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15/12/2022 | FRANCE | N°20/04281

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 15 décembre 2022, 20/04281


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 15/12/2022





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N° de MINUTE :

N° RG 20/04281 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TH6O



Jugement (N° 19/01327)

rendu le 27 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANT



Monsieur [Z] [O] [V]

né le 08 juillet 2000 à [Localité 3] (Angola)

de nationalité angolaise

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]



bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 59178/002/20/08905 du 17/11/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai



représenté par Me Eurielle Rivière, avocat au barreau de Lille, avo...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 15/12/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/04281 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TH6O

Jugement (N° 19/01327)

rendu le 27 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANT

Monsieur [Z] [O] [V]

né le 08 juillet 2000 à [Localité 3] (Angola)

de nationalité angolaise

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 59178/002/20/08905 du 17/11/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai

représenté par Me Eurielle Rivière, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉ

Monsieur le procureur général près la cour d'appel de Douai

représenté par Monsieur Olivier Declerck, substitué général

DÉBATS à l'audience publique du 06 octobre 2022 tenue par Bruno Poupet magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022 après prorogation du délibéré en date du 1er décembre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 mars 2022

****

EXPOSÉ DU LITIGE

L'article 21-12 du code civil dispose notamment que l'enfant qui, depuis au moins trois années, est confié au service de l'aide sociale à l'enfance peut, jusqu'à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu'il réclame la qualité de Français, pourvu qu'à l'époque de sa déclaration il réside en France.

L'article 26 du même code, dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2020, ajoute que les déclarations de cet ordre sont reçues par le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal d'instance ou par le consul et qu'il en est délivré récépissé après remise des pièces nécessaires à la preuve de leur recevabilité.

M. [Z] [O] [V], né le 8 juillet 2000 à [Localité 3] (Angola) et confié à l'aide sociale à l'enfance du Nord depuis le 25 avril 2014, a procédé le 4 juillet 2018 à la déclaration prévue par l'article 21-12 du code civil auprès du directeur des services du greffe du tribunal d'instance de Roubaix, lequel a refusé de la recevoir, et a confirmé ce refus par courrier du 10 juillet suivant à son conseil, au motif que l'intéressé n'avait « aucun élément d'identité, d'état civil'».

M. [O] [V] a obtenu ultérieurement, le 11 mars 2019, un jugement par lequel le tribunal de grande instance de Lille a dit :

- qu'il était né le 8 juillet 2000 à [Localité 3] (Angola), de sexe masculin, d'[N] [O] [V] et de [I] [Y],

- que le dispositif de ce jugement tiendrait lieu d'acte de naissance pour l'intéressé et serait transcrit sur les registres se trouvant au Centre central d'état civil à [Localité 4].

Cette transcription est intervenue le 6 juin 2019.

Parallèlement et par acte du 7 février 2019, M. [O] [V] a fait assigner le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lille devant ledit tribunal aux fins de voir, sur le fondement de l'article 21-12 du code civil :

- dire qu'il est né le 8 juillet 2000 à [Localité 3] en Angola, de sexe masculin et de nationalité française,

- ordonner l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par lui le 4 juillet 2018 par devant le greffier en chef du tribunal d'instance de Lille,

- laisser les frais et dépens à la charge du Trésor public, comme en matière d'aide juridictionnelle.

Par jugement du 27 mars 2020, le tribunal a principalement :

- dit que compte tenu du jugement rendu le 11 mars 2019, il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande de déclaration judiciaire de la naissance d'[Z] [O] [V],

- constaté que ce dernier n'avait pas souscrit de déclaration de nationalité française en son nom,

- dit qu'il n'était pas de nationalité française,

- ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil,

- condamné M. [Z] [O] [V] aux dépens.

M. [O] [V] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 février 2022, demande à la cour de l'infirmer et de :

- « dire que le 8 juillet 2000 à [Localité 3] en Angola est né [O] [V] [Z], de sexe masculin et de nationalité française »,

- ordonner l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 4 juillet 2018 par devant le greffier en chef du tribunal d'instance de Lille,

- laisser les frais et dépens à la charge du trésor public, comme en matière d'aide juridictionnelle.

Par ses dernières conclusions remises le 8 mars 2022, le procureur général près la cour d'appel de Douai demande à la cour :

- de constater que les conditions de l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées et de dire que la procédure est régulière,

- à titre principal, de confirmer le jugement et de dire que M. [O] [V] n'a pas souscrit de déclaration acquisitive de nationalité française fondée sur l'article 21-12 du code civil à la date du 4 juillet 2018,

- à titre subsidiaire, de confirmer le jugement et de dire que si une déclaration acquisitive de nationalité française fondée sur l'article 21-12 du code civil avait été souscrite à la date du 4 juillet 2018, les conditions de son enregistrement n'étaient pas réunies à cette date et doit être refusée.

en tout état de cause,

- de rejeter toutes les demandes de M. [O] [V],

- de dire qu'il n'est pas de nationalité française,

- d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour constate que les formalités prévues par l'article 1043 du code de procédure civile ont été remplies et que la procédure est régulière.

Sur la demande de M. [Z] [O] [V] tendant à ce qu'il soit dit qu'il est né le 8 juillet 2000 à [Localité 3] en Angola

C'est à juste titre que le tribunal a jugé qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à cette demande à laquelle il avait déjà été fait droit par le jugement du 11 mars 2019, régulièrement transcrit.

Sur la demande tendant à ce que soit ordonné l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 4 juillet 2018 par devant le greffier en chef du tribunal d'instance de Lille

Il apparaît que c'est par l'effet d'une erreur matérielle, qu'il convient de corriger, que l'appelant mentionne dans cette demande le tribunal d'instance de Lille puisqu'il ressort de ses conclusions et de ses pièces qu'il s'agit d'une déclaration faite au tribunal d'instance de Roubaix.

L'article 16 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, dans sa version en vigueur à la date de la déclaration dont se prévaut l'appelant, dispose que pour souscrire la déclaration prévue à l'article 21-12 précité, le déclarant doit fournir diverses pièces qui sont énumérées dont, en premier lieu, l'extrait de son acte de naissance.

Il n'est pas contesté que ni un extrait d'acte de naissance ni aucun document justifiant de l'identité de M. [O] [V] n'était joint à sa déclaration du 4 juillet 2018, de sorte que le refus du directeur de greffe du tribunal d'instance de Roubaix de l'enregistrer était légitime.

L'appelant argue toutefois de l'impossibilité où il se trouvait de produire un extrait d'acte de naissance.

Il verse aux débats, à cet égard, les copies de lettres dont il dit qu'elles sont restées sans réponse, à savoir :

- des lettres adressées le 6 juin 2018 par l'association de protection de l'enfance à laquelle il était confié à l'ambassade de France en Angola et au ministère des affaires étrangères d'Angola aux fins d'obtenir les informations nécessaires, évoquant des démarches antérieures effectuées par le département du Nord et demeurées vaines,

- plusieurs lettres effectivement adressées aux mêmes fins par le département du Nord à la mairie de [Localité 3] et au consulat général d'Angola à [Localité 5] les 27 janvier 2015, 31 mars 2016 et 14 septembre 2016, insistant sur l'urgence d'obtenir les documents demandés,

ce dont il résulte que des démarches ont été faites en temps voulu aux fins d'établir son état civil.

L'impossibilité alléguée est confirmée par le prononcé du jugement supplétif d'acte de naissance rendu par le tribunal de grande instance de Lille le 11 mars 2019 dès lors qu'il est constant que pour obtenir un tel jugement, le demandeur doit établir la réalité de la circonstance qui ne lui permet pas de disposer d'un acte de l'état civil.

M. [O] [V] rappelle à bon droit qu'en raison de son caractère déclaratif, le jugement supplétif d'acte de naissance, même s'il est prononcé postérieurement à la majorité de l'intéressé, établit l'état civil de l'enfant depuis sa naissance.

L'appelant justifie donc de son identité. Il démontre qu'au 4 juillet 2018, il était encore mineur et, puisqu'il n'est pas discuté qu'il était alors confié aux services de l'aide sociale à l'enfance depuis plus de trois ans et résidait en France, remplissait les conditions pour faire la déclaration prévue par l'article 21-12 du code civil.

Il ne peut être contesté qu'il a procédé à cette déclaration le 4 juillet 2018 et, dès lors qu'il démontre l'impossibilité, admise par une décision de justice non contestée, où il s'est trouvé de produire la pièce dont l'absence, seule, a empêché l'enregistrement de celle-ci et la délivrance d'un récépissé, absence que pallie désormais le jugement supplétif, il y a lieu de faire droit à sa demande tendant à cet enregistrement.

Il convient, en conséquence, de laisser les dépens à la charge du Trésor Public.

PAR CES MOTIFS

La cour

constate que les formalités prévues par l'article 1043 du code de procédure civile ont été remplies et que la procédure est régulière,

infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

ordonne l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par M. [Z] [O] [V] le 4 juillet 2018 par devant le directeur des services de greffe du tribunal d'instance de Roubaix,

ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

dit que les dépens sont à la charge du Trésor Public.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 20/04281
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;20.04281 ?
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