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29/03/2019 | FRANCE | N°17/016868

France | France, Cour d'appel de Douai, D1, 29 mars 2019, 17/016868


ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 446/19

No RG 17/01686 - No Portalis DBVT-V-B7B-QYYE

VS/VM

RO

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVESNES SUR HELPE
en date du
15 Mai 2017
(RG 16/00313 -section 5)

GROSSE :

aux avocats

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANTE :

SAS CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE
dont le siège social est à sis [...]
Représentée par Me Arthur ANDRIEUX, avocat au bar

reau de BOULOGNE-SUR-MER

INTIMÉ :

M. B... K...
[...]
Représenté par M. P... M... (Défenseur syndical)

DÉBATS : à l'audience publique du 07 Février 2019

T...

ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 446/19

No RG 17/01686 - No Portalis DBVT-V-B7B-QYYE

VS/VM

RO

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVESNES SUR HELPE
en date du
15 Mai 2017
(RG 16/00313 -section 5)

GROSSE :

aux avocats

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANTE :

SAS CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE
dont le siège social est à sis [...]
Représentée par Me Arthur ANDRIEUX, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

INTIMÉ :

M. B... K...
[...]
Représenté par M. P... M... (Défenseur syndical)

DÉBATS : à l'audience publique du 07 Février 2019

Tenue par Véronique SOULIER
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Maryse ZANDECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique SOULIER : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Leila GOUTAS : CONSEILLER
Caroline PACHTER-WALD : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Véronique SOULIER, Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 04 Septembre 2017, avec effet différé jusqu'au 07 Janvier 2019
EXPOSE DU LITIGE :

Monsieur Z... K... est entré au service de la société CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE en contrat temporaire en qualité de conducteur de camion. Il a été recruté en qualité de conducteur d'engins polyvalent, catégorie professionnelle ouvrier, niveau 3 - échelon 1, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2011.

La convention collective applicable est celle des industries des Carrières et Matériaux.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 novembre 2015 faisant suite à un entretien préalable du 10 novembre 2015, il a été mis à pied trois jours du 23 au 25 novembre 2015 à la suite d'un accident de chantier survenu en raison d'une négligence lors de l'exécution du travail de déchargement et alors qu'il ne respectait pas la consigne du port obligatoire de la ceinture de sécurité.

Par lettre du 28 avril 2016 remise en mains propres, Monsieur Z... K... a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé le 28 avril 2016.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mai 2016, la SAS CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE a notifié à Monsieur Z... K... son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Par lettre du 09 juin 2016, Monsieur Z... K... a contesté son licenciement au motif qu'il ne conduisait pas la mini pelle venant juste de s'y installer.

La société CBS ayant confirmé par courrier du 13 juin 2016 le licenciement notifié en précisant à Monsieur Z... K... qu'il quitterait les effectifs à compter du 25 juillet 2016 après réalisation de son préavis, celui-ci a saisi le Conseil de Prud'hommes d'AVESNES S/HELPE.

Par jugement du 15 mai 2017, le Conseil de Prud'hommes d'AVESNES S/HELPE a :
- dit que le licenciement de Monsieur Z... K... était sans cause réelle et sérieuse ;
- condamné la SAS des CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE à verser au salarié une indemnité de 9 939, 30 euros ;
- condamné la SAS des CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE à verser au salarié une indemnité de 700,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la SAS des CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- prononcé l'exécution provisoire.

La SAS des CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE a régulièrement interjeté appel de toutes les dispositions du jugement par déclaration formée au greffe par voie électronique le 19 juin 2017.

Monsieur P... M..., défenseur syndical, s'est régulièrement constitué dans l'intérêt de Monsieur Z... K....

En application du calendrier de procédure des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, l'appelant devait conclure avant le 9 juillet 2018 et l'intimé avant le 8 octobre 2018, la clôture différée étant fixée au 7 janvier 2019.

Aux termes de ses conclusions d'appelant transmises par voie électronique le 10 octobre 2017 et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, la SAS des CARRIERES DU BASSIN DE LA SAMBRE a demandé à la Cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de :
- dire que Monsieur Z... K... a commis un manquement aux règles de sécurité justifiant son licenciement;
- dire le licenciement prononcé pour cause réelle et sérieuse;
- débouter Monsieur Z... K... de toutes ses demandes;
- condamner Monsieur Z... K... au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 30 octobre 2018, Monsieur P... M..., défenseur syndical représentant Monsieur Z... K... a demandé à la Cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions. Il a repris son argumentation initiale soutenant que le salarié venait de monter dans la mini pelle et que le motif retenu n'était pas une cause sérieuse de licenciement.

SUR CE :

Sur le licenciement :

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est à dire pour un motif existant, exact, objectif et revêtant une certaine gravité rendant impossible la continuation du contrat de travail.

En application des dispositions de l'article L 1235-1 du code du travail, la charge de la preuve n'incombe spécifiquement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. En cas de doute, celui-ci profite au salarié.

Conformément aux dispositions de l'article L 4122-1 du code du travail, une obligation de sécurité pèse sur le salarié conformément aux instructions données par l'employeur et dans les conditions prévues au règlement intérieur, chaque salarié devant prendre soin en fonction de sa formation et selon ses possibilités de sa santé, de sa sécurité ainsi que celle des autres personnes concernées par ses actes ou omissions au travail.

Enfin, c'est la lettre de licenciement ci-dessous reproduite qui délimite l'étendue du litige:

«Vous avez été embauché le 1 er juillet 2011 en qualité de chauffeur de camion.
Le 14 septembre 2015 vous avez été victime d'un accident du travail lors d'une opération de déchargement au cours de laquelle vous avez fait preuve de négligence. Vous avez été sanctionné par une mise à pied de 3 jours. Il vous a été rappelé que le port de la ceinture de sécurité est obligatoire sur tous les véhicules et engins et qu'en aucune façon vous ne pouvez déroger à cette obligation inscrite dans le règlement intérieur.

Cependant, le jeudi 21 avril 2016, nous avons constaté que vous conduisiez la mini-pelle pour effectuer des travaux de nettoyage de l'installation sans vous être au préalable attaché avec la ceinture de sécurité. Cette observation a été faite par votre responsable hiérarchique en présence de l'animateur prévention.

Nous vous avons convoqué à un entretien préalable par courrier remis en mains propres le 28 avril 2016. Lors de cet entretien qui s'est déroulé le vendredi 13 mai 2016 et au cours duquel vous étiez assisté de H... U..., délégué du personnel, nous vous avons rappelé les faits que nous vous reprochons et avons entendu vos éléments de réponse.

Les éléments évoqués en entretien ne sont pas en mesure de modifier notre appréciation de la gravité des faits fautifs que nous vous reprochons.

En effet, nous vous avons sensibilisé plusieurs fois sur l'obligation de porter la ceinture de sécurité sur tous les véhicules et engins, quelle que soit la durée de l'intervention et la distance à parcourir. Lors de notre courrier du 13 novembre 2015, nous vous avons rappelé que nous ne pourrions plus tolérer de votre part de manquement à l'obligation d'appliquer rigoureusement les règles de sécurité et notamment le port des Equipements de Protection Individuelle. Ces règles sont inscrites dans le règlement intérieur et elles sont régulièrement rappelées à l'ensemble du personnel. Nous avons à chaque fois expliqué, avec des exemples concrets, les risques pris sur la santé en cas de non-respect du port des protections.

En conséquence, nous avons le regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse ».

A l'inverse de ce que soutient Monsieur Z... K... devant la Cour comme en première instance concernant le fait qu'il n'était pas en train de conduire le jour des faits qui lui sont reprochés, il résulte des deux attestations précises et concordantes établies par Monsieur Q... A..., chef de carrière et Monsieur Y... G..., animateur prévention au sein de la SAS CBS confortées par le rapport de visite d'observation comportemental rédigé par Monsieur A..., que le 21 avril 2016, Monsieur Z... K... était en train de charger un mini-dumper avec une mini-pelle alors qu'il ne portait pas sa ceinture de sécurité, ce qu'il a reconnu en indiquant qu'il s'agissait d'un oubli.

Il s'agit là évidemment d'un manquement aux règles de sécurité de la part d'un salarié dont l'activité professionnelle est la conduite d'engins polyvalent, qui est ainsi soumis aux dispositions du règlement intérieur de la société qui rappelle dans son article 6 que "le personnel est tenu de circuler avec prudence sur les voies autorisées et de respecter les prescriptions du code de la route" ce qui implique bien évidemment le port de la ceinture de sécurité.

Cette règle était parfaitement connue du salarié qui avait les moyens de la respecter ce d'autant qu'elle lui avait été rappelée dans le cadre de la procédure disciplinaire dont il avait fait l'objet cinq mois plutôt en novembre 2015.

Ce manquement, alors même qu'il était réitéré et inadmissible en raison de la profession du salarié ,n'a pas été considéré comme suffisamment sérieux par les premiers juges qui ont indiqué que l'employeur aurait dû , en application de l'article 24 du règlement intérieur de l'entreprise listant une échelle de sanctions comportant cinq étapes intermédiaires avant le licenciement, prononcer une autre sanction.

Si l'article 24 du règlement intérieur prévoit qu'en cas de faute ou de manquement à l'une des prescriptions du règlement intérieur, la direction pourra, vu la gravité des fautes ou leur répétitivité appliquer l'une des sanctions suivantes quelle que soit l'ancienneté du salarié :
- avertissement;
- mise à pied;
- mutation disciplinaire;
- rétrogradation;
- licenciement : rupture du contrat au terme du préavis;
- licenciement pour faute grave;
- licenciement pour faute lourde;
il précise expressément que l'ordre d'énumération qui détermine l'échelle des sanctions, ne lie pas l'employeur qui a donc tout latitude pour appliquer la sanction proportionnée à la gravité de la faute commise.

Or, au cas d'espèce, ainsi que cela résulte de la lettre de licenciement, une sanction disciplinaire sous la forme d'une mise à pied de trois jours avait été infligée à Monsieur Z... K... moins de six mois plus tôt pour s'être montré négligent lors de l'exécution d'un travail de déchargement ayant entraîné un accident de chantier et alors qu'il ne respectait déjà pas la consigne du port obligatoire de la ceinture de sécurité, que ce dernier ne l'évoque pas dans ses écritures, qu'il s'agit pourtant de la réitération d'un manquement suffisamment grave à l'obligation de sécurité pesant sur un conducteur d'engins pour entraîner le prononcé à son encontre d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse en sorte qu'il convient d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, la réalité de la cause du licenciement prononcé ne permettant pas au salarié d'obtenir des dommages-intérêts pour licenciement abusif.

Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile:

Le jugement déféré sera également infirmé sur la somme allouée à Monsieur Z... K... au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'allouer à la SAS des Carrières du bassin de la Sambre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau :

DIT que le licenciement de Monsieur Z... K... repose sur une cause réelle et sérieuse.

DÉBOUTE Monsieur Z... K... de sa demande de dommages-intérêts.

DÉBOUTE la SAS des Carrières du bassin de la Sambre de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LAISSE à chaque partie la charge de ses dépens d'appel.

LE GREFFIER

A. GATNER

LE PRÉSIDENT

V. SOULIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : D1
Numéro d'arrêt : 17/016868
Date de la décision : 29/03/2019
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-03-29;17.016868 ?
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