trois ans, elle connaît en outre des pics d'activités liés à des campagnes ponctuelles, qui ne correspondent pas à son activité ponctuelle, qu'elle a connu une augmentation du nombre d'appels à compter du mois d'août 2017 en régression à partir du mois de janvier 2018.

Sur ce, en vertu de l'article L.1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

L'article L1242-2, 2°)du code du travail, dans sa version applicable au litige, sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : ['] accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

En cas de litige sur le motif du recours, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat à durée déterminée, en l'espèce de l'accroissement temporaire de l'activité allégué.

Il n'est pas contesté que le contrat du 28/08/2017 et les avenants de renouvellement du 26/09/2017 et du 20/12/2017 font état d'un accroissement temporaire d'activité .

Toutefois le document, quasi illisible, produit par l'employeur de la « cellule planification » porte sur la période de septembre 2017 à février 2018. Or, l'examen de cette seule période est insuffisant à établir le surcroît temporaire d'activité, en l'absence de comparaison avec les exercices précédents, la période de fin d'année favorisant de plus la proposition d'opérations commerciales par les différents opérateurs de téléphonie. La preuve du surcroît temporaire d'activité n'est pas rapportée. La relation de travail doit donc être requalifiée en contrat à durée indéterminée, étant précisé que l'appelante ne tire pas toutes les conséquences qu'implique cette requalification. La relation de travail est requalifiée en contrat à durée indéterminée, par application de l'article L. 1245-1 du code du travail. Le jugement est infirmé.

Sur la démission

L'appelante fait valoir que sa démission s'analyse en réalité en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, en raison de sa correspondance du 13/03/2018 par laquelle elle dénonce ses conditions de travail.

L'intimée indique que la démission est claire et non équivoque, que le courrier dénonçant ses prétendues conditions de travail lui a été adressée plus d'un mois et demi après sa lettre, et après des demandes de son employeur en remboursement de trop-perçu, que la salariée a imaginé remettre en cause sa démission, qu'elle ne produit aucune pièce justificative, que les deux attestations produites sont fausses et en concernent pas la salariée.

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

La lettre de démission de la salariée du 27/01/2018 ne comporte aucune mention permettant de caractériser une dimension équivoque. Il n'est pas plus justifié de circonstances antérieures permettant de mettre en question le caractère non équivoque de la démission. Toutefois, la correspondance du 13/03/2018, qui a été adressée un mois et demi après la lettre initiale de démission, ce qui apparaît tardif, fait suite à deux lettres de mise en demeure de l'employeur (22/02/2018 et 12/03/2018) afférentes à la restitution d'un badge d'accès, d'un casque, et à la restitution d'un trop perçu de 281,37 €, ces circonstances contemporaines de la rupture permettant d'en déduire le caractère équivoque. Il convient d'examiner les griefs de la salariée.

La lettre du 13/03/2018 fait état d'une démission forcée par les conditions de travail infligées par l'employeur : absence de visite médical en dépit d'une situation de handicap, conditions de travail « inhumaines (pression du supérieur, rythme exigé insoutenable, horaires 10h/20h insoutenables durant des mois, heures supplémentaires non payées sauf en fin de contrat), coupure repas non payée, tension continuelle, suppression facile des primes ».

-Sur le harcèlement moral

Dans le dispositif de ses conclusions, Mme [R] demande le paiement d'une indemnité pour harcèlement moral, aucun moyen n'étant clairement produit au soutien de cette argumentation, l'appelante se référant cependant à des « conditions de travail inhumaines », ce dont il se déduit qu'elle invoque des faits de harcèlement moral.

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il appartient au juge de se prononcer sur l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral.

Le juge ne doit pas seulement examiner chaque fait invoqué par le salarié de façon isolée mais également les analyser dans leur ensemble, c'est-à-dire les apprécier dans leur globalité, puisque des éléments, qui isolément paraissent insignifiants, peuvent une fois réunis, constituer une situation de harcèlement.

Si la preuve est libre en matière prud'homale, le salarié qui s'estime victime de harcèlement moral est tenu d'établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants qu'il présente au soutien de ses allégations afin de mettre en mesure la partie défenderesse de s'expliquer sur les agissements qui lui sont reprochés.

Mme [R] fait valoir sa correspondance du 13/03/2018.

Elle produit les éléments suivants au soutien de sa demande :

-une attestation de Mme [L] [D] attestant de conditions de travail invivables psychologiquement, de primes de ventes jamais reçues, de pressions et d'humiliations avec des recherches dans sa vie privée via les réseaux sociaux,

-une attestation de Mme [M] [J] indiquant avoir travailé chez B2S de septembre 2017 à janvier 2018, indiquant que les primes sont annulées pour un rien, que les heures supplémentaires ne sont pas payées, qu'il y a de la pression, que les visites médicales ne sont pas faites,

-une lettre de notification de reconnaissance de travailleur handicapé du 14/10/2015 et une attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales du 13/03/2018.

Cependant, examinés dans leur ensemble, ces éléments ne permettent pas de présumer de faits de harcèlement moral. Les attestations des collègues de Mme [R] sont générales, et ne comportent aucun fait afférent à Mme [R], et constituent le récit non circonstancié d'expériences propres à chacun des témoins. Il n'est donc pas possible de présumer de faits de harcèlement moral, étant ajouté que Mme [R] ne sollicite aucune somme au titre de l'exécution du contrat de travail (paiement d'heures supplémentaires ou de primes). La demande de paiement d'une indemnité au titre du harcèlement moral est rejetée.

-Sur la visite médicale et le manquement à l'obligation de sécurité de résultat.

L'appelante fait valoir, qu'elle n'a pas bénéficié de visite d'information et de prévention, malgré ses multiples demandes, l'employeur ayant ignoré sa situation de handicap.

L'intimée explique avoir réalisé les démarches utiles pour que la salariée bénéficie de la visite d'information et de prévention, que la salariée a été convoquée et ne s'est pas rendue à la visite.

Sur ce, en vertu de l'article R4624-10 du code du travail, tout travailleur bénéficie d'une visite d'information et de prévention, réalisée par l'un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa de l'article L. 4624-1 dans un délai qui n'excède pas trois mois à compter de la prise effective du poste de travail.

En vertu de l'article R1221-2, 5°) du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, au moyen de la déclaration préalable à l'embauche, l'employeur accomplit les déclarations et demandes suivantes : ['] la demande de visite d'information et de prévention prévue au deuxième alinéa de l'article L. 4624-1 du présent code ou la demande d'examen médical d'aptitude à l'embauche prévu à l'article L. 4624-2 du présent code, ou, s'il s'agit d'un salarié agricole, à l'article R. 717-14 du code rural et de la pêche maritime [...] ».

L'employeur verse la déclaration préalable à l'embauche mentionnant notamment dans les formalités enregistrées « médecin du travail » et précisant « ['] les informations communiquées seront transmises de manière automatiques aux partenaires concernés[...] ».

L'employeur est tenu en vertu de l'article L4121-1 du code du travail de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Le dispositif de déclaration résultant de l'article R1221-2 précité ne dispense pas l'employeur de s'assurer de l'effectivité de la mise en place de la visite d'information et de prévention.

Toutefois, il n'est pas établi que l'employeur a délibérément manqué à ses obligations réglementaires, le défaut de convocation à la visite d'information et de prévention pouvant également résulter d'une négligence du service de santé au travail. Cette négligence est insuffisante à caractériser un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité, étant ajouté que Mme [R] ne justifie pas l'avoir informé de sa reconnaissance de travailleur handicapé. Enfin, Mme [R] ne justifie pas plus du préjudice résultant du défaut de visite d'information et de prévention.

Il s'ensuit que le seul grief établi n'est pas suffisamment grave pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. La rupture doit donc être qualifiée de démission. Les demandes indemnitaires sont rejetées. Le jugement est confirmé.

Sur la demande reconventionnelle

L'appelante indique avoir restitué les objets réclamés, et sollicite que soit rejetée la demande de remboursement.

L'intimée demande la restitution de la somme trop-perçue de 281,37 €, le solde de tout compte faisant apparaître une somme négative, outre la restitution du matériel de l'entreprise (badge et casque).

En vertu de l'article 1302 du code civil, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

L'employeur invoque un reçu pour solde de tout compte faisant état d'un solde négatif de -281,37 €. Toutefois aucune explication n'est donnée quant aux mentions figurant au reçu, qui n'a pas été signé par la salariée, concernant en particulier le « débit/crédit d'heures » pour un montant de 401,13 euros bruts, ou encore les « retenues E/S » pour la somme de -195,45 €. Faute de ces précisions, l'employeur ne prouve pas l'obligation dont il réclame le paiement. La demande est rejetée. Le jugement est infirmé.

Mme [R] indique avoir restitué le matériel réclamé, qu'elle reconnaît donc avoir reçu . Elle ne produit aucun des justificatifs qu'elle invoque dans ses écritures. Il convient donc de confirmer le jugement, une astreinte n'apparaissant toutefois pas nécessaire, le jugement étant infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Les dispositions de première instance étant infirmées, la SAS CRM 59 qui est partie perdante supporte les dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, Mme [R] bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale, les dispositions de première instance étant infirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne les dispositions sur la requalification du contrat de travail, la restitution du trop-perçu, l'astreinte, les dépens et les frais irrépétibles,

Infirme le jugement de ces chefs,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Requalifie la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée,

Déboute la SAS CRM 59 de sa demande en paiement de la somme de 281,37 €,

Dit n'y a avoir lieu à astreinte s'agissant de l'obligation de restitution d'un casque et d'un badge par Mme [S] [R],

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS CRM 59 aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

Gaetan DELETTREZ

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 20/01048
Date de la décision : 16/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-16;20.01048 ?
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