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25/11/2022 | FRANCE | N°20/02396

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 25 novembre 2022, 20/02396


ARRÊT DU

25 Novembre 2022







N° 1663/22



N° RG 20/02396 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLHL



PL/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

20 Novembre 2020

(RG 18/01168 -section 4)






































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GROSSE :



aux avocats



le 25 Novembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [V] [S]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Alexandre BAREGE, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE :



S.A. SOPRA STERIA GROUP

[Adresse 6]

[L...

ARRÊT DU

25 Novembre 2022

N° 1663/22

N° RG 20/02396 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLHL

PL/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

20 Novembre 2020

(RG 18/01168 -section 4)

GROSSE :

aux avocats

le 25 Novembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [V] [S]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Alexandre BAREGE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A. SOPRA STERIA GROUP

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Jérôme POUGET, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS : à l'audience publique du 28 Septembre 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge LAWECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 09 Août 2022

EXPOSE DES FAITS

 

[V] [S] épouse [G] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 janvier 2008 en qualité d'en qualité d'ingénieur débutant, position 1.2, coefficient 100 par la société SOPRA STERIA GROUP.

A la date de son licenciement, elle occupait l'emploi d'ingénieur d'étude, position 2.2, coefficient 130 de la convention collective, percevait une rémunération mensuelle de 3080 euros bruts, augmentée d'une prime équivalente de treizième mois, et était assujettie à la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils. L'entreprise employait de façon habituelle au moins onze salariés.

Elle a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter du 9 décembre 2016. Dans le cadre de la visite médicale de reprise organisée le 1er septembre 2017, le médecin du travail a conclu à son inaptitude en ces termes : «inaptitude en un seul examen à son poste d'ingénieur d'études avec la direction d'une équipe et les conditions de travail et d'environnement chez Sopra ; capable d'exercer avec formation éventuelle une activité dans le domaine de ses compétences».

Le 13 octobre 2017, la société lui a proposé, au titre du reclassement, un poste de test-analyst-projet GCA-AUCHAN, proposition à laquelle les délégués du personnel avaient émis un avis favorable.

La salariée n'ayant pas donné suite à cette offre, la société lui a indiqué par courrier du 7 novembre 2017 que son silence valait refus de la proposition de poste et qu'elle n'avait pas identifié d'autres possibilités de reclassement conformes aux préconisations du médecin du travail.

[V] [S] a été convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 novembre 2017 à un entretien le 24 novembre 2017 en vue d'une mesure de licenciement pour motif personnel. A l'issue de cet entretien, son licenciement pour inaptitude définitive et impossibilité de reclassement lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 novembre 2017.

Par requête reçue le 29 novembre 2018, la salariée a saisi le Conseil de prud'hommes de Lille afin de faire constater l'illégitimité de son licenciement et d'obtenir le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

 

Par jugement en date du 20 novembre 2020, le conseil de prud'hommes l'a déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le 18 décembre 2020, [V] [S] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 9 août 2022 la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 28 septembre 2022.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 15 août 2021, [V] [S] sollicite de la Cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société à lui verser

- 7500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement à l'obligation de prévention et de sécurité

- 31297,20 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 9389,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 938,92 euros au titre des congés payés y afférents

- 2500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la remise tardive et erronée des documents de fin de contrat

- 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

les sommes dues devant porter intérêts à compter du jour de la demande en application de l'article 1231-7 du code civil,

et les intérêts devant donner lieu à capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil, du moment qu'ils sont dus pour une année entière.

 

L'appelante expose que la charge de la preuve d'un manquement de l'employeur à son obligation de prévention ne lui incombe pas, qu'elle a été confrontée à un stress majeur dans l'exécution de ses missions, qu'elle devait assurer l'encadrement d'une équipe de dix-huit personnes alors que dans les mois précédents son équipe était constituée de dix à douze personnes, là où un chargé de projet doit généralement encadrer sept à huit personnes, que ses collaborateurs étaient pour la majorité jeunes avec une autonomie très limitée, qu'il n'y a pas eu de réflexion sur l'organisation du travail et qu'aucune mesure n'a été mise en place pour lui permettre de travailler dans des conditions préservant son état de santé, que la société a manqué à ses obligations de prévention et de sécurité, qu'elle ne démontre pas qu'elle ait respecté les obligations qui s'imposaient à elle à la date à laquelle la salariée était présente dans les effectifs, que la production du document unique d'évaluation des risques ne permet pas de déterminer à quelle date il a été a été mis en place, qu'il ne contient aucune précision sur le nombre de collaborateurs devant être affectés dans une équipe encadrée par un chef de projet ni sur les mesures mises en place lorsqu'un collaborateur estime qu'il est en surcharge de travail, que l'absence de signalement par le médecin du travail d'une situation d'accident du travail ou de maladie professionnelle dans l'avis d'inaptitude ne signifie pas que l'inaptitude soit sans lien avec le travail, que celle-ci fait suite à un syndrome anxio-dépressif trouvant son origine dans une situation de souffrance au travail consécutive à une surcharge de travail et un manque de moyen confié à l'appelante pour assurer toutes ses missions, qu'elle est donc la conséquence d'un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée, en l'occurrence le manquement à l'obligation de prévention et de sécurité, que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, que la société a manqué à son obligation de reclassement, que la consultation des délégués du personnel a été viciée et doit donc être considérée comme inexistante, que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse pour ce motif également, que l'emploi proposé ne peut sérieusement être considéré comme étant aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, que le test analyst a pour mission de se comporter comme l'utilisateur final, qu'il doit tester un logiciel ou une solution informatique, que pour occuper ce poste, il n'est pas nécessaire d'être ingénieur, que l'intimée ne peut prétendre qu'elle était en droit de limiter géographiquement ses recherches, que rien ne l'autorisait à limiter unilatéralement le périmètre de l'obligation de reclassement, que l'appelante était disposée à envisager une mobilité géographique, que le fait qu'un poste unique ait été proposé n'est donc pas suffisant à caractériser le respect par la société de son obligation de reclassement, qu'il appartient à cette dernière de démontrer que le reclassement était réellement impossible à l'échelle de l'entreprise ou du groupe et qu'il n'existait pas d'autre poste compatible avec l'état de santé de l'appelante plus en adéquation avec celui qu'elle occupait précédemment, tout en tenant compte des conclusions du médecin du travail, qu'elle n'a pas retrouvé immédiatement un emploi, qu'elle a envisagé de se lancer dans une activité de traiteur puis a décidé de reprendre une formation pour apprendre un métier permettant de préserver l'humain, qu'elle produit aux débats les pièces justifiant de la réalité de son préjudice, qu'elle a dû entreprendre des démarches pour obtenir communication des documents de fin de contrat, que sans réponse de son employeur, elle a dû faire intervenir un conseil et engager des frais pour que ces documents lui soient remis, qu'elle n'en a été mise en possession que le 25 avril 2018 alors qu'ils auraient dû lui être délivrés dès la rupture de son contrat de travail.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 19 novembre 2021, la société SOPRA STERIA GROUP intimée sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris et la condamnation complémentaire de l'appelante à lui verser 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'intimée soutient qu'elle n'a commis aucun manquement à son obligation de prévention et de sécurité, qu'il appartient à la salariée d'établir le non-respect des obligations de l'employeur même au titre de l'obligation de sécurité, que l'appelante ne verse aux débats aucune pièce relative à cette prétendue absence de moyens nécessaires à l'exécution de ses tâches, que lors de la consultation des délégués du personnel, ces derniers n'ont émis aucune observation ou remarque sur un éventuel manquement de la société, qu'ils ont seulement souhaité des adaptations sur la mission proposée à l'appelante et les formations offertes, que le médecin du travail, pourtant informé de la situation de cette dernière, n'a pas jugé que la société ait manqué à son obligation de sécurité, que l'avis d'inaptitude ne vise pas une situation d'accident du travail ou de maladie professionnelle, que la société n'ayant pas fait l'objet d'alerte préalable, notamment des représentants du personnel ou de la médecine du travail, a respecté ses obligations de prévention légales, qu'en outre, elle délivre auprès de ses manageurs de nombreuses formations afin de les sensibiliser à la gestion des ressources humaines impliquant l'écoute et la résolution des problèmes des collaborateurs, que le licenciement est bien fondé, que l'appelante a été examinée par le médecin du travail qui l'a déclarée inapte en un seul examen, que la société l'a interrogé pour connaître les possibilités d'aménagement et les propositions de reclassement en demandant des précisions complémentaires, que le choix de privilégier un emploi géographique proche du domicile de la salariée correspond au respect par la société de ses obligations légales, que depuis le 1er janvier 2016, celle-ci réside à [Localité 4], que postérieurement à son licenciement les activités professionnelles exercées par cette dernière se sont situées soit à son domicile soit à [Localité 3], que le 20 septembre 2017, la société a convoqué les délégués du personnel pour les consulter sur les possibilités de reclassement de l'appelante, qu'ils ont tous exprimé un avis favorable sur la proposition de reclassement, que le médecin du travail n'a pas considéré que la proposition de reclassement adressée par la société ne respectait pas ses préconisations, que l'examen du référentiel métier et de l'offre de reclassement font apparaître la parfaite corrélation entre le poste proposé et les différentes activités d'un ingénieur d'étude, que l'appelante a choisi de ne pas répondre à cette proposition et a ainsi l'a refusée, qu'à titre subsidiaire, ayant une ancienneté de moins de dix ans au moment de son licenciement, elle ne justifie pas d'un préjudice à la hauteur de ses demandes, que l'article L1235-3 du code du travail prévoit une indemnisation comprise entre trois et neuf mois de salaire, que l'appelante percevant 3080 euros bruts par mois, l'indemnité compensatrice de préavis ne peut excéder 9240 euros bruts, qu'elle ne justifie pas non plus d'un préjudice au titre de la violation de l'obligation de sécurité et de la remise tardive des documents de fin de contrat de travail.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Attendu en application de l'article L4121-2 du code du travail qu'à l'appui des manquements allégués de son employeur à l'obligation de sécurité, qui seraient à l'origine de son inaptitude, l'appelante produit les avis d'arrêt de travail délivrés par le docteur [U] [T] pour la période du 9 décembre 2016 au 28 juillet 2017 ainsi que les ordonnances mentionnant les différents médicaments qui sont habituellement prescrits pour le traitement de dépressions majeures et de crises d'anxiété ; que ces arrêts de travail, selon les mentions portées par ce praticien sur les avis successifs, étaient consécutifs initialement à un surmenage professionnel, puis à un «Sd Ad» qu'il convient de traduire, selon toute apparence, par syndrome anxio-dépressif, complété le 31 janvier 2017 par un surmenage professionnel, ce dernier motif étant substitué le 10 février 2017 par une souffrance au travail, puis le 10 mars 207 par un «burn-out» et de nouveau par une souffrance au travail ; que l'appelante communique également les différentes factures émises en janvier, février et juin 2017 en paiement d'honoraires à la suite de la consultation d'une psychologue clinicienne ; qu'elle affirme enfin qu'elle ne disposait pas des moyens nécessaires en personnel puisque ses collaborateurs n'avaient pas d'expérience et qu'en outre elle devait encadrer une équipe de dix-huit personnes alors qu'un chef de projet n'en dirige habituellement que sept à huit ;

Attendu toutefois que la société souligne qu'elle n'a été destinataire d'aucune alerte préalable ; qu'elle communique son règlement intérieur, en vigueur à compter du 4 avril 2014, rappelant aux articles 3.4 et 3.5 l'obligation pour tout salarié d'avertir la direction de l'entreprise de toute situation de travail qui, selon lui, serait susceptible de présenter un danger grave ou imminent pour sa vie, sa santé ou celle d'autrui ainsi que l'autorisation de se retirer dans un tel cas ; qu'elle verse aux débats le document unique d'évaluation des risques professionnels contenant les rubriques «stress et risques psycho-sociaux» et «harcèlement» ; qu'y sont énumérés les mesures de prévention existant dans l'entreprise et en particulier pour la première, une surveillance médicale, un accès direct au médecin du travail, le maintien d'une hotline d'écoute PSY et l'existence d'une charte informatique rappelant la nécessité de veiller à préserver le droit au repos et l'équilibre entre la vie privée et l'activité professionnelle notamment ; que les différents documents uniques produits datent d'au moins de l'année 2015 puisque, parmi les risques de stress envisagés, figure la fusion-absorption des deux entreprises de services du numérique Sopra et Steria, devenue effective en janvier 2015 ; qu'en outre l'appelante communique les comptes rendus des réunions ordinaires du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des 16 septembre 2016, 6 octobre 2017 et 28 juin 2018 mentionnant la présentation de la mise à jour du document unique d'évaluation des risques professionnels pour les années 2016, 2017 et 2018; qu'elle produit enfin le curriculum vitae établi par l'appelante dans lequel celle-ci mentionne qu'en qualité de team leader, elle a piloté de mai 2012 à février 2014, en lien avec le chef de projet, une équipe de support composée de cinq à sept personnes, puis de mars 2014 à décembre 2016 une équipe de trois à quatre personnes sous la responsabilité d'un directeur de projet ; qu'au demeurant, l'annexe II de la convention collective, relative à la classification des ingénieurs et cadres, ne mentionne nullement le nombre de collaborateurs qu'un ingénieur occupant la position 2.2 et bénéficiant de ce fait du coefficient 130, est susceptible de superviser ; qu'en outre cette annexe précise que les ingénieurs d'études et de recherches appartenant à cette catégorie ne disposent d'aucune fonction de commandement ; qu'en conséquence les manquements allégués de la société à son obligation de sécurité ne sont pas établis ;

Attendu en application de l'article L1226-2 du code du travail, que l'avis d'inaptitude établi par le médecin du travail mentionne de façon vague les capacités subsistantes de l'appelante ; qu'à la demande de la société, ce praticien a apporté, le 11 septembre 2017, quelques précisions, selon lesquelles la salariée pouvait exercer une fonction, éventuellement après une formation, n'impliquant pas le management d'une équipe ; que le fait que la société ait recherché un poste dans la zone géographique où l'appelante était jusque-là employée et résidait depuis six années, en l'espèce la région de [Localité 5], ne peut lui être reproché, la similarité souhaitée par les dispositions légales précitées entre le précédent emploi et le poste envisagé au titre du reclassement, se référant également au lieu où doit être exécutée la prestation de travail ; que la note du 10 octobre 2017 valant procès-verbal est conforme aux dispositions légales précitées qui n'imposent pas à l'employeur de recueillir l'avis des délégués du personnel collectivement au cours d'une réunion ; qu'elle relate le résultat des consultations effectuées les 25 et 27 septembre 2017, 3, 4 et 5 octobre 2017 sur la proposition de reclassement de la salariée, après connaissance de l'avis du médecin du travail, des précisons apportées ultérieurement par celui-ci et du poste envisagé ; qu'elle fait état des observations émises par les délégués sur la formation proposée à la salariée et des corrections apportées ; que la note conclut à l'émission d'un avis favorable par l'ensemble des délégués consultés; qu'elle a été adressée par courriel le 13 octobre 2017 à chacun de ceux dont l'avis avait été requis et recueilli individuellement ; qu'il importe peu que le nombre de délégués qui se sont exprimés soit supérieur au nombre de sièges de délégués titulaires, des délégués suppléants ayant également participé à la consultation ; que par courriel du 19 octobre 2017, le poste de test-analyst proposé au titre du reclassement de l'appelante a été soumis à l'avis du médecin du travail qui n'a émis aucune observation ; que selon la fiche de poste, les taches principales de l'appelante consistaient en l'exécution de cas de tests, l'identification et l'analyse des dysfonctionnements, le report de l'avancement des itérations de tests, une formation de trois jours intitulée «e media solution specifications» étant en outre prévue ; que l'appelante ne peut objecter que cet emploi n'était pas comparable à celui qu'elle occupait du fait qu'il n'impliquait pas l'encadrement de collaborateurs alors que le médecin du travail l'avait déclarée inapte à la direction d'une équipe ; que les différentes responsabilités qui lui étaient attribuées dans le cadre du poste de reclassement étaient conformes aux missions relevant d'un ingénieur classé en catégorie 2.2 et décrites à l'annexe II de la convention collective ; que le 13 octobre 2017 la société a proposé à l'appelante l'emploi de test analyst, accompagné d'une fiche de poste et d'un descriptif des formations à suivre ; que la salariée n'a donné aucune suite à cette proposition ; que conformément à l'article L1226-2-1 alinéa 3 du code du travail, en vigueur à la date du licenciement, l'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2 dudit code, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail ; qu'en proposant à l'appelante dans les conditions précédemment rappelées le poste de test-analyst, caractérisation matérielle d'un emploi, la société a exécuté loyalement son obligation de reclassement ; qu'il s'ensuit que le licenciement est bien fondé ;

Attendu sur la remise tardive des documents sociaux, qu'il n'est pas contesté qu'à la date du licenciement, le 30 novembre 2017, la société n'a pas tenu à la disposition de l'appelante l'attestation Pôle Emploi ; que pour l'obtenir, la salariée a dû effectuer des démarches auprès de son employeur à compter du 15 décembre 2017 ; que l'attestation qui a été finalement établie le 25 décembre 2017, soit près d'un mois après la rupture de la relation de travail, ne lui a été remise que le 3 janvier 2018 ; qu'elle comportait en outre de multiples erreurs sur les salaires perçus qui n'ont donné lieu à l'établissement d'une nouvelle attestation conforme à la situation de la salariée que le 25 avril 2018 ; que la perception des allocations d'aide au retour à emploi en a été retardée, les services de Pôle Emploi ayant dû adresser à l'appelante cinq courriers successifs relatifs à la date d'ouverture de ses droits, les 11 et 23 janvier, 5 et 8 février, 30 avril 2018, et ayant commis, du fait des imprécisions, des erreurs dans le calcul des allocations conduisant à un trop-perçu d'un montant de 1181,94 euros dont le remboursement a été exigé le 30 avril 2018 ; que les retards apportés par la société et les erreurs commises par celle-ci qui ont conduit à une multiplication des démarches de la salariée, lui ont donc occasionné un préjudice qu'il convient d'évaluer à 2000 euros ;

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a dû exposer tant devant le conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

REFORME le jugement déféré,

CONDAMNE la société SOPRA STERIA GROUP à verser à [V] [S] épouse [G] 2000 euros en réparation du préjudice résultant de la remise tardive d'une attestation Pôle Emploi,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris à l'exception des dépens,

 

FAIT MASSE des dépens,

 

DIT qu'ils seront supportés par moitié par chaque partie.

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

LE PRÉSIDENT

P. LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 20/02396
Date de la décision : 25/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-25;20.02396 ?
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