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30/09/2022 | FRANCE | N°21/00162

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 30 septembre 2022, 21/00162


ARRÊT DU

30 Septembre 2022







N° 1257/22



N° RG 21/00162 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TNXI



PL/CH









Article

700-2























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

21 Décembre 2020

(RG 19/00027 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 30 Septembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [C] [M] épouse [B]

[Adresse 2]

représentée par Me Antoine BIGHINATTI, avocat au barreau de VALENCIENNES

(bénéficie d'une aide juridi...

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1257/22

N° RG 21/00162 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TNXI

PL/CH

Article

700-2

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

21 Décembre 2020

(RG 19/00027 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [C] [M] épouse [B]

[Adresse 2]

représentée par Me Antoine BIGHINATTI, avocat au barreau de VALENCIENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 591780022021002093 du 23/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

INTIMÉE :

S.A.S.U. PICARD SURGELES

[Adresse 1]

représentée par Me Loïc LE ROY, avocat au barreau de DOUAI assisté de Me Florence ROBERT DU GARDIER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Paul REVEL, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS : à l'audience publique du 29 Juin 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Séverine STIEVENARD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRESIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 24 mai 2022

EXPOSE DES FAITS

 

[C] [M] épouse [B] a été embauchée par la société PICARD SURGELES en qualité de vendeuse assistante 2, Niveau III A, statut employée par contrat de travail à durée déterminée du 23 février 2015 au 10 janvier 2016, Les parties ont conclu, à partir du 11 janvier 2016, un contrat à durée indéterminée à temps partiel. La salariée était assujettie à la convention collective du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire.

[C] [B] a fait l'objet d'un arrêt de travail du 8 janvier 2018 au 22 août 2019. Le 24 janvier 2018, la société a effectué une déclaration d'accident du travail.

Par requête reçue le 29 janvier 2019, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Valenciennes afin d'obtenir la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet, la résiliation judiciaire dudit contrat, un rappel de salaire et le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts puis a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 12 août 2019.

Par jugement en date du 21 décembre 2020, le conseil de prud'hommes a condamné la société à lui verser

2000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat

1500 euros pour non-respect des dispositions conventionnelles

a débouté la salariée du surplus de sa demande et a laissé les dépens à la charge de chaque partie.

Le 9 février 2021, [C] [B] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 29 juin 2022.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 22 septembre 2021, [C] [B] sollicite de la Cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société à lui verser

11232,81 euros bruts à titre de rappel de salaire sur temps complet

1123,28 euros au titre des congés payés y afférents

5000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la priorité de passage à temps complet

3300 euros à titre de rappel de tickets restaurants ou à défaut de requalification en temps complet, la somme de 2002,50 euros

5000 euros de dommages-intérêts au titre de la participation

10000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi

25000 euros à titre de dommages-intérêts pour la nullité du licenciement sur le fondement de l'article L1235-3-1 du code du travail

1736,65 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ou, à défaut de requalification en temps complet, la somme de 842,54 euros

3145,64 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ou, à défaut de requalification en temps complet, la somme de 2246,76 euros

314,56 euros au titre des congés payés y afférents ou, à défaut de requalification à temps complet, la somme de 224,68 euros

la remise d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle Emploi dûment complétés sous astreinte de 200 euros par document et par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir

et le versement au conseil de l'appelante de 3000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

L'appelante expose qu'elle était dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler, qu'elle était informée à la dernière minute, par SMS, des changements intervenus dans ses horaires de travail, que sur la seule année 2017, elle a connu quatre-vingts changements de planning, que la relation de travail a totalisé vingt-huit avenants, soit l'équivalent de dix-neuf mois de remplacements, que les différents plannings remis n'ont jamais été conformes aux horaires repris sur les contrats de travail, que le contrat de travail doit être requalifié en un contrat à temps complet, qu'il lui est dû une somme brute totale de 3057,35 euros à titre de rappel de salaire, qu'elle n'a pas bénéficié de la priorité d'évolution vers un temps complet, qu'elle a postulé afin d'être affectée à un poste d'assistante responsable de magasin à temps complet à [Localité 4], qu'elle a appris le 6 janvier 2018 que son employeur ne la retenait pas pour ce poste, sans pour autant lui en donner les raisons, alors que selon la procédure en cours au sein de la société il y était tenu, qu'elle est donc en droit de solliciter des dommages et intérêts pour violation de la priorité de passage à temps complet, que selon la convention collective, son employeur devait lui accorder un ticket restaurant puisqu'elle travaillait six heures par jour avec une pause d'au minimum vingt minutes pour déjeuner, qu'elle est fondée à demander le paiement de la somme équivalant à 145 tickets restaurants au titre de l'année 2015, 150 tickets restaurants au titre de l'année 2016, 145 tickets restaurants au titre de l'année 2017 ou, en cas de non requalification du contrat en temps complet, à 105 tickets restaurants au titre de l'année 2015, 77 tickets restaurants au titre de l'année 2016 et 85 tickets restaurants au titre de l'année 2017, qu'en ne la faisant pas bénéficier d'un emploi à temps complet, la société l'a privée d'une quote-part plus importante de la participation mise en place au sein de l'entreprise, qu'elle a subi une dégradation significative de ses conditions de travail, que son employeur lui a refusé quatre jours de congés pour événement familial, qu'aucune suite n'a été donnée à sa demande du 20 juin 2016 visant à évoluer vers un emploi à temps plein, qu'alors qu'elle assumait régulièrement les tâches d'assistante responsable de magasin dans le cadre de remplacements, elle s'est vue refuser d'évoluer vers ce poste, que bien que n'étant ni responsable, ni assistante responsable, elle se déplaçait lorsque l'alarme du magasin se mettait en marche, qu'elle produit l'ensemble des éléments médicaux justifiant de la gravité de l'impact de ses conditions de travail sur son état de santé, que les manquements de l'employeur dans l'exécution de la relation de travail sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail, qu'ils justifient l'obtention de dommages et intérêts pour nullité de la rupture du contrat de travail.

 

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 25 novembre 2021, la société PICARD SURGELES intimée sollicite de la cour l'infirmation du jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il l'a condamnée à verser à l'appelante des dommages et intérêts pour un manquement à son obligation de sécurité de résultat et pour non-respect des dispositions conventionnelles, la confirmation pour le surplus et la condamnation de l'appelante à lui verser 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'intimée soutient que les griefs formulés à son encontre ne sont pas justifiés, qu'aucune faute de nature à justifier la prise d'acte du contrat de travail n'est caractérisée, que l'absence de visite médicale au moment de l'embauche ne peut constituer un élément justifiant la prise d'acte de la rupture du contrat dès lors qu'il n'a pas empêché la poursuite de la relation de travail, que l'appelante a été reçue le 11 janvier 2017 par le médecin du travail qui l'a déclarée apte au travail, qu'elle n'a pas sollicité le bénéfice de quatre jours de congés pour événement familial et n'apporte pas la preuve d'en avoir sollicité le bénéfice et d'un refus, que la modification de la durée de travail a fait l'objet d'un accord avec la société sous la forme d'avenants, que certains changements d'horaires de travail n'imposaient pas la conclusion d'avenants, que la société a pris en compte les contraintes personnelles de la salariée afin d'adapter son planning, que l'appelante ne démontre pas qu'un poste à temps plein d'un niveau équivalent à celui qu'elle occupait aurait été disponible et qu'il ne lui aurait pas été proposé, que la décision d'accorder une promotion, au même titre qu'une augmentation individuelle, relève du pouvoir de direction et d'organisation de l'employeur, que la société a constaté que lorsque l'appelante occupait temporairement le poste d'assistante au responsable de magasin, son travail n'était pas satisfaisant, qu'elle acceptait difficilement les remarques qui lui étaient faites en vue de l'amélioration de son travail, qu'elle rencontrait des difficultés pour s'organiser et hiérarchiser les priorités, que lorsqu'elle consentait à se rendre dans le magasin, quand l'alarme était déclenchée, elle bénéficiait d'une prime spécifique, que l'employeur n'a aucune obligation de proposer au salarié des formations qualifiantes qui seraient destinées à une promotion, qu'à l'issue de l'enquête diligentée par la société, aucun élément de fait n'a permis de caractériser l'existence d'un harcèlement moral, que le fait que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie ait accepté de prendre en charge le «burn out» déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels ne permet pas de conclure à l'existence d'une situation de harcèlement, qu'en l'absence de poste disponible dans le secteur de [Localité 5], la demande de mutation dans un autre magasin présentée par l'appelante afin de ne plus être en contact avec [I] [T] et M. [X] n'a pu aboutir, que les horaires qui devaient être effectués par la salariée étaient ceux indiqués sur les plannings transmis par la société, permettant ainsi à l'appelante de connaître à l'avance son rythme de travail, qu'en cas d'avenants conclus pour le remplacement de salariés absents nommément désignés, le nombre d'avenants temporaires conclus avec un même salarié à temps partiel n'est pas limité à huit par an, à titre subsidiaire, que le rappel de salaire calculé par l'appelante fondé sur un décompte au mois le mois est erroné, que l'attribution des tickets restaurant n'est pas automatique mais est liée à la justification d'une plage de six heures de travail continu commençant ou se terminant entre 12 et 14 heures, que l'appelante ne justifie pas du préjudice qu'elle allègue, que la priorité de passage à temps complet concerne des postes de même niveau mais ne donne pas droit à une promotion, que la prise d'acte de rupture devant produire les effets d'une démission, l'appelante ne peut prétendre à des indemnités fondées sur un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la société n'a commis aucun manquement ni aux dispositions conventionnelles ni à son obligation de sécurité de résultat.

MOTIFS DE L'ARRET

 

Attendu en application des articles L3123-6, L3123-22 du code du travail et 6.2.4 sur le complément d'heures de la convention collective qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'appelante a été employée par contrats de travail à durée déterminée successifs motivés par le remplacement d'une salariée absente, à l'exception du dernier fondé sur un accroissement temporaire d'activité, de la façon suivante :

du 23 février au 1er mars 2015 pour une durée de travail de 20 heures par semaine,

du 9 au 29 mars 2015, prolongé jusqu'au 5 juillet 2015 pour 20 heures par semaine sauf durant les onzième, quinzième, dix-huitième, dix-neuvième, vingt-sixième et vingt-septième semaines où, par avenants des 9 mars, 6 avril, 27 avril et 22 juin, la durée de travail de ces dernières a été portée à 35 heures,

du 6 juillet au 8 août 2015 prolongé jusqu'au 30 août puis jusqu'au 13 septembre 2015, pour une durée de travail initiale de 20 heures de la vingt-huitième à la trentième semaine, de 17 heures 30 la trente-et-unième semaine et de 21 heures la trente-deuxième semaine, puis par avenant du 6 juillet portée à 35 heures, pour l'ensemble des semaines jusqu'à la trente-cinquième, et enfin par avenant du 30 août 2015 réduite à 15 heures par semaine,

du 14 au 20 septembre 2015 prolongé jusqu'au 27 septembre 2015, pour une durée de travail de 15 heures par semaine, puis de 22 heures lors de la prolongation,

du 28 septembre au 11 octobre 2015 pour une durée de travail de 15 heures par semaine,

du 12 au 18 octobre 2015 prolongé jusqu'au 1er novembre 2015, pour une durée de travail de 15 heures par semaine portée à 20 heures la quarante troisième semaine et à 21 heures la quarante-quatrième,

du 2 au 15 novembre 2015 prolongé jusqu'au 22 novembre 2015, pour une durée de travail de 15 heures par semaine, portée à 24 heures lors de la prolongation

du 23 au 29 novembre 2015, pour une durée de travail de 17 heures par semaine

du 30 novembre 2015 au 3 janvier 2016, prolongé jusqu'au 10 janvier 2016 pour une durée de travail de 23 heures 30 la quarante-neuvième semaine, 33 heures la cinquantième et 34 heures 45 les semaines suivantes ;

qu'à compter du 11 janvier 2016 la relation de travail est devenue à durée indéterminée à temps partiel, la durée de travail hebdomadaire étant fixée à 15 heures et répartie durant la semaine entre les mercredi, vendredi et samedi ;

que l'appelante ne conteste pas avoir reçu également, lors de la conclusion de ces différents contrats, les plannings déterminant la répartition de ses heures de travail durant la semaine ; qu'elle produit d'ailleurs chaque planning correspondant aux semaines pour lesquelles la durée de travail était inférieure à 35 heures ; qu'elle n'apporte aucune preuve de ce que la répartition effective de ses heures de travail durant la semaine était différente de celle mentionnée sur les plannings, comme elle le soutient en particulier pour la période du 9 mars au 5 juillet 2015 ou qu'elle ait accompli 11 heures 45 de travail en plus durant la semaine du 11 au 17 mai 2015 ; qu'il ne peut se déduire des quelques captures d'écran du téléphone portable de l'appelante faisant apparaître les messages reçus les 11 février, 26 octobre ou 17 décembre 2017 qu'elle n'était pas en mesure de connaître son rythme de travail et qu'elle devait se tenir de ce fait à la disposition permanente de son employeur ; qu'enfin la conclusion d'avenants multiples modifiant la durée de travail tant à la baisse qu'à la hausse était conforme aux dispositions de la convention collective puisqu'ils s'inscrivaient dans le cadre d'un remplacement d'un salarié absent, ou en raison d'un besoin temporaire d'activité ; qu'il n'y a donc pas lieu de requalifier la relation de travail en contrat de travail à temps complet ;

Attendu en application des dispositions de l'article L3123-8 devenu L3123-3 du code du travail qu'il appartenait à la société de porter à la connaissance de l'appelante la liste des emplois disponibles ressortissant à sa catégorie professionnelle ou correspondant à un emploi équivalent ; que toutefois si le poste de vendeuse assistante à plein temps dans le magasin de [Localité 3] pour lequel la salariée avait présenté sa candidature le 20 juin 2016 était susceptible d'être équivalent. il n'apparaissait pas disponible à la date précitée ; qu'il résulte en effet du courrier de l'appelante adressé le 9 janvier 2018 au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, que le magasin était en cours de construction et que son repreneur tardant à arriver, il lui avait été proposé une mission qu'elle avait acceptée en tant que vendeuse assistante pour une durée de travail hebdomadaire de 25 heures ; que le poste d'assistante responsable de magasin de [Localité 4] qu'ambitionnait l'appelante n'était pas équivalent, puisque relevant d'un niveau hiérarchique plus élevé ; qu'il n'est donc pas établi que la société ait failli à son obligation d'information ;

Attendu en application de l'article 9 de l'accord d'entreprise que l'appelante pouvait bénéficier de tickets restaurant dès lors qu'elle justifiait d'une plage de six heures de travail continu commençant ou se terminant entre 12 et 14 heures ; que cette justification résulte des contrats de travail, des avenants et des plannings produits desquels il résulte qu'elle pouvait prétendre à 105 tickets restaurants au titre de l'année 2015, 77 tickets restaurants au titre de l'année 2016 et 85 tickets restaurants au titre de l'année 2017 ; que la société est donc redevable de la somme de 2002,50 euros à ce titre ;

Attendu que le préjudice dont fait état l'appelante au titre de la participation est consécutif à la requalification du contrat de travail en contrat à temps complet ; qu'ayant été déboutée de sa demande de ce chef, elle ne peut donc se prévaloir dudit préjudice ;

Attendu en application de l'article L1154-1 du code du travail que les éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement que présente l'appelante sont le refus de son employeur de lui accorder quatre jours de congés pour son mariage au motif qu'elle se trouvait à temps partiel, d'innombrables variations dans ses horaires de travail, la contraignant à demeurer constamment au service de son employeur, une absence de suite donnée à sa demande du 20 juin 2016 visant à évoluer vers un emploi à temps plein, le refus de la société d'assurer sa promotion au poste d'assistante responsable de magasin à [Localité 4], l'obligation de se déplacer en pleine nuit lorsque l'alarme du magasin résonnait ;

Attendu toutefois que la société établit que l'appelante n'a jamais présenté de demande de congés pour son mariage ; que les griefs qu'elle allègue à ce sujet ne sont qu'une reproduction de notes manuscrites figurant sur le planning de la semaine 45 de l'année 2015 versé aux débats ; que l'appelante a consenti aux nombreuses modifications de la durée de son travail qui n'étaient pas par ailleurs irrégulières ; que sa demande de mutation du 20 juin 2016 a été partiellement satisfaite par l'employeur ; que celui-ci n'était pas tenu de lui accorder de façon automatique une promotion dès lors qu'il constatait par des éléments objectifs que la salariée était confrontée à des difficultés dans l'organisation de son travail et notamment la gestion des marchandises ; qu'à cet égard, l'attestation établie par [I] [T], fait apparaître qu'elle ne disposait pas des qualités professionnelles nécessaires pour occuper le poste d'assistante responsable de magasin ; qu'enfin les déplacements de nuit à la suite du déclenchement de l'alarme du magasin avaient été subordonnés à l'accord de l'appelante qu'elle avait donné et étaient rémunérés au moyen d'une prime ; qu'en outre, à la suite du courrier du 9 janvier 2018 de l'appelante assurant être victime de harcèlement moral, la société a effectué une déclaration d'accident du travail, a convié cette dernière à un entretien avec le responsable des ressources humaines et le responsable régional et a diligenté une enquête ; qu'enfin à la suite de la consolidation de l'appelante, elle a donné son accord à la demande de celle-ci de bénéficier d'un congé lui permettant de suivre une formation Fongecif pour devenir négociateur conseil en patrimoine immobilier ;

Attendu en conséquence que l'existence d'un harcèlement moral imputable à la société n'est pas établi ;

Attendu que la salariée ne fait pas état, à l'encontre de son employeur, de manquements à l'obligation de sécurité de résultat dont il était débiteur, distincts d'un harcèlement moral ; qu'elle ne conclut pas dans ses écritures sur les dispositions conventionnelles qui n'auraient pas été respectées par la société et ne sollicite pas dans le dispositif de celles-là la confirmation du jugement sur ce point ;

Attendu que la prise d'acte, reposant sur des manquements susceptibles de caractériser des agissements de harcèlement moral inexistants, produit en conséquence les effets d'une démission ;

Attendu en application des articles 700 2° du code de procédure civile et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, que l'équité commande d'allouer au profit de Maître Antoine BIGHINATTI, membre de la SCP ACTION-CONSEILS, conseil de l'appelante, 1500 euros au titre des frais que celle-ci aurait dû exposer en cause d'appel si elle n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré

 

ET STATUANT A NOUVEAU 

CONDAMNE la société PICARD SURGELES à verser à [C] [M] épouse [B] 2002,50 euros à titre de rappel de tickets restaurants,

DEBOUTE [C] [B] du surplus de sa demande,

CONDAMNE la société PICARD SURGELES à verser à Maître Antoine BIGHINATTI, membre de la SCP ACTION-CONSEILS, 1500 euros nets au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que [C] [B], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide en application de l'article 700 2° du code de procédure civile,

DIT que si Me BIGHINATTI recouvre cette somme, il renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat et que s'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée viendra en déduction de la part contributive de l'Etat,

DIT que si, à l'issue du délai de quatre ans à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, Me BIGHINATTI n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il sera réputé avoir renoncé à celle-ci,

CONDAMNE la société PICARD SURGELES aux dépens.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Philippe LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/00162
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;21.00162 ?
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