ARRÊT DU
29 Avril 2022
N° 332/22
N° RG 19/00947 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SJJ3
PL/VM
RO
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BÉTHUNE
en date du
20 Mars 2019
(RG F 18/00161 -section 2 )
GROSSE :
aux avocats
le 29 Avril 2022
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANTE :
Mme [U] [D] ÉPOUSE [C]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Hélène BERNARD, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉES :
UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'AMIENS
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par Me Adeline HERMARY, avocat au barreau de BÉTHUNE
SELURL DEPREUX SÉBASTIEN, es qualité de mandataire liquidateur de la SAS PARCYDE
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Stéphane BESSONNET, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS :à l'audience publique du 22 Février 2022
Tenue par Philippe LABREGERE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Gaetan DELETTREZ
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Philippe LABREGERE
: MAGISTRAT HONORAIRE
Pierre NOUBEL
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Muriel LE BELLEC
: CONSEILLER
ARRÊT :Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Avril 2022,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 15 Février 2022
EXPOSE DES FAITS
[U] [D] épouse [C] a été embauchée en qualité de conseillère de vente-esthéticienne par contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2009 par la société PARCYDE.
Le 14 juin 2016, [H] [K], ancien directeur commercial de la société, a été condamné par le tribunal correctionnel de Béthune à six mois d'emprisonnement avec sursis pour avoir détourné un disque dur et des données nominatives constituant notamment un fichier clients et les avoir communiqués à un concurrent de son employeur.
Par jugement du 9 novembre 2016, le tribunal de commerce d'Arras a ouvert une procédure de sauvegarde au profit de la société, convertie en redressement judiciaire le 10 mai 2017. Après autorisation de la cession du fonds de [Localité 9] au bénéfice de la société Arome puis de celui de [Localité 6] au profit de [I] [B], le tribunal de commerce, par jugement du 29 septembre 2017, a prononcé la liquidation judiciaire de la société avec cessation d'activité.
Son licenciement pour motif économique a été notifié à [U] [C] par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 octobre 2017 par l'administrateur judiciaire maintenu dans ces fonctions pour la mise en 'uvre de la procédure de licenciement pour les salariés non repris.
Par requête reçue le 16 juillet 2018, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Béthune afin d'obtenir un rappel de prime, de faire constater l'illégitimité et l'irrégularité de son licenciement et d'obtenir le versement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 20 mars 2019, le conseil de prud'hommes a dit que [U] [C] était créancière de la liquidation judiciaire de la société PARCYDE pour les sommes de
- 200 euros à titre de rappel des primes d'usage
- 20 euros au titre des congés payés y afférents
- 1761,64 euros à titre d'indemnité pour manquement aux règles relatives à l'assistance du salarié pendant l'entretien préalable
- 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
a condamné le liquidateur de la société PARCYDE, solidairement avec le CGEA d'AMIENS à communiquer le bulletin de paie de décembre 2016 rectifié ainsi que les documents de fin de contrat sous astreinte de 25 euros par jour de retard à compter du quinzième jour du prononcé du jugement,
débouté la salariée de ses autres demandes et déclaré le jugement opposable au CGEA d'AMIENS.
Le 15 avril 2019, [U] [C] a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance en date du 15 février 2022, la procédure a été clôturée et l'audience des plaidoiries a été fixée au 22 février 2022.
Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 16 juin 2021, [U] [C] sollicite de la Cour l'infirmation du jugement entrepris, la décision devant être déclarée commune et opposable au CGEA d'AMIENS qui doit garantie des salaires à la salariée, et la condamnation du liquidateur de la Société PARCYDE, solidairement avec le CGEA d'AMIENS au paiement de
- 10283,09 euros au titre de la «prime spéciale/exceptionnelle»
- 1028,31 au titre des congés payés y afférents
- 1813,63 euros au titre du manquement de l'employeur à son obligation de loyauté
- 906,82 euros du fait du non-respect de la périodicité du paiement de salaire pour le mois d'octobre 2017
- 6364,94 euros à titre d'indemnité en raison de l'inégalité de traitement salarial
- 3182,47 euros à titre d'indemnité par suite de l'absence de mise en place de délégué du personnel dans la société et de l'absence de procès-verbal de carence
- 3182,47 euros pour défaut de mise à disposition des documents de fin de contrat
- 25459,76 euros à titre d'indemnité pour défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement ou à titre subsidiaire 3182,47 euros à titre d'indemnité du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement conformément aux dispositions de l'article L.1235-2 du code du travail
en tout état de cause,
la condamnation du liquidateur de la société PARCYDE, solidairement avec le CGEA d'AMIENS à communiquer les documents de fin de contrat ainsi que les bulletins rectifiés sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document à compter du prononcé du jugement et à verser une indemnité d'un montant de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
la capitalisation des intérêts et l'exécution provisoire sur la décision à intervenir.
L'appelante expose qu'elle occupait les fonctions de responsable du magasin de [Localité 8], nonobstant le libellé de l'emploi sur le bulletin de paie, et percevait un salaire mensuel brut de 1726,03 euros selon le bulletin de paie de septembre 2017, qu'en août 2016, elle a constaté une diminution de sa rémunération par la réduction d'une «prime spéciale/exceptionnelle», versée mensuellement depuis son entrée dans la société et qui avait donc la valeur juridique d'un usage, que ni la Société PARCYDE ni le liquidateur n'ont dénoncé l'usage précité dans les conditions requises par la jurisprudence, que l'acceptation d'un bulletin de paie sans réserve ne peut pas être interprétée comme impliquant une renonciation du salarié à toute réclamation ultérieure sur ses salaires, que l'usage d'entreprise est constitué suite au versement de cette prime, que le rappel de prime d'usage auquel elle a droit de prétendre doit couvrir les sommes dues à compter du mois de novembre 2014, que la suppression d'un élément de rémunération constitue un manquement au devoir de loyauté. qu'elle est fondée à solliciter le versement d'une indemnité en raison de ce manquement, que son salaire devait être payé au moins une fois par mois, que celui d'octobre 2017 a connu un retard qui lui a occasionné un préjudice du fait de ses difficultés économiques, qu'elle n'a jamais perçu la rémunération afférente à la réalité de son poste de responsable de magasin, que son salaire de référence dans lequel doit être réintégré le rappel des primes dues et non payées s'élève à 3182,47 euros, ou à titre subsidiaire à 1761,64 euros, que l'indemnité légale de licenciement doit être fixée à 6563,84 euros, que la société n'a jamais mis en place d'élections professionnelles pour se conformer aux dispositions légales, alors qu'elle comptait plus de onze salariés, que les difficultés économiques de la société sont intrinsèquement liées au comportement de son ancien préposé au poste de directeur commercial qui a notamment été condamné pénalement, que l'employeur n'a pas pris les mesures suffisantes à préserver l'activité et la pérennité de l'entreprise et des emplois, qu'en dépit de ces difficultés, il a distribué à ses collaborateurs sur l'ensemble des points de vente et pendant plusieurs années, d'importantes primes versées mensuellement jusqu'en août 2016, que le licenciement de l'appelante ne peut valablement reposer sur une cause réelle et sérieuse, que le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi et le solde de tout compte ont été mis à sa disposition le 28 mai 2018, soit 7 mois après la rupture du contrat de travail.
Selon ses écritures récapitulatives reçues au greffe de la cour le 23 avril 2021, le mandataire liquidateur de la société PARCYDE, intimé et appelant incident, sollicite de la cour qu'elle déclare irrecevables les demandes de l'appelante, à titre subsidiaire conclut à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a reconnu l'appelante créancière d'une prime d'usage, de congés payés y afférents, d'une indemnité pour manquement aux règles relatives à l'assistance du salarié pendant l'entretien préalable, d'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et a condamné le liquidateur de la société PARCYDE, solidairement avec le CGEA d'Amiens à communiquer sous astreinte le bulletin de paie de décembre 2016 rectifié ainsi que les documents de fin de contrat, à la confirmation pour le surplus, à la fixation du salaire de référence de l'appelante à la somme de 1761.64 euros, au débouté de l'ensemble des demandes de cette dernière et à sa condamnation au paiement de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le mandataire liquidateur soutient que les demandes de l'appelante sont irrecevables en application de l'article L.622-21 du code de commerce, que si le contrat qu'il produit diffère de celui communiqué par l'appelante dans l'article relatif à la période d'essai, il ne s'agit que d'une simple erreur de plume qui s'est glissée dans le contrat présenté par cette dernière, qu'en tout état de cause, les modalités d'exécution relatives au lieu d'exercice de l'activité, aux fonctions et conditions d'activité sont identiques, que s'agissant de la prime spéciale, le contrat de travail ne stipule pas le bénéfice d'une prime exceptionnelle ou spéciale en complément de la rémunération mensuelle de base, que les primes dites «spéciales», dont l'appelante a pu bénéficier ne revêtent pas le caractère d'usage, dès lors qu'elles ne répondent pas au critère de fixité exigé mais à des critères aléatoires et subjectifs, fonction des résultats de la société et de la motivation, de la présence et de l'implication de la salariée, qu'elles ne constituaient donc pas un élément de salaire mais une libéralité laissée à la discrétion de l'employeur, en vertu de son pouvoir de direction, que la suppression de la prime spéciale ne caractérise pas un manquement à l'obligation de loyauté de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail, qu'en cas de retard de paiement du salaire, le salarié ne peut obtenir des dommages et intérêts qu'en cas de préjudice distinct de celui résultant du retard dans le versement des salaires et de mauvaise foi de l'employeur, que le salaire du mois d'octobre 2017 a bien été réglé à l'appelante, puisqu'elle a sollicité l'avance des fonds du CGEA et que le paiement a bien été effectué, qu'elle n'a dû subir qu'un seul retard dans le paiement de son salaire, à raison des difficultés financières de la société et de la procédure collective, qu'elle n'apporte pas le moindre élément de fait susceptible de caractériser une inégalité de traitement, que seule une somme de 1761,64 euros, correspondant à la rémunération mensuelle brute moyenne des douze derniers mois de la salariée, doit être retenue, que s'agissant de l'indemnité de licenciement, elle a été remplie de ses droits, soit la somme de 3662,34 euros pour la période d'ancienneté du 1erjuillet 2009 au 25 octobre 2017, que l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement consécutive au défaut de consultation des délégués du personnel n'est accordée que lorsque le salarié démontre qu'un tel manquement lui a causé un préjudice distinct, ce que l'appelante n'établit pas, que la preuve de légèreté blâmable de l'employeur n'est pas rapportée, que la société s'est brutalement aperçue que l'un de ses préposés se rendait coupable d'abus de confiance, entre le 28 août 2015 et le 6 novembre 2015, qu'elle n'est pas demeurée inerte puisqu'elle a immédiatement déposé plainte à son encontre et a procédé à son licenciement, que de simples erreurs de prévision ou de gestion ne peuvent suffire à priver de cause économique un licenciement justifié par la fermeture de l'entreprise ni à établir la légèreté blâmable, que les motifs économiques ont été précisément exposés dans la lettre de licenciement et ne sont nullement contestés par la salariée, qu'enfin l'appelante doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour remise tardive des documents, compte tenu de l'absence de démonstration d'un manquement, d'un préjudice et des circonstances de la cause.
Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 11 janvier 2022, l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Amiens conclut à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu l'appelante créancière d'une prime d'usage, de congés payés y afférents, d'une indemnité pour manquement aux règles relatives à l'assistance du salarié pendant l'entretien préalable, d'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et a condamné le liquidateur de la société PARCYDE, solidairement avec le CGEA d'Amiens à communiquer sous astreinte le bulletin de paie de décembre 2016 rectifié ainsi que les documents de fin de contrat, la confirmation pour le surplus et à titre infiniment subsidiaire sollicite de la cour que la décision soit déclarée opposable au Centre de Gestion et d'Etude AGS d'Amiens en qualité de gestionnaire de l'AGS dans les limites prévues aux articles L3253-1 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253- 5 du code du travail, en tout état de cause et si l'opposabilité à l'AGS est prononcée, que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties compte tenu du plafond applicable, ne pourrait s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire.
Le Centre de Gestion et d'Étude AGS fait valoir que l'appelante qui a été embauchée le 1er juillet 2009 et licenciée le 25 octobre 2017 peut prétendre, conformément à l'article R1234-2 du code de travail, à ¿ de mois de salaire par année d'ancienneté, que l'indemnité de licenciement qu'elle a perçue d'un montant de 3708.24 euros est exacte, puisque la moyenne de ses douze derniers mois de salaire s'élève à la somme de 1761.64 euros, que si l'appelante considère avoir subi un préjudice du fait de l'absence de consultation des délégués du personnel dans le cadre de la procédure de licenciement, elle n'établit pas la réalité du préjudice qu'il invoque, que le liquidateur démontre que l'employeur ne s'est nullement rendu responsable d'une quelconque légèreté blâmable, qu'il a immédiatement déposé plainte et qu'il a licencié Monsieur [K] très rapidement après avoir pris connaissance des faits, qu'il a en outre sollicité l'octroi d'une mesure de sauvegarde dès que les difficultés financières sont apparues, sans les dissimuler, que s'il ressort des pièces produites par l'appelante l'existence de primes, leur constance, leur fixité et leur généralité ne sont nullement démontrées, que s'il est vrai que le salaire d'octobre n'a pas été réglé dans les délais, ce retard s'explique par les difficultés économiques que rencontrait l'entreprise, qu'en tout état de cause, la situation a été régularisée très rapidement par l'AGS, que sur les dommages et intérêts sollicités en raison du prétendu non-respect du principe «à travail égal, salaire égal» l'appelante ne procède que par affirmations et ne fournit pas la moindre preuve de ses allégations, qu'à titre infiniment subsidiaire, l'AGS rappelle les limites de sa garantie.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Attendu en application de l'article du code L622-21 du commerce que les demandes formées par l'appelante sont recevables puisqu'elles tendent en réalité à faire inscrire sa créance, dont elles résulteraient, au passif de la liquidation judiciaire de la société PARCYDE représentée par son liquidateur et à la déclarer opposable à l'AGS ;
Attendu en application de l'article du code L1222-1 du code du travail qu'il résulte des différents bulletins de paye produits que l'appelante percevait, outre son salaire de base et une prime de transport, une prime sur le chiffre d'affaires, à compter du 1er janvier 2013 au moins qui ne résulte pas du contrat de travail ; que cette prime dénommée prime spéciale à partir d'août 2013 ne présentait aucune fixité puisqu'elle a oscillé entre 200 et 3000 euros jusqu'au mois d'août 2016, date à laquelle elle a toujours été évaluée à la somme de 200 euros ; qu'en l'absence de fixité de la dite prime pour la période antérieure au mois d'août 2016, l'appelante n'est pas fondée à solliciter un rappel de salaire au titre de la prime spéciale ; que pour la période postérieure, l'engagement unilatéral de l'employeur, du fait de la fixité de la prime allouée, était limité au seul versement de la somme de 200 euros ; que le rappel sollicité ne peut donc concerner que le seul mois de décembre 2016 puisque la prime de 200 euros n'a pas été versée durant ce mois à la salariée ;
Attendu que le manquement de l'employeur à l'exécution loyale du contrat de travail ne peut être caractérisé par le seul de défaut de paiement durant un mois de prime spéciale de 200 euros ;
Attendu sur la violation de la règle «A travail égal, salaire égal», qu'en application de celle-ci, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ;
Attendu que l'appelante fonde cette violation sur le fait qu'elle occupait en réalité le poste de responsable et non celui d'esthéticienne pour lequel elle était rémunérée ; qu'il lui appartenait donc de démontrer qu'elle ne percevait pas le même salaire que celui versé à des salariés occupant des fonctions de responsable de magasin ; qu'elle se borne à produire les attestations de salariées qui affirment qu'elle exerçait bien ces fonctions ; qu'elle sollicite à ce titre une indemnité correspondant à deux mois de salaire et non un rappel de salaire ; que sa demande de ce chef est donc dépourvue de fondement ;
Attendu en application de l'article du code L1233-3 du code du travail qu'il résulte de l'attestation de la société d'expertise comptable que le chiffre d'affaires relatif au comité d'entreprise de la société avait diminué de 1127 248 euros entre 2014 et 2015 ; que le détournement dont s'était rendu coupable le directeur commercial, consistant en la revente notamment du fichier clients à la société C.E. Parfum Direct établie dans la principauté de Monaco avait entraîné, selon la gérante de la société PARCYDE une perte de 1,7 million d'euros de chiffre d'affaires ; qu'aux effets du détournement s'ajoutait, comme le constate l'administrateur judiciaire, la dénonciation par les partenaires bancaires de la société de l'ensemble de leurs concours à compter de l'automne ainsi que des performances médiocres ; que la situation financière de la société était donc définitivement compromise par l'ensemble de ces facteurs ; qu'elle avait conduit le tribunal de commerce d'Arras a ouvrir une procédure de sauvegarde le 9 novembre 2016, puis une procédure de redressement judiciaire 10 mai 2017 ; que les graves difficultés économiques rencontrées par la société sont mises également en évidence par le budget prévisionnel arrêté au mois de juillet 2017 faisant apparaître une insuffisance de trésorerie de 38000 euros et par les loyers du site de Cora Lens restés impayés au deuxième trimestre pour un montant de 35000 euros ; que le défaut de paiement momentané du salaire de septembre 2017, événement qui au demeurant est resté isolé, est consécutif à ces difficultés ; qu'il ne peut donc être conclu que la dégradation de la situation financière de l'entreprise soit consécutive à la seule la légèreté blâmable qui, selon l'appelante, serait caractérisée par le fait que la société ait versé à son directeur commercial entre janvier 2015 et juin 2016 des primes ;
Attendu que si le défaut de paiement momentané du salaire de septembre 2017 est resté un incident isolé et est consécutif aux graves difficultés rappelées précédemment, il n'en demeure pas moins qu'il a bien occasionné un préjudice financier à l'appelante qui n'a pas reçu dans les délais le salaire auquel elle pouvait prétendre conformément à l'article L3242-1 du code du travail ; qu'il convient en conséquence d'évaluer le préjudice subi à la somme de 900 euros ;
Attendu en application de l'article L2312-2 du code du travail qu'il n'est pas contesté que lors de l'ouverture de la procédure de sauvegarde de l'entreprise, la société PARCYDE comptait plus de onze salariés mais ne disposait pas de délégué du personnel ; que pourtant cet effectif avait été atteint au cours des trois années précédentes ; que la société n'a jamais organisé d'élections professionnelles pour se conformer à ses obligations légales ou établi de procès-verbal de carence exigé par l'article L2314-5 du code du travail ; que compte tenu des missions dont sont investis les délégués du personnel et qui sont définies à l'article L2313-1 du code du travail, le défaut d'établissement d'un procès-verbal de carence qui a pour effet d'avertir l'inspection du travail et les organisations syndicales de salariés a bien occasionné un préjudice à l'appelante qu'il convient d'évaluer à la somme de 3000 euros ; que l'indemnité sollicitée également par cette dernière au titre de l'irrégularité de son licenciement puisque, lors de l'entretien préalable, elle n'a pas pu se faire assister d'un membre d'une institution représentative du personnel de l'entreprise, conformément à l'article L1232-4 du code du travail, n'est que la conséquence de l'omission constatée précédemment qui a donné lieu à réparation et n'a pas généré de préjudice distinct ;
Attendu que l'appelante se borne à solliciter dans le dispositif de ses conclusions qu'il soit jugé que le montant de l'indemnité de licenciement calculée sur la base d'un salaire mensuel brut de 3182,47 euros devait s'élever à 6563,84 euros ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande puisque la somme revendiquée résulte de l'intégration au salaire de base d'une prime spéciale mensuelle dont l'évaluation présentée par l'appelante n'a pas été retenue par la cour ;
Attendu que le licenciement de l'appelante est fondé sur une cause réelle et sérieuse et qu'elle n'est créancière d'aucun rappel de salaire, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise sous astreinte de documents de fin de contrat ainsi que des bulletins de paye rectifiés ;
Attendu toutefois qu'alors que l'appelante prétend que le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi et le solde de tout compte n'ont été mis à sa disposition que le 28 mai 2018, soit sept mois après la rupture du contrat de travail, l'intimé se borne à affirmer que l'intégralité des bulletins de paie et les documents de fin de contrat ont été remis en temps utile ; que cependant il ne démontre par aucune pièce qu'il a tenu tant le certificat de travail que l'attestation Pôle Emploi à la disposition de l'appelante dès l'expiration du contrat de travail, comme l'exigent les articles L1234-19 et R1234-9 du code du travail, le certificat de travail qu'il produit en particulier ne le démontrant nullement ; que leur défaut de délivrance dans les délais a bien occasionné un dommage puisqu'il retardait le versement des indemnités de retour à l'emploi, conditionné par la production de ces documents ; qu'il convient en conséquence d'évaluer le préjudice subi par l'appelante à ce titre à la somme de 2000 euros ;
Attendu qu'il convient de déclarer le présent arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA dans les limites de sa garantie ;
Attendu que l'équité commandait que les premiers juges allouent la somme de 750 euros à l'appelante sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que toutefois son paiement doit être supporté exclusivement par le liquidateur de la société ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a dû en exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
DÉCLARE recevable [U] [D] épouse [C] en ses demandes,
REFORME le jugement déféré,
FIXE la créance de [U] [C] au passif de la liquidation judiciaire de la société PARCYDE à la somme de
- 200 euros à titre de rappel de prime spéciale pour le mois de décembre 2016
- 20 euros au titre des congés payés y afférents
- 3000 euros en réparation du préjudice subi du fait du défaut d'établissement d'un procès-verbal de carence en raison de l'absence de mise en place de délégués du personnel dans la société
- 900 euros en réparation du préjudice subi par suite du non-respect de la périodicité du paiement du salaire
- 2000 euros pour défaut de mise à disposition des documents de fin de contrat,
DÉBOUTE [U] [C] du surplus de sa demande,
DIT n'y avoir lieu d'ordonner la remise sous astreinte des documents de fin de contrat et des bulletins de paye rectifiés,
DIT que la somme allouée par les premiers juges en application de l'article 700 du code de procédure civile sera supportée exclusivement par le liquidateur judiciaire de la société PARCYDE,
DÉCLARE l'arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Amiens,
DIT que l'AGS-CGEA ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-8 et suivants du code du travail que dans les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 à L3253-17, L3253-19 à L3253-21 et D3253-2 dudit code,
DÉBOUTE l'AGS CGEA de sa demande tendant à subordonner ses avances à la justification par le mandataire de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder au paiement des sommes garanties mais rappelle que l'obligation au paiement de l'AGS-CGEA ne pourra s'effectuer que sur présentation par le mandataire d'un relevé de créance,
CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris,
MET les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la société PARCYDE.
LE GREFFIER
S. STIEVENARD
LE PRÉSIDENT
P. LABREGERE