La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2022 | FRANCE | N°20/02377

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 23 juin 2022, 20/02377


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 23/06/2022





****





N° de MINUTE :

N° RG 20/02377 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TBY2



Jugement (N° 18/00556)

rendu le 07 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Dunkerque







APPELANTE



La SASU Auto Blitz

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 4]<

br>


représentée par Me Déborah Boudjemaa, avocat au barreau d'Arras

ayant pour conseil Me Mazvydas Michalauskas, avocat au barreau de Paris





INTIMÉS



Monsieur [Y] [O]

né le 19 juin 1958 à [Localité 8]

demeurant [A...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 23/06/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/02377 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TBY2

Jugement (N° 18/00556)

rendu le 07 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Dunkerque

APPELANTE

La SASU Auto Blitz

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Déborah Boudjemaa, avocat au barreau d'Arras

ayant pour conseil Me Mazvydas Michalauskas, avocat au barreau de Paris

INTIMÉS

Monsieur [Y] [O]

né le 19 juin 1958 à [Localité 8]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Guillaume Guilluy, membre de la SCP Guilluy Timmerman, avocat au barreau de dunkerque

La société Contrôle Technique Automobile Wavrinois (CTAW)

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Caroline Demeyere, membre de la SELARL Bednarski Charlet & Associés, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 31 mars 2022 tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christine Simon-Rossenthal, présidente de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Céline Miller, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine Simon-Rossenthal, présidente et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 mars 2022

****

Le 18 décembre 2015, Monsieur [Y] [O] a acheté à la société Auto Blitz un véhicule de marque Mercedes modèle classe C 220 CDI Break avant garde immatriculé [Immatriculation 7], présentant 152 709 km au compteur, moyennant un prix de 6 700 euros TTC.

Le jour de la vente, le contrôle technique du véhicule avait été réalisé par la société CTA Wavrinois. Le procès-verbal de contrôle technique faisait état de trois observations sur l'état du véhicule. Monsieur [O] constatait dès la prise en charge du véhicule, sur le chemin du retour à son domicile, diverses anomalies et en particulier une forte odeur de gazole.

A l'initiative de Monsieur [O], un nouveau contrôle technique était réalisé le 28 décembre 2015 par la société Flandres contrôle technique alors que le véhicule présentait au compteur 153 679 km. Le procès-verbal de contrôle faisait état de quinze défauts non mentionnés par le premier contrôle technique.

Monsieur [O] a tenté sans succès de régler le litige avec la société Auto Blitz.

Le cabinet CEA Expertises, mandaté par Monsieur [O], a rendu un rapport amiable faisant état de diverses anomalies et désordres sur le véhicule.

Monsieur [O] a fait procéder au remplacement des plaquettes de frein avant et des flexibles arrières selon facture du garage Leboeuf d'un montant de 478,84 euros.

Par ordonnance en date du 20 octobre 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Dunkerque a ordonné une expertise judiciaire du véhicule.

L'expert judiciaire, M. [L] [R], a déposé son rapport le 18 octobre 2017.

Par acte d'huissier en date du 2 mars 2018, Monsieur [O] a fait assigner la société Auto Blitz et la société CTA Wavrinois devant le tribunal judiciaire de Dunkerque aux fins de voir reconnues leurs responsabilités respectives, sur le fondement des articles 1641 et suivants pour l'une et de l'article 1242 du code civil pour l'autre et de les voir condamnées à l'indemniser de ses préjudices matériels, de jouissance et moral.

Par jugement en date du 7 mai 2020, le tribunal judiciaire de Dunkerque a :

- Rejeté la demande de nullité de l'expertise judiciaire formulée par la SASU Contrôle Technique Automobile Wavrinois ;

- Condamné in solidum la SAS Auto Blitz et la SAS Contrôle Technique Automobile Wavrinois à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :

. 6 598,83 euros au titre des frais de réparation,

. 1 003,10 euros au titre de l'assurance,

. 3 477 euros au titre du préjudice de jouissance,

. 1 000 euros au titre du préjudice moral.

- Rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires ;

- Condamné in solidum la société Auto Blitz et la SAS Wavrinois à payer à Monsieur [O] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné in solidum la société Auto Blitz et la SAS Wavrinois aux dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [R].

La SAS Auto Blitz a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 29 septembre 2020, la SAS Auto Blitz demande à la cour d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- Débouter Monsieur [Y] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins ou conclusions contraires aux présentes ;

- Subsidiairement, ordonner la limitation du préjudice de Monsieur [O] à la somme de 6 700 euros tous chefs de préjudice confondus ;

- Subsidiairement, condamner la CTA Wavrinois à contribuer à parts égales avec la SAS Auto Blitz à la dette vis-à-vis de M. [O] ;

- Débouter dans tous les cas Monsieur [Y] [O] et la CTA Wavrinois de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- Dire que chacune des parties conservera ses dépens et frais irrépétibles.

Elle souligne tout d'abord l'absence de caractère occulte des désordres, faisant valoir que M. [O] était parfaitement informé de l'état du véhicule qu'il a acheté pour un prix dérisoire et dont l'ancienneté et le nombre de kilomètres parcourus ne pouvaient pas laisser de doute quant à son état. Elle ajoute que l'acheteur avait été parfaitement informé des défauts du véhicule matérialisés dans le procès-verbal de contrôle technique du 18 décembre 2015, qu'il en a accepté les risques et qu'il lui appartient d'en assumer la responsabilité, sous réserve de celle du centre Contrôle Technique Automobile Wavrinois, dont la responsabilité est également recherchée par le demandeur. Elle soutient que la qualité de consommateur de M. [O] ne saurait être retenue en l'espèce car aucun élément ne permet de l'affirmer et affirme que l'expert n'avait pas à se prononcer sur ce point, s'agissant d'une qualification juridique échappant à sa mission. Elle ajoute que les défauts relatifs aux pneumatiques et au système de freinage étaient visibles lors de la vente, étant précisé que M. [O] a pu essayer le véhicule avant la vente et se rendre compte du fonctionnement des freins. Elle fait valoir que l'absence de kit bluetooth ne constitue pas un vice caché puisque celle-ci était connue par l'acheteur et que les autres défauts dont se plaint M. [O], notamment l'état de la boîte de vitesse automatique, sont apparus après un usage très intensif du véhicule par l'acquéreur après la vente, de sorte qu'ils ne peuvent être imputables au vendeur.

Subsidiairement, sur le quantum des réparations sollicitées, elle fait valoir que certains chefs de préjudice matériel, à savoir le remplacement des pneumatiques (350 euros), la remise en état du système de freinage (400 euros), les frais de révision, entretien, vidange (302,6 euros), de remplacement de la batterie (222,4 euros) et de kit bluetooth (495,72 euros) ne sauraient en aucun cas être indemnisés dès lors qu' il ne s'agit pas de vices cachés ou qu'il s'agit de défauts inhérents à l'usage intensif du véhicule après la vente. Elle ajoute que l'absence de jouissance n'est pas établie puisque M. [O] a procédé à ses frais à la remise en état du système de freinage, qu'il a continué ensuite d'utiliser le véhicule de manière intensive et qu'il ne justifie pas de la location d'un véhicule de remplacement. Elle soutient que le préjudice moral n'est pas établi. Enfin, elle fait valoir que seul le préjudice prévisible lors de la conclusion du contrat est indemnisable et qu'à ce titre, il convient d'ordonner la limitation du préjudice de M. [O], tous chefs de préjudices confondus, à la somme de 6 700 euros correspondant au prix de vente du véhicule, lequel constitue le préjudice prévisible au delà duquel elle ne peut être tenue à réparation.

Enfin, subsidiairement, sur la contribution à la dette, elle fait valoir que si le jugement entrepris a retenu sa responsabilité in solidum avec le centre de contrôle technique, les proportions de la contribution à la dette n'ont pas été fixées. Elle soutient que pour ce faire, il convient de s'inspirer des dispositions de l'article 1267 al.2 du code civil tel qu'inscrit dans la proposition de loi portant réforme de la responsabilité civile déposée au Sénat le 29 juillet 2020, aux termes duquel'si toutes ou certaines d'elles ont commis une faute, elles contribuent entre elles à proportion de la gravité de leur faute respective et du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable. Si aucune d'elle n'a commis de faute, elles contribuent à proportion du rôle causal du fait générateur qui leur est imputable, ou à défaut par parts égales.' Elle ajoute qu'en l'espèce, sa part contributive ne saurait dépasser 50 % du préjudice de M. [O], de sorte qu'il convient à titre subsidiaire d'infirmer la décision dont appel et de fixer la contribution à la dette par parts égales entre l'appelante et le centre de contrôle technique.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 26 mars 2021, la SASU Centre de contrôle technique automobile du Wavrinois demande à la cour de la recevoir en son appel incident, d'infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dunkerque en date du 7 mai 2020, en toutes ses dispositions, et statuant de nouveau, de :

In limine litis,

- Juger nul le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [R] en date du 12 octobre 2017,

- Le cas échéant, désigner un contre-expert avec la même mission que celle confiée à Monsieur [R]

En toute hypothèse sur le fond,

- Juger que la société CTA Wavrinois ne saurait engager que sa responsabilité délictuelle et non contractuelle sur le fondement de la garantie des vices cachés,

- Juger qu'aucune preuve d'une quelconque faute de la Société CTA Wavrinois, a fortiori volontaire, n'est apportée.

En conséquence,

- Débouter Monsieur [O] de l'ensemble des demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour considérait que la société CTA Wavrinois a engagé sa responsabilité :

- Juger que la responsabilité de la société CTA Wavrinois ne pourrait être recherchée qu'au titre de la perte de chance de pouvoir négocier auprès du vendeur une diminution du prix, perte de chance qui n'est ni alléguée, ni justifiée,

- Débouter en conséquence Monsieur [O] de toute demande de condamnation in solidum de la Société CTA Wavrinois avec la société Auto Blitz,

- Constater l'absence de lien de causalité entre la faute reprochée à la société CTA Wavrinois et les postes de préjudice suivants :

. Le coût du remplacement de la deuxième clef de télécommande d'ouverture et du chargeur CD à hauteur de 261,71 euros HT,

. la remise en état de la boîte de vitesse automatique évaluée à la somme de 3 750 euros HT,

. le remplacement des pneumatiques à hauteur de 350 euros HT,

. la remise en état du système de freinage à hauteur de 399,03 euros HT,

. la remise en état du réglage du frein à main et divers forfait pièces et main d''uvre à hauteur de 250 euros HT,

- En conséquence, débouter Monsieur [O] de toute demande indemnitaire de ces chefs,

- Débouter Monsieur [O] de ses demandes d'indemnisation au titre du préjudice de jouissance fixé au-delà des conclusions de l'expert judiciaire,

- Débouter Monsieur [O] de sa demande de réparation au titre du préjudice moral,

- En toute hypothèse, vu le principe de réparation intégrale, débouter Monsieur [O] de toute demande au-delà de la somme de 6 700 euros correspondant au prix du véhicule payé par Monsieur [O],

- Débouter pareillement la société Auto Blitz de sa demande de condamnation de la société CTA Wavrinois à contribuer à la dette à parts égales,

Infiniment subsidiairement, si par extraordinaire la cour devait condamner in solidum la société CTA Wavrinois avec la société Auto Blitz,

- Juger que la société CTA Wavrinois subit un préjudice du fait de la faute contractuelle de la société Auto Blitz à l'égard de Monsieur [O],

- Condamner en conséquence la société Auto Blitz à garantir la société CTA Wavrinois de toutes condamnations prononcées à son encontre.

En tout état de cause,

- Condamner Monsieur [O] et la société Auto Blitz in solidum à verser à la société CTA Wavrinois la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance.

A cet effet, elle sollicite tout d'abord le prononcé de la nullité du rapport d'expertise en raison d'une part, du défaut de respect du principe du contradictoire par l'expert judiciaire et d'autre part, de l'absence d'impartialité dont celui-ci a fait preuve à l'égard de la société CTAW au cours de l'expertise. Elle fait valoir que la nullité de l'expertise encourue pour défaut de respect des règles du contradictoire visées à l'article 16 du code de procédure civile est une nullité absolue, qui doit être prononcée sans que la partie qui l'invoque ait à justifier d'un grief, tandis que s'agissant des autres causes de nullité encourues par la mesure d'expertise (pour manquement aux règles prévues aux articles 237, 238 et 276 du code de procédure civile notamment), elles ne peuvent entraîner cette nullité qu'à charge pour la partie qui les invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.

Elle soutient que le manquement aux règles du contradictoire est caractérisé en l'absence en annexes du rapport d'expertise des quatre dires de la société CTAW et de ses pièces jointes et en l'absence de réponse par l'expert aux dires n°1 communiqué le 18 janvier 2017 et n° 2 communiqué le 22 mars 2017 dans son pré-rapport du 15 septembre 2017. Elle fait valoir qu'en ne répondant à l'intégralité des dires de la société CTAW que dans son rapport définitif du 12 octobre 2017 reçu le 23 octobre 2017 par les parties, sans réponse possible de ces dernières, l'expert a empêché la société CTAW de faire valoir ses observations sur les réponses apportées par celui-ci, violant ainsi le principe du contradictoire.

Elle met par ailleurs en exergue le défaut d'impartialité de l'expert à son égard lorsqu'il conclut de manière tout à fait péremptoire et subjective, selon elle, qu'elle aurait 'volontairement' omis les défauts à corriger dans son rapport de contrôle, se fondant sur les seules affirmations de M. [O], sans aucun élément probant et objectif alors que ces allégations sont formellement contestées par le centre de contrôle technique, et ce alors que l'appréciation du caractère intentionnel du comportement fautif de la société CTWA est une appréciation à caractère juridique à laquelle ne peut procéder l'expert. Elle ajoute que le grief que lui cause cette appréciation est évident puisqu'elle est de nature à entraîner sa responsabilité pénale.

Sur le fond et à titre principal, elle soutient qu'elle ne pourrait être tenue responsable des dommages subis par M. [O] que sur le fondement délictuel et non sur le fondement de la garantie des vices cachés, mais que dès lors qu'aucune faute dans la réalisation de sa mission de contrôleur technique n'est établie, sa responsabilité ne peut être engagée. Elle fait valoir que le tribunal judiciaire a considéré à tort qu'en omettant de faire figurer au procès-verbal du 18 décembre 2015 les vices constatés dix jours plus tard par le second contrôle technique réalisé par la société Flandres Contrôle Technique à la demande de M. [O], elle aurait commis une faute et pour le moins une grave négligence fautive qui engagerait sa responsabilité.

Elle rappelle que selon l'arrêté du 18 juin 1991, la responsabilité du contrôleur technique ne peut être retenue que si les vices du véhicule peuvent être décelés sans démontage, sa mission consistant à effectuer visuellement, sans démontage quelconque, même d'un cache, et sans faire rouler le véhicule, un contrôle des points techniques et limitativement énumérés à l'annexe de l'arrêt. Elle ajoute que cette responsabilité ne peut être recherchée qu'en cas de faute ou de négligence susceptible de mettre en cause la sécurité du véhicule, que la vérification obligatoire opérée dans le cadre du contrôle technique n'a pas d'influence sur la garantie des vices cachés dès lors que le contrôleur ne vérifie pas toutes les pièces du véhicule mais uniquement un certain nombre de points réglementaires après un contrôle visuel sans démontage. Elle ajoute enfin que le contrôleur n'est tenu qu'à une obligation de moyen auprès de son client, mais qu'en l'espèce, la société CTWA étant tiers au contrat existant entre la société Auto Blitz et M. [O], sa responsabilité ne peut être engagée, non pas sur le fondement de la garantie des vices cachés, mais en prouvant une faute délictuelle, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et ce préjudice. Elle fait valoir qu'elle a procédé au contrôle technique du véhicule litigieux dans les règles de l'art et que les mesures relevées étaient conformes aux normes requises ; qu'il n'est nullement établi que la fuite de gazole et la fuite de liquide au niveau de la réserve d'huile de la boîte de vitesse existaient au jour du contrôle technique puisqu'elle a pu effectuer le contrôle d'opacité lors de son examen du 18 décembre 2015 ; qu'il ne peut être exclu que le véhicule ait été nettoyé avant le contrôle technique de la société CTAW, que qui expliquerait qu'une éventuelle fuite de carburant n'ait pu être détectée lors du contrôle visuel effectué à ce titre le 18 décembre 2015, contrairement au second contrôle technique effectué par M. [O] dix jours plus tard ; que les désordres affectant la boîte de vitesse relevés par l'expert judiciaire n'avaient été relevés ni par le contrôle technique de la société Flandres Contrôle Technique ni par l'expert amiable, de sorte que la société CTAW ne saurait être déclarée responsable d'un quelconque défaut concernant la boîte de vitesse, et ce d'autant qu'il n'est pas établi ni que ces désordres existaient au jour du contrôle technique réalisé, ni que ceux-ci compromettraient la sécurité du véhicule ; que s'agissant des flexibles de frein arrière, ceux-ci ont été remplacés par M. [P] et les anciens n'ont pas été conservés, de sorte qu'il est impossible d'affirmer qu'une quelconque détérioration de ces flexibles aurait été visible lors du contrôle technique réalisé par la société CTAW ; qu'il en est de même des plaquettes de frein également remplacées sans conservation des anciennes ; que s'agissant de l'usure des pneus, il n'est pas établi que les pneus présents sur le véhicule au jour de l'expertise (qu'elle soit amiable ou judiciaire) aient été les mêmes que ceux présents lors du contrôle technique réalisé par la société CTAW ; qu'en toute hypothèse, un kilométrage important a été réalisé par M. [P] entre le premier contrôle technique réalisé le jour de la vente et l'expertise amiable, de même qu'entre les deux contrôles techniques ; que s'agissant du flexible de frein qui se serait rompu, le contrôle volontaire effectué par M. [P] auprès de Flandres Contrôle Technique indiquait seulement une 'détérioration mineure' ; qu'en réalité, il semble que le véhicule de M. [P] ait subi un choc, fut-il léger, qui a entraîné les défauts constatés lors de l'expertise (fuite de carburant, frottement de roue à l'avant droit, fissuration des plaquettes de frein à l'avant droit...), hypothèse émise par CTAW dès ses conclusions de référé, puis ses dires devant l'expert judiciaire qui n'y a pas répondu ; que l'expert ne répond pas plus dans son rapport à la question de l'impact qu'a pu avoir l'accumulation des kilomètres parcourus par le véhicule depuis le contrôle effectué par la société CTAW sur les désordres constatés.

Elle soutient à titre subsidiaire que si, par extraordinaire, la cour devait confirmer le jugement entrepris en retenant la responsabilité délictuelle de la société CTAW, l'évaluation du préjudice de M. [O] devrait nécessairement tenir compte du fait que la responsabilité de la société Auto Blitz est engagée à raison d'une faute distincte sur un fondement distinct, celui de la garantie des vices cachés, du fait que la faute du contrôleur technique, si elle est établie, ne peut entraîner réparation qu'au titre de la perte de chance de ne pas contracter ou de négocier une diminution du prix, laquelle ne peut être égale à la totalité de la somme escomptée et que dès lors, une condamnation in solidum des sociétés Auto Blitz et CTAW ne peut être prononcée, une telle condamnation ne pouvant intervenir que lorsque les responsables ont tous deux commis une faute ayant concouru à la survenance d'un même dommage. Elle ajoute qu'en vertu du principe de réparation intégrale qui ne permet ni perte ni profit pour la victime, le droit au remboursement des frais de remise en état d'une chose endommagée a pour limite sa valeur de remplacement et qu'en conséquence, il ne saurait être alloué à M. [O] une somme supérieure au prix payé pour le véhicule, soit 6 700 euros.

Enfin, dans l'hypothèse extraordinaire où la cour la condamnerait in solidum avec la société Auto Blitz, elle demande la condamnation de cette société à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre, la société CTAW subissant un préjudice du fait de la faute contractuelle de la société Auto Blitz à l'égard de M. [O]. Elle ajoute que la société Auto Blitz ne pourra corrélativement qu'être déboutée de sa demande tendant à fixer la part contributive de la société CTAW à 50 % du préjudice prétendument subi par M. [O].

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 28 décembre 2020, Monsieur [O] demande à la cour de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dunkerque le 07 mai 2020 en ce que la demande de nullité du rapport d'expertise judiciaire formulée par la société SAS Wavrinois a été rejetée, que les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois ont été déclarées responsables in solidum du préjudice subi par M. [O], que les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois ont été condamnées in solidum aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise de M. [R], ainsi qu'au règlement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance par M. [O],

Le réformer concernant les montants alloués à M. [O] à titre de dommages et intérêts et, statuant de nouveau :

- Condamner in solidum les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois à verser à M. [O] la somme de 10 467,87 euros euros à titre de préjudice matériel,

- Condamner in solidum les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois à verser à M. [O] la somme de 13 110 euros au titre du préjudice de jouissance,

- Condamner in solidum les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois à verser à M. [O] la somme de 10 euros par jour au titre du préjudice de jouissance jusqu'au règlement intégral des dommages et intérêts alloués au titre du préjudice matériel,

- Condamner in solidum les SAS Auto Blitz et CTA Wavrinois à verser à M. [O] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- Condamner in solidum les sociétés Auto Blitz et CTA Wavrinois à verser à M. [O] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Condamner in solidum les sociétés Auto Blitz et CTA Wavrinois aux entiers dépens d'instance.

Il fait essentiellement valoir qu'il ressort de l'expertise judiciaire que le véhicule était affecté de vices graves, le rendant impropre à son usage et antérieurs à la vente ; que le vendeur professionnel étant tenu de connaître les vices affectant la chose, il doit à ce titre réparation de l'intégralité du préjudice subi par l'acquéreur par application de l'article 1645 du code civil ; que la SAS Auto Blitz engage donc sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du code civil ; que par ailleurs, concernant l'absence d'équipements (lecteur CD, deuxième clef, kit bluetooth), elle engage sa responsabilité sur le fondement de l'obligation de délivrance conforme des articles 1604 et suivants du code civil.

Il conteste avoir eu connaissance des vices affectant le véhicule dès lors que le procès-verbal de contrôle technique du 18 décembre 2015 qui lui a été présenté lors de la vente ne mentionnait que trois défauts alors que celui du 28 décembre 2015 établi à son initiative par la société Flandres Contrôle Technique mentionnait 15 défauts ; que l'expertise judiciaire a établi le comportement frauduleux du contrôleur technique partenaire de la société Auto Blitz, la société CTA Wavrinois, qui a volontairement omis des défauts afin de le tromper ; que s'agissant de l'état des pneumatiques et de défectuosité du système de freinage qu'il aurait pu détecter avant la vente, il précise qu'il n'a pu effectuer qu'un seul et unique essai routier qui ne lui a pas permis de détecter ces défauts en quelques minutes ; qu'en tout état de cause, il est un consommateur non averti ne disposant d'aucune compétence particulière en mécanique ; qu'il ignorait l'absence du kit bluetooth puisque précisément la présence d'un tel kit était mentionnée dans l'annonce publiée sur le site internet 'le Bon coin' ; que les autres défauts ne sont pas apparus à la suite d'un usage abusif de sa part du véhicule puisqu'il n'a parcouru qu'environ 500 kilomètres par semaine entre la vente et la première expertise ; que l'expert a en tout état de cause expressément précisé dans son rapport que les désordres étaient pré-existants à la vente.

Sur la validité de l'expertise judiciaire, il soutient que l'expert n'a aucunement l'obligation de répondre par un pré-rapport à chacun des dires formulés par les parties et que dès lors que celui-ci a répondu au dire n°4 de la société CTA Wavrinois, lequel est censé avoir récapitulé les dires précédents, aucune irrégularité ne peut être constatée ; qu'en tout état de cause, l'inobservation des formalités prescrites à l'article 276 n'entraîne la nullité de l'expertise qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause cette irrégularité ; qu'en l'espèce, l'expert judiciaire a répondu avec une grande précision à l'ensemble des questions posées par la juridiction et que la société CTA Wavrinois n'explique pas en quoi l'absence de réponse à ses trois premiers dires lui causerait un quelconque grief. Il fait valoir qu'en indiquant que la société CTA Wavrinois avait volontairement omis de mentionner les défauts à corriger dans son contrôle technique du 18 décembre 2015, l'expert n'a aucunement outrepassé ses fonctions, aucune disposition du code de procédure civile n'empêchant l'expert de se prononcer sur le caractère intentionnel des fautes commises par un professionnel de l'automobile.

Il soutient que le contrôleur technique, qui est contractuellement tenu d'une obligation de moyen à l'égard de son client en vertu de laquelle il s'engage à apporter dans son travail tout le soin, l'attention et la diligence que l'on est en droit d'attendre d'un professionnel, engage sa responsabilité délictuelle à l'égard de l'acquéreur du véhicule dès lors qu'il a commis des négligences dans l'exécution de sa mission et qu'il existe un lien de causalité entre les fautes commises et les dommages subis par l'acquéreur du véhicule. Il ajoute qu'en l'espèce, la négligence de la société CTA Wavrinois est avérée, l'expert judiciaire ayant estimé que le contrôleur technique avait établi son rapport en omettant volontairement les défauts à corriger avec obligation d'une contre-visite. Il fait valoir qu'en raison de ces agissements particulièrement graves et de leur caractère intentionnel, la société de contrôle technique, qui agit de concert avec le vendeur pour tromper les acquéreurs potentiels des véhicules, doit être tenue de réparer son entier préjudice. Il ajoute que le kilométrage qu'il a réalisé postérieurement à la vente est tout à fait raisonnable et que l'expert a exclu tout lien de cause à effet entre l'utilisation du véhicule et l'apparition des désordres, estimant qu'ils étaient tous préexistants à la vente ; que l'expert a également exclu que le véhicule ait subi un nettoyage préalablement au contrôle technique litigieux ; que l'hypothèse selon laquelle le véhicule aurait éventuellement subi un choc postérieurement à la vente n'a pas été soumise à l'expert lors de la réunion, que si elle a été évoquée dans les dires 2 et 3 du contrôleur technique, elle n'a pas été reprise dans son dire récapitulatif, de sorte que l'expert a pu penser que ces observations avaient été abandonnées et qu'il n'avait pas à y répondre ; qu'en tout état de cause, aucun élément technique ne vient corroborer la thèse d'un accident postérieur à la vente. Il rappelle que la faute délictuelle ne nécessite pas de caractère intentionnel, mais qu'en l'espèce, le caractère volontaire des omissions relevées par l'expert est incontestable.

Sur l'indemnisation de son préjudice, il soutient qu'en application de l'article 1644 du code civil, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix ; que ce choix est libre et qu'il n'a pas à en justifier; qu'il ne peut lui être opposé le fait que le montant des réparations excède la valeur vénale du véhicule ; que les dommages et intérêts alloués par le premier juge doivent être majorés, son préjudice matériel et de jouissance ayant duré bien plus que deux années ; que son préjudice moral lié au fait d'avoir transporté sa famille dans un véhicule porteur de vices grave présentant un danger immédiat pour son utilisateur et les autres usagers de la route est caractérisé ; qu'il convient de prononcer une condamnation in solidum entre la société venderesse et la société de contrôle technique, chacune d'entre elle ayant contribué à la survenance du préjudice, l'une en commercialisant en toute mauvaise foi un préjudice affecté de vices graves et l'autre en omettant volontairement de mentionner sur le contrôle technique les éléments nécessitant une contre-visite.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I - Sur l'expertise judiciaire

Aux termes de l'article 232 du code de procédure civile, 'le juge peut commettre toute personne de son choix pour l'éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert les lumières d'un technicien.'

L'article 237 dudit code dispose que 'le technicien commis doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité.'

L'article 238 ajoute que 'le technicien doit donner son avis sur les points pour l'examen desquels il a été commis. Il ne peut répondre à d'autres questions, sauf accord écrit des parties. Il ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique.'

L'article 244 précise que 'le technicien doit faire connaître dans son avis toutes les informations qui apportent un éclaircissement sur les questions à examiner. Il lui est interdit de révéler les autres informations dont il pourrait avoir connaissance à l'occasion de l'exécution de sa mission. Il ne peut faire état que des informations légitimement recueillies.'

L'article 246 ajoute que 'le juge n'est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien.'

**

Par ailleurs, en vertu de l'article 16 du code de procédure civile, 'le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.'

Aux termes de l'article 276 dudit code, 'l'expert doit prendre en considération les observations ou réclamations des parties, et, lorsqu'elles sont écrites, les joindre à son avis si les parties le demandent. Toutefois, lorsque l'expert a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations, il n'est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, à moins qu'il n'existe une cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fait rapport au juge. Lorsqu'elles sont écrites, les dernières observations ou réclamations des parties doivent rappeler sommairement le contenu de celles qu'elles ont présentées antérieurement. A défaut, elles sont réputées abandonnées par les parties. L'expert doit faire mention, dans son avis, de la suite qu'il aura donnée aux observations ou réclamations présentées.'

Aux termes des dispositions combinées des articles 114 alinéa 2, 175 et 176 du code de procédure civile, la nullité d'une expertise ne peut être prononcée qu'à la charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.

En l'espèce, la mission d'expertise adressée à M. [L] [R] lui demandait notamment de 'répondre, conformément aux dispositions de l'article 276 du code de procédure civile, à tous dires ou observations des parties auxquelles sont communiqués, avant d'émettre l'avis sur l'évaluation définitive des travaux de réparation, soit une note de synthèse, soit un pré-rapport comportant toutes les informations sur l'état de ses investigations et tous les documents relatifs notamment aux devis et propositions chiffrés concernant les diverses évaluations'.

Il résulte des éléments versés aux débats qu'à la suite de la réunion d'expertise qui s'est tenue le 2 février 2017, à laquelle les parties ont été convoquées par lettres recommandées avec avis de réception, l'expert a établi un pré-rapport le 15 septembre 2017, dans lequel il relate ses constatations effectuées sur le véhicule, évalue le montant et la durée prévisibles des travaux à effectuer, le montant des frais annexes et des frais d'immobilisation du véhicule, donne son avis d'expert sur les vices affectant le véhicule et les responsabilités encourues et laisse aux parties un délai de 20 jours pour lui faire valoir leurs éventuelles observations sous forme de dire auquel il indique qu'il répondra dans le corps du rapport définitif.

Le conseil de la société CTAW a adressé à l'expert quatre dires, dont les deux premiers, en date des 18 janvier et 22 mars 2017, sont antérieurs au pré-rapport, et les deux derniers sont datés du 11 octobre 2017.

La société CTAW reproche à l'expert de n'avoir pas répondu à ses deux premiers dires dans le cadre de son pré-rapport, mais uniquement dans le cadre de son rapport définitif, en date du 12 octobre 2017.

Cependant, la cour observe que dès lors que l'expert a bien répondu dans son rapport définitif aux différents dires émis par le conseil de la société CTAW, celui-ci a respecté les dispositions de l'article 276 du code de procédure civile, lequel n'impose pas à l'expert de répondre au fur et à mesure aux dires des parties, mais simplement de répondre à leurs dires et observations après leur avoir communiqué son pré-rapport.

La cour relève au surplus que la société CTAW a pu largement faire valoir ses observations sur les réponses apportées par l'expert à ses dires dans le cadre du débat contradictoire judiciaire.

Le fait que l'expert ait qualifié M. [P] de 'particulier qui n'a aucune compétence professionnelle en matière d'automobile' constitue une réponse factuelle à l'une des questions posées dans le cadre de la mission d'expertise et non une appréciation juridique.

Enfin, le fait que l'expert ait pu qualifier de 'volontaires' les omissions fautives de la société CTWA dans son rapport de contrôle technique ne constitue pas un manquement de l'expert à son devoir d'impartialité mais là encore, une réponse à la question suivante posée dans le cadre de la mission d'expertise : 'Donner tous éléments techniques complémentaires permettant à la juridiction saisie d'évaluer le préjudice subi par le propriétaire du véhicule et de déterminer les éventuelles responsabilités encourues.'

Dès lors, c'est à juste titre que le premier juge a écarté la demande de nullité de l'expertise et que, constatant par ailleurs que l'expertise était complète etqu'il disposait de suffisamment d'éléments techniques pour statuer, il n'a pas fait droit à la demande de contre-expertise.

II- Sur la responsabilité du vendeur la SAS Auto Blitz

A/ Sur la garantie des vices cachés

Aux termes des dispositions de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères. Il doit ainsi établir que la chose vendue est atteinte d'un vice :

- inhérent à la chose et constituant la cause technique des défectuosités,

- présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose,

- existant antérieurement à la vente, au moins en l'état de germe,

- n'étant, au moment de la vente, ni apparent ni connu de lui, le vendeur n'étant pas tenu ' des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même' conformément à l'article 1642 du code civil,

- et d'une importance telle que s'il en avait eu connaissance, il n'aurait pas acquis la chose ou n'en aurait offert qu'un moindre prix.

* Sur l'existence des vices cachés

Il est constant que lorsque Monsieur [Y] [O] a acheté le 18 décembre 2015 à la société Auto Blitz un véhicule de marque Mercedes modèle classe C 220 CDI Break avant garde, mis pour la première fois en circulation le 14 mars 2006 et présentant 152 709 kms au compteur, il lui a été présenté le jour de la vente un contrôle technique du véhicule réalisé le même jour par la société CTA Wavrinois, faisant état de trois défauts à corriger sans obligation d'une contre-visite :

- 2.1.1.1.2. Angles, ripage AV : ripage excessif

- 4.1.1.1.1. Feu de croisement : réglage trop bas (G)

- 6.2.6.1.1. Pare-boue, protection sous moteur : anomalie de fixation et/ou mauvais état.

M. [Y] [O] a fait effectuer un nouveau contrôle technique le 28 décembre 2015 par la société Flandres Contrôle technique, alors que le véhicule présentait 153 679 km au compteur et avait donc roulé 970 kilomètres depuis la vente. Ce contrôle technique relevait quinze défauts :

- 1.2.4.1.1. Flexibles de frein : détérioration mineure (ARG, ARD)

- 1.3.2.2.1. Commande du frein de stationnement : course importante

- 1.4.4.1.1. Plaquette de frein : usure prononcée/détérioration (AVD)

- 2.1.1.1.2. Angles, ripage av : ripage excessif

- 3.1.1.1.1. Pare-brise : mauvais état

- 4.1.1.1.2. Feu de croisement : réglage trop haut et/ou faisceau non conforme

- 5.2.4.1.1. Demi-train AV ( y compris ancrages) : jeu mineur rotule et/ou articulation (G,D)

- 5.2.5.1.1. Demi-train AR ( y compris ancrages) : jeu mineur rotule et/ou articulation (SUPG, SUPD)

- 5.3.1.2.2. Roue : frottements sur carrosserie et/ou éléments mécaniques (AVD)

- 5.3.2.1.3. Pneumatique : usure irrégulière (AVG,AVD)

- 5.3.2.2.4. Pneumatique : Pression anormale (AVG, AVD, ARG, ARD)

- 6.1.4.1.1. Berceau : corrosion (AR)

- 6.2.6.1.1. Pare-boue, protection sous moteur : anomalie de fixation et/ou mauvais état (AVD, AV)

- 8.2.1.3.1. Circuit de carburant (AV) : fuite (AV)

- 9.1.2.2.6. Opacité des fumées d'échappement : contrôle impossible (fuite importante de carburant).

M. [M], expert amiable mandaté par la protection juridique de M. [O], a examiné le véhicule le 4 février 2016 en présence de M. [O] et des représentants des centres de contrôle technique CTA Wavrinois et Flandres Contrôle technique, en l'absence du garage Auto Blitz pourtant régulièrement convoqué et alors que le véhicule présentait 155 821 km au compteur, soit 3 112 kilomètres parcourus depuis la vente. Il a relevé les constatations suivantes :

- Bocal liquide de frein vide

- Craquelures des flexibles de freins arrières

- Fuite importante de lookeed au niveau du flexible arrière gauche

- Course importante commande frein de stationnement

- Impacts zone de vision passagère, un impact zone de vision conducteur léger

- Plaquettes de frein légèrement fissurées côté intérieur à l'avant-droit

- Usure irrégulière pneumatiques avant côté extérieur

- Défaut de fixation du pare boue avant droit

- Corrosion superficielle du berceau arrière

- Craquelures des silentblocs de bras inférieurs avant gauche et droit

- Coupelle d'amortisseurs arrières gauche et droit hors d'usage

- Fuite importante de gazole en provenance de la pompe d'injection

- Le désordre au niveau de la boîte n'est pas matérialisable, essai du véhicule non réalisable en raison de la fuite de lookeed

- en l'état, le véhicule est dangereux et doit impérativement être transféré sur véhicule de dépannage.

Il conclut que M. [O] a fait l'acquisition auprès du garage Auto Blitz d'un véhicule dont la pompe d'injection gazole dévoilait une fuite importante, dont les plaquettes de freins avant, coupelles d'amortisseurs arrière, silenblocs de bras avant et flexibles de freins arrière étaient hors d'usage au moment de la vente. Il ajoute que le véhicule a été vendu avec des pneumatiques avant qui dévoilaient une usure irrégulière extérieure et dont la boîte de vitesse était défaillante.

Il évalue le coût de la remise en état nécessaire (remplacement de la pompe d'injection, tuyaux, de l'alternateur, remplacement des silenblocs, coupelles d'amortisseurs, pare boue avant droit, pneumatiques avant, courroie accessoire, vis) à la somme de 4 682,28 euros TTC suivant devis du garage Vereenooghe, outre la remise en état de la boîte de vitesse consistant en un remplacement du filtre et vidange pour un montant de 302,80 euros TTC suivant devis du même garage. Il précise que M. [O] a fait procéder au remplacement des plaquettes de freins avant et flexibles arrière suivant facture n° 34423 du garage Leboeuf, pour un montant de 478,84 euros TTC.

Le rapport d'expertise judiciaire en date du 12 octobre 2017 rédigé par M. [L] [R] après avoir réuni les parties ( à l'exception du vendeur Auto Blitz ni présent, ni représenté, ni excusé) et examiné le véhicule le 2 février 2017, alors qu'il avait parcouru 7 720 kms depuis son acquisition, relève les désordres suivants :

'Dès l'ouverture du capot, je constate et perçois une odeur prenante de gasoil en provenance de l'environnement du moteur ainsi qu'une fuite de gasoil importante dans l'environnement de la pompe à gasoil.

Je constate également une fuite de liquide au niveau de la réserve d'huile de la boîte de vitesse.

(...) Je constate qu'il n'y a pas de défauts d'ordre électrique. (...)

Le moteur démarre normalement mais présente une importante fuite de gasoil localisée sur la pompe d'injection haute pression.

Je relève que la boîte de vitesse présente deux désordres, une fuite d'huile et un patinage excessif et anormal.'

Après élévation du véhicule, l'expert constate également que 'le pare-boue est décroché de ses fixations et frotte sur le pneumatique et s'est usé à son contact.

J'observe que la fuite de gasoil s'est propagée sur tout le soubassement et a immaculé le dessous de caisse dont je peux dire que cette fuite est très antérieure à la vente intervenue.(...)'

Sur le plan sécuritaire, l'expert relève que les flexibles de frein arrière sont neufs (pièces remplacées non conservées), que la course de frein à main est très importante et inopérante, que les plaquettes de freins avant sont neuves (pièces remplacées non conservées) et que les pneumatiques avant présentent une usure irrégulière sur les bandes de roulement extérieures.

Il évalue le coût des travaux nécessaires à 750 euros pour la remise en état de la pompe haute pression, 3 750 euros pour la remise en état de la boîte de vitesse automatique, 350 euros pour le remplacement des pneumatiques, 399,03 euros pour la remise en état du système de freinage (réparations déjà effectuées suivant facture du garage Leboeuf) et 250 euros pour la remise en état du réglage de frein à main et divers forfait pièces et main d'oeuvre.

Il estime en outre nécessaire une révision des points de sécurité avant remise en circulation pour un montant de 300 euros et chiffre diverses autres prestations de révision/entretien vidange moteur et filtre à huile suite à la prestation de remplacement de la pompe haute pression, outre le remplacement de la batterie.

Dans ses conclusions, en considération de son examen du véhicule, des pièces transmises et de l'absence totale du vendeur du véhicule, l'expert retient que les désordres décrits excluent toute faute du conducteur que ce soit d'utilisation ou d'entretien du véhicule. Il indique qu'il se trouve 'en présence d'un véhicule porteur de vices graves, présentant un danger immédiat pour son utilisateur et les autres usagers de la route du fait principalement de l'état de dangerosité notamment en ce qui concerne le système de freinage, les pneumatiques avant, les fonctions moteur et boîte de vitesses générée par les fuites de gasoil et d'huile et patinage, et ce depuis bien longtemps.' et ajoute que 'cet état existait évidemment lors du contrôle effectué le 18 décembre 2015 par le centre de contrôle technique CTA Wavrinois'. Dans sa réponse aux dires formulés par le centre de contrôle technique CTAW, l'expert confirme sans réserve que la fuite importante de carburant se trouvait existante et présente lors de la réalisation du contrôle technique du 18 décembre 2015 et qu'elle ne pouvait pas échapper à l'oeil du contrôleur technique. Il précise que le groupe moteur n'a pas subi de nettoyage au karcher car les accumulations de dépôts graisseurs et amalgames de terres et suies sont encore bien visibles sur le moteur et son compartiment et le soubassement.

Il relève par ailleurs que le véhicule présente de nombreux autres désordres, tous témoins d'un usage et d'une usure prononcée, précisant qu'on peut dire qu'il n'a subi aucune réparation, ni révision et préparation avant sa vente par le vendeur SAS Auto Blitz malgré ses engagements pris lors de la vente de faire les réparations avant la vente.

Il ajoute que 'le véhicule est notoirement entaché de vices cachés, non décelables par un acquéreur profane.'

Or, alors que l'expert ne détaille pas, parmi les défauts graves relevés affectant la sécurité du véhicule, si l'ensemble de ces défauts étaient cachés, la cour estime que l'état d'usure des pneumatiques, visible à l'oeil nu et sans démontage, pouvait être relevé par un acquéreur profane normalement diligent, quoique sa mention sur le procès-verbal de contrôle technique aurait permis d'attirer son attention sur ce désordre et lui aurait permis le cas échéant de négocier le prix de vente à la baisse.

Dès lors, la cour ne retiendra pas l'usure des pneumatiques comme étant constitutive d'un vice caché, tandis que les autres désordres majeurs concernant le système de freinage, les fonctions moteur et boîte de vitesse, générés par les fuites de gasoil et d'huile, doivent être considérés comme des vices présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose, existant antérieurement à la vente, au moins en l'état de germe, n'étant, au moment de la vente, ni apparents ni connu de l'acquéreur et d'une importance telle que s'il en avait eu connaissance, il n'aurait pas acquis la chose ou ne l'aurait acquise que pour un moindre prix, étant précisé que le montant des travaux de remise en état nécessaires pour la simple sécurisation du véhicule (remises en état de la pompe haute pression, de la boîte de vitesse automatique, du système de freinage et du réglage de frein à main) s'élève à la somme de 5 149,03 euros alors que le véhicule a été acquis pour la somme de 6 700 euros.

* Sur la réparation des préjudices

Aux termes de l'article 1644 du code civil, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

En application de ce texte, l'acheteur n'a pas à rendre compte de son choix, étant précisé que la restitution de 'partie du prix' implique que le préjudice matériel subi soit inférieur au coût de l'acquisition.

L'article 1645 précise d'ailleurs que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur,

La possibilité d'allouer des dommages et intérêts complémentaires en sus de la restitution du prix implique que le quantum total des réparations allouées à l'acquéreur peut être supérieur au montant du prix, le dispositif légal ne prévoyant pas de limitation à cet égard.

La SAS Auto Blitz, vendeur du véhicule litigieux, étant un garage professionnel, elle est présumé avoir eu connaissance du vice affectant la chose et sera en conséquence tenue de tous les dommages et intérêts envers l'acquéreur conformément à l'article 1645 susvisé.

Il convient en conséquence d'allouer à M. [O], qui souhaite conserver le véhicule et se faire indemniser du montant des travaux nécessaires à la réparation des vices cachés constatés la somme de 5 149,03 euros correspondant au montant des travaux nécessaires pour la reprise des vices nécessaire à la simple sécurisation du véhicule (remise en état de la pompe haute pression, de la boîte de vitesse automatique, du système de freinage et du réglage de frein à main), outre la somme de 300 euros correspondant à la révision sur les points de sécurité estimée nécessaire par l'expert avant la remise en circulation du véhicule.

M. [O] sera en revanche débouté de sa demande d'indemnisation au titre des frais annexes indispensables à l'utilisation du véhicule, à savoir les frais de révision, entretien, vidange et de remplacement de batterie, compte tenu du kilométrage effectué par M. [O] depuis l'acquisition du véhicule et ces frais n'étant pas liés aux vices cachés.

En l'absence de justificatifs produits des mensualités d'assurance qu'il aurait payées pendant l'immobilisation du véhicule, il sera également débouté de cette demande, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.

S'agissant du préjudice de jouissance subi par M. [O], l'expert relève que le véhicule est immobilisé depuis le 14 mai 2016 et évalue le préjudice subi à 1/1000ème de la valeur du véhicule par jour d'immobilisation pendant 519 jours. M. [O] sollicite la fixation de ce préjudice à 10 euros par jour d'immobilisation conformément aux préconisations du 'bureau central français en la matière' sur une durée de 1 311 jours au 16 décembre 2019. Pour appuyer ses prétentions, il produit un document intitulé 'recommandation pour le règlement des postes de préjudice 'immobilisation' et frais de location' en droit commun', dont rien ne permet d'identifier l'origine ni le rédacteur. La cour observe cependant que le véhicule a manifestement continué à rouler après l'achat, puis le contrôle technique volontaire du 28 décembre 2015 puis l'expertise amiable, après que M. [O] ait fait remplacer les plaquettes et flexibles de frein, à tel titre que lors des opérations d'expertise judiciaire effectuée en février 2017, il avait parcouru 7 720 kilomètres depuis la vente. M. [O] ne produit par ailleurs pas de facture d'achat ou de location d'un véhicule de remplacement. Dès lors, il convient d'infirmer le premier juge en ce qu'il a condamné la SAS Auto Blitz à payer un préjudice de jouissance à M. [O], et statuant à nouveau, de le débouter de sa demande à ce titre.

S'agissant du préjudice moral, si le premier juge a considéré que ce préjudice était caractérisé dès lors que M. [O] a été amené à conduire un véhicule qualifié par l'expert de dangereux pour le conducteur et les autres usagers de la route, la cour estime cependant que, compte tenu de l'ancienneté du véhicule, de son kilométrage connu par M. [O] lors de l'achat, du fait qu'il ait continué à rouler avec le véhicule après l'expertise amiable sans pour autant justifier d'une impossibilité de disposer d'une alternative à ce moyen de transport et enfin du fait qu'il ait souhaité conserver le véhicule malgré les désordres relevés, ce préjudice n'est pas avéré, la décision entreprise étant infirmée sur ce point et M. [O] débouté de sa demande au titre du préjudice moral.

B/ Sur le manquement à l'obligation de délivrance conforme

Aux termes des articles 1604 et suivants du code civil, le vendeur est tenu d'une obligation de délivrance conforme de la chose entre les mains de l'acquéreur, cette obligation de délivrer la chose portant sur la chose telle qu'elle est convenue au contrat conclu entre les parties et comprenant les accessoires de la chose et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel.

En l'espèce, il résulte de la petite annonce publiée sur le site internet 'Le Bon coin' pour la vente du véhicule litigieux que la vente portait sur un véhicule équipé en bluetooth, avec radio CD er un double de clés.

Or le bon de livraison du véhicule en date du 18 décembre 2015 signé de M. [O] comporte la mention 'Manque double de clé à envoyer à mon domicile'. Par ailleurs, le devis effectué en concession Mercedes par M. [O] le 29 décembre 2015 mentionne que le véhicule ne dispose pas de prééquipement téléphonique donc pas de prise en charge bluetooth. Enfin, l'expert amiable a pu constater le 4 février 2016 que le véhicule n'était pas équipé d'un chargeur CD.

Ces manquements constituent des manquements à l'obligation de délivrance du vendeur.

S'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à M. [O] une réparation à ce titre, la cour retiendra le devis effectué par le garage Lauwerie concession Mercedes le 29 décembre 2015 à hauteur de 314,05 euros, au lieu du chiffrage effectué par l'expert à 757,43 euros sur la base de devis non produits retenu par le premier juge.

III- Sur la responsabilité du contrôleur technique, la société CTA Wavrinois

En vertu de l'article 1382 du code civil dans sa version applicable aux relations entre les parties, tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article 1384 du code civil dans sa version applicable aux relations entre les parties, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde. Les commettants sont ainsi responsables du dommage causé par leurs préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.

Par ailleurs, en vertu de l'article 1165 du code civil dans sa version applicable aux relations entre les parties, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu à l'article 1121.

En application combinée de ces textes, le contrôleur technique qui a effectué le contrôle technique préalable à la vente d'un véhicule automobile peut voir sa responsabilité engagée sur un fondement contractuel par son cocontractant et sur un fondement délictuel par l'acquéreur du véhicule avec lequel il n'a pas contracté, si lui ou l'un de ses préposés a manqué à ses obligations contractuelles dans le cadre de sa mission de contrôleur technique, dès lors que ce manquement a occasionné un préjudice à l'acquéreur.

En vertu de l'arrêté du 18 juin 1991 relatif à la mise en place et à l'organisation du contrôle technique des véhicules dont le poids n'excède pas 3,5 tonnes, la mission du contrôleur technique consiste à effectuer visuellement, sans démontage et sans faire rouler le véhicule, un contrôle des points techniques limitativement énumérés à l'annexe de l'arrêt, avec établissement d'un procès-verbal qui doit décrire les défaillances constatées et indiquer les résultats des mesures relevées au cours des essais. L'annexe I de cet arrêté définit les défaillances mineures n'ayant aucune incidence notable sur la sécurité du véhicule ou sur l'environnement, les défaillances majeures susceptibles de compromettre la sécurité du véhicule, d'avoir une incidence négative sur l'environnement ou de mettre en danger les autres usagers de la route, et les défaillances critiques constituant un danger direct et immédiat pour la sécurité routière ou ayant une incidence grave sur l'environnement, ces deux derniers types de défaillance entraînant une obligation de contre-visite.

La responsabilité du contrôleur technique peut ainsi être recherchée en cas d'omission de signaler des désordres majeurs ou critiques susceptibles de mettre en cause la sécurité du véhicule ou des tiers dès lors que ce manquement fautif a entraîné un préjudice pour l'acquéreur du véhicule.

A/ Sur la faute

En l'espèce, il résulte du contrôle technique du véhicule réalisé le 18 décembre 2015, jour de la vente, par la société CTA Wavrinois, que celle-ci a relevé sur le véhicule Mercedes vendu à M. [O] par la société Auto Blitz, présentant alors 152 709 km au compteur, les défauts suivants à corriger sans obligation d'une contre-visite :

- 2.1.1.1.2. Angles, ripage AV : ripage excessif

- 4.1.1.1.1. Feu de croisement : réglage trop bas (G)

- 6.2.6.1.1. Pare-boue, protection sous moteur : anomalie de fixation et/ou mauvais état.

M. [Y] [O] a fait effectuer un nouveau contrôle technique dix jours plus tard, soit le 28 décembre 2015, par la société Flandres Contrôle technique, alors que le véhicule présentait 153 679 km au compteur et avait donc roulé seulement 970 kilomètres depuis la vente. Ce contrôle technique relève désormais quinze défauts :

- 1.2.4.1.1. Flexibles de frein : détérioration mineure (ARG, ARD)

- 1.3.2.2.1. Commande du frein de stationnement : course importante

- 1.4.4.1.1. Plaquette de frein : usure prononcée/détérioration (AVD)

- 2.1.1.1.2. Angles, ripage av : ripage excessif

- 3.1.1.1.1. Pare-brise : mauvais état

- 4.1.1.1.2. Feu de croisement : réglage trop haut et/ou faisceau non conforme

- 5.2.4.1.1. Demi-train AV ( y compris ancrages) : jeu mineur rotule et/ou articulation (G, D)

- 5.2.5.1.1. Demi-train AR ( y compris ancrages) : jeu mineur rotule et/ou articulation (SUPG, SUPD)

- 5.3.1.2.2. Roue : frottements sur carrosserie et/ou éléments mécaniques (AVD)

- 5.3.2.1.3. Pneumatique : usure irrégulière (AVG,AVD)

- 5.3.2.2.4. Pneumatique : Pression anormale (AVG, AVD, ARG, ARD)

- 6.1.4.1.1. Berceau : corrosion (AR)

- 6.2.6.1.1. Pare-boue, protection sous moteur : anomalie de fixation et/ou mauvais état (AVD,AV)

- 8.2.1.3.1. Circuit de carburant (AV) : fuite (AV)

- 9.1.2.2.6. Opacité des fumées d'échappement : contrôle impossible (fuite importante de carburant).

Il résulte par ailleurs de l'expertise judiciaire que 'le véhicule litigieux est porteur de vices graves, présentant un danger immédiat pour son utilisateur et les autres usagers de la route du fait principalement de l'état de dangerosité notamment en ce qui concerne le système de freinage, les pneumatiques avant, les fonctions moteur et boîte de vitesse générée par les fuites de gasoil et d'huile et patinage, et ce depuis bien longtemps.'

L'expert estime que cet état existait évidemment lors du contrôle effectué le 18 décembre 2015 par le centre de contrôle technique CTA Wavrinois et que le rapport établi n'est absolument pas le reflet de l'état réel du véhicule, ce qui constitue un des éléments d'appréciation de l'acheteur qui se propose d'acquérir un bien.

Il ajoute qu'il ne fait aucun doute que le centre de contrôle technique CTA Wavrinois a établi un rapport de contrôle en omettant volontairement les défauts à corriger avec obligation d'une contre-visite qui ne pouvaient lui échapper compte tenu du fait que le contrôleur du même centre de contrôle technique CTA Wavrinois avait indiqué à M. [O] la présence de la fuite de gasoil lors de l'examen avant l'achat.

Si la réalité de ces derniers propos n'est pas avérée dès lors qu'ils résultent des déclarations faites à l'expert par M. [O] et qu'ils sont contestés par le centre de contrôle technique CTA Wavrinois, il n'en demeure pas moins, ainsi que le souligne l'expert judiciaire, qu'au regard de l'importance de la fuite de carburant qui a aspergé tout le compartiment moteur et ce depuis bien longtemps et de son écoulement sous le soubassement, il fait aucun doute que ces points omis ne pouvaient pas ne pas être relevés par le centre CTA Wavrinois lors du contrôle effectué le jour de la vente.

L'expert soutient ainsi que trois défauts soumis à contre-visite, à savoir la fuite avant dans le circuit de carburant (8.2.1.3.1.), le contrôle impossible de l'opacité des fumées d'échappement en raison d'une fuite importante de carburant (9.1.2.2.6.) et le frottement sur carrosserie et/ou élément mécanique (pare-boue)(5.3.1.2.2.) pouvaient et devaient être relevés par le centre de contrôle technique, étant précisé que ce dernier défaut a été signalé dans les deux contrôles techniques au titre d'un défaut mineur de fixation du pare-boue.

Le centre de contrôle technique automobile du Wavrinois a donc commis une faute en ne signalant pas ces désordres soumis à contre-visite, cette faute étant de nature à engager sa responsabilité à l'égard de l'acquéreur, M. [O].

S'agissant des autres défaillances relevées dans le second contrôle technique, celles-ci ne sont pas qualifiées par l'expert de défaillances majeures ou critiques et doivent en conséquence être considérées comme des défaillances mineures. Compte tenu du faible temps écoulé (10 jours) et du faible kilométrage parcouru par le véhicule (970 kms) entre les deux contrôles techniques, la cour estime que ces défaillances existaient déjà lors du premier contrôle technique et qu'elles auraient donc pu être relevées par l'expert.

Enfin, la cour note que l'expert ne relève pas, parmi les désordres que le contrôleur technique aurait dû signaler, les désordres de la boîte de vitesse, laquelle comporte une fuite d'huile et un patinage excessif et anormal et nécessite un reconditionnement. Dès lors, ce désordre qui a déjà été retenu au titre des vices cachés dont le vendeur doit garantie à l'acquéreur, ne sera pas retenu par la cour au titre des omissions fautives du centre de contrôle technique, d'autant que le second contrôle technique réalisé dix jours après la vente n'avait pas plus relevé ce désordre.

B/ Sur le préjudice et le lien de causalité

Le centre de contrôle technique CTAW peut donc voir sa responsabilité engagée pour le préjudice causé à M. [O] par l'omission fautive, dans son rapport de contrôle technique du 18 décembre 2015, de la mention des défaillances majeures que constituent la fuite avant dans le circuit de carburant (8.2.1.3.1.), du contrôle impossible de l'opacité des fumées d'échappement en raison d'une fuite importante de carburant (9.1.2.2.6.) et du frottement sur carrosserie et/ou élément mécanique (pare-boue)(5.3.1.2.2.), et des défaillances mineures sans obligation de contre-visite relevée par le second contrôle, dont l'usure irrégulière des pneumatiques, ce préjudice s'analysant en une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter en négociant une baisse significative de prix.

Le coût de la réfection du pare-boue n'a pas été chiffré par l'expert.

Compte tenu du fait que l'expert a chiffré le coût de la remise en état de la pompe haute pression du moteur à la somme de 750 euros, le coût du remplacement des pneumatiques à la somme de 350 euros et le coût de la remise en état du système de freinage à la somme de 399,03 euros, que les autres défaillances mineures du véhicule ne sont pas chiffrées et que la défaillance de la boîte de vitesse automatique n'est pas relevée par l'expert parmi les défaillances que le centre de contrôle technique CTAW aurait pu et dû relever, le préjudice subi par l'acquéreur du fait de l'omission fautive du centre de contrôle technique s'analyse en une perte de chance de négocier le véhicule à un moindre prix à hauteur de 1 500 euros en moins.

La préjudice de perte de chance ne pouvant être équivalent au profit escompté, la cour fixera ce préjudice à la somme de 1 000 euros correspondant aux deux tiers du manque à gagner subi par l'acquéreur du fait de l'omission fautive du centre de contrôle technique.

IV- Sur la demande de condamnation in solidum du vendeur et du contrôleur technique

Si les différents responsables d'un même dommage causé à la même victime peuvent être condamnés in solidum à la réparation de ce préjudice, quand bien même leurs fautes et le fondement juridique de leur responsabilité seraient de nature différentes, force est de constater en l'espèce que le garage vendeur Auto Blitz est déclaré responsable des préjudices matériels, moral, de jouissance causés à M. [O], tandis que le Centre de Contrôle Technique Automobile Wavrinois est déclaré responsable d'un préjudice de perte de chance de ne pas contracter ou de négocier le prix à la baisse.

Ces préjudices étant de nature différente il n'y a pas lieu à prononcer de condamnation in solidum entre le vendeur et le centre de contrôle technique, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.

Par ailleurs, le vendeur et le centre de contrôle technique étant chacun condamné au titre de ses propres fautes, sur des fondements différents, il n'y pas lieu de condamner la société Auto Blitz à garantir la société CTAW, ni à dire que le centre de contrôle technique du Wavrinois devra contribuer à parts égales à la dette vis-à-vis de M. [O].

V- Sur les autres demandes

Le premier juge a exactement statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés Auto Blitz et CTA Wavrinois seront par ailleurs tenues solidairement aux dépens d'appel.

Elles seront condamnées à payer à M. [O] la somme de 1 500 euros chacune au titre de ses frais irrépétibles d'appel et déboutées de leur demande sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a :

- Rejeté la demande de nullité de l'expertise judiciaire formulée par la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois ;

- Condamné in solidum la société Auto Blitz et la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois à payer à M. [Y] [O] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné in solidum la société Auto Blitz et la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois aux dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire de M. [R], la cour précisant qu'il s'agit d'une condamnation solidaire et non 'in solidum' ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

- Condamne la société SAS Auto Blitz à payer à M. [Y] [O] les sommes suivantes :

* 5 149,03 euros au titre des frais de réparation ;

* 314,05 euros au titre des frais concernant le lecteur CD, la deuxième clef et le kit bluetooth;

- Déboute M. [Y] [O] de ses demandes en réparation au titre des frais d'assurance, du trouble de jouissance et de son préjudice moral ;

- Condamne la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois à payer à M. [Y] [O] la somme de 1 000 euros au titre d'une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus favorables ;

- Déboute M. [Y] [O] du surplus de ses demandes en indemnisation ;

- Déboute M. [Y] [O] de sa demande de condamnation in solidum de la SAS Auto Blitz et de la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois ;

- Déboute la SAS Auto Blitz de sa demande de partage de contribution à la dette formée à l'encontre de la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois ;

- Déboute la SAS Contrôle technique Wavrinois de sa demande de garantie formée à l'encontre de la SAS Auto Blitz ;

Y ajoutant,

- Condamne la société Auto Blitz et la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois solidairement aux dépens ;

- Condamne la société Auto Blitz et la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois à payer à M. [Y] [O] la somme de 1 500 euros chacun au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

- Déboute la société Auto Blitz et la SAS Contrôle technique automobile Wavrinois de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,

Delphine Verhaeghe.Christine Simon-Rossenthal.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 20/02377
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.02377 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award