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30/09/2022 | FRANCE | N°19/01811

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 30 septembre 2022, 19/01811


ARRÊT DU

30 Septembre 2022







N° 1261/22



N° RG 19/01811 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SROB



PL/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'Arras

en date du

22 Juillet 2019

(RG -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 30 Septembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [C] [N]

[Adresse 1]

représentée par Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI, assisté de Me Patrick TABET, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me IOVINO Céli...

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1261/22

N° RG 19/01811 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SROB

PL/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'Arras

en date du

22 Juillet 2019

(RG -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [C] [N]

[Adresse 1]

représentée par Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI, assisté de Me Patrick TABET, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me IOVINO Céline, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Mme [P] [L] épouse [E]

[Adresse 2]

représentée par Me Alexandra BODEREAU, avocat au barreau d'ARRAS

DÉBATS : à l'audience publique du 28 Juin 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRESIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 12 janvier 2022

EXPOSE DES FAITS

 

[P] [L] épouse [E] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 4 décembre 1989 en qualité de secrétaire médicale-assistante dentaire par le Docteur [Z], chirurgien-dentiste. A la suite de la cession du cabinet dentaire à [C] [N], le contrat de travail a été transféré à compter du 15 janvier 2017.

Par courrier en date du 23 mai 2017 la salariée a présenté sa démission à compter du 23 juin 2017 puis par courrier du 8 juin 2017, elle a fait connaître à son employeur sa volonté de se rétracter. [C] [N] a refusé sa réintégration.

Par requête reçue le 7 décembre 2017, [P] [E] a saisi le conseil de prud'hommes d'Arras afin de faire constater que sa démission était équivoque et qu'elle produisait les effets d'un licenciement abusif et d'obtenir le versement d'indemnités de rupture ainsi que des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

 

Par jugement en date du 22 juillet 2019, le conseil de prud'hommes a requalifié la démission d'[P] [E] en licenciement sans cause réelle et sérieuse, a condamné [C] [N] à lui verser

27031,80 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

18702,49 euros au titre de l'indemnité de licenciement

4307,32 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

a débouté la salariée du surplus de sa demande et [C] [N] de sa demande reconventionnelle et a condamné cette dernière aux dépens.

Le 19 août 2019, [C] [N] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 12 janvier 2022 la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 28 juin 2022.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 18 novembre 2019, [C] [N] sollicite de la Cour la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de l'intimée tendant à la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec toutes les conséquences en découlant et en ce qu'il a débouté l'appelante de sa demande tendant à voir condamnée [P] [E] à lui verser des dommages et intérêts, eu égard au comportement de cette dernière, et la condamnation de l'intimée à lui verser

30000 euros à titre de dommages et intérêts

6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'appelante expose que les termes de la lettre de démission rédigée de la main de l'intimée et remise le 23 mai 2017 sont clairs et non équivoques, qu'aucune réserve n'y est émise, que le consentement de cette dernière n'a pas été vicié, que l'appelante verse aux débats de très nombreuses attestations venant démontrer qu'elle n'a jamais adopté un comportement critiquable ou méprisant à l'égard de l'intimée, qu'au contraire, l'ambiance de travail était bonne et détendue, qu'elle ne l'a jamais contrainte à démissionner, que lorsque l'appelante a appris le 19 mai 2017 l'usurpation, lors de son absence, de son ordonnancier à l'initiative de la salariée, au risque d'engager la responsabilité du praticien, elle a sollicité légitimement des explications auprès de cette

dernière qui a reconnu la situation et le grave manquement commis, qu'elle a démissionné après avoir mûrement réfléchi durant le week-end, qu'elle savait que son employeur allait initier une procédure de licenciement pour faute grave à son encontre à la suite de tels faits, que l'appelante ne lui a jamais donné comme instructions d'établir et de signer à sa place des ordonnances pour les patients, que l'intimée a tenté de l'intimider, par l'intermédiaire de son conjoint, ce qui l'a contrainte à déposer par précaution, le 12 juin 2017, une main courante auprès du commissariat d'[Localité 3], qu'il n'existe aucun élément permettant de démontrer que l'état de santé de l'intimée se serait dégradé antérieurement à sa démission en raison d'un prétendu harcèlement moral au travail, que la recherche d'un modèle de lettre de démission par la salariée sur son poste de travail, situé à l'accueil, prouve que cette démission était libre et réfléchie, que les demandes formulées par l'intimée sont injustifiées également dans leur quantum, que sa rémunération mensuelle brute moyenne était de 2025,71 euros, qu'elle ne justifie d'aucun préjudice susceptible de fonder sa demande indemnitaire à hauteur de douze mois de salaire, qu'elle a commis une faute grave et qu'un tel comportement, aux conséquences qui auraient pu être lourdes, doit donner lieu au versement de dommages et intérêts.

 

L'intimée a constitué avocat mais n'a pas conclu. 

MOTIFS DE L'ARRET

 

Attendu en application de l'article L1231-1 du code du travail qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'intimée a présenté sa démission par lettre remise en main propre le 23 mai 2017 ; qu'elle se bornait à avertir son employeur qu'elle quitterait son poste le 23 juin 2017, compte tenu du préavis d'un mois auquel elle était tenue conformément à la convention collective des cabinets dentaires ; que toutefois, par courrier recommandé en date du 8 juin 2017, reçu le 12 juin 2017, la salariée a informé son employeur qu'elle se rétractait, affirmant que sa volonté de démissionner n'était pas claire et qu'elle était consécutive à des pressions morales réitérées exercées sur sa personne et à des actes de dénigrement imputés à son employeur ; que toutefois, dans le même courrier elle ajoutait que, compte tenu des agissements qu'elle reprochait à ce dernier et du préjudice qui en était résulté, il lui était impossible de continuer à travailler au sein du cabinet dentaire ; qu'elle l'invitait donc à conclure une convention de rupture ; qu'à défaut, elle saisirait la juridiction prud'homale en vue de faire requalifier cette démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en réponse, par courrier recommandé du 22 juin 2017, l'appelante lui a objecté que sa démission était dépourvue de toute équivoque et n'a pas accepté la rétractation ; que les premiers juges se bornent à constater une dégradation de l'état de santé de l'intimée sans expliquer en quoi les conditions de travail semblaient en être la cause ; qu'il n'est communiqué aucune pièce de nature à démontrer les pressions ou les actes de dénigrement prétendument subis ayant affecté le consentement de l'intimée à donner sa démission ; qu'il n'est pas démontré que le fait que l'appelante ait envisagé d'engager une procédure de licenciement de nature disciplinaire pour les faits commis par l'intimée dont la gravité est au demeurant caractérisée, ait pu rendre équivoque la volonté de cette dernière de démissionner ; que celle-ci ne peut se déduire du seul fait que l'intimée avait consulté dans le bureau de l'appelante des exemples de lettre de démission, comme le note le conseil de prud'hommes ; que l'appelante produit par ailleurs différentes attestations émanant de patients, de fournisseurs ou d'anciens collaborateurs, dont le contenu se trouve en totale contradiction avec les allégations de la salariée ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments de fait que la démission de cette dernière était claire et non équivoque ;

Attendu que l'appelante produit l'attestation d'[I] [D] qui rapporte s'être rendu à son cabinet le 5 mai 2017 en raison d'un abcès dentaire ; que cette dernière étant absente ce jour-là, il a été reçu par l'intimée ; que sans la moindre autorisation, celle-ci lui a prescrit un antibiotique antibactérien, le bi missilor, délivré ensuite au patient sur production d'une ordonnance à l'en-tête du cabinet, rédigée par la salariée et versée aux débats ; que l'appelante n'a eu connaissance de ces faits que le 19 mai 2017, à la suite d'une nouvelle visite du patient qui souffrait de douleurs persistantes ; qu'un tel comportement de la part de l'intimée qui, en tant que secrétaire médicale-assistante dentaire, n'avait aucune qualité pour établir des prescriptions, comme le souligne le courriel du Président du Conseil de l'ordre national des chirurgiens-dentistes du 23 mai 2017, est bien de nature à entacher gravement la réputation du cabinet, puisque l'extraction d'une dent du patient s'avérait en réalité nécessaire ; qu'il a occasionné de ce fait un préjudice à l'appelante qu'il convient d'évaluer à 3000 euros ;

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'appelante les frais qu'elle a dû exposer tant devant le conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré,

 

ET STATUANT A NOUVEAU, 

DEBOUTE [P] [E] de sa demande,

CONDAMNE [P] [L] épouse [E] à verser à [C] [N]

3000 euros en réparation du préjudice subi

2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE [P] [E] aux dépens.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Philippe LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 19/01811
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;19.01811 ?
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