La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2022 | FRANCE | N°20/04984

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 01 décembre 2022, 20/04984


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 01/12/2022





****





N° de MINUTE :

N° RG 20/04984 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TKF6



Jugement (N° 19/03161)

rendu le 06 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANT



Monsieur [E] [P]

né le 19 décembre 1964 à [Localité 2]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



représentÃ

© par Me Quentin Leclerc-Lemaître, avocat au barreau de Lille, avocat constitué





INTIMÉE



Madame [L] [X] [Z]

née le 30 janvier 1959 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 6]



représentée par Me Murielle Fontaine-Chabb...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 01/12/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/04984 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TKF6

Jugement (N° 19/03161)

rendu le 06 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANT

Monsieur [E] [P]

né le 19 décembre 1964 à [Localité 2]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Quentin Leclerc-Lemaître, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

Madame [L] [X] [Z]

née le 30 janvier 1959 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Murielle Fontaine-Chabbert, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 1er septembre 2022 tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022 après prorogation du délibéré en date du 03 novembre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 07 juillet 2022

****

M. [E] [P] et Mme [L] [X] [Z] ont vécu en concubinage du début de l'année 2016 à la fin du printemps 2018.

Courant novembre 2017, M. [P] a financé l'acquisition d'un véhicule de marque Mercedes modèle 350 SLS immatriculé [Immatriculation 4]. Le certificat de cession du 17 novembre 2017 a été établi entre le vendeur et Mme [Z] et la carte grise édictée au nom de cette dernière. Suite à la séparation du couple, Mme [Z] a repris le véhicule qu'elle a revendu au garage Thorez le 10 avril 2018.

Soutenant être le propriétaire du véhicule, M. [P] a déposé plainte contre son ancienne compagne le 20 avril 2018 pour vol puis, après mises en demeure infructueuse des 14 avril 2018 et 28 février 2019 d'avoir à restituer le véhicule, il a fait assigner Mme [Z], suivant exploit délivré le 11 avril 2019, aux fins d'obtenir la restitution du véhicule sous astreinte ou, à défaut, le montant correspondant à la valeur du véhicule.

Par jugement du 6 novembre 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Lille a débouté M. [P] de l'ensemble de ses demandes et condamné celui-ci à payer à Mme [Z] la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice moral, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

M. [P] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 5 juillet 2022, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et en conséquence, statuant à nouveau, de condamner Mme [L] [X] [Z] à lui payer la somme de 16 750 euros correspondant à la moitié de la valeur du véhicule au moment de sa soustraction, outre la moitié de la somme de 33 euros par jour (1/1000 euros de la valeur du véhicule) à titre d'indemnité d'occupation du véhicule à compter du 10 avril 2018 et ce, jusqu'au jour du jugement de première instance, soit un total de 9 455 euros, en tout état de cause la débouter de ses demandes reconventionnelles et juger que chaque partie gardera à sa charge ses propres frais dépens pour l'ensemble des procédures de première instance et d'appel.

Il soutient essentiellement que la propriété du véhicule Mercedes immatriculé [Immatriculation 4] est indivise dès lors que les biens acquis lors du concubinage bénéficient d'une présomption d'indivision et qu'il s'agit d'un meuble corporel dont la propriété ne résulte d'aucun titre mais d'un ensemble d'éléments de preuve. A cet égard, il fait valoir que c'est lui-même qui en a assumé l'intégralité du financement, que la carte grise n'a été établie au nom de sa compagne que pour des raisons pratiques mais que Mme [X] [Z] ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle en aurait eu la jouissance exclusive. Il ajoute que celle-ci ne démontre ni que le véhicule lui aurait été donné par son compagnon dans une intention libérale, ni que cet achat aurait été une contrepartie à sa participation aux frais de la vie commune.

Il fait valoir que la possession du véhicule dont tente de se prévaloir Mme [X] [Z] pour établir une présomption de propriété à son profit en application de l'article 2276 du code civil n'a été ni de bonne foi ni paisible dès lors qu'après qu'elle lui eût de mauvaise foi dérobé les clefs du véhicule en quittant le domicile, il a immédiatement déposé plainte pour vol à son encontre, que les attestations qu'elle produit sont de circonstance et enfin, que Mme [X] [Z] n'a pas hésité à vendre le véhicule litigieux dès le 10 avril 2018, soit le jour même de son départ du logement conjugal, pour un prix anormalement bas de 18 000 euros au regard de sa cotation Argus de 36 057 euros.

Il ajoute que la restitution du véhicule étant impossible par la faute de Mme [X] [Z], laquelle n'entend pas justifier des modalités et du prix de la cession du véhicule au profit du garage Thorez, celle-ci doit en conséquence être condamnée sur le fondement de l'article 1240 du code civil à lui payer la moitié de la valeur du véhicule, outre une indemnité de jouissance de celui-ci.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 6 juillet 2022, Mme [Z] demande à la cour de débouter M. [E] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions, de confirmer purement et simplement et en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille et, y ajoutant, de condamner M. [E] [P] à lui payer la somme complémentaire de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil, en réparation du préjudice subi pour procédure d'appel manifestement abusive et poursuite d'acharnement procédural, le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme de 4 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour d'appel estimait y avoir lieu à réformation du jugement rendu le 6 novembre 2020 par reconnaissance d'une propriété indivise sur le véhicule litigieux, elle demande à la cour de rejeter la demande de paiement formée par M. [E] [P] de la moitié de la valeur vénale du véhicule qu'il estime à 33 500 euros et de retenir le seul montant de la vente à hauteur de 18 000 euros, soit représentant par moitié la somme de 9 000 euros, de rejeter la demande de condamnation à titre d'indemnité d'occupation formée par M. [E] [P] et, à titre extrêmement subsidiaire, de ramener toutes les prétentions de celui-ci à de plus justes proportions et lui accorder les plus larges délais de remboursement et enfin, de dire que chaque partie gardera à sa charge ses propres frais et dépens pour l'ensemble des procédures de première instance et d'appel.

Elle fait essentiellement valoir que M. [P], qui a abandonné en cause d'appel ses prétentions à la propriété exclusive du bien litigieux pour invoquer une indivision, ne critique le jugement entrepris qu'en équité alors que c'est par une juste appréciation de la situation des parties que le tribunal a estimé que la preuve d'une intention libérale de M. [P] à son profit était rapportée et qu'elle justifiait au surplus d'une possession du véhicule litigieux non équivoque et de bonne foi, outre qu'il n'était démontré aucune faute à son encontre.

Elle soutient ainsi que la preuve de l'intention libérale de M. [P] à son profit est constituée par le fait que le contrat de cession et la carte grise aient été établis à son nom, qu'elle ait souscrit l'assurance du véhicule et effectué des travaux sur celui-ci, ainsi que par de nombreux témoignages attestant de la volonté de son compagnon de la gratifier pour des raisons sentimentales.

Soutenant qu'en l'absence de présomption d'indivision entre concubins, le concubin qui est en possession d'un meuble corporel est présumé en être propriétaire en application de l'article 2276 du code civil, elle se prévaut d'une présomption de propriété du véhicule du fait d'une possession paisible, publique et non équivoque. Elle souligne que le paiement du prix par M. [P] ne suffit pas à renverser cette présomption dès lors que celui qui a payé peut parfaitement avoir donné le bien à celui qui le détient. Elle ajoute que si la carte grise ne constitue pas un titre de propriété, les mentions qui y figurent constituent un élément d'appréciation important alors que M. [P] ne peut se prévaloir d'une facture établie à son nom ou d'un certificat d'immatriculation établi au nom des deux concubins et qu'il ne rapporte ni la preuve de ce qu'elle n'aurait été qu'une utilisatrice précaire du véhicule, ni de ce que sa possession aurait été de mauvaise foi.

A titre subsidiaire, si la propriété indivise du véhicule litigieux devait être retenue par la cour, Mme [X] [Z] conclut à la modération des sommes réclamées par M. [P] alors qu'il ne rapporte pas la preuve du prix par lui payé pour le véhicule et qu'elle-même a revendu celui-ci au garage Thorez pour un montant de 18 000 euros au regard de son état réel, contrairement à la cotation Argus invoquée par M. [P].

Elle ajoute que M. [P] ne saurait prétendre à l'indemnisation de son prétendu préjudice de jouissance dès lors qu'il reconnaît lui-même que le véhicule n'était destiné qu'à une utilisation de loisir le week-end et qu'il a contribué à l'immobilisation du véhicule par sa plainte pénale, le véhicule ayant été mis sous scellés du 23 avril 2018 au 18 février 2019, date à laquelle il a finalement été rendu au garage Thorez sur autorisation du procureur de la République qui a classé sans suite la plainte pour vol déposée par M. [P].

Elle demande enfin la confirmation du jugement entrepris en ce qui concerne l'indemnisation du préjudice moral qu'elle a subi du fait des fautes et de l'acharnement procédural de M. [P] à son endroit, outre sa condamnation à des dommages et intérêts pour appel abusif.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il sera référé à leurs dernières conclusions écrites par application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Liminaire

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes de 'dire et juger' formulées par les parties ne pouvant être considérées comme des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile, mais s'analysant en réalité en des moyens invoqués par les parties à l'appui de leurs prétentions, la cour les traitera comme tels, n'étant tenue que de statuer sur les prétentions énoncées par les parties dans le dispositif de leurs dernières conclusions.

Sur la propriété du véhicule Mercedes

Aux termes de l'article 543 du code civil, on peut avoir sur les biens, ou un droit de propriété, ou un simple droit de jouissance, ou seulement des services fonciers à prétendre.

L'article 544 de ce code ajoute que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

L'article 711 dudit code précise que la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l'effet des obligations.

En vertu des articles 893 et 894, la libéralité est définie comme l'acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d'une autre personne, par donation entre vifs ou par testament, la donation entre vifs étant un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte.

En outre, il n'existe pas, en l'état du droit, de présomption de propriété indivise des biens acquis par les concubins pendant la vie commune et il leur appartient, dès lors, de rapporter la preuve du caractère propre ou indivis d'un tel bien conformément au droit commun de la preuve.

A cet égard, l'article 2276 dudit code dispose qu'en fait de meubles, la possession vaut titre. Néanmoins, celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la revendiquer pendant trois ans à compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve ; sauf à celui-ci son recours contre celui duquel il la tient.

Le possesseur de bonne foi d'un bien meuble est donc présumé en être le propriétaire. La bonne foi, qui est présumée, sauf preuve contraire, s'entend de la croyance pleine et entière où s'est trouvé le possesseur, au moment de son acquisition des droits de son auteur, à la propriété des biens qu'il lui a transmis.

M. [P], qui revendique la propriété indivise avec son ex-compagne du véhicule de marque Mercedes modèle 350 SLS immatriculé [Immatriculation 4] après en avoir revendiqué la propriété exclusive en première instance, ne justifie d'aucune facture d'achat du véhicule établie à son nom ou au nom des deux concubins et ne produit qu'un justificatif de paiement, d'un montant de 15 000 euros, correspondant à l'avance qu'il aurait payée par chèque n° 7387875 du 22 novembre 2017 tiré sur le compte bancaire de sa société Deule TP et inscrit en débit de son compte courant d'associé, le solde du prix de vente de 18 500 euros n'étant toujours pas payé au 1er mars 2019, suivant ses propres déclarations aux services de police.

Le certificat de cession du véhicule, en date du 17 novembre 2017, porte la mention et la signature de Mme [L] [X] en qualité de nouvelle propriétaire du véhicule et la carte grise du véhicule a été établie après la cession au nom de Mme [L] [X] en qualité de propriétaire du véhicule alors que ce document aurait pu tout à fait mentionner les noms des deux concubins en qualité de co-propriétaires du véhicule ou celui de M. [P] en qualité de propriétaire et celui de Mme [X] en qualité d'utilisatrice, sans que cela pose de difficulté particulière au moment des contrôles routiers, contrairement à ce que tente de soutenir M. [P].

Lors de son audition devant les services de police dans le cadre de la plainte pour vol qu'il avait déposée à l'encontre de Mme [L] [X], classée sans suite par M. le procureur de la République pour infraction insuffisamment caractérisée, M. [P] a indiqué qu'il avait payé le véhicule et mis le certificat d'immatriculation au nom de sa concubine pour des raisons administratives, ajoutant plus loin qu'il avait acheté le véhicule et fait la transaction pour Deule TP, payant avec un chèque au nom de sa société. Il produit également l'attestation d'un de ses amis, M. [D], qui indique lui avoir conseillé de mettre le véhicule au nom de sa compagne pour éviter d'avoir à payer la taxe sur les véhicules de société.

Il résulte par ailleurs des propres déclarations de M. [P] lors de son audition devant les services de police, ainsi que des témoignages qu'il verse aux débats que sa compagne utilisait le véhicule en semaine pour ses déplacements personnels et professionnels tandis qu'il utilisait son pick-up pour ses besoins professionnels et que le véhicule était utilisé par lui-même ou le couple les soirs et week-ends.

Si les témoins de M. [P] attestent qu'ils l'ont vu au volant du véhicule litigieux en soirée et le week-end et, pour certains, qu'il ne leur a jamais parlé du véhicule comme d'un cadeau fait à Mme [X] [Z], M. [Y] et M. [K] témoignent de ce que M. [P] leur aurait confié avoir mis la carte grise au nom de sa compagne 'pour des raisons sentimentales' selon le premier et 'pour lui prouver son engagement dans sa nouvelle vie de couple' selon le second, ajoutant qu'il 'avait confiance en cette personne, qui assurerait le véhicule afin de pouvoir circuler sereinement lors de ses déplacements sans lui.'

Cependant, peu importe le mobile invoqué, qu'il soit amoureux ou financier, il n'en reste pas moins que c'est de son propre chef que M. [P] a décidé de déclarer le véhicule comme étant celui de sa compagne.

Mme [X] [Z] produit, en ce qui la concerne, les témoignages concordants et dépositions devant les services de police d'amis et connaissances (M. et Mme [B], M. [V] [A], M. [J] [U], Mme [T] [R], M. [I] [G], Mme [F] [W], M. [H] [S] [O]) qui attestent tous avoir bénéficié, lors d'une soirée en fin d'année 2017 à la brasserie 'la Duchesse' à [Localité 6], d'une tournée au champagne payée par M. [P] pour fêter le nouveau véhicule qu'il affirmait avoir tout juste acquis pour l'offrir en cadeau à sa compagne, [L]. Certains attestent également avoir vu par la suite Mme [X] rouler avec le véhicule.

Outre l'établissement de la carte grise à son nom, il n'est pas contesté que Mme [X] assurait également le véhicule et il est justifié d'une facture de réparations du véhicule établie à son nom par le garage Mercedes-Benz de [Localité 5], en date du 30 novembre 2017, pour un montant de 1035,42 euros, démontrant que Mme [X] se comportait comme la propriétaire du véhicule.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, étant précisé que si la carte grise du véhicule ne constitue certes pas un titre de propriété du véhicule, elle représente néanmoins un indice sérieux de la propriété du bien, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que Mme [X] rapportait la preuve d'une possession en toute bonne foi dudit véhicule, financé par son conjoint qui souhaitait lui en faire un cadeau, raison pour laquelle elle avait été désignée en qualité de propriétaire sur la carte grise du véhicule et dans le certificat de cession, le seul paiement du prix par M. [P] ne pouvant suffire à établir le caractère précaire de la possession. La cour ajoute à ce titre que la plainte pour vol déposée par M. [P] dans le contexte conflictuel de la séparation du couple n'est pas plus de nature à établir le caractère précaire de la possession du véhicule par Mme [X] qui en avait eu libre disposition jusque-là.

En conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en ce que celle-ci a débouté M. [P] de ses demandes de restitution du prix d'achat et d'indemnisation de sa privation de jouissance et, y ajoutant, de débouter M. [P] de sa demande formulée en cause d'appel de restitution de la moitié de la valeur du véhicule.

Sur les demandes de dommages et intérêts de Mme [X] [Z]

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte de ce texte et de l'article 32-1 du code de procédure civile, qu'une partie ne peut engager sa responsabilité pour avoir exercé une action en justice ou s'être défendue que si l'exercice de son droit a dégénéré en abus. L'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'étant pas, en soi, constitutive d'une faute, l'abus ne peut se déduire du seul rejet des prétentions par le tribunal.

En l'espèce, il résulte des éléments aux débats qu'après la séparation du couple, M. [P] n'a eu de cesse que de réclamer avec insistance à Mme [X] la restitution du véhicule qu'il lui avait pourtant donné, allant jusqu'à enfoncer le portail de son lieu de travail avec son 4x4, embaucher un détective privé pour la surveiller, déposant plainte pour vol auprès des services de police pour ensuite, dès qu'il a eu connaissance de l'avis de classement sans suite de cette plainte pour infraction insuffisamment caractérisée, l'assigner au civil en restitution du véhicule ou de la valeur de celui-ci.

Son comportement harcelant, voire constitutif de dénonciation calomnieuse, est fautif et c'est à juste titre que le premier juge a estimé qu'il convenait de réparer le préjudice moral subi par Mme [X] du fait de celui-ci par l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 1 500 euros, la cour estimant justifié de condamner en outre M. [P] au paiement de la somme de 500 euros pour appel abusif compte tenu de sa mauvaise foi.

Sur les demandes accessoires

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [P] succombant en son appel sera tenu aux entiers dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. [E] [P] de sa demande en remboursement de la moitié de la valeur du véhicule de marque Mercedes modèle 350 SLS immatriculé [Immatriculation 4] ;

Le condamne à payer à Mme [L] [X] [Z] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires pour appel abusif ;

Le condamne aux entiers dépens d'appel.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 20/04984
Date de la décision : 01/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-01;20.04984 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award