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04/04/2019 | FRANCE | N°18/05751

France | France, Cour d'appel de Douai, 04 avril 2019, 18/05751


République Française
Au nom du Peuple Français




COUR D'APPEL DE DOUAI


CHAMBRE 2 SECTION 2


ARRÊT DU 04/04/2019


***


No de MINUTE : 19/
No RG : 18/05751 - No Portalis DBVT-V-B7C-R5HB


Ordonnance (No 2018-14) rendue le 22 mai 2018 par le tribunal de commerce d'Arras
Ordonnance (RG 18/3183) rendue le 4 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai


Déféré


DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ


SAS Energie Verte prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siÃ

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ayant son siège social [...]
[...]
représentée et assistée par Me Isabelle Carlier, avocat au barreau de Douai
ayant pour conseil Me Bruno Houssier, avoca...

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 04/04/2019

***

No de MINUTE : 19/
No RG : 18/05751 - No Portalis DBVT-V-B7C-R5HB

Ordonnance (No 2018-14) rendue le 22 mai 2018 par le tribunal de commerce d'Arras
Ordonnance (RG 18/3183) rendue le 4 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai

Déféré

DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ

SAS Energie Verte prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [...]
[...]
représentée et assistée par Me Isabelle Carlier, avocat au barreau de Douai
ayant pour conseil Me Bruno Houssier, avocat au barreau de Lille

DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ

SAS Combulys prise en la personne de son président domicilié ès qualités audit siège
ayant son siège social [...]
[...]
représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai
assistée de Me Ingrid Desrumaux, avocat au barreau de Bordeaux

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Marie-Laure Dallery, président de chambre
Nadia Cordier, conseiller
Agnès Fallenot, conseiller
---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

DÉBATS à l'audience publique du 28 février 2019 après rapport oral de l'affaire par Nadia Cordier
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 04 avril 2019 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Laure Dallery, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par déclaration d'appel en date du 4 juin 2018, les SAS Combulys a interjeté appel à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue en date du 22 mai 2018 par le tribunal de commerce d'Arras.

L'avis de fixation de l'affaire a été adressé par le greffe le 25 juin 2018.

Une signification de la déclaration d'appel et de l'avis de fixation a été effectuée le 28 juin 2018. Les conclusions ont quant à elle été signifiées le 25 juillet 2018 à la SAS Energie Verte.

Cette société a constitué avocat le 3 septembre 2018. Des conclusions ont été signifiées par RPVA le 5 octobre 2018.

Un avis d'irrecevabilité des conclusions de l'intimé a été adressé par le greffe le 20 novembre 2018 en application de l'article 905-2 du code de procédure civile

Par ordonnance d'irrecevabilité des conclusions de l'intimée sur le fondement de l'article 905-2 du code de procédure civile en date du 4 octobre 2018, le magistrat chargé de la mise en état a :
- déclaré irrecevables les conclusions de l'intimée notifiée par le RPVA le 5 septembre 2018,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

* * *

Par conclusions de déféré en date du 13 février 2019, la SAS Energie verte sollicite, au visa des dispositions des articles 916 et 911 du code de procédure civile, de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de l'acte litigieux du 25 juillet 2018, de :
- dire et juger que cet acte n'a fait courir aucun délai pour le dépôt des conclusions de l'appelant,
- en conséquence, déclarer recevables les conclusions prises par la société Energie verte le 5 septembre 2018.

La société Energie verte fait valoir que :
- l'acte de signification des conclusions indique simplement en son titre "article 911" sans reprendre les dispositions du texte,
- il a été remis en pleine période estivale ne permettant pas au vu de l'omission du texte au destinataire de comprendre les dispositions qu'elle doit prendre pour la défense de ses intérêts,
- le conseil de la partie adverse n'a pas jugé bon d'aviser le conseil de la société de cette procédure dite d'urgence, et donc du calendrier de procédure et de ses conclusions.

Elle souligne que :
- l'absence de mention ou les mentions erronées dans un acte de signification quant aux délais et ses conséquences a pour effet de ne pas faire courir de délai,
- la sanction de l'irrecevabilité des conclusions de la société constituerait une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge consacré par l'article 6-1 de la CEDH.

Elle ajoute que :
- les conclusions de déféré prises le 18 octobre 2018 sont parfaitement recevables au visa des dispositions de l'article 916 du code de procédure civile,
- aucune ambiguïté n'est possible en l'espèce quant à la décision frappée de déféré,
-l'acte litigieux nommé signification des conclusions valant assignation délivrée le 25 juillet 2018 n'a fait courir aucun délai pour le dépôt des conclusions en réponse au fond de la société Energie verte.

Par conclusions en réponse sur déféré en date du 14 janvier 2019, la société Combulys demande, au visa des articles 905-2, 911 et 916 du code de procédure civile, de :
- à titre principal,
-déclarer irrecevables les conclusions de déféré notifiées par la société Energie verte le 18 octobre 2018,
- subsidiairement,
- constater que la société Energie verte n'a pas respecté les dispositions impératives de l'article 905-2 du code de procédure civile,
-en conséquence, déclarer la société Energie verte mal fondée en son déféré, et confirmer l'ordonnance du 4 octobre 2018 déclarant irrecevable les conclusions notifiées par la société Energie verte le 5 septembre 2018,
- condamner la société Energie verte à payer à la société Combulys la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en remboursement des frais irrépétibles exposés sur l'incident et le déféré.

Sur l'irrecevabilité des conclusions de déféré, elle fait valoir que :
- les conclusions ne répondent pas aux obligations imposées par l'article 916 du code de procédure civile,
- l'absence de visa de l'ordonnance en date du 4 octobre 2018 dans le dispositif impose que les conclusions de déféré soient déclarées irrecevables.

Sur les conclusions du 5 septembre 2018, elle sollicite la confirmation de l'irrecevabilité de ces conclusions, aux motifs que :
- la société était informée de la déclaration d'appel et de l'avis de fixation à bref délai,
- l'avis de fixation rappelait bien le délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions,
- dès le 28 juin 2018, l'intimée était avertie de la procédure d'appel et des obligations qui lui étaient imposées,
- les exigences procédurales ne constituent aucune atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge et consacré par l'article 6§1 de la CEDH,
-aucun texte n'impose que soit repris in extenso les dispositions de l'article 911 du code de procédure civile,
- elle a pris en ne constituant pas dans le délai de 15 jours, le risque de ne pas être représentée et a assistée pour mener à bien cette procédure.

MOTIVATION

L'article 916 du code de procédure civile, prévoit que les ordonnances du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, statuant sur la caducité ou l'irrecevabilité en application des articles 905-1 et 905-2, peuvent être déférées à la cour dans les mêmes conditions que les ordonnances du conseiller de la mise en état, soit dans les 15 jours de leur date lorsqu'elles ont pour effet de mettre fin à l'instance. La requête remise au greffe de la chambre à laquelle l'affaire est distribuée, contient, outre les mentions prescrites à l'article 58 et à peine d'irrecevabilité, l'indication de la décision déférée ainsi qu'un exposé des moyens de fait et de droit.

En vertu des dispositions de l'article 905-2 du même code, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, l'appelant dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe.
L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d'un délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

L'article 911 du même code dispose que sous les sanctions prévues aux articles 905-2, 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus à ces articles aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; cependant si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat. La notification des conclusions au sens de l'article 910-1 faite à une partie dans le délai prévu aux articles 905-2 et 908 à 910 ainsi qu'à l'alinéa 1er du présent article constitue le point de départ du délai dont cette partie dispose pour remettre ses conclusions au greffe.

* * *

Le texte précité de l'article 916 du code de procédure civile n'apporte aucune précision complémentaire sur la forme ou le contenu de la requête, la notion de simple requête n'imposant aucune forme sacramentelle dès lors qu'elle indique la juridiction devant laquelle la demande est portée, l'objet de la demande et l'exposé des moyens, outre l'indication des pièces éventuelles et l'identification du requérant.

Ainsi, les écritures déposées par la SAS Energie verte en date du 18 mai 2018, outre les mentions de l'article 58 du code de procédure civile, intitulées "conclusions de déféré" et adressées à la cour, spécifie expressément dans le corps que " la Société énergie verte, au visa des dispositions de l'article 916 du code de procédure civile, défère à la cour cette ordonnance" et contient un exposé des moyens de fait et de droit au soutien de cette demande.

Le fait que cet acte prenne la forme d'un jeu de conclusions, avec un dispositif lequel ne se réfère pas expressément à l'ordonnance que la société entend déférer, ne saurait remettre en cause la validité et la recevabilité de l'acte litigieux.
Il en est de même de la présence en en-tête de la mention relative de l'ordonnance de référé du tribunal de commerce d'Arras du 22 mai 2018, au regard du contenu explicite des écritures et de cette mention visant uniquement à rappeler à la partie adverse dans quelle procédure s'inscrit cette requête.

En conséquence, aucune irrecevabilité des conclusions de déféré notifiées le 18 octobre 2018 ne saurait être encourue.

La société Energie Verte critique la validité de l'acte nommée "signification de conclusions valant assignation délivrée", avec référence à l'article 911 du code de procédure civile, reprochant l'absence de toute mention quant aux délais impératifs imposés aux parties pour conclure et quant aux conséquences de ce non-respect.

Cependant, aucun texte n'impose un quelconque formalisme dans la rédaction de l'acte signifiant lesdites conclusions et n'exige que l'article 911 ne soit cité in extenso ou que les délais pour conclure soient expressément rappelés dans ledit acte, et ce contrairement aux obligations légales d'information imposées par l'article 905-1 du même code concernant l'acte de signification de la déclaration d'appel et de l'avis de fixation et sanctionnées à peine de nullité.

Les conséquences sur l'absence de mention ou les mentions erronées d'un délai dans un acte de signification privant ce dernier de toute possibilité de faire courir les délais impartis ne sont pas applicables en l'espèce.

En outre, la société Energie Verte ne peut utilement arguer de l'absence d'information sur les mesures à prendre pour la défense de ses intérêts, alors que l'avis en date du 25 juin 2018 portant fixation de l'affaire a été signifiée ainsi que la déclaration d'appel par acte d'huissier en date du 28 juin 2018 à personne habilitée.

Or, ledit acte rappelle les dispositions de l'article 905-2 du code de procédure civile qu'il reproduit expressément, les délais pour conclure ainsi que les conséquences d'un défaut de constitution.

Dès cette date l'intimée avait donc son attention attirée sur les exigences procédurales imposées et sur la nécessité de constituer rapidement avocat pour permettre d'assurer sa défense dans les délais impartis, sans que les exigences procédurales précitées puissent in abstracto constituer une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge consacré par l'article 6§1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés.

Dans les faits, la société Verte ne peut pas plus tirer argument de la rigueur desdits délais et de leur échéance en période de vacations, alors même qu'il résulte des dispositions précitées et des faits de l'espèce, d'une part, qu'elle a été informée valablement des délais impartis et des conséquences liées à un défaut de comparution ou à un défaut de conclusion dans les délais, à personne habilitée avant la période estivale, soit le 28 juin 2018, d'autre part, que, faute d'avoir constitué, le délai d'un mois s'est trouvé lui-même allongé par l'effet mécanique de l'article 911 d'un nouveau délai d'un mois, la signification litigieuse des conclusions à un associé se déclarant habiliter à recevoir l'acte étant intervenu dans ce cadre le 25 juillet 2018.

Dès lors, au vu des textes précités et des circonstances de l'espèce, sans que les exigences précitées puissent être estimées comme constituant in concreto une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge consacré par l'article 6§ 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés, la société Energie Verte qui n'a pas conclu dans le délai imparti ne peut que voir ses conclusions signifiées en date du 5 septembre 2018 déclarées irrecevables.

L'ordonnance du président de la Chambre rendue sur le fondement de l'article 905-2 du code de procédure civile en date du 4 Octobre 2018 est confirmée.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la Société Energie verte succombant en son déféré, il convient de la condamner aux dépens de la procédure d'incident et de déféré.

Les dispositions de l'ordonnance querellée relative à l'indemnité procédurale sont confirmées.

Le sens du présent déféré commande de la condamner à payer la somme de
1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

REJETTE la demande d'irrecevabilité des conclusions de déféré notifiées le 18 octobre 2018 ;

REÇOIT la société Energie Verte en son déféré ;

REJETTE sur le fond le déféré ;

CONFIRME l'ordonnance du président de la Chambre rendue sur le fondement de l'article 905-2 du code de procédure civile en date du 4 Octobre 2018 en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE la SAS Energie Verte à payer à la SAS Combulys la somme de
1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Energie Verte aux dépens de la procédure d'incident et de déféré.

Le greffier Le président

V. Roelofs M.L.Dallery


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 18/05751
Date de la décision : 04/04/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-04;18.05751 ?
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