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27/05/2022 | FRANCE | N°21/00160

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 27 mai 2022, 21/00160


ARRÊT DU

27 Mai 2022







N° 505/22



N° RG 21/00160 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TNWL



PL/VM







RO



































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Valenciennes

en date du

02 Novembre 2020

(RG 19/00305 -section )



























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GROSSE :



aux avocats



le 27 Mai 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [F] [N]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représenté par Me Ioannis KAPPOPOULOS, avocat au barreau de VALENCIENNES





INTIMÉES :



M. [M] [J], liquidateur j...

ARRÊT DU

27 Mai 2022

N° 505/22

N° RG 21/00160 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TNWL

PL/VM

RO

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Valenciennes

en date du

02 Novembre 2020

(RG 19/00305 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 27 Mai 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [F] [N]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représenté par Me Ioannis KAPPOPOULOS, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉES :

M. [M] [J], liquidateur judiciaire de la SARL MCBI

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Dorothée FIEVET, avocat au barreau de VALENCIENNES

UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 4]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Thibaut CRASNAULT, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS :à l'audience publique du 29 Mars 2022

Tenue par Philippe LABREGERE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaëlle LEMAITRE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE

: MAGISTRAT HONORAIRE

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

ARRÊT :Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Mai 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 25 Janvier 2022

EXPOSE DES FAITS

 

La société M.C.B.I a été constituée le 22 juillet 2015 par [P] [G] et [F] [N]. Le 1er septembre 2015, ce dernier a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de directeur technique, coefficient hiérarchique 162, moyennant un salaire mensuel brut de 5280 euros.

Par jugement en date du 17 octobre 2016, le tribunal de commerce de Valenciennes a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société. Un plan de redressement a été arrêté par décision du 2 octobre 2017. Par jugement du 29 avril 2019, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de la société M.C.B.I, et désigné un liquidateur judiciaire.

 

[F] [N] a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception à un entretien préalable le 10 mai 2019 en vue de son licenciement. A l'issue de cet entretien, son licenciement pour motif économique lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 17 mai 2019, le liquidateur judiciaire émettant par ailleurs des réserves sur le statut de [F] [N], compte tenu de sa qualité d'associé au sein de la société.

Par requête reçue le 26 septembre 2019, [F] [N] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Valenciennes afin d'obtenir le versement des indemnités de rupture et la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 50 euros par jour de retard puis le remboursement d'une somme prélevée sur son compte personnel après la liquidation judiciaire par la société MCBI.

 

Par jugement en date du 2 novembre 2020, le Conseil de Prud'hommes a débouté le salarié de sa demande et l'a condamné à payer au mandataire liquidateur de la société 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le 8 février 2021, [F] [N] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 25 janvier 2022, la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 29 mars 2022.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 6 mai 2021, [F] [N] sollicite de la cour la réformation du jugement entrepris et la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société MCBI à la somme de

- 7885,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 788,55 euros au titre des congés payés y afférents

- 3614,19 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 4000 euros à titre de remboursement,

avec intérêts à compter du jour de la demande et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil, du moment qu'ils sont dus pour une année entière,

la remise des documents de fin de contrat, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, en vertu des dispositions de l'article L131-1 du code des procédures civiles d'exécution,

la condamnation du liquidateur judiciaire es qualité de la société M.C.B.I. à payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

l'arrêt à intervenir devant être déclaré opposable au CGEA.

 

L'appelant expose qu'il n'a pas réceptionné ses documents de fin de contrat, que disposant d'une ancienneté de trois ans et huit mois au moment de son licenciement, il lui est dû un rappel d'indemnité légale de licenciement ainsi qu'une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, que bien qu'il ait été associé de la société MCBI, il était placé sous la responsabilité de [P] [G], gérant de la société, qu'il ne disposait d'aucun pouvoir, au regard des statuts, pour s'opposer à la gérance, que le lien de subordination juridique entre la société MCBI et lui-même est établi par l'attestation du gérant, qu'il verse également aux débats l'intégralité de ses fiches de paie depuis son embauche jusqu'à la liquidation judiciaire, que les trois sommes de 1500 euros, 1500 euros et 2000 euros ont été prélevées sur son compte personnel après la liquidation de la société par la société LOXAM à la suite de commandes passées par la société MCBI, qu'il avait déposé une empreinte bancaire afin de réserver du matériel pour le compte de la société, que seul son compte personnel a finalement fait l'objet d'un prélèvement, que cette demande additionnelle est recevable et parfaitement justifiée.

 

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 20 juillet 2021, le liquidateur judiciaire de la société MCBI intimé sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de l'appelant à lui verser 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'intimée soutient que l'appelant a créé avec [P] [G] la société M.C.B.I, qu'à la date de création de la société, il détenait 50 % des parts de celle-ci, que le contrat de travail qu'il produit prenant effet le 1er septembre 2015 et relatif à un poste de directeur technique échelon 162 présente un caractère fictif, que la classification prévue au contrat correspondait au plus haut niveau de responsabilité de la convention collective des cadres du bâtiment, que le salaire prévu contractuellement se situait au-delà des appointements minimaux conventionnels, que son salaire net mensuel est passé de 1500 euros nets en 2015 à 7000 euros nets en 2019, qu'en vertu d'un avenant à son contrat de travail du 24 avril 2018, sa rémunération mensuelle brute a été fixée à 3942,77 euros, que l'appelant ne produit aucun élément ou attestation démontrant qu'il exerçait des fonctions techniques et qu'il se trouvait sous la subordination de son employeur, qu'à titre subsidiaire, il ne justifie pas être fondé à solliciter le paiement d'une indemnité de licenciement d'un montant de 3614,19 euros, que les bulletins de paie d'avril 2018 à mars 2019 font état d'un salaire de référence de 3641,47 euros, que la demande additionnelle, correspondant au remboursement des sommes prélevées sur son compte personnel, après la liquidation judiciaire par la société LOXAM, suite à des commandes passées par son employeur, est irrecevable car elle ne se rattache pas aux prétentions originaires par un lien suffisant, en application de l'article 70 du code de procédure civile.

 

Selon ses écritures récapitulatives reçues au greffe de la cour le 4 août 2021, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, au débouté de l'appelant de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, à sa condamnation au paiement de la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en toutes hypothèses sollicite de la cour qu'il soit déclaré que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale, qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L3253-6 du code du travail ne pourra concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens de l'article L.3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie et que la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié confondues, l'un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d'assurance chômage mentionnés à ces articles.

Le Centre de Gestion et d'Étude AGS fait valoir que l'appelant ne saurait se prévaloir d'un quelconque contrat de travail, qu'il avait créé avec [P] [G] la société M.C.B.I. et en détenait 50 % des parts, qu'il disposait donc d'une faculté de blocage au sein de la société, incompatible en soi avec l'existence d'un lien de subordination, qu'alors que sa rémunération mensuelle brute était contractuellement fixée à 5280 euros, le bulletin de paie du mois de février 2018 laisse apparaître un salaire de 1963,73 euros, tandis qu'un avenant à son contrat de travail en date du 24 avril 2018 fixe sa rémunération à 3942,77 euros, qu'il exerçait en réalité des fonctions de mandataire social, à titre subsidiaire que l'indemnité de licenciement ne saurait excéder la somme de 3331,94 euros, que la demande liée au remboursement de frais est irrecevable, la règle d'unicité d'instance ayant été supprimée depuis le décret du 20 mai 2016.

MOTIFS DE L'ARRÊT

 

Attendu en application des articles R1452-2 du code du travail, 65 et 70 du code de procédure civile que constitue une demande additionnelle la demande par laquelle une partie modifie ses prétentions antérieures ; que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ;

Attendu que la demande de remboursement se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant puisqu'elle s'inscrit dans le cadre de la relation de travail que l'appelant prétend avoir nouée avec la société M.C.B.I ;

Attendu en application de l'article L1221-1 du code du travail que pour contester l'existence d'une relation de travail, le liquidateur se fonde tout d'abord sur les statuts de la Sarl M.C.B.I. desquels il résulte que celle-ci qui avait pour objet principal tous travaux de bâtiment avait été constituée le 22 juillet 2015 par [P] [G] et l'appelant et que ce dernier détenait 50 % des parts de la société ; qu'il produit également le jugement du tribunal de commerce de Valenciennes du 29 avril 2019 mentionnant qu'à l'audience avait comparu l'appelant en qualité d'associé, assistant [P] [G], gérant de la société ; que le jugement précise que [P] [G] et l'appelant, de concert, avaient reconnu notamment les difficultés rencontrées par la société pour régler les factures de ses fournisseurs, mais avaient continué à faire montre d'optimisme sur le futur de l'entreprise qui employait cent-vingt-deux salariés ; que l'intimé s'appuie aussi sur le montant de la rémunération de l'appelant convenue au contrat de travail ; qu'il excédait largement les minimas prévus en application de la convention collective des cadres du bâtiment à laquelle était assujetti l'appelant, puisqu'au 1er février 2017, le coefficient 162, le plus élevé de la grille, devait donner lieu au versement d'un salaire mensuel de 4773 euros alors que celui de l'appelant prévu au contrat de travail était de 5280 euros ; que l'intimé souligne les incohérences affectant la rémunération de l'appelant ; qu'il apparaît en effet que, par avenant au contrat de travail en date du 27 avril 2018 justifié par l'ancienneté et l'expérience de l'appelant, la rémunération de celui-ci était fixée paradoxalement à 3942,77 euros, soit une diminution de 1338 euros ; que de même au 1er février 2018, selon les bulletins de paye communiqués, le salaire de l'appelant s'élevait à 1963,76 euros sans la moindre raison ; qu'à l'ensemble de ces éléments l'appelant n'oppose que l'attestation de [P] [G], dépourvue de crédibilité du fait de la position de celui-ci, confirmant la situation de subordination hiérarchique de [F] [N] vis-à-vis de lui ; que par ailleurs la garantie sur ses propres deniers offerte par l'appelant à l'occasion de la location de matériel par la société M.C.B.I. excédait le statut de simple salarié qu'il revendique ; que l'absence de toute relation de travail entre l'appelant et la société M.C.B. I est donc établie ;

Attendu qu'en l'absence de relation de travail, le liquidateur n'était pas tenu de remettre à l'appelant les documents de fin de contrat ;

 

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'appelant a bien été amené à se constituer caution en garantie du paiement de matériel loué auprès de la société LOXAM ; qu'il produit un relevé de compte faisant apparaître trois débits au profit de la société LOXAM effectués les 11 et 21 juin 2019 pour un montant total de 4000 euros ; qu'il n'est pas contesté que cette location était destinée à la société M.C.B.I. ; que celle-ci en était donc bien débitrice ;

Attendu toutefois que l'AGS ne saurait être tenue à garantir le paiement de cette somme qui n'entre pas dans le champ d'application de l'article L3253-8 du code du travail puisqu'il ne s'agit pas d'une créance résultant d'un contrat de travail ;

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a dû exposer tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS

 

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

 

INFIRME le jugement déféré

ET STATUANT A NOUVEAU,

 

FIXE la créance de [F] [N] au passif de la liquidation judiciaire de la société M.C.B.I à la somme de 4000 euros à titre de remboursement de frais de location,

DÉBOUTE [F] [N] du surplus de sa demande,

DIT que l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] ne sera pas tenue à garantie,

MET les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la société M.C.B.I.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRÉSIDENT

P. LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale e salle 4
Numéro d'arrêt : 21/00160
Date de la décision : 27/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-27;21.00160 ?
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