La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/2022 | FRANCE | N°19/02062

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 24 juin 2022, 19/02062


ARRÊT DU

24 Juin 2022







N° 1123/22



N° RG 19/02062 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SUVC



GG/CH





























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

13 Septembre 2019

(RG F 17/00490 -section )



































GROSSE :



Aux a

vocats



le 24 Juin 2022



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTES :



Mme [Y] [P] [Z] En qualité d'ayant-droit de Monsieur [V] [I] [E]

[Adresse 2]

représentée par Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE



Mme [F] [R] [E] En qualité d'ayant-...

ARRÊT DU

24 Juin 2022

N° 1123/22

N° RG 19/02062 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SUVC

GG/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

13 Septembre 2019

(RG F 17/00490 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 24 Juin 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTES :

Mme [Y] [P] [Z] En qualité d'ayant-droit de Monsieur [V] [I] [E]

[Adresse 2]

représentée par Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE

Mme [F] [R] [E] En qualité d'ayant-droit de Monsieur [V] [I] [E]

[Adresse 3]

représentée par Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE

M. [W] [L] [E] En qualité d'ayant-droit de Monsieur [V] [I] [E]

[Adresse 2]

représenté par Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A.R.L. REPROSCAN

[Adresse 1]

[Adresse 5]

représentée par Me Aurore SELLIER-SUTY, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Bernard MEURICE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Gaetan DELETTREZ

DÉBATS :à l'audience publique du 27 Avril 2022

ARRÊT :Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 06 avril 2022

EXPOSE DU LITIGE

La SARL REPROSCAN qui assure une activité de pré-presse, applique la convention collective de commerce de gros de papeterie et d'articles de bureau, a engagé M. [V] [E], né en 1966, en qualité de cadre technico-commercial par contrat de travail à durée indéterminée du 01/03/2022.

Par avenant du 04/10/2010 un véhicule de service a été mis à disposition du salarié.

L'employeur a convoqué M. [E] pour un entretien en Italie le 18/11/2016. Plusieurs correspondances ont été adressées ensuite par le salarié à M. [B] [U], gérant de la société REPROSCAN, le 20/12/2016 et le 02/02/2017. M. [E] a été en arrêt de travail du 01/02/2017 au 09/04/2017, puis du 24/04/2017 au 04/01/2019.

L'inspecteur du travail a écrit le 17/05/2017 à l'employeur lui indiquant que le salarié était exposé à des risques psycho-sociaux, l'employeur ayant répondu le 05/06/2017 pour contester la teneur des déclarations de M. [E].

Par lettre du 19/05/2017, M. [V] [E] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 30/05/2017, puis licencié par son employeur le 05/06/2017 pour faute grave aux motifs suivant :

«[...] Vous exercez des fonctions de technico-commercial depuis mars 2002 ce qui implique que nous puissions compter sans arrière-pensée sur le respect de l'ensemble de vos obligations professionnelles compte tenu de surcroît de mon éloignement géographique

Vous disposez d'une carte bancaire naturellement réservée au règlement de vos seuls frais professionnels

Or, l'examen de vos dépenses et le contrôle de celles-ci que nous venons d'effectuer à la faveur de l'établissement de nos comptes révèlent l'utilisation de cette carte professionnelle ' adossée au compte de la société ' pour assurer des dépenses personnelles auprès de débitants de boissons dont certains à proximité de notre bureau implanté à [Localité 4] sans que ne soit justifiée et ne puisse être justifiée -et pour cause- la nature professionnelle de ces dépenses de surcroît exposées à heures où vous auriez manifestement dû être occupé à vos obligations personnelles

Ce comportement explique les difficultés rencontrées à l'égard de la clientèle que ce soit en termes de qualité des rapports commerciaux ou en termes de présentation

Ainsi tant le détournement de l'utilisation de la carte bancaire professionnelle dont vous êtes détenteur du fait de vos fonctions que l'utilisation frauduleuse de celle-ci à des fins personnelles durant votre temps de travail au mépris de vos obligations et le comportement inapproprié adopté dans le cadre de l'exécution de vos fonctions constituent des manquements graves, renouvelés et délibérés aux obligations contractuelles de loyauté et d'intégrité et justifient ainsi le licenciement pour fautes graves qui vous est par la présente notifié, votre contrat ne pouvant à l'évidence se poursuivre plus avant même durant le cours d'un préavis[...]».

Par requête du 31/05/2017, M. [V] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille pour obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail en raison de faits de harcèlement moral.

Le 08/01/2019, la caisse primaire d'assurance maladie, après avis du comité régional, a reconnu le caractère professionnel de la maladie de M. [E].

M. [V] [E] est décédé le 8 avril 2019. Lui succèdent son épouse survivante Mme [Y] [Z] et ses enfants Mme [F] [E] et M. [W] [E] (les consorts [E] ci-après).

Par jugement du 13/09/2019, le conseil de prud'hommes a :

-jugé que M. [V] [E] n'a pas été victime de harcèlement moral,

-prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] [E] aux torts de l'employeur,

-condamné la société REPROSCAN à verser à M. [V] [E] les sommes suivantes :

-26.600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (correspondant à 6 mois de salaire sur la base d'un salaire brut de 4 312,46 €),

-44.872 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

-20.122 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

-2.012 € au titre des congés pays sur préavis,

-1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Ordonné la remise de fiches de paie conformes au jugement rendu dans un délai de 30 jours sans astreinte.

Mme [Y] [Z], Mme [F] [E] et M. [W] [E] ès qualités d'ayants droit de [V] [E], ont interjeté appel par déclaration du 18/10/2019.

La SARL REPROSCAN a interjeté appel par déclaration du 21/10/2019. Les instances ont fait l'objet d'une jonction par ordonnance du 02/07/2021.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 12/06/2020 Mme [Y] [Z], Mlle [F] [E] et M. [W] [E] demandent à la cour de :

-confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lille le 13 septembre 2019 en ce qu'il a :

-prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] [E] aux torts et griefs de l'employeur ;

-condamné la société REPROSCAN France au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de 20.122 € outre 2.012 € au titre des congés payés sur préavis ;

-ordonné la remise de fiches de paie conformes à la décision rendue dans un délai de 30 jours ;

-Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lille le 13 septembre 2019 en ce qu'il a :

-jugé que M. [V] [E] n'a pas été victime de harcèlement moral,

-limité le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 26.600 € (correspondant à 6 mois de salaire sur la base d'un salaire brut de 4312,46 €) ;

-fixé à 44 872 € l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

-limité la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à 1.000 € ;

-omis de statuer sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formulée à hauteur de 10.000 € ;

-omis de statuer sur la demande visant à voir ordonner la capitalisation des intérêts,

Et, statuant de nouveau,

A titre principal,

-Dire et juger que M. [V] [E] était victime d'un harcèlement moral ;

-Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] [E] aux torts et griefs de l'employeur ;

A titre subsidiaire,

-Dire et juger que le licenciement pour faute grave est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse ;

Par conséquent,

Condamner la société REPROSCAN France au paiement des sommes suivantes à Madame [Y] [P] [Z], Mademoiselle [F] [R] [E] et Monsieur [W] [L] [E] :

-Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (18 mois de salaire, sur la base d'un salaire brut de 5 030,66 €) : 90.000€

-Indemnité conventionnelle de licenciement : 46 952,83 €

-Indemnité compensatrice de préavis 20.122,00 €

-Congés payés sur préavis : 2.012 €,

-Dommages et intérêts pour préjudice moral : 50.000 €,

-Article 700 du code de procédure civile : 2.000 €,

-Ordonner la remise d'un certificat de travail et d'une attestation POLE EMPLOI conforme à la décision rendue ;

-Ordonner la capitalisation des intérêts.

Selon ses conclusions du 02/06/2020, la SARL REPROSCAN demande à la cour de :

-Joindre les deux procédures RG 19/02062 et RG 19/02070 et statuant par un seul et même arrêt,

-Statuant sur l'appel principal de la société REPROSCAN sur les termes du jugement du conseil de prud'hommes de Lille du 13 septembre 2019 (RG 17/00490) en ses dispositions expressément critiquées en ce que le Conseil : (i) prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] [E] aux torts de l'employeur (ii) condamne la Société REPROSCAN France à verser à M. [V] [E] les sommes de 26 600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 44 872 € à titre d 'indemnité conventionnelle de licenciement, 20 122 € à titre d'indemnité de préavis, 2 012 € au titre des congés sur préavis, 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile (iii) ordonne la remise des fiches de paie conformes au présent jugement dans un délai de 30jours sans astreinte,

-Constater que la demande de résiliation judiciaire formulée postérieurement à la mise en place de la procédure de licenciement est sans objet du fait du licenciement intervenu,

-Dire et juger que n'existe aucun manquement aux obligations contractuelles de nature à engager la responsabilité de la société REPROSCAN

-Et statuant à nouveau,

-Réformer le jugement en ce qu'i1 a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de M. [V] [E] aux torts de l'employeur et a condamné la société REPROSCAN au paiement d'indemnités de rupture et dommages-intérêts

En conséquence,

-Débouter Monsieur [E] de la demande de résiliation judiciaire

-Débouter les ayants droit de Monsieur [E] des demandes tendant à la condamnation de la société REPROSCAN au paiement des sommes de 26 600 € à titre

de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 44 872 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20 122 € à titre d'indemnité de préavis, 2 012 € au titre des congés sur préavis

-Débouter de même les ayants droit de Monsieur [E] de leur demande d'Art. 700 et de celle tendant à voir ordonner la remise d'une 'che de paye

Subsidiairement,

-dire et juger que le licenciement notifié le 5 juin 2017 procède de manquements graves de Monsieur [E] et en conséquence débouter de même les ayants droits de Monsieur [E] des demandes tendant à la condamnation de la société REPROSCAN au paiement des sommes de 26 600 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 44 872 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 20 122 € à titre d'indemnité de préavis, 2 012 € au titre des congés sur préavis

-Débouter de même les ayants droit de Monsieur [E] de leur demande d'Art. 700 et de celle tendant à voir ordonner la remise d'une 'che de paye

-En tout état de cause et dans l'hypothèse où la cour statuerait sur les droits à préavis et indemnité de licenciement, dire et juger inapplicable la convention collective des imprimeries de labeur revendiquée et fixer aux sommes de 12 937.08 euros le montant de l'indemnité de préavis et 25 788.50 euros et l'indemnité de licenciement par application de la convention collective de commerce de gros contractuellement appliquée et applicable,

Statuant sur l'appel incident des ayants droits de monsieur [E] sur le jugement en ce qu'il a (i) Jugé que M. [V] [E] n'a pas été victime de harcèlement moral, (ii) Limité le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause ni réelle ni sérieuse à 26 600 € ( iii) 'xé à 44 872 € l'indemnité conventionnelle de licenciement, les héritiers sollicitant qu'elle soit fixée par la cour statuant à nouveau à hauteur de 46 952.83 61 (iv) Limité la : condamnation au titre de l'article 700, (v) Omis de statuer sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formulée à hauteur de 10 000 € et (vi) Omis de statuer sur la demande visant à voir ordonnée la capitalisation des intérêts.

-Confirmer le jugement en ce qu'il a été jugé que monsieur [E] n'a pas été victime de harcèlement moral

-Débouter les ayants droit de Monsieur [E] de toutes demandes 'ns et conclusions tendant à la 'xation - et à la condamnation de la société REPROSCAN - aux sommes de 90 000 €, 46 952.83 euros, 20 122 €, 2012 € et 2000 € les créances respectivement revendiquées à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse, indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis, congés payés sur préavis et Art... 700,

-Débouter les ayants droit de Monsieur [E] de leur demande de dommages-intérêts pour préjudice moral distinct ;

-Les condamner en tous les frais et dépens.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 06/04/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

La demande de jonction est sans objet.

Sur la demande résiliation judiciaire du contrat de travail

-Sur l'objet du litige

Au préalable, la SARL REPROSCAN expose que le conseil de prud'hommes ne pouvait statuer sur la demande résiliation judiciaire dès lors que le contrat était rompu par le licenciement, la demande étant sans objet.

Les consorts [E] rappellent que l'instance a été engagée le 31/05/2017, le licenciement du 05/06/2017 étant notifié le 08/06/2017.

Il est constant que lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée, que c'est seulement s'il ne l'estime pas fondée qu'il doit statuer sur le licenciement.

C'est donc vainement que la SARL REPROSCAN estime la demande principale est sans objet, M. [E] ayant effectivement saisi le conseil de prud'hommes de Lille pour obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail avant la décision de licenciement du 05/06/2017, comme le rappellent exactement les intimés.

-Sur le harcèlement moral

En application des articles 1224 du code civil et L.1231-1 du code du travail, le salarié est fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur en rendant la poursuite impossible. Il convient d'examiner les griefs du salarié.

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il appartient au juge de se prononcer sur l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral.

Le juge ne doit pas seulement examiner chaque fait invoqué par le salarié de façon isolée mais également les analyser dans leur ensemble, c'est-à-dire les apprécier dans leur globalité, puisque des éléments, qui isolément paraissent insignifiants, peuvent une fois réunis, constituer une situation de harcèlement.

Si la preuve est libre en matière prud'homale, le salarié qui s'estime victime de harcèlement moral est tenu d'établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants qu'il présente au soutien de ses allégations afin de mettre en mesure la partie défenderesse de s'expliquer sur les agissements qui lui sont reprochés.

Les appelants soutiennent que M. [E] a subi des faits de harcèlement moral, qu'il a été privé pendant plusieurs mois de tout moyen d'exécuter sa mission, qu'il était volontairement isolé, coupé des moyens techniques indispensables à ses fonctions, que l'employeur ne lui a plus confié de travail, que le caractère de sa maladie professionnelle a été reconnu et qu'il a mis fin à ses jours le 08/04/2019 dans contexte.

Ils produisent les éléments qui suivent :

-plusieurs lettres de courriel de M. [E] adressés à l'employeur, le 20/12/2016 et le 20/02/2017, indiquant pour la première que l'employeur l'a convoqué en Italie afin de «m'informer par oral que vous aviez l'intention de baisser mon salaire à 1800,00 € net mensuel au lieu de mon salaire actuel à 3200 € net mensuel sur 14 mois» et indiquant rester en attente de l'avenant pour réfléchir à la proposition ; et pour la seconde faisant part de «plusieurs faits que vous effectuez à mon égard. Vous m'aviez confié les codes d'accès filbanque, afin d'effectuer le suivi des paiements de mes clients, depuis début décembre 2016, vous avez demandé à M. [T] de modifier ces codes, sans m'en avertir. Je n'ai donc plus la possibilité de continuer le suivi de paiement pour Reproscan France.

A plusieurs reprises, j'ai appelé M. [O] pour signaler des disfonctionnements sur les accès du serveur Reproscan, régulièrement les serveurs ne sont pas accessibles !! mais également les problèmes d'imprimantes défaillantes (machine ancienne) Ces problèmes sont persistants, mais surtout vous n'essayez pas d'améliorer la situation.

Vous ne répondez plus à mes appels téléphoniques, ni à mes mails, d'ailleurs je vous également fait un courrier le 20 décembre 2016, que vous avez réceptionné en date du 02 JANVIER 2017 en recommandé, et auquel vous n'avez toujours pas répondu.

Lorsque j'appel Mr [O], il n'a jamais plus le temps, il me dit qu'il est occupé, qu'il va me rappeler, chose qu'il effectue soit avec beaucoup de retard, soit pas du tout.

Vous ne me mettez plus en copie les mails que vous effectuez auprès de mes clients.

J'ai appris par le biais de mon client que, ce mardi 31 Janvier 2017, vous avez programmé une nouvelle fois, une réunion dans les bureaux de mon client «BLANCHE PORTE», vous ne m'avez jamais averti et surtout pas convié une fois de plus à cette réunion.

A plusieurs reprises, je vous ai fait part de mon sentiment de «Mise au Placard»[...],

-plusieurs courriels de M. [E] adressés à l'employeur des 07/04/2017, 11/04/2017 et 12/04/2017, demandant si le véhicule de service sera disponible à sa reprise d'arrêt de travail et les connexions Reproscan rétablies (07/04/2017), indiquant «à ce jour, au bureau je n'ai toujours aucune connection internet, ni de véhicule de service à ma disposition, ni d'imprimante, et malgré ma demande et relance par mail et téléphonique à REPROSCAN en Italie, Mr [U] n'effectue aucune démarche pour me donner la possibilité de travailler» (11/04/2017), le salarié indiquant utiliser sa boîte mail personnelle car il n'a plus de moyens de communiquer, situation non résolue le lendemain,

-un courriel du 24/04/2017 de M. [E] indiquant «j'ai repris mon poste de travail le Lundi 10 avril, et malgré mes appels téléphoniques, mails, rien n'a changé

Vous ne me donnez pas la possibilité de travailler dans des conditions correctes, toujours pas de véhicule de service, plus d'accès aux mails, vous ne répondez plus au téléphone etc etc...

Cette situation demeure suffisamment impossible, je saisie l'inspection du travail».

-une lettre de M. [S] [A], inspecteur du travail du 17/05/2017 indiquant avoir constaté le 21 avril 2017 que le salarié n'a plus accès aux fichiers informatiques, que

l'accès internet était coupé et que l'employeur M. [U] ne lui répondait plus au téléphone, ajoutant «je souligne qu'en qualité de seul salarié de votre agence en France, vous m'avez paru isolé et particulièrement désemparé par le silence de votre employeur et la rupture des liaisons informatiques. Vous m'avez, en outre indiqué que, pendant votre arrêt de travail, votre employeur vous avait demandé de lui restituer les clés de votre véhicule de service, qui n'était plus dans son garage à votre retour ; vous ne pouvez donc plus visiter ses clients[...] ; l'inspecteur ajoute avoir avisé l'employeur de la situation de la sorte : «par tous ces faits, vous le mettez dans l'impossibilité d'exercer son activité et l'exposez à des risques psycho-sociaux majeurs» et lui rappelant les dispositions légales des articles L1152-1 du code du travail et 222-33-2 du code pénal relatifs au harcèlement moral.

-une lettre du conseil de M. [E] du 23/05/2017 dénonçant une attitude constitutive de harcèlement moral,

-plusieurs courriels et lettres de satisfactions de clients (M. [D] [N] pour la société Jardin express, Mme [J] [M], responsable de communication),

-une attestation de M. [C] [G] déclarant être intervenu à plusieurs reprises pour aider M. [E] pour des problèmes d'impression,

-une lettre de M. et Mme [K] indiquant avoir eu «connaissance des problèmes que M. [E] [V] avec son employeur notamment une mise au placard et un harcèlement quotidien (moral) sur son lieu de travaille car il n'avait pas la possibilité de travailler dans des conditions correctes, dès son premier arrêt de travaille son employeur lui a retirer son véhicule de société et ne le lui a plus jamais rendu. Depuis cette situation nous avons vu notre ami se dégrader mentalement un manque total de confiance en lui ainsi qu'une perte de poids considérable. Le mal être de M. [E] est dû au circonstance de ce harcèlement subi»,

-les justificatifs d'arrêts de travail, et d'hospitalisation de M. [E] du 29/01/2018 au 23/02/2018,

-la décision de reconnaissance de maladie professionnelle du 08/01/2019,

-un échange de courriels avec l'expert comptable M. [T], des 3 et 4 février 2017, lui demandant de déposer la voiture de service au parking de [Localité 4] et récupérer les clés pour une intervention technique, le salarié étant alors en arrêt de travail,

-l'enquête administrative «maladie professionnelle» du 22/08/2018, relatant les déclarations de M. [E] en lien avec la suppression de son poste en avril 2017, l'absence de son client principal dans l'organigramme, l'absence de travail, la coupure de l'accès au serveur et à l'imprimante, et faisant état d'une tentative suicide en janvier 2018 puis en mars 2018,

-un certificat du Dr [X] [H], psychiatre, indiquant que M. [E] «présentait un syndrome anxio-dépressif majeur avec passage à l'acte suicidaire représentant le motif du premier contact avec notre secteur en hospitalisation complète. Il situait sa symptomatologie anxio-dépressive majeure dans le contexte de difficultés professionnelles, évoquant un licenciement mal vécu qu'il estimait abusif. Il présentait

une perte d'estime de soi, des angoisses fluctuantes avec paroxysmes notamment dans les moments de confrontation à la solitude et l'inactivité. Il décrivait un vécu douloureux d'inutilité, une douleur morale avec un vécu de trahison vis-à-vis de son ancien milieu professionnel [...]».

Examinés dans leur ensemble, ces éléments permettent de présumer de faits de harcèlement moral. Il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement, et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La SARL REPROSCAN produit les éléments qui suivent :

-la lettre du 05/06/2017 de M. [U] en réponse à la lettre du 17/05/2017 de l'inspecteur du travail, contestant les déconnections de l'internet, du téléphone, des liaisons informatiques et des outils bureautiques, indiquant que la serrure a été changée par M. [E], que le véhicule a été «rapatrié» pour une remise en état complète et un défaut d'entretien, et soutenant en substance que les «propos de Monsieur [E] n'engagent que lui»,

-un courriel de M. [E] du 22/11/2016 indiquant «pendant mon déplacement en Italie, il y a eu un problème de compteur au bureau, une personne et passé pour réparer et changer la clé dans le prochain plis je te l'envoie, les voisins ont un double en cas de problème car le disjoncteur et commun

Nous faisons un courrier au propriétaire, pour le remboursement[...]

-une lettre de son conseil contestant vivement les allégations contenues dans la lettre du 23/05/2017 du conseil de M. [E],

-une facture du 25/09/2017.

Elle soutient que rien ne prouve que le salarié a été privé des moyens lui permettant d'exécuter ses missions, que les allégations de M. [E] ne reposent que sur ses déclarations étant précisé que les «constatations» qui ont pu être faites par l'administration ne sont pas de nature à constituer une preuve quelconque, que M. [E] a fait, à l'égard de l'inspection du travail, une présentation partiale de l'entreprise et lui a donné une information tronquée de sa situation, que la clé du local a été changée au regard d'une considération technique, que les clés n'ont pas été changées par la suite, que le véhicule de service a été rapatrié pour une remise en état complète compte tenu d'un défaut d'entretien.

Il ressort de ces éléments que les lettres et courriels de M. [E] adressés à son employeur sont restés sans réponse. M. [E] est ainsi resté dans l'incertitude à la suite de l'entretien du 18/11/2016 au cours duquel la diminution de son salaire de moitié a été évoqué. Aucune réponse ne lui a été apportée, alors que le salarié s'est plaint de n'avoir plus les codes d'accès «filbanque» début décembre 2016, et surtout de ne plus avoir de réponse de l'employeur à ses courriels et appels téléphoniques, en particulier ceux des 07/04/2017, 11/04/2017 et 12/04/2017 précités. Cette situation a conduit à un premier arrêt de travail le 01/02/2017, puis à un second le 24/04/2017, alors que le salarié a constaté par courriel du 24/04/2017 qu'il n'est plus en possibilité de travailler. M. [E] s'est donc trouvé isolé et a subi des conditions de travail dégradées, ayant affecté sa santé, et au sujet desquelles l'employeur a été interpellé par l'inspection du travail. Hormis sa réponse à la lettre du 17/05/2017, la SARL REPROSCAN ne rapporte

pas la preuve que le salarié avait bien accès aux fichiers informatiques, que l'accès internet fonctionnait ou encore que le gérant répondait aux appels du salarié. En définitive, dans son audition dans le cadre de la demande en reconnaissance de maladie professionnelle, M. [U] se borne à faire état de problèmes personnels du salarié, indique qu'il a perdu deux clients et a subi une perte de chiffre d'affaire, que «cette perte est due au comportement de son salarié et il n'a pas eu d'autres choix que de le licencier pour faute grave», alors que la lettre de licenciement n'évoque pas ces griefs. Enfin, si le salarié a fait état le 22/11/2016 d'un changement de clé en raison d'un problème au compteur électrique, M. [E] fait manifestement référence à un changement de clé ultérieur, l'inspecteur du travail indiquant que le local ne peut plus être fermé à clé. La

facture du 25/09/2017 faisant état de travaux sur un véhicule Mégane ne peut justifier que le salarié soit privé de son véhicule de service, et qu'aucune réponse ne lui soit adressée. Les éléments apportés par l'employeur sont donc insuffisants à établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral lequel est constitué. Le jugement est donc infirmé sur ce point.

Il s'agit d'un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur à la date du 05/06/2017.

Sur les conséquences de la résiliation du contrat de travail.

Le contrat de travail prévoit un 13ième et 14ième mois. Le salaire moyen s'établit en conséquence à la somme de 5.030,66 €.

S'agissant de l'indemnité de licenciement, les consorts [E] revendiquent l'application la convention collective des imprimeries de labeur, sans toutefois argumenter cette demande. La convention applicable est en conséquence celle mentionnée au contrat de travail, soit la convention collective nationale de commerces de gros du 23 juin 1970, chaque partie fondant subsidiairement ses calculs sur ces stipulations conventionnelles.

L'article 4 de l'annexe 1 de la convention collective prévoit : «Conformément à l'article 37 des dispositions communes, une indemnité de licenciement est accordée au cadre licencié dans les conditions suivantes :

a) Cadre ayant de 1 à 5 ans de présence dans l'entreprise au moment du licenciement : 2/10 de mois par année de présence ;

b) Cadre ayant plus de 5 ans de présence dans l'entreprise au moment du licenciement :

-3/10 de mois par année de présence dans la tranche de 0 à 9 ans inclus ;

-4/10 de mois par année de présence dans la tranche de 10 à 19 ans inclus ;

-5/10 de mois par année de présence dans la tranche à partir de 20 ans,

Le calcul est effectué sur la base du 12e de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule la plus avantageuse pour l'intéressé, le tiers des 3 derniers mois, étant entendu que, dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel qui aurait été versée au salarié pendant cette période ne serait prise en compte que pro rata temporis. L'indemnité ne pourra dépasser un maximum de 12 mois.

Lorsque le cadre congédié est âgé de 50 ans révolus et compte au moins 15 ans d'ancienneté comme cadre dans l'entreprise, l'indemnité de licenciement fixée ci-dessus est majorée de :

-15 % entre 50 et 55 ans ;

-20 % à partir de 55 révolus.

Le calcul des appelants n'apparaissant pas critiquable, l'indemnité conventionnelle de licenciement sera fixée à la somme de 30.083,34 €.

L'indemnité compensatrice de préavis de trois mois, s'établit à 15.091,98 € outre 1.509,20 € de congés payés afférents.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [E], de son âge (51 ans), de

son ancienneté (15 ans et trois mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, une somme de 60.400 € à titre d'indemnité pour licenciement abusif.

Sur le préjudice moral

Les appelants indiquent que le conseil de prud'hommes a omis de statuer sur la demande, que M. [E] a subi un préjudice majeur au regard de l'impact sur sa santé du comportement de la société REPROSCAN sur sa santé, conduisant à son décès.

La société REPROSCAN conteste tout lien entre le contexte professionnel et le décès de M. [E], rappelant qu'elle a dû faire part de ses observations sur les difficultés personnelles et familiales de M. [E] durant l'enquête sur la maladie professionnelle.

Les avis d'arrêts de travail versés aux débats sont consécutifs aux faits de harcèlement moral qui est à l'origine de ces arrêts maladie successifs et par suite de l'inaptitude du salarié ; ces faits se sont déroulés sur une période allant de novembre 2016 jusqu'au 05/06/2017 ; le décès par suicide du salarié est certes intervenu le 08/04/2019 certes après le licenciement mais après que la CPAM a reconnu le 08/01/2019 le caractère professionnel de la maladie, alors même qu'il est établi par le certificat du Dr [H] du 25/10/2019 que le salarié présentait «présentait un syndrome anxio-dépressif majeur avec passage à l'acte suicidaire», ce qui a été le cas. Dans ce contexte particulier, le préjudice moral subi par le salarié sera réparé par la somme de 20.000 € de dommages-intérêts.

La SARL REPROSCAN sera condamnée au paiement de ces sommes.

Les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, soit à réception de la convocation devant le bureau de conciliation, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts par annuités échues sera ordonnée.

Il sera ordonné la remise d'un certificat de travail et d'une indemnité Pôle emploi conformes au présent arrêt.

Sur les autres demandes

Succombant, la SARL REPROSCAN supporte les dépens de première instance et d'appel, les dispositions de première instance étant confirmées.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, il convient d'allouer aux consorts [E] une indemnité de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

DECLARE la demande de jonction sans objet,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] [E] aux torts de la SARL REPROSCAN, et l'a condamnée à la remise de fiches de paie conformes au jugement ainsi qu'à payer à M. [V] [E] une indemnité de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

DIT que M. [V] [E] a été victime de faits de harcèlement moral,

DIT que la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL REPROSCAN à payer à Mme [Y] [Z], Mlle [F] [E] et M. [W] [E] les sommes qui suivent :

-30.083,34 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-15.091,98 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1.509,20 € de congés payés afférents,

-60.400 € à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

-20.000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral,

DIT que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, soit à réception de la convocation devant le bureau de conciliation, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter du présent arrêt avec capitalisation,

ORDONNE à la SARL REPROSCAN de remettre à Mme [Y] [Z], Mlle [F] [E] et M. [W] [E] la remise d'un certificat de travail et d'une indemnité Pôle emploi conformes au présent arrêt,

CONDAMNE la SARL REPROSCAN à payer à Mme [Y] [Z], Mlle [F] [E] et M. [W] [E] une indemnité de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL REPROSCAN aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

Nadine BERLY

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 19/02062
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;19.02062 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award