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07/05/2020 | FRANCE | N°17/06306

France | France, Cour d'appel de Douai, 07 mai 2020, 17/06306


République Française
Au nom du Peuple Français


COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 7/05/2020
No de MINUTE : 20/376
No RG 17/06306 - No Portalis DBVT-V-B7B-RD6O
Jugement (No 1115000100) rendu le 20 novembre 2015
par le tribunal d'instance d'Avesnes sur Helpe
APPELANTE


Sa Credipar agissant par ses représentants légaux
[...]


Représentée par Me Benoît de Berny, avocat au barreau de Lille


INTIMÉE


Madame A... T...
née le [...] à Maubeuge (59600) - de nationalité française
[...]
>
Représentée par Me Jean-Yves Houzeau, avocat au barreau d'Avesnes-sur-Helpe


DÉBATS à l'audience publique du 22 janvier 2020 tenue par Maria B...

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 7/05/2020
No de MINUTE : 20/376
No RG 17/06306 - No Portalis DBVT-V-B7B-RD6O
Jugement (No 1115000100) rendu le 20 novembre 2015
par le tribunal d'instance d'Avesnes sur Helpe
APPELANTE

Sa Credipar agissant par ses représentants légaux
[...]

Représentée par Me Benoît de Berny, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

Madame A... T...
née le [...] à Maubeuge (59600) - de nationalité française
[...]

Représentée par Me Jean-Yves Houzeau, avocat au barreau d'Avesnes-sur-Helpe

DÉBATS à l'audience publique du 22 janvier 2020 tenue par Maria Bimba Amaral magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Betty Moradi

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre
Hélène Billieres, conseiller
Maria Bimba Amaral, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 7 mai 2020 après prorogation du délibéré du 26 mars 2020(date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Betty Moradi, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 19 décembre 2020

FAITS ET PROCÉDURE - PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon offre émise et acceptée le 7 octobre 2011, la S.A. Crédipar a consenti à M. S... F... et à Mme A... T... épouse F..., tenus solidairement, un crédit de 18 000 euros pour financer l'acquisition d'un véhicule d'occasion Citroën Grand C4 Picasso, remboursable au taux d'intérêts de 12,45 % en 60 mensualités hors assurance de 414,46 euros du 5 décembre 2011 au 5 novembre 2016. Des assurances complémentaires ont été souscrites pour un total de 47,13 euros se décomposant en l'Assurance Décès Solo pour 18 euros, la Plus Que l'Argus (PQA) pour 21,60 euros TTC, la Complémentaire Assistance (EA) pour 7,53 euros, de sorte que la mensualité totale s'élevait à 461,59 euros. Le coût total du crédit hors assurances était mentionné pour 24 867,60 euros.

Le 28 janvier 2014, la commission de surendettement des particuliers du Nord Valenciennes a déclaré Mme A... T... épouse F... recevable en sa demande d'élaboration d'un plan de redressement.

Par courrier recommandé du 16 juillet 2014 avec avis de réception signé le 24 du même mois par madame et portant la mention « non réclamé» pour monsieur, la S.A. Crédipar a mis en demeure les époux F... de payer sous huitaine la somme de 16 913,26 euros et leur a indiqué qu'à défaut de paiement, une procédure serait engagée.

Par ordonnance du 4 février 2015 notifiée le 24, le juge de l'exécution a conféré force exécutoire aux mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers du Nord Valenciennes concernant Mme A... T... épouse F..., à savoir, s'agissant de la créance de la S.A. Crédipar d'un montant de 15 380,13 euros, un règlement en 8 échéances de 0 euros puis 16 échéances de 329 euros, au taux d'intérêt réduit à zéro.

Par acte d'huissier du 31 mars 2015, la S.A. Crédipar a fait assigner en paiement Mme A... T... épouse F... devant le tribunal d'instance d'Avesnes sur Helpe.

Par jugement contradictoire avant dire droit du 30 juin 2015, cette juridiction a ordonné la réouverture de débats afin que le prêteur produise un historique de compte complet.

Le 6 juillet 2015, le véhicule a été vendu aux enchères pour la somme de 3 100 euros, les frais de transport, contrôle technique et gardiennage étant mentionnés pour une somme de 249,46 euros soit un solde de 2 850,54 euros.

Le 28 juillet 2015, la créance de la S.A. Crédipar a été retenue dans la procédure collective concernant M. S... F... pour la somme de 18 483,75 euros.

Par jugement contradictoire du 20 novembre 2015, le tribunal d'instance d'Avesnes sur Helpe a :

- débouté la société Crédipar de l'ensemble de ses demandes en raison de l'absence d'un historique de compte suffisamment détaillé ;
- débouté la société Crédipar de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société Crédipar aux entiers dépens.

Par courrier recommandé du 22 septembre 2017 avec avis de réception non revenu, la S.A. Crédipar a rappelé à Mme A... F... qu'elle n'avait pas respecté le plan de surendettement ainsi devenu caduc et l'a mise en demeure de payer la somme de 12 529,76 euros.

Le 27 octobre 2017, la S.A Crédipar a interjeté appel du jugement précité en ce qu'il l'a :

- déboutée de l'ensemble de ses demandes en raison de l'absence d'un historique de compte suffisamment détaillé;
- déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du de de procédure civile;
- condamnée aux entiers dépens.

Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 4 avril 2018, elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré dans les termes de son appel et de condamner Mme A... T... épouse F... à lui payer les sommes de :

- 13 707,36 euros avec intérêts au taux de 12,45 % l'an à compter de la mise en demeure du 22 septembre 2017, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière par application de l'article 1343-2 du code civil ;
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant des frais irrépétibles de première instance ;
- 1 000 euros pour ceux d'appel ;
outre les frais et dépens.

Elle soutient que les sommes prélevées correspondent aux dispositions contractuelles ; le crédit était remboursable en 60 échéances hors assurance de 414,46 euros ; le montant des échéances et celui des intérêts devaient être ajustés en fonction de la date de mise à disposition des fonds ; la somme prélevée mensuellement de 462,97 euros aboutit, en soustrayant le montant des assurances facultatives de 47,13 euros, à la somme de 415,84 euros soit la somme prévue au tableau d'amortissement ; la différence de 1,38 euros entre la mensualité hors assurances prévue au contrat (414,46 euros) et celle figurant au tableau d'amortissement (415,84 euros) correspond aux intérêts courus entre la date de libération des fonds et la première échéance.

Elle souligne que l'indemnité contractuelle de 8 % d'un montant de 1 177,77 euros est contractuellement prévue et n'est pas excessive, eu égard aux sommes dues à hauteur de 13 707,36 euros.

Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 21 février 2018, Mme A... T... épouse F... demande à la cour de :

à titre principal :
- débouter la S.A. Crédipar de toutes ses demandes et confirmer le jugement
déféré ;
- condamner la S.A. Crédipar à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
à titre subsidiaire:
- réduire à de plus justes proportions l'indemnité, clause pénale, fixée au contrat ;
- débouter la S.A. Crédipar de toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- réduire le taux d'intérêts au taux d'intérêt légal « compte tenu du manquement de la société quant au calcul du taux effectif global et du coût du crédit, dès lors que le manquement de la société Crédipar quant à ses éléments de calculs et plus particulièrement celui du taux effectif global et du coût total du crédit apparaît non seulement obscur mais contradictoire entre ce qui a été fixé au titre des règlements et ce qui a été convenu au titre du contrat et que cette imprécision constitue donc un manquement de Crédipar et de ses obligations de renseignement, ce qui peut être sanctionné par l'application du taux légal et non plus contractuel... ».

Elle expose que les mensualités contractuellement prévues (414,46 euros) diffèrent de celles prévues au tableau d'amortissement (même en ajoutant les assurances facultatives) et de celles qui ont été réellement prélevées (415,84 euros) ; cette tromperie a entraîné un surcoût total du crédit (24 950,40 euros au lieu de 24 867,60 euros) ; ce différentiel a un impact sur le calcul des intérêts ; il n'est pas possible de calculer précisément le montant qui est dû même en tenant compte des impayés ; le prêteur doit fournir un tableau reprenant ce qui était contractuellement dû, ce qui a été payé, toute différence devant lui profiter.

Elle met en avant l'imprécision des comptes, la disparité de puissance économique entre les parties, la recevabilité du dossier de surendettement et sa bonne foi pour solliciter la diminution de l'indemnité légale.

MOTIFS

Sur la demande en paiement

En application de l'article L. 311-24 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat litigieux, « En cas de défaillance de l'emprunteur. le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêt de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret. »

L'article L. 311-23 du même code précise : « Aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.
Toutefois, le prêteur pourra réclamer à l'emprunteur, en cas de défaillance de celui-ci, le remboursement des frais taxables qui lui auront été occasionnés par cette défaillance, à l'exclusion de tout remboursement forfaitaire de frais de recouvrement. »

Le contrat précise dans les conditions particulières, au paragraphe I 3 « Modalités de remboursement du crédit » que : « (. ..) Le montant des échéances. Le montant total dû et la durée mentionnés au présent contrat sont calculés pour le paiement de la première échéance à 30 jours à compter de la date de mise à disposition des fonds. Si cette dernière date diffère de plus d'un jour de la date prévue, en plus ou moins, le montant des intérêts et le montant des échéances ainsi que le montant total dû seront ajustés en conséquence dans la limite de 10 % du montant des intérêts. Cette modification sera notifiée à l'emprunteur au plus tard 7 jours avant la date de la première échéance. »

En l'espèce, la libération des fonds datant du 26 octobre 2011 et la première échéance étant du 5 décembre 2011, plus de trente jours se sont écoulés entre ces deux dates. Par courrier du 28 octobre 2011, la société Crédipar a adressé aux époux F... un rappel des caractéristiques de leur contrat de crédit précisant le montant du prélèvement de 462,97 euros à compter du 5 décembre 2011 et rappelant que « le montant de vos prélèvements peut différer légèrement de celui prévu initialement, selon que la date de prélèvement se situe à plus ou moins de 30 jours de la date de règlement.» Il en résulte que les deux tableaux d'amortissement versés aux débats, en ce qu'ils mentionnent une mensualité hors assurance d'un montant de 415,84 euros, supérieur au montant prévisionnel pour 414,46 euros, sont conformes aux stipulations contractuelles.

Si un des deux tableaux d'amortissement (pièce 9) supprime dès le mois de septembre 2013, soit le mois suivant le premier impayé de paiement, les assurances PQA pour 21,60 euros TTC et EA pour 7,53 euros, de sorte que les mensualités prélevées s'élèvent à 433,84 euros au lieu de 462,97 euros, le montant du capital restant dû est identique dans les deux tableaux d'amortissement. En outre, au vu des décomptes et historiques, le prêteur réclamait, avant le plan de surendettement, le paiement de mensualités pour ce montant de 433,84 euros, ce qui était favorable à l'emprunteuse, de sorte que le premier juge a à tort débouté le prêteur de sa demande en paiement.

Le jugement déféré doit donc être infirmé.

La demande de Mme A... T... épouse F... tendant à voir le taux d'intérêt contractuel réduit au taux d'intérêt légal sera en outre rejetée, aucun manquement n'ayant été commis par le prêteur ainsi qu'il vient d'être vu.

Au vu des pièces produites et notamment de l'offre préalable de crédit et des tableaux d'amortissement, de l'ordonnance du 4 février 2015 conférant force exécutoire aux mesures recommandées, des historiques de compte en date des 23 février et 25 août 2015 et 28 septembre 2017, du courrier de mise en demeure du 16 juillet 2014, du courrier prononçant la caducité du plan le 22 septembre 2017, des décomptes aux 23 février 2015 et 27 septembre 2017, la créance de la S.A. Crédipar s'établit en conséquence comme suit :

- échéances échues impayées : 658 euros ;
- capital restant dû : 14 722,13 euros ;
soit un sous total de 15 380,13 euros dont il convient de déduire le prix de vente du véhicule pour 3 100 euros et non 2 854,54 euros, les frais pour 249,46 euros (transport, contrôle technique, gardiennage) n'étant pas des frais taxables au sens de l'alinéa 2 de l'article L. 311-23 du code de la consommation, soit un solde de 12 280,13 euros portant intérêts au taux contractuel de 12,45 % à compter du 22 septembre 2017.

En ce qui concerne l'indemnité légale de 8 % réclamée à hauteur de 1 177,77 euros, l'article 1152 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce précise que: « Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.»

Le caractère excessif de la clause n'est pas établi alors même que les impayés sont intervenus un an et demi à peine après l'octroi du crédit, de sorte que la demande de réduction de la clause sera rejetée. La somme de 1 177,77 euros portera intérêts au taux légal, cette indemnité n'étant pas une somme restant due au sens de l'article L. 311-24 du code de la consommation, à compter du 10 janvier 2018, date des premières conclusions d'appel, la mise en demeure du 22 septembre 2017 n'étant pas parvenu à son destinataire.

Faute de justifier de sa libération, Mme A... T... épouse F... sera condamnée à payer ces sommes.

La règle édictée par l'article L. 311-23 du code de la consommation selon lequel aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles
L. 311-24 à L. 311-25 du code de la consommation ne peut être mise à la charge de l'emprunteur en cas de défaillance prévue par ces articles, fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce. La demande de capitalisation de intérêts doit donc être rejetée.

Sur les demandes accessoires

Succombant, Mme A... T... épouse F... sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ni au titre de la première instance, ni de l'appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne Mme A... T... épouse F... à payer à la S.A. Crédipar les sommes de :

- 12 280,13 euros en principal avec intérêts au taux contractuel de 12,45 % à compter du 22 septembre 2017 ;
- 1 177,77 euros au titre de l'indemnité légale avec intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2018 ;

Déboute la S.A. Crédipar de ses demandes de capitalisation des intérêts et de celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne Mme A... T... épouse F... aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,

B. Moradi S. Collière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 17/06306
Date de la décision : 07/05/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-07;17.06306 ?
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