La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/2022 | FRANCE | N°21/00184

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 30 septembre 2022, 21/00184


ARRÊT DU

30 Septembre 2022







N° 1262/22



N° RG 21/00184 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TN7U



PL/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

21 Décembre 2020

(RG F19/00036 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 30 Septembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [D] [U] épouse [V]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Antoine BIGHINATTI, avocat au barreau de VALENCIENNES





INTIMÉE :



S.A.S. BAST...

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1262/22

N° RG 21/00184 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TN7U

PL/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

21 Décembre 2020

(RG F19/00036 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [D] [U] épouse [V]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Antoine BIGHINATTI, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉE :

S.A.S. BASTIDE VICTORIA

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Armand AUDEGOND, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS : à l'audience publique du 28 Juin 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRESIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 24 mai 2022

EXPOSE DES FAITS

 

[D] [U] épouse [V] a été embauchée par la société BASTIDE VICTORIA par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 31 juillet 2017 en qualité de serveur-employé polyvalent, niveau 2 échelon 2 de la convention collective des hôtels, cafés, restaurants, moyennant une rémunération mensuelle brute de base de 1544 euros augmentée d'avantages en nature selon les usages en vigueur dans la profession.

Après avoir fait l'objet d'un arrêt de travail du 9 au 14 février 2018, prolongé ultérieurement, la salariée qui avait repris son poste a notifié à son employeur, par courrier recommandé du 14 mars 2018 avec accusé réception, une prise d'acte de rupture de son contrat de travail fondée sur le non-paiement de ses congés payés, le prélèvement continu et injustifié d'une cotisation à une mutuelle, une mise en demeure de reprendre son poste de travail alors qu'elle se trouvait en arrêt de travail et un décompte abusif des avantages repas. Prenant acte de ce courrier qu'elle considérait comme une démission, la société a fait établir les différents documents délivrés à la fin de la relation de travail.

Par requête reçue le 4 février 2019, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Valenciennes afin de faire constater que la prise d'acte de rupture produisait les effets d'un licenciement nul et d'obtenir le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

 

Par jugement en date du 21 décembre 2020, le conseil de prud'hommes a débouté [D] [V] de sa demande, la société de sa demande reconventionnelle et a condamné la salariée au paiement de 1300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le 12 février 2021, [D] [V] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 24 mai 2022, la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 28 juin 2022.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 13 avril 2021, [D] [V] sollicite de la Cour la réformation du jugement entrepris, la requalification de la prise d'acte de rupture en licenciement nul et la condamnation de la société à lui verser

112 euros à titre de rappel de salaire

2941,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

294,14 euros au titre des congés payés y afférents

183,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

18528 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul

1528,83 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement

10000 euros en réparation du préjudice moral consécutif à la discrimination

à titre subsidiaire

112 euros à titre de rappel de salaire

2941,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

294,14 euros au titre des congés payés y afférents

183,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

1528,83 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement

3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'appelante expose qu'elle a été victime d'une discrimination, que son employeur avait connaissance de son état de grossesse, que dès qu'il l'a connu, son comportement a changé, que la société a modifié le planning prévoyant des congés anticipés du 19 au 25 février afin de pouvoir lui reprocher une absence injustifiée, que son employeur avait été prévenu de la prolongation de son arrêt de travail, qu'il était dans l'incapacité de savoir qu'une interruption volontaire de grossesse avait été pratiquée à la date de la rupture, que le prélèvement d'une somme au titre d'une mutuelle pendant toute la relation de travail est injustifiée, l'appelante bénéficiant de la C.M.U, que la société a décompté sur le mois de février les jours de congés payés accordés par anticipation alors qu'ils devaient être imputés sur les congés à venir, que la prise d'acte de rupture produit les effets d'un licenciement nul, qu'à titre subsidiaire, il doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 9 juillet 2021, la société BASTIDE VICTORIA intimée sollicite de la cour la réformation du jugement entrepris et la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 3057,66 euros au titre du préjudice subi du fait du non-respect de son préavis par la salariée, la confirmation pour le surplus et la condamnation complémentaire de l'appelante à lui verser 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'intimée soutient que les griefs invoqués à l'appui de la prise d'acte de rupture n'empêchaient nullement la poursuite du contrat de travail, qu'après son retour de vacances et la mise en demeure de réintégrer son poste qui lui a été notifiée, l'appelante a repris son travail pendant près de trois semaines après avoir reçu son bulletin de salaire faisant état de retenues sur salaire pour absence injustifiée, que le prélèvement de 12 euros par mois au titre de la mutuelle était justifié, que jusqu'à la prise d'acte de rupture, l'intimée n'était nullement informée de ce que l'appelante bénéficiait de la CMU, que le grief tiré du décompte prétendument abusif des avantages repas a été abandonné, que la prise d'acte de rupture, lors de sa dénonciation à l'employeur, n'a pas été envisagée pour un motif lié à un état de grossesse, que par suite d'une interruption volontaire de grossesse, l'appelante n'était plus enceinte depuis le 16 février 2018 et ne bénéficiait plus de la protection des dispositions du code du travail, que la société n'a jamais eu connaissance de l'état de grossesse de l'appelante, que l'avis d'arrêt de travail initial établi le 9 février 2018 par son médecin traitant est sans rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse, qu'à aucun moment, la salariée n'a informé son employeur de son état de grossesse, que la société ne s'est jamais prévalue de l'absence injustifiée du 19 au 25 février 2018, ni pour procéder au licenciement de la salariée ni même pour la sanctionner, qu'en outre, ayant été embauchée le 31 juillet 2017, elle n'avait aucun droit à une prise de congés, sauf accord de son employeur, que la demande officielle de congés pour la période du 19 février au 25 février 2018 n'a jamais été soumise à l'intimée, que celle-ci n'a pas procédé à la rémunération de cette période en l'absence de présentation d'une demande de congés écrite, qu'à juste titre elle a adressé à l'appelante une lettre de mise en demeure de réintégrer son poste le 20 février 2018 alors que celle-ci n'était plus en arrêt de travail mais en vacances en Italie, que l'avis de prolongation de l'arrêt de travail n'a jamais été communiqué postérieurement au 7 mars 2018, que la prise d'acte de rupture n'apparaît pas imputable à l'employeur et doit être considérée comme une démission, qu'il appartenait alors à la salariée d'effectuer son préavis, ce qui n'a pas été le cas, que la société a été contrainte de faire face à une désorganisation en raison de la brusque rupture du contrat de travail injustifiée émanant de l'appelante.

MOTIFS DE L'ARRET

 

Attendu en application de l'article L1231-1 du code du travail qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'appelante a fait l'objet d'un arrêt de travail du 9 au 14 février 2018 ; que par SMS, le dimanche 11 février 2018, elle a informé son employeur qu'elle était enceinte depuis trois semaines mais qu'une interruption volontaire de grossesse devait être pratiquée le mercredi suivant, du fait que se développait une grossesse extra-utérine ; que constatant son absence, son employeur lui a adressé un SMS le 15 février 2018 à 18h 09 lui demandant de lui faire parvenir la prolongation de son arrêt de travail ; que tout en rappelant que son conjoint l'avait prévenu, l'appelante lui a répondu immédiatement qu'elle lui transmettrait dès le lendemain la pièce demandée ; que par courrier recommandé en date du 20 février 2018, la société l'a mise en demeure de justifier de son absence ; que la salariée ne rapporte nullement la preuve matérielle qu'elle a bien communiqué à son employeur la prolongation d'arrêt de travail du 15 au 18 février 2018, se bornant à affirmer que le justificatif avait été déposé dans la boîte aux lettres de la société le 16 février 2018 ; qu'elle ne produit pas davantage cette pièce devant la cour ; que l'appelante s'est rendue en Italie au moins du 20 au 22 février 2018 puisqu'elle avait réservé une chambre pour deux nuits à Milan durant cette période ; qu'il n'est pas contesté qu'elle s'est absentée en réalité du 19 au 25 février 2018 ; qu'elle ne justifie pas que son employeur lui ait accordé pour cette période des congés puisqu'elle ne communique pas de bulletin d'absence mentionnant l'accord préalable de son employeur, alors qu'elle s'était conformée à cette procédure lors de sa précédente absence du 16 au 19 décembre 2017 ; que le SMS envoyé le 14 mars 2018 à l'appelante par la société démontre que cette dernière n'avait pas donné son accord à la prise des congés effectuée antérieurement unilatéralement par la salariée ; que la mise en demeure du 20 février 2018 et la retenue opérée par la société sur le salaire pour la période du 19 au 25 février 2018 sont donc justifiées ; que l'appelante a rempli et signé le 1er septembre 2017 un formulaire en vue d'être affiliée à la mutuelle April prévoyance à compter du 1er septembre 2017 et a donné son accord pour que le paiement des cotisations soit effectué par prélèvement sur son salaire ; qu'elle n'a jamais averti son employeur qu'elle bénéficiait de la couverture maladie universelle complémentaire ; que l'attestation de droits à l'assurance maladie valable pour la période 19 septembre 2017 au 18 septembre 2018 en possession de la société à l'époque de l'embauche ne faisait nullement apparaître l'existence de cette couverture complémentaire ; que le prélèvement opéré par la société n'est donc pas fautif ; que le fait que la société ait déduit du salaire du mois de mars la cotisation à la mutuelle sans l'avoir calculée au prorata de la présence de l'appelante ne saurait justifier la prise d'acte de rupture ; qu'en conséquence celle-ci produit bien les effets d'une démission ;

Attendu en application de l'article 30 de la convention collective qu'ayant moins de deux années d'ancienneté, l'appelante était tenue à un préavis de quinze jours ; que l'indemnité compensatrice de préavis dont elle était débitrice doit être évaluée à 772 euros ; que l'intimée ne démontre pas que son préjudice consécutif à l'absence d'exécution du préavis excède le montant de l'indemnité due au titre des dispositions de la convention collective ;

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'intimée les frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer une somme complémentaire de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

REFORME le jugement entrepris,

CONDAMNE [D] [U] épouse [V] à verser à la société BASTIDE VICTORIA 772 euros au titre du préavis consécutif à sa démission,

CONFIRME pour le surplus le jugement déféré,

 

ET Y AJOUTANT,

CONDAMNE [D] [V] à verser à la société BASTIDE VICTORIA 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE [D] [V] aux dépens.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Philippe LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/00184
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;21.00184 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award