République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 07/07/2022
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N° de MINUTE :
N° RG 18/06326 - N° Portalis DBVT-V-B7C-R7GK
Jugement (N° 17/004220)
rendu le 05 octobre 2018 par le tribunal d'instance de Lille
APPELANTE
La SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque agissant en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Francis Deffrennes, membre du cabinet Thémès, avocat au barreau de Lille
INTIMÉS
Monsieur [X] [D]
né le 09 mars 1970 à [Localité 7]
Madame [R] [P] épouse [D]
née le 15 décembre 1970 à [Localité 8]
demeurant ensemble [Adresse 2]
[Localité 4]
représentés par Me Guillaume Ghestem, avocat au barreau de Lille
ayant pour conseil Me Ariane Vennin, membre de la SELAS A7 Avocats, avocat au barreau de Paris
La SELAS MJS Partners représentée par Me [N] [I] en qualité de mandataire ad hoc de la société Ate Isoleo France
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 6]
- assignée en intervention forcée le 22 juin 2021 à personne habilitée - n'ayant pas constitué avocat
DÉBATS à l'audience publique du 05 mai 2022 tenue par Emmanuelle Boutié magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Christine Simon-Rossenthal, présidente de chambre
Emmanuelle Boutié, conseiller
Céline Miller, conseiller
ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 juillet 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine Simon-Rossenthal, présidente et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 07 avril 2022
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Le 21 mai 2015, Monsieur [X] [D] a contracté auprès de la société Isoleo France une prestation portant sur l'installation et la mise en service d'une centrale photovoltaïque pour un montant total de 21 500 euros TTC. Le bon de commande prévoyait le financement auprès de la société Sygma.
Suivant offre préalable régularisée le même jour, la société BNP Paris Personal Finance a consenti à Monsieur [D] et Madame [R] [P], épouse [D], un crédit affecté à la réalisation d'une prestation de panneaux photovoltaïques d'un montant de 21 500 euros remboursable en 180 mensualités, précédées d'un différé de paiement de 12 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 5,76 %.
Par actes d'huissier en date des 17 et 20 novembre 2017, les époux [D] ont fait assigner la société BNP Paribas Personal Finance et Me [G] [Y], en qualité de liquidateur de la société ATE Isoléo France, aux fins de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement en date du 5 octobre 2018, le tribunal d'instance de Lille a :
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 mai 2015 entre Monsieur [D] et la société Isoleo France ;
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté n° 41105006 conclu entre la société BNP Paribas Personal Finance et Monsieur [D] et Madame [D] en date du 21 mai 2015 ;
- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer aux époux [D] l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit conclu le 21 mai 2015 ;
- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l'ensemble de ses demandes ;
- ordonné à la société BNP Paribas Personal Finance de procéder à la radiation des époux [D] ;
- débouté les époux [D] du surplus de leurs demandes ;
- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à payer aux époux [D] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société BNP Paris Personal Finance aux dépens ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
La BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 septembre 2019, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
- recevoir la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque en son appel, la déclarer bien fondée ;
- réformer le jugement intervenu devant le tribunal d'instance de Lille en date du 5 octobre 2018.
Et statuant à nouveau, à titre principal,
- constater que Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] ne justifient nullement de leur déclaration de créance alors qu'ils ont engagé leur action postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Isoleo France.
- par conséquent, dire et juger que Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] sont irrecevables à agir en nullité et/ou en résolution du contrat principal conclu avec la société ATE Isoleo France et, en conséquence, à agir en nullité et/ou en résolution du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti par la S.A. Sygma Banque, aux droits de laquelle vient désormais la S.A. BNP Paribas Personal Finance.
A titre subsidiaire,
- débouter Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions telles que dirigées à l'encontre de la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque ;
- juger que le bon de commande régularisé le 21 mai 2015 par Monsieur [X] [D] respecte les dispositions des anciens articles L.121-17 et L.121-18-1 du code de la consommation ;
- à défaut, constater, dire et juger que Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] ont amplement manifesté leur volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l'affectant sur le fondement des anciens articles L.121-17 et L.121-18-1 du code de la consommation et ce en toute connaissance des dispositions applicables ;
- juger que les conditions d'annulation du contrat principal de vente de panneaux photovoltaïques conclu le 21 mai 2015 sur le fondement d'un prétendu dol ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] avec la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque n'est pas annulé ;
- en conséquence, enjoindre à Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] de reprendre le règlement des échéances mensuelles du prêt entre les mains de la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque conformément aux stipulations de l'offre acceptée le 21 mai 2015 et ce, jusqu'au plus parfait paiement.
A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat principal de vente conclu le 21 mai 2015 entre Monsieur [X] [D] et la société Isoleo France et de manière subséquente la nullité du contrat de crédit affecté consenti à Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] par la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque selon offre préalable acceptée le 21 mai 2015 ;
- constater, dire et juger que la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque n'a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ;
- par conséquent, condamner solidairement Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] à rembourser à la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque le montant du capital prêté, déduction faite des échéances d'ores et déjà acquittées par les emprunteurs.
A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour considérait à l'instar du premier magistrat que la S.A. Sygma Banque, aux droits de laquelle vient désormais la S.A. BNP Paribas Personal Finance, a commis une faute dans le déblocage de fonds ;
- juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque ;
- juger que Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] conserveront l'installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à leur domicile par la société ATE Isoléo France, que l'installation photovoltaïque fonctionne parfaitement puisque ladite installation est raccordée au réseau ERDF-Enedis, que l'installation a bien été mise en service et que les époux [D] perçoivent chaque année des revenus énergétiques grâce à l'installation photovoltaïque litigieuse ;
- par conséquent, dire et juger que la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque ne saurait être privé de la totalité de sa créance de restitution, compte tenu de l'absence de préjudice avéré pour Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] ;
- par conséquent, condamner solidairement Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] à restituer à la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure à la moitié du capital prêté.
En tout état de cause,
- condamner solidairement Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] à payer à la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de a SA Sygma Banque la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum Monsieur [X] [D] et Madame [R] [D] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d'appel dont distraction au profit de Maître Francis Deffrennes, Avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 14 mai 2019, les époux [D] demandent à la cour de :
- juger recevable les demandes de nullité ou de résolution des époux [D] malgré l'absence de déclaration de créance ;
- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Lille du 5 octobre 2018 ;
- juger que les époux [D] subissent un préjudice en raison du financement d'un bon de commande nul et d'un certificat de livraison lacunaire ;
- condamner la BNP Paribas Personal Finance à payer aux époux [D] la somme de 2 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à Maître [G] [Y] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ate Isoleo France par acte d'huissier de justice en date du 5 février 2019. Celui-ci n'a pas constitué avocat devant la cour.
Par arrêt en date du 8 avril 2021, la cour d'appel de Douai à invité les parties à s'expliquer sur les conditions de la représentation de la société Ate Isoleo France, dont la liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif et à solliciter si nécessaire la désignation d'un mandataire ad hoc pour cette société par le président de la chambre et renvoyé l'affaire et les parties à la mise en état du 8 juin 2021.
Par ordonnance en date du 28 avril 2021, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné la Selas Mjs Partners en la personne de Maître [I] en qualité de mandataire ad litem de la société Ate Isoleo France avec la mission de représenter la société dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire.
Dans ses observations suite à réouverture des débats notifiées par voie électronique le 6 mai 2021, M. et Mme [D] font valoir que si la cour d'appel pouvait à bon droit ordonner la réouverture des débats pour recueillir les observations contradictoires des parties, après qu'elle a relevé d'office la perte en cours d'instance de la personnalité morale de la société ATE Isoleo France et en conséquence, de la qualité d'intimé de Maître [G] [Y] es qualités de liquidateur de cette société, elle ne peut néanmoins pas autoriser la SA BNP Paribas Personal Finance, appelante, à régulariser cette situation en faisant procéder à la nomination d'un mandataire ad hoc chargé de représenter les intérêts de la société Ate Isoleo France dans la présente procédure d'appel.
En outre, elle précise qu'aucune révocation de l'ordonnance de clôture ne peut être prononcée afin d'autoriser la SA BNP Paribas personal finance, appelante, à régulariser cette situation en faisant procéder à la nomination d'un mandataire ad hoc chargé de représenter les intérêts de la société Ate Isoleo France dans l'instance d'appel.
Les autres parties n'ont pas formulé d'observations.
Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
Sur la désignation d'un mandataire ad hoc
Aux termes des dispositions de l'article L.641-9 II du code de commerce, lorsque le débiteur est une personne morale, les dirigeants sociaux en fonction lors du prononcé du jugement de liquidation judiciaire le demeurent, sauf disposition contraire des statuts ou décision de l'assemblée générale. En cas de nécessité, un mandataire peut être désigné en leur lieu et place par ordonnance du président du tribunal sur requête de tout intéressé, du liquidateur ou du ministère public.
En l'espèce, la clôture de la procédure collective de la société Ate Isoleo France a été prononcée pour insuffisance d'actif et par ordonnance en date du 28 avril 2021, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné la Selas Mjs Partners en la personne de Maître [I] en qualité de mandataire ad hoc de la société Ate Isoleo France avec la mission de représenter la société dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire.
Sur la recevabilité
Les règles de l'arrêt des poursuites individuelles et de l'interruption des instances en cours sont d'ordre public et peuvent être invoquées en tout état de cause et la juridiction est tenue de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'arrêt ou de l'interruption des poursuites individuelles consécutive à l'ouverture d'une procédure collective, même en cause d'appel, et de vérifier la réunion des conditions d'une reprise de plein droit de l'instance en cas d'interruption.
En application de l'article L.622-21-1 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part du créancier tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent au titre d'une créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ou tendant à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
Toute action en dommages-intérêts, en ce qu'elle tend à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent et trouve son origine dans un fait reproché lors de la conclusion ou de l'exécution du contrat antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, est soumise à l'arrêt ou à l'interruption des poursuites.
En revanche, l'action en nullité et l'action en résolution pour un motif autre que le défaut de paiement ne sont pas soumises à l'interdiction ou à l'interruption.
Tel est le cas lorsque l'annulation ou la résolution de la vente, et le cas échéant celle du crédit affecté, est prononcée après l'ouverture d'une procédure collective à l'égard du vendeur de la créance de restitution du prix, de la créance de l'emprunteur à l'encontre du vendeur au titre de son obligation à le garantir envers le prêteur du remboursement du prêt et de la créance du prêteur à l'encontre du vendeur au titre de son obligation de garantie.
En effet, ces créances trouvent leur origine, non pas dans la conclusion des contrats, mais dans l'annulation ou la résolution du contrat de vente par le fait du vendeur et l'annulation ou la résolution consécutive du contrat de crédit prononcées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de celui-ci.
En l'espèce, la demande de M. [X] [D] et Mme [R] [P] épouse [D] tendant à la résolution ou à la nullité du contrat de vente n'entre pas dans le champ de l'article L.622-21 du code de commerce. Cette demande est donc recevable.
La procédure est régulière dès lors que Maître [G] [Y] a bien été mise en cause à la procédure en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ate Isoleo France et que la Selas Mjs Partners a été désignée en qualité de mandataire ad hoc aux fins de représenter la société dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire.
Sur la nullité du contrat de vente en date du 21 mai 2015
A titre liminaire, il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 applicable au cas d'espèce.
En vertu de l'article L. 121-18-1 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter notamment, à peine de nullité, les informations relatives à l'identité du démarcheur et ses coordonnées, les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service; la faculté de rétractation du consommateur prévue à l'article L.121-21 du code de la consommation et les conditions d'exercice de cette faculté. Le contrat doit être accompagné du formulaire de rétractation mentionné au 2° du I de l'article L.121-17, lequel doit être détachable pour permettre au consommateur d'adresser au professionnel sa rétractation.
L'article L. 121-24 du code de la consommation précise que l'exemplaire du contrat laissé au client doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, laquelle doit être rappelée avec cette mention : « Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre ». Le formulaire détachable doit contenir les mentions décrites aux articles R. 121-3 à R. 121-6 du code de la consommation et doit pouvoir en être facilement séparé.
Sur ce,
Il ressort de l'examen de l'exemplaire du bon de commande qu'il n'est pas conforme à ces dispositions légales en ce que:
- la date de livraison n' est pas mentionnée,
- aucune mention ne vient expliciter les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des douze panneaux photovoltaïques ainsi que la date de fin d'exécution de son installation, d'obtention du consuel, même prévisionnelle ;
- il n'y a pas de ventilation du coût global entre l'installation des panneaux et les prestations afférentes aux démarches administratives et au raccordement au réseau ERDF ni entre le prix des matériaux et celui de la main d'oeuvre.
Il s'ensuit que le contrat principal ne répond pas aux exigences de formalisme prévu par le code de la consommation à peine de nullité.
Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l'acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige, que la confirmation tacite d'un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l'affectant et qu'il ait eu l'intention de le réparer.
Le fait que les conditions générales figurant au verso sur le bon de commande se bornent à reprendre les dispositions du code de la consommation est insuffisant à révéler à l'emprunteur les vices affectant ce bon.
Il en résulte que faute pour M. [D] d'avoir eu connaissance du vice affectant le bon de commande, aucun de ses agissements postérieurs ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité. Ainsi l'absence d'exercice de la faculté de rétractation n'emporte pas confirmation tacite et il en va de même du commencement d'exécution du contrat de prêt par le paiement de mensualités.
Aucune confirmation de la nullité ne saurait donc être caractérisée.
Le jugement déféré sera confirmé en qu'il a prononcé l'annulation du contrat principal signé le 21 mai 2015.
Sur les conséquences de l'annulation du contrat accessoire
Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l'état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l'annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de prestations de services qu'il finançait emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au prestataire de services par le prêteur. Elle emporte pour le prêteur l'obligation de restituer les sommes déjà versées par l'emprunteur.
Néanmoins, étant rappelé qu'en application de l'article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 applicable en l'espèce, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation, le prêteur qui commet une faute dans la délivrance des fonds se voit privé des effets de la possibilité de se prévaloir à l'égard de l'emprunteur des effets de l'annulation du contrat de prêt dès lors que l'emprunteur subit un préjudice causé par cette faute.
Commet une faute de nature à le priver de sa créance de restitution le prêteur qui libère les fonds prêtés sans vérifier la régularité du contrat principal souscrit à l'occasion du démarchage au domicile de l'emprunteur, vérifications qui lui auraient permis le cas échéant de constater que le bon de commande était affecté d'une cause de nullité.
Commet également une faute la banque qui libère les fonds sur une attestation de livraison ne comprenant pas toutes les informations nécessaires à l'identification de l'opération concernée ou ne lui permettant pas de s'assurer du caractère complet de l'exécution de la prestation, ni de s'en convaincre légitimement.
La privation de la banque de sa créance de restitution ne s'analyse pas exclusivement comme une sanction du professionnel, destinée in fine à l'inciter à la plus grande vigilance quant à la régularité des opérations de démarchage à domicile qu'il finance. En effet, l'objectif de préserver l'ordre public de protection du consommateur ne saurait conduire à priver la banque de sa créance de restitution en l'absence de tout préjudice subi par les emprunteurs en conséquence des fautes de la banque. Ainsi, lorsque le bien a été livré et la prestation fournie conformément aux stipulations contractuelles, et que l'installation objet du contrat principal fonctionne, l'emprunteur, qui ne subit aucun préjudice, ne saurait être dispensé de rembourser à la banque le capital prêté. Dans l'hypothèse où les emprunteurs échouent à établir avoir subi un préjudice, la banque peut se prévaloir à leur égard des effets de la résolution du contrat de prêt, conséquence de la résolution du contrat principal et obtenir le remboursement du capital emprunté assorti des intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt.
En l'espèce, le prêteur qui a versé les fonds au prestataire de services sans avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal alors que l'irrégularité du bon de commande signé par M. [D] était manifeste ' vérification qui lui aurait permis de constater que le contrat principal étaient affectés d'une cause de nullité ' a commis une faute de nature à les priver de leur créance de restitution de ces fonds.
Par ailleurs, la banque a débloqué les fonds alors que l'installation n'était pas achevée au regard des dispositions du bon de commande qui mettaient à la charge de la société Ate isoleo France des prestations de mise en service de l'installation sur le réseau ERDF et d'obtention du contrat d'achat auprès de cet établissement, les époux [D] ayant opté pour une revente totale à EDF de l'énergie produite par leurs centrales photovoltaïques. Or, au vu de l'attestation de livraison et d'installation signés par M. [D] et du contrat conclu avec ERDF, il n'est pas discuté que le raccordement au réseau n'est intervenu que le 2 novembre 2015.
L'installation n'était donc pas finalisée lorsque la société Ate Isoleo France a fait signer à M. [D] l'attestation de livraison et d'installation, et la rédaction sommaire de ce document , renseignés par de simples formules types pré-imprimées, sans qu'aucune place ne soit laissée à la mention d'éventuelles réserves, ne rendait pas compte des opérations de réception de l'ensemble des travaux commandés et ne permettait donc pas au prêteur de s'assurer de l'effectivité d'une réalisation complète et exempte de réserves.
La faute de la banque dans le déblocage des fonds est ainsi caractérisée.
Toutefois, les époux [D] conservant de fait le matériel installé en raison de la liquidation judiciaire de la société Ate isoleo France et de la clôture de celle-ci, cela en état de fonctionnement sous la conclusion d'un contrat de revente à ERDF leur procurant des revenus, ils ne peuvent être indemnisés que du préjudice réellement subi et ne sauraient dès lors être dispensés de rembourser la totalité des fonds prêtés. Au vu des éléments de la cause et à proportion du préjudice subi, la banque sera privée de la moitié des fonds prêtés.
M. et Mme [D] devront ainsi, en conséquence de l'annulation des contrats de prêts, rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 10 750 euros, dont à déduire les échéances déjà payées.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a privé la banque de la totalité de sa créance de restitution.
Sur la radiation du FICP
Le jugement entrepris n'est pas critiqué en ce qu'il a ordonné à la banque de procéder à la radiation de M. et Mme [D] du FICP ; il sera confirmé de ce chef.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l'espèce, chacune des parties succombant partiellement, chacune conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles tant de première instance que d'appel, le jugement entrepris étant infirmé de ces chefs.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
- condamné la banque à restituer à M. et Mme [D] l'ensemble des sommes versées en exécution des trois crédits affectés,
- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la banque aux dépens et au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Dit que la société BNP Paribas Personal Finance sera privée de la moitié de sa créance de restitution des fonds prêtés aux époux [D],
Dit qu'en conséquence de la nullité du contrat de prêt seront condamnés M. et Mme [D] solidairement à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 10 750 euros dont à déduire les échéances déjà payées.
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le greffier,La présidente,
Delphine Verhaeghe.Christine Simon-Rossenthal.