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19/05/2022 | FRANCE | N°19/06409

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 19 mai 2022, 19/06409


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 19/05/2022





****





N° de MINUTE :

N° RG 19/06409 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SXI5



Jugement (N° 19-002176) rendu le 05 novembre 2019

par le tribunal d'instance de Lille







APPELANT



Monsieur [U] [D]

né le 03 décembre 1979 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 2]



représent

é par Me Gaëlle Thual, avocat au barreau de Lille





INTIMÉ



Monsieur [J] [L]

né le 22 décembre 1992 à [Localité 5] (59)

demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]



représenté par Me Martin Danel, avocat au barreau de Dunkerque






...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 19/05/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 19/06409 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SXI5

Jugement (N° 19-002176) rendu le 05 novembre 2019

par le tribunal d'instance de Lille

APPELANT

Monsieur [U] [D]

né le 03 décembre 1979 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Gaëlle Thual, avocat au barreau de Lille

INTIMÉ

Monsieur [J] [L]

né le 22 décembre 1992 à [Localité 5] (59)

demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par Me Martin Danel, avocat au barreau de Dunkerque

DÉBATS à l'audience publique du 07 mars 2022 tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christine Simon-Rossenthal, présidente de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Céline Miller, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine Simon-Rossenthal, présidente et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 février 2022

****

Suivant acte de cession du 12 octobre 2016, M. [U] [D] a vendu à M. [J] [L] un véhicule Opel modèle Astra immatriculé [Immatriculation 6], véhicule mis pour la première fois en circulation le 1er décembre 2003 et présentant un kilométrage de 141 232 kilomètres, pour un prix de 2 500 euros.

A cette occasion, M. [D] a remis à M. [L] un procès-verbal de contrôle technique du 6 octobre 2016 réalisé par la société Auto Sur indiquant qu'il n'avait pas lieu à contre-visite.

Le 14 octobre 2016, le véhicule a subi un emballement du moteur sur autoroute, nécessitant un dépannage.

Le véhicule était alors confié au garage espace Thirion, qui constatait un niveau anormalement élevé de la quantité de lubrifiant moteur.

L'expert mandaté par l'assurance de protection juridique de M. [J] [L] concluait le 16 juin 2017 que le désordre était lié à une défaillance du système d'injection laquelle, compte tenu du faible kilométrage parcouru depuis la vente, était présente avant celle-ci.

Par courrier du 17 juillet 2017 adressé à son vendeur, M. [J] [L] a sollicité l'annulation de la vente et le remboursement du prix du véhicule et des frais de travaux et d'assurance engagés pour celui-ci.

Par ordonnance du 6 février 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille a ordonné une mesure d'expertise judiciaire à la demande de M. [L], désignant M. [S] en qualité d'expert judiciaire.

Celui-ci a déposé son rapport le 22 octobre 2018.

Par acte signifié le 20 mai 2019, M. [L] a fait assigner M. [D] aux fins de :

Prononcer la résolution de la vente du véhicule Opel astra immatriculé [Immatriculation 6] du 12 octobre 2016 entre M. [J] [L] et M. [U] [D] ;

Ordonner en conséquence à M. [U] [D] de reprendre possession du véhicule, au domicile de M.[J] [L], à ses frais exclusifs, sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai de 15 jours suivant signification du jugement, sans mise en demeure préalable ;

Condamner M. [U] [D] à verser à M.[J] [L] :

2 500 euros au titre du prix d'achat du véhicule,

1 335,15 euros au titre des cotisations d'assurance,

Condamner M. [U] [D] à payer à M. [J] [L] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Monsieur [U] [D] aux entiers dépens ;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par un jugement du 5 novembre 2019, le tribunal d'instance de Lille a :

Prononcé la résolution de la vente ;

Condamné M. [D] à rembourser à M. [J] [L] la somme de 2 500 euros correspondant au prix de la vente du véhicule ;

Dit que M. [J] [L] devra restituer le véhicule litigieux à M. [U] [D] concomitamment au remboursement du prix ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Condamné M. [U] [D] à rembourser à M. [J] [L] la somme de 1 335,15 euros au titre des cotisations d'assurance par lui assumées du 15 octobre 2016 au 15 septembre 2018 sur ce véhicule ;

Condamné M. [U] [D] à payer à M.[J] [L] la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

Condamné M.[U] [D] au paiement des dépens.

Monsieur [D] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 03 décembre 2020, M. [D] demande à la cour :

- D'infirmer le jugement rendu le 5 novembre 2019 par le tribunal d'instance de Lille sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à astreinte, de rejeter l'ensemble des demandes de M. [J] [L] et en conséquence,

- Dire n'y avoir lieu à vice caché affectant la vente du véhicule Opel Astra immatriculé [Immatriculation 6] du 12 octobre 2016 intervenue entre M. [J] [L] et M. [U] [D],

- Dire n'y avoir lieu à résolution de la vente,

- Condamner M. [J] [L] à payer à M. [U] [D] à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et au paiement des entiers dépens ;

- Condamner M. [J] [L] aux entiers dépens.

Il fait essentiellement valoir que le véhicule présenté à la vente n'était pas en bon état, ce dont avait parfaitement connaissance M. [J] [L] à qui avait été communiqué le contrôle technique réalisé le 6 octobre 2016 sur le véhicule, lequel mentionnait entre autres défauts à corriger sans contre-visite l'existence d'un défaut d'étanchéité du moteur. Il ajoute que M. [L] avait également eu communication de la facture relative à la fourniture et à la pose d'un turbocompresseur sur le véhicule.

Il fait valoir qu'il est légitime de douter de l'impartialité de l'expert mandaté par l'assurance de protection juridique de M. [L], d'autant que l'expert judiciaire a par la suite déclaré que la théorie développée dans le rapport amiable n'était pas juste sur le plan technique, qu'il a relevé par ailleurs que l'emballement dont il était fait état et ses conséquences n'avaient pu faire l'objet de constatations ni d'investigations techniques dans la mesure où le véhicule litigieux avait déjà été réparé par les établissements Thirion à la charge de la partie demanderesse, sans conservation des pièces et que l'expert judiciaire ne fait que formuler des hypothèses sans établir l'antériorité du désordre par rapport à la vente.

Il soutient que M. [L] ne démontre pas l'antériorité du défaut par rapport à la vente et que lorsqu'il s'avère impossible de déterminer le moment de la naissance du trouble, c'est l'acquéreur qui doit supporter le risque de la preuve, d'autant que s'agissant d'une chose d'occasion, celui-ci ne saurait s'attendre à ce que la qualité de la chose soit identique à celle d'une chose neuve et qu'il ne saurait mettre en oeuvre la garantie évoquée pour des défauts qui ne sont dus qu'à l'usure ou à la vétusté, sa vigilance devant être accrue lors de la vente compte tenu notamment de la modicité du prix et de l'ancienneté de la date de fabrication. Il souligne à cet égard que le véhicule litigieux a été décrit par l'expert judiciaire comme un véhicule en mauvais état, dont la première mise en circulation date du 1er décembre 2003 et que le prix de la vente a été négocié à 2 500 euros.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 12 mars 2020, M. [L] demande à la cour, au visa des dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, de :

Incidemment, infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande d'astreinte et en ce qu'il n'a pas précisé les lieu et modalités de restitution du véhicule, ni mis à la charge de M. [D] les frais de restitution,

Le confirmer pour le surplus,

En conséquence,

Prononcer la résolution de la vente du véhicule Opel astra immatriculé [Immatriculation 6] du 12 octobre 2016 entre M.[L] et M. [D] ;

Ordonner en conséquence à M. [D] de reprendre possession de son véhicule, au domicile de M. [L], à ses frais exclusifs, sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai de 15 jours suivant signification du jugement, sans mise en demeure préalable ;

Condamner M. [D] à verser à M. [L] :

2 500 euros au titre du prix d'achat du véhicule,

1 335,15 euros au titre des cotisations d'assurances,

Condamner M. [D] à payer à M. [L] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner tout succombant aux entiers dépens, en ce compris les dépens de référé et d'expertise judiciaire par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A cet effet, il soutient que le rapport d'expertise amiable conclut bien à l'existence d'un vice rédhibitoire antérieur à la vente et que M. [D] omet d'évoquer la facture de dépannage du garage [F] qui évoque bien un emballement moteur avec une importante fumée blanche deux jours à peine après la vente et 190 kilomètres parcourus.

Il souligne par ailleurs que le jugement contesté a retenu que le procès-verbal de contrôle technique ne permettait pas à M. [L] de connaître l'importance du défaut qui lui a donc été caché lors de la vente.

Il ajoute que l'expert judiciaire n'exclut à aucun moment l'hypothèse d'un vice caché, précisant au contraire qu'il s'agit de l'hypothèse privilégiée, et conclut qu'il existe un faisceau d'indices plaidant incontestablement en faveur de sa thèse, de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de résolution de la vente

Aux termes des dispositions de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve du vice caché et de ses différents caractères. Il doit ainsi établir que la chose vendue est atteinte d'un vice :

- inhérent à la chose et constituant la cause technique des défectuosités,

- présentant un caractère de gravité de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose,

- existant antérieurement à la vente, au moins en l'état de germe,

- n'étant, au moment de la vente, ni apparent ni connu de lui, le vendeur n'étant pas tenu ' des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même' conformément à l'article 1642 du code civil,

- et d'une importance telle que s'il en avait eu connaissance, il n'aurait pas acquis la chose ou n'en aurait offert qu'un moindre prix.

En l'espèce, M. [U] [D] a vendu à M. [J] [L] le 12 octobre 2016 un véhicule Opel modèle Astra immatriculé [Immatriculation 6], mis pour la première fois en circulation le 1er décembre 2003 et présentant un kilométrage de 141 232 kilomètres, pour un prix de 2 500 euros.

Cette vente était accompagnée de la remise de diverses factures relatives à des travaux réalisés sur le véhicule ainsi que d'un procès-verbal de contrôle technique en date du 6 octobre 2016, mentionnant différents défauts à corriger, mais sans contre-visite, à savoir :

- canalisation de frein : détérioration mineure

- câble, tringlerie du frein de stationnement : détérioration mineure

- volant de direction : jeu mineur et/ou point dur aux braquages

- crémaillère, boitier de direction : jeu anormal

- pare-brise : mauvais état

- feu de croisement : réglage trop bas,

- barre stabilisatrice (y compris ancrages) : mauvaise fixation/liaison ( y compris silent-blocs et/ou articulations) AV

- porte AR, hayon : détérioration importante

- moteur : défaut d'étanchéité.

M. [J] [L] ne pouvait donc ignorer, compte tenu de l'âge du véhicule, du kilométrage affiché et du prix de celui-ci, qu'il faisait l'acquisition d'un véhicule d'occasion, présentant différents défauts, certes présentés comme mineurs, s'agissant de défauts ne faisant pas l'objet d'une obligation de contre-visite.

Deux jours après la vente et après avoir roulé 190 kilomètres depuis celle-ci, M. [L] indique avoir subi un emballement du moteur nécessitant un dépannage sur l'autoroute, ainsi qu'il résulte de la facture du garage [F] du 14 octobre 2016, lequel a relevé un désordre relatif au moteur et remorqué le véhicule.

Le véhicule a alors été pris en charge par le garage Thirion, dont l'ordre de travail en date du même jour mentionne : 'véhicule arrivé par assistance, moteur s'est emballé sur l'autoroute avec importante fumée blanche, faire diagnostic et devis'.

La facture du garage Thirion en date du 31 octobre 2016, pour un montant de 475,92 euros, mentionne qu'il a été procédé à un contrôle du jeu dans le turbo, de la présence d'huile dans les durites, à l'extraction d'une bougie, à la vidange du moteur, celui-ci comportant 7 litres d'huile au lieu de 5,5 litres, au contrôle de la prise de compressions, au remplacement de 4 bougies, à la vidange du filtre à huile et à la dépose de l'échangeur pour nettoyage.

Une deuxième facture du garage Thirion, en date du 16 novembre 2016 et d'un montant de 774,95 euros, mentionne le remplacement des injecteurs après récupération de ces pièces sur un deuxième véhicule appartenant au client.

M. [K] [Z], expert amiable diligenté pour examiner le véhicule par l'assurance de protection juridique de M. [L], a examiné le véhicule le 14 mars 2017. Il constate alors que le niveau de lubrifiant moteur se trouve au niveau maximum de la jauge mais ne le dépasse pas, que l'huile est très claire du fait de son remplacement récent et que son aspect et la configuration de la jauge ne facilite pas la constatation du niveau. Il indique dans son rapport que '190 km après l'acquisition du véhicule, il se produit un emballement moteur. Le garage Espace Thirion, lors de ses premières constatations, a relevé un niveau anormalement élevé de la quantité de lubrifiant moteur. Ceci n'a pu se produire que par un dysfonctionnement du système d'injection qui a introduit une quantité trop important de gaz-oil dans les chambres de combustion, ce carburant s'est dilué dans le lubrifiant moteur, le niveau a dépassé le maximum permettant une auto-alimentation du moteur incontrôlée menant à l'emballement.'

Il ajoute que 'compte tenu des constatations réalisées, il n'y a pas eu d'augmentation du niveau de lubrifiant moteur depuis les derniers travaux réalisés par le garage Espace Thirion et qu'on peut donc penser que la remise en état effectuée par le garage a été nécessaire et suffisante pour remédier à l'augmentation rapide du niveau de lubrifiant moteur. Ceci sera validé par le roulage et le contrôle de l'évolution du niveau de lubrifiant moteur.'

En conclusion, il indique que l'emballement moteur s'est produit en raison d'une défaillance du système d'injection et que compte tenu du très faible kilométrage parcouru par le véhicule depuis la vente, on peut affirmer que cette défaillance était présente avant la vente. Il ajoute que ceci a entraîné des frais importants de remise en état du véhicule relativement au prix d'acquisition et que si le vendeur en avait eu connaissance avant l'achat, il ne l'aurait pas effectué.

M. [Y] [S], expert judiciaire mandaté pour expertiser le véhicule, l'a examiné le 7 septembre 2018 et a procédé au prélèvement d'un échantillon d'huile aux fins d'analyse.

Dans ses conclusions en date du 22 octobre 2018, il rappelle que l'emballement par auto-alimentation et auto-combustion de la machine dont il est fait état et ses conséquences n'ont pu faire l'objet de constatations ni d'investigations techniques, le véhicule ayant déjà été réparé à la charge de la partie demanderesse et diligence des Ets Thirion Opel Lievin, sans conservation des pièces.

Il précise que suivant les résultats de l'analyse d'huile ainsi que de l'exploration de l'électronique embarquée, il semblerait que les conséquences de cet infarctus mécanique que constitue un emballement moteur aient été efficacement traitées et éliminées par les réparations entreprises par les Ets Thirion.

Il ajoute que la théorie développée par l'expert amiable suivant laquelle l'emballement de la machine aurait trouvé sa cause dans une défaillance du système d'injection, à l'origine d'une dilution et élevation du niveau d'huile par du carburant, en l'occurrence du gas-oil, ne peut être juste sur le plan technique dès lors que dans une telle hypothèse, l'analyse d'huile aurait révêlé une viscosité irrésistiblement diminuée en présence de carburant venu liquifier le bain d'huile, ainsi qu'un taux de dilution (mesure dédiée à la présence de carburant dans l'huile) anormal, ce qui n'est pas le cas puisque la viscosité mesurée à 76,8mm2/s trahit un lubrifiant quelque peu épaissi mais certainement pas liquifié, ainsi qu'un taux de dilution inférieur au seuil d'alerte.

Ce faisant, il omet cependant la circonstance que le garage Thirion, lors de son intervention du mois d'octobre 2016, avait procédé à la vidange du moteur et donc au remplacement du bain d'huile, ainsi que relevé par le premier expert qui a constaté que l'huile était très claire du fait de son remplacement récent.

Dès lors, les hypothèses émises par l'expert pour expliquer la cause des désordres, à savoir d'une part l'hypothèse d'un excès d'huile apporté lors d'un appoint sans pouvoir déterminer l'antériorité ou non de cet appoint mal maîtrisé par rapport à la vente et d'autre part, l'hypothèse plus probable d'une mauvaise exécution dans le cadre du remplacement du turbocompresseur effectué à la demande du vendeur en janvier 2016, à l'origine d'un désordre suffisamment grave et important pour entraîner une impropriété d'usage, sans que cela soit porté à la connaissance de l'acquéreur, ne peuvent exclure l'hypothèse émise par le premier expert.

Ainsi, quand bien même les réparations auraient été effectuées avant l'expertise, ce qui explique les conclusions réservées de l'expert judiciaire, la cour estime qu'il existe suffisamment d'éléments, compte tenu du faible kilométrage parcouru par le véhicule depuis la vente et de la survenance du désordre deux jours seulement après celle-ci, des devis, diagnostics, factures d'intervention et des différentes conclusions d'expertise pour indiquer que le vice préexistait ou était au moins en germe lors de la vente, qu'il n'était pas connu de l'acquéreur, la seule mention dans le procès-verbal de contrôle technique d'un défaut d'étanchéité du moteur sans nécessité de contrôle technique n'étant pas de nature à alerter l'acquéreur sur un désordre de cette ampleur, et enfin qu'il était d'une importance telle, compte tenu du coût des travaux de réparation engagés relativement au prix du véhicule, que s'il l'avait connu, l'acquéreur n'aurait pas fait l'acquisition du véhicule.

Dans ces conditions, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a ordonné la résolution de la vente et la restitution du véhicule et du prix de 2 500 euros, la cour précisant toutefois que les frais de restitution devront être pris en charge par le vendeur.

Il n'y a pas lieu au prononcé d'une astreinte, la décision ayant déjà été exécutée, ainsi que constaté par le juge de la mise en état dans son ordonnance du 16 mars 2021.

Sur la demande de dommages et intérêts complémentaires

Aux termes de l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Il est admis à cet égard que le vendeur professionnel est présumé avoir connaissance des vices de la chose au moment de la vente.

En l'espèce, M. [D] est un vendeur particulier qui a mis en vente son véhicule par l'intermédiaire du site Le Bon coin. Il a mis à disposition de M. [L] les factures des travaux réalisés sur le véhicule avant la vente, ainsi que le procès-verbal de contrôle technique mentionnant divers défauts à corriger sans obligation de contrôle technique.

Compte tenu des circonstances de survenance du désordre, par un emballement subit du moteur sur l'autoroute avec dégagement de fumées blanches, ayant nécessité le dépannage du véhicule et la mise en oeuvre de réparations avant sa remise en circulation, il apparaît peu vraisemblable que le vendeur en ait eu connaissance avant la vente.

Dans ces conditions, il ne sera pas tenu aux dommages et intérêts complémentaires réclamés au titre du remboursement des frais d'assurance, la décision de première instance étant infirmée sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Le premier juge a exactement statué sur les dépens et le sort des frais irrépétibles.

M. [D] succombant en son recours sera tenu aux entiers dépens.

L'équité commande par ailleurs de le condamner à payer à M. [L] la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel et de le débouter de sa demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné M. [U] [D] à payer à M. [J] [L] la somme de 1 335,15 euros au titre de ses cotisations d'assurance ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [J] [L] de sa demande de dommages et intérêts au titre des cotisations d'assurance ;

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

Dit que les frais de restitution du véhicule seront pris en charge par M. [U] [D] ;

Condamne M. [U] [D] aux entiers dépens d'appel ;

Condamne M. [U] [D] à payer à M. [J] [L] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [U] [D] de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,La présidente,

Delphine Verhaeghe.Christine Simon-Rossenthal.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 19/06409
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;19.06409 ?
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