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29/04/2022 | FRANCE | N°18/00384

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 1, 29 avril 2022, 18/00384


ARRÊT DU

29 Avril 2022







N° 515/22



N° RG 18/00384 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RKMK



SHF/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

19 Décembre 2017

(RG 17/00093 -section 3)











































GROSSE :



aux avocats



le 29 Avril 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [V] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Delphine MALAQUIN, avocat au barreau de VALENCIENNES





INTIMÉE :



SARL SOFRATEL

[Adresse 2]

[Local...

ARRÊT DU

29 Avril 2022

N° 515/22

N° RG 18/00384 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RKMK

SHF/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

19 Décembre 2017

(RG 17/00093 -section 3)

GROSSE :

aux avocats

le 29 Avril 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [V] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Delphine MALAQUIN, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉE :

SARL SOFRATEL

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Manuel DE ABREU, avocat au barreau de VALENCIENNES, substitué par Me Delphine AUDENARD, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS :à l'audience publique du 09 Mars 2022

Tenue par Soleine HUNTER-FALCK

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

ARRÊT :Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Avril 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 15 septembre 2021

La SARL Sofratel (Société Française de télésurveillance) qui a une activité de sécurité et télésurveillance, est soumise à la convention collective de la prévention et de la sécurité ; elle comprend plus de 10 salariés

Monsieur [V] [C], né en 1968, a été engagé par contrat à durée déterminée dans le cadre d'un surcroît d'activité par la SARL Sofratel du 14.03 au 10.06.2011 en qualité d'installateur monteur.

Un contrat de travail à durée indéterminée a été signé le 10.06.2011 à effet du 14.06.2011, sous la qualification Niveau l ' Echelon 2 ' Coefficient 120 à temps complet (151h67).

Des avertissements ont été notifiés au salarié les 10.01.2013, 12.03.2014, 27.03.2014 avec suppression de la prime d'objectif du mois d'avril 2014, puis les 18.07.2014, 12.09.2014, 07.01.2015, 19.01.2014.

Le 16.01.2015, M. [V] [C] a été victime d'un accident de travail et a bénéficié d'un arrêt de travail prolongé jusqu'au 15.02.2015.

Monsieur [V] [C] a, par lettre du 12.02.2015, remis sa démission, la fin du préavis étant fixée au 15.02.2015, dans les termes suivants :

'Suite à de nombreux courriers de la part de M [U] me stipulant mon manque de professionnalisme et de manque de rentabilité et pour préserver ma santé mentale, je vous informe que j'ai pris la décision de démissionner de mon poste de technicien que j'occupe actuellement dans votre entreprise depuis le 11 mars 2011.

Au vu des différents reproches, je souhaite être dispensé d'effectuer mon préavis par dérogation aux dispositions de la convention collective. Je vous remercie de prendre en considération ma demande afin que je puisse quitter mon emploi le 15 février 2015.'

Le 16.02.2015 la société a pris acte de cette démission sans accepter de le dispenser d'exécution du préavis.

M. [V] [C] été convoqué par lettre du 24.02.2015 à un entretien préalable fixé le 05.03.2015 avec mise à pied conservatoire à compter du 12.12.2014, puis licencié par son employeur le 10.03.2015 pour faute lourde. Il a contesté cette mesure par LRAR.

Le 27.03.2015, le conseil des prud'hommes de Valenciennes a été saisi par Monsieur [V] [C] en requalification de la démission, indemnisation des préjudices subis du fait de la rupture et pour diverses demandes liées à l'exécution du contrat de travail.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 31.01.2018 par Monsieur [V] [C] du jugement rendu le 19.12.2017 par le conseil de prud'hommes de Valenciennes section Activités Diverses, notifié le 11.01.2018, qui a :

DEBOUTE Monsieur [V] [C] de sa demande de requalification de démission en licenciement abusif.

DIT le licenciement de Monsieur [V] [C] pour faute lourde.

L'a DEBOUTE de l'intégralité de ses demandes.

Et l'a CONDAMNE à payer à la SARL SOFRATEL, prise en la personne de son gérant, la somme de SEPT CENT CINQUANTE EUROS (750,00 €) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens.

L'affaire a été plaidée le 24.03.2021 puis mise en délibéré ; la réouverture des débats avec révocation de l'ordonnance de clôture a été ordonnée par arrêt rendu le 28.05.2021 avec renvoi à l'audience du 06.10.2021, puis avec un nouveau renvoi au 09.03.2022.

Vu les conclusions transmises par RPVA le 07.03.2022 par Monsieur [V] [C] qui demande à la cour de :

'Dire bien appelé mal jugé'

REFORMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 décembre 2017 par le conseil des prud'hommes de Valenciennes,

ET STATUANT de nouveau,

DIRE que les demandes formulées par Monsieur [C] au titre de l'annulation des sanctions disciplinaires et rappel d'heures de route ne sont pas prescrites,

ANNULER les avertissements prononcés à l'encontre de Monsieur [C] les 12 mars 2014, 27 mars 2014, 18 juillet 2014, 12 septembre 2014, 7 janvier 2015, 19 janvier 2015,

REQUALIFIER la démission de Monsieur [C] intervenue le 12 février 2015 en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail,

DIRE que cette prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des manquements de la Société SOFRATEL,

En conséquence,

CONDAMNER la Société SOFRATEL à payer à Monsieur [C] les sommes suivantes :

- Dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait des avertissements répétés et infondés : 2 000 €

- Indemnité légale de licenciement : 1 693.36 €

- Indemnité compensatrice de préavis : 4 233.42 € brut

- Indemnité de congés payés y afférent : 423.34 € brut

- Dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse : 40 000 €

- Dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait des circonstances dans lesquelles est intervenue la rupture du contrat : 20 000 €

- Rappel d'heures de route pour la période de janvier 2013 a décembre 2014 : 3 841.45 € brut

- Indemnité de congés payés y afférent : 384.14 € brut

DEBOUTER la Société SOFRATEL de 1'ensemb1e de ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER la Société SOFRATEL à payer à Monsieur [C] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au titre des procédures de l ère instance et d'appel ;

LA CONDAMNER aux entiers dépens de l ére instance et d'appe1 ;

Vu les conclusions transmises par RPVA le 03.03.2022 par la SARL Sofratel qui demande de :

SUR LES DEMANDES RELATIVES A L'EXECUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL.

S'agissant des demandes de rappel de salaires et d'indemnité de déplacement formulées par voie de conclusions en date du 14 février 2017 et développée en appel sous l'intitulé «heures de route» :

JUGER la demande de rappel d'heures de route pour la période antérieure au 14 février 2014 irrecevables comme prescrite ;

- CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de VALENCIENNES en date du 19 décembre 2017 ;

En conséquence,

- DEBOUTER M. [C] de l'ensemble de ses demandes ;

S'agissant des demandes d'annulation des avertissements formulées par voie de conclusions en date du 14 février 2017 :

- JUGER les demandes d'annulation formulées irrecevables comme prescrites.

Subsidiairement,

CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de VALENCIENNES en date du 19 décembre 2017 ;

En conséquence,

- DEBOUTER M. [C] de l'ensemble de ses demandes ;

SUR LES DEMANDES RELATIVES A LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL :

A titre principal

CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de VALENCIENNES en date du 19 décembre 2017 en ce qu'il a DEBOUTER Monsieur [C] de sa demande de requalification de sa démission en prise d'acte ayant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

- LE DEBOUTER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire

- DEBOUTER M. [C] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires et pécuniaires qui ne se justifient pas en leur quantum.

En tout état de cause

CONDAMNER M. [C] à verser à la société SOFRATEL une indemnité procédurale de 2 000.00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les 750.00 € accordé par le Conseil de Prud'hommes de VALENCIENNES et pour lesquels il est demandé confirmation de la décision ;

Le CONDAMNER aux entiers dépens de l'instance, en ce compris ceux exposés par devant le Conseil des Prud'hommes de VALENCIENNES ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 08.03.2022 prise au visa de l'article 907 du code de procédure civile ;

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

A l'issue de cette audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l'exécution du contrat de travail :

1) Sur l'annulation des sanctions et mises en garde :

M. [V] [C] déclare avoir fait l'objet de janvier 2013 à février 2015 de plus de 10 sanctions infondées avant d'être mis en arrêt de travail pour syndrome dépressif réactionnel, et de notifier sa démission à son employeur.

Il indique avoir saisi le conseil des prud'hommes de demandes liées à la rupture de son contrat de travail le 27.03.2015 et la demande effectuée par conclusions complétives du 14.02.2017 n'est donc pas prescrite ; une demande écrite a été faite le 28.01.2015 à laquelle la société a répondu le 11.02.2015.

Il conteste les sanctions qui lui ont été notifiées et précise que ni leur réalité ni leur imputabilité ne sont établies, ce qui a été constaté alors que les chantiers était en cours, et qu'il n'avait fait l'objet d'aucune remarque pendant deux ans ; il observe que son employeur n'a pas fait droit à la demande de dispense de préavis ce qui atteste de la qualité de son travail.

La SARL SOFRATEL constate que le salarié conteste globalement les 'sanctions et mises en garde' qui lui ont été notifiées depuis le 12.03.2014, ce qu'il n'a pas fait avant de saisir la juridiction prud'homale ; elle estime que cette demande est prescrite en application de l'article L 1471-1 du code du travail puisque cette demande figure pour la première fois dans les conclusions communiquées devant le conseil des prud'hommes le 14.02.2017, alors que le dernier avertissement lui a été notifié en janvier 2015 soit plus de deux ans auparavant. A titre subsidiaire, la société justifie du bien fondé des différents avertissements.

En ce qui concerne la prescription, dans sa version applicable à l'espèce, l'article L 1471-1 du code du travail décide que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Il est constant que ces avertissements ont été notifiés au fur et à mesure entre le 12.03.2014 et jusqu'au 07.01.2015. La SARL SOFRATEL produit les conclusions récapitulatives communiquées en février 2017 aux termes desquelles M. [V] [C] sollicite dans le dispositif l'annulation de l'ensemble des sanctions et mises en garde, ainsi que l'indemnisation du préjudice causé globalement. Cette demande ne figurait pas dans la requête initiale ainsi qu'il ressort du jugement rendu le 19.12.2017.

La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure.

Il en résulte que la saisine de la juridiction prud'homale emporte interruption de la prescription pour l'ensemble des actions nées du même ensemble contractuel, même si leur fondement ou leur objet est différent.

Par suite, le conseil des prud'hommes de Valenciennes ayant été saisi le 27.03.2015, cette demande n'est pas prescrite.

Sur le fond, la SARL SOFRATEL justifie du bien fondé des avertissements successifs en produisant pour :

- l'avertissement du 12.03.2014 relatif au non-respect des horaires, la note de service du 27.12.2013 qui rappelle notamment que la durée horaire quotidienne était fixée au maximum à 12 h, ce qui n'a pas été respecté par M. [V] [C] la semaine du 10.02.2014 ;

Le salarié réplique qu'il avait déjà à plusieurs reprises en 2012 et 2013 eu des amplitudes horaires supérieures à 12h, ce qui ne lui avait pas été reproché alors ;

=$gt; il n'en reste pas moins que M. [V] [C] n'a pas respecté la note de service du 27.12.2013 qui rappelait aux salariés la nécessité de respecter une durée maximale quotidienne ;

- l'avertissement du 27.03.2014 relatif à la qualité de sa prestation de travail, le courriel du 26.04.2016 du client accompagné de la fiche du salarié établissant la mauvaise exécution de la prestation, outre la justification de la refacturation au profit de Immochan ;

Le salarié conteste ces allégations ;

=$gt; la réalité du grief repose principalement sur le courriel émanant de M. [F] du 26.03.2014 qui a été avisé par le client du fait que 'les câbles tombent' ;

- l'avertissement du 18.07.2014 relatif aux prestations du salarié et au non-respect des horaires sans accord de l'employeur, ainsi que les photos prises sur le chantier accompagnées de la fiche du salarié ;

Le salarié conteste les faits, les photos n'étant pas probantes ;

=$gt; il ressort des pièces 41/42 qu'il s'agit bien du chantier SIMPLY et il est justifié de la présence de M. [V] [C] sur ce chantier, sans qu'il soit démontré par ces seules photos qu'il ait été à l'origine de cette réalisation défectueuse ; néanmoins il ne conteste pas le dépassement horaire ;

- l'avertissement du 12.09.2014, relatif au comportement professionnel du salarié qui n'a pas donné satisfaction au client Partenord, des photos étant communiquées ; le salarié n'a pas contesté la sanction sur le moment ;

M. [V] [C] ne conteste pas avoir été sur ce chantier mais expose que les photos ont été prises en cours de chantier et ne démontrent aucunement qu'il ait été responsable de la situation décrite ;

=$gt; Il est néanmoins établi que le salarié a laissé les cables apparents à son départ, mais aussi qu'à un endroit le mur a été percé en laissant un trou apparent ; il n'est pas justifié de l'état du chantier au départ du salarié ;

- l'avertissement du 07.01.2015 relatif à de l'inattention, au non-respect de consignes ; la société produit l'attestation de M. [U], responsable d'activité, qui confirme que M. [V] [C] n'est pas arrivé équipé avec le matériel qui avait été préparé et mis à sa disposition ;

M. [V] [C] fait valoir qu'il s'agissait de la première journée du chantier et qu'il aurait eu la possibilité de compléter son matériel par la suite ;

=$gt; cependant les consignes qui lui avaient été données n'ont pas été respectées ;

- l'avertissement du 19.01.2015 indiquant que le salarié n'a avisé son employeur de l'accident du travail survenu le 16.01.2015 que le lendemain, sans donner les informations utiles pour la déclaration de cet accident de travail, alors que le jour même il a raccompagné un collègue à proximité de l'entreprise, ce dont il est justifié ; la société a été contrainte de lui adresser un courrier LRAR le 27.01.2015 pour obtenir les renseignements utiles à la déclaration ;

M. [V] [C] communique l'arrêt de travail initial du 16.01.2015 pour lombalgies et en a fait part à l'employeur le lendemain ;

=$gt; il n'est pas contesté que M. [V] [C] a averti la SARL SOFRATEL de l'accident du travail survenu le 16.01.2015 dès le lendemain oralement ; il a en effet tardé à remplir les formalités d'usage, ce qui ne justifiait pas une sanction.

En conséquence, l'essentiel des griefs contenus dans les différents courriers d'avertissement est justifié, M. [V] [C] n'ayant pas eu un comportement professionnel irréprochable comme il le fait valoir ; en l'absence de faute de l'employeur, le salarié ne peut réclamer réparation du préjudice invoqué.

Cette demande qui doit être rejetée n'a pas été examinée par le premier juge.

2) Sur le rappel d'heures de route :

M. [V] [C] précise que, s'il a réclamé en première instance le paiement d'indemnités de déplacement, il s'agissait d'une erreur de qualification et en réalité il sollicite le paiement d'un rappel d'heures de route.

Il conteste la prescription de la demande puisqu'il convient de faire application des dispositions transitoires et de prendre en compte un délai de 5 ans.

Sur ce point, la SARL SOFRATEL invoque la prescription triennale de cette demande en application de l'article L 3245-1 du code du travail dès lors qu'elle figure pour la première fois dans les conclusions transmises le 14.02.2017, la prescription rendant irrecevable la demande antérieure au 14.02.2014.

Selon l'article L.3245-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l'action en paiement du salaire se prescrivait par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.

En application de l'article L.3245-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, entrée en vigueur le 16 juin 2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat est rompu, sur les trois années précédant la rupture du contrat.

Aux termes de l'article 21-V de la loi du 14 juin 2013 les dispositions du code du travail prévues aux III et IV de cet article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Il en résulte que la demande de rappel de salaires présentée par M. [V] [C] le 14.02.2017 pour la période allant de janvier 2013 à décembre 2014 n'est pas prescrite.

Sur le fond, M. [V] [C] produit aux débats les feuilles de route de 2012 à 2014 pour justifier du bien fondé de sa demande outre ses bulletins de paie de 2013 à janvier 2015 qui mentionnent la rémunération d'heures de route, et un tableau récapitulatif qui tient compte non seulement du fait que, lorsque la mission du salarié ne couvrait pas les 35 heures hebdomadaires, une partie des heures de route étaient affectées en heures de chantier dans la limite de 35 heures, mais également de ses absences, qui sont limitées, et des heures supplémentaires versées qui ne doivent pas être déduites puisqu'il s'agit d'un poste distinct.

La société oppose que des heures supplémentaires ont été réglées, ce qui figure sur les bulletins de paie, mais également que la demande est incohérente là encore compte tenu des éléments produits, et totalement exagérée. Elle constate que des heures de route ont d'ores et déjà été rémunérées notamment de mars 2013 à janvier 2015, alors même que le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail n'est pas considéré comme du temps de travail effectif, sauf si ce temps de trajet est supérieur au temps de trajet usuel jusqu'au siège sociale de l'entreprise qui est évalué à une heure. M. [V] [C] a en outre été payé de ses heures supplémentaires et il a été réglé sur une base hebdomadaire de 35 heures alors même qu'il reconnaît dans le tableau communiqué ne pas avoir travaillé cette durée du travail certaines semaines. La société conteste le duplicata des fiches de suivi remplies par le salarié qui n'étaient pas fiables ainsi qu'il est démontré. A titre subsidiaire elle indique qu'il est impossible de vérifier le calcul présenté.

Il est constant que le salarié a régularisé sa demande en sollicitant le paiement d'heures de route et non pas d'heures supplémentaires.

Le contrat de travail stipule que la durée du travail mensuel est fixée à 151h67 soit 35 heures par semaine ; et que les horaires de travail sur les chantiers sont fixés du lundi au vendredi de 8h30 à 12h et de 14h à 17h30, les heures supplémentaires devant être autorisées par écrit.

Les bulletins de salaire produits de janvier 2013 à janvier 2015 font état du versement très régulier d'heures de route payées au même taux horaire que le salaire brut, qui viennent s'ajouter au paiement de ses heures normalement dues à raison de 151h67 par mois.

Au soutien de ses prétentions, M. [V] [C] produit des fiches hebdomadaires récapitulant pour chaque jour de la période les sites d'intervention et les clients, les heures de chantier et les heures de route, complétées d'un tableau récapitulant chaque mois les heures de route non payées.

Ces éléments précis permettent à l'employeur de répondre.

La SARL SOFRATEL fait état du règlement d'heures supplémentaires qui constituent un élément distinct de la fiche de paie et ne doivent pas être prises en compte ; il est constant que le salarié a été payé au titre de 35h par semaine alors que son tableau fait en effet état régulièrement d'un horaire de travail inférieur, et cette différence n'est pas mentionnée dans le calcul proposé par le salarié ; en outre la société démontre l'incohérence de la demande à plusieurs reprises.

Par suite la demande qui n'est pas suffisamment justifiée sera rejetée et le jugement confirmé.

3) Sur le travail dissimulé :

Cette demande qui n'a pas été examinée en première instance n'a pas été reprise en appel et ne saurait se justifier.

4) Sur les indemnités de déplacement :

Il en est de même pour cette demande.

Sur la rupture du contrat de travail et ses effets :

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer le vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.

Ainsi si les faits invoqués au soutien de la prise d'acte de rupture ne la justifiaient pas eu égard aux griefs énoncés dans la lettre de prise d'acte qui sont déterminants, les effets produits sont ceux d'une démission. En revanche si les faits invoqués par le salarié sont établis et constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur, la prise d'acte de rupture produit les effets du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il ressort de l'examen des différentes demandes du salarié qui sont rejetées pour l'essentiel, que les faits invoqués au soutien de la prise d'acte de rupture ne constituaient pas des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur, et par suite ne la justifiaient pas.

En outre, M. [V] [C] ne fait plus valoir dans ses écritures d'une part un harcèlement moral ni un manquement à l'obligation de sécurité.

M. [V] [C] avait par un courrier en date du 12.02.2013 donné sa démission à son employeur en sollicitant de quitter son emploi le 15 février, ce qui lui a été refusé par son employeur le 16.02.2013, ce dernier rappelant que le préavis devait être effectué jusqu'au 13.03.2015. Il n'y a pas lieu de tenir compte de la lettre de licenciement pour faute lourde qui intervient après la rupture du contrat de travail.

Il convient de dire que les effets produits par la lettre du salarié du 12.02.2015 seront ceux d'une démission qui en l'espèce est claire et non équivoque. Par suite les demandes formées par M. [V] [C] au titre de la rupture du contrat de travail seront rejetées, et le jugement sera infirmé.

M. [V] [C] sollicite par ailleurs la réparation du préjudice moral résultant des pressions, griefs et sanctions disciplinaires qu'il a subis et qui constituent selon lui un acharnement infondé de son employeur.

Néanmoins la faute de la société n'est pas démontrée eu égard à la décision prise concernant les sanctions disciplinaires qui sont jugées en bonne partie justifiées, peu important leur renouvellement sur un période limitée, et les pressions subies n'étant pas suffisamment caractérisées par l'attestation délivrée par M. [I]. La demande sera rejetée et le jugement confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 19.12.2017 par le conseil de prud'hommes de Valenciennes section Activités Diverses, sauf en ce qu'il a rejeté la requalification de la démission et a dit le licenciement de M. [V] [C] pour faute lourde, tout en le condamnant à payer la somme de 750 € à la société au titre de l'article 700 du CPC ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la prise d'acte de rupture du 12.02.2013 doit produire les effets d'une démission ;

Rejette les autres demandes ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [V] [C] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER

Séverine STIEVENARD

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 1
Numéro d'arrêt : 18/00384
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;18.00384 ?
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