ARRÊT DU
29 Mars 2019
N 504/19
No RG 17/00268 - No Portalis DBVT-V-B7B-QOIN
LG/VM
RO
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY
en date du
24 Janvier 2017
(RG F 16/00189 -section 5 )
GROSSE :
aux avocats
le 29/03/19
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
M. I... U...
[...]
[...]
Représenté par Me Eric BONDUE, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me HANSCOTTE
INTIMÉ :
EURL SYSTECO
[...]
[...]
Représenté par Me Eric DEMEY, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS : à l'audience publique du 06 Décembre 2018
Tenue par Leila GOUTAS
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Valérie COCKENPOT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Sabine MARIETTE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Leila GOUTAS : CONSEILLER
Caroline PACHTER-WALD : CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Sabine MARIETTE, Président de chambre et par Annick GATNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 03 Avril 2017, avec effet différé jusqu'au 06 Novembre 2018
EXPOSE DU LITIGE:
Monsieur O... Q... exerçait initialement, en son nom personnel et depuis 2002, une activité d'installation et de dépannage de systèmes électriques (alarme anti-intrusion, télésurveillance, alarme incendie, détection extérieure etc...). Le 25 avril 2008, il a créé, l'EURL SYSTECO poursuivant la même activité.
Suivant contrat à durée déterminée en date du 3 janvier 2008, Monsieur Q... a engagé pour une durée de 3 mois Monsieur I... U... en qualité de technicien, niveau, 1, position 1, coefficient 150 de la convention collective du bâtiment (entreprises employant moins de 10 salariés).
Ce contrat a été renouvelé pour une durée identique et, à l'issue, Monsieur U... a été embauché à titre définitif . Il a, dans ce cadre intégré l'EURL SYSTECO.
Le 27 septembre 2010, le salarié s'est vu notifier un premier avertissement pour avoir sollicité le remboursement de frais liés à des dépenses personnelles.
Entre le 10 août 2011 et le 1er décembre 2011, Monsieur U... a été placé en arrêt maladie.
Le 5 décembre 2011, la société SYSTECO a pris à son encontre un nouvel avertissement en invoquant différents manquements contractuels.
Quelques semaines plus tard, reprochant cette fois-ci, au salarié le détournement de données confidentielles de l'entreprise, la société SYSTECO l'a convoqué à un entretien préalable à licenciement qui s'est déroulé le 9 février 2012 et lui a, par courrier daté du 30 janvier 2012, notifié une mise à pied à titre conservatoire.
Le 16 février 2012, Monsieur U... a été licencié pour faute grave.
Contestant la légitimité de cette mesure, ce dernier a saisi le conseil des prud'hommes de Lannoy, le 23 novembre 2012, afin d'obtenir la condamnation de son ancien employeur au paiement de diverses sommes et indemnités.
Après plusieurs renvois sollicités à la demande des parties, l'affaire a été radiée, suivant ordonnance prise le 1er octobre 2013.
Par courrier daté du 6 juillet 2016 et réceptionné le 12 juillet 2012 par le greffe de la juridiction, le conseil de Monsieur U... a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle.
Le 22 novembre 2016, lors de l'audience devant le bureau de jugement, l'EURL SYSTECO a soulevé, in limine litis, la péremption d'instance.
Par jugement du 24 janvier 2017, la juridiction prud'homale a :
- constaté la péremption d'instance ;
- dit n'y avoir lieu à statuer sur le fond,
- condamné Monsieur I... U... à verser à l'EURL SYSTECO une indemnité de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Le 7 février 2017, Monsieur U... a interjeté appel de cette décision dans les conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées entre les parties.
L'affaire a été audiencée conformément aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 3 avril 2017, le président de la chambre a fixé la clôture différée au 6 novembre 2018 et l'audience de plaidoirie au 6 décembre 2018.
Aux termes de ses conclusions, régulièrement notifiées par messagerie électronique le 24 février 2017, Monsieur U... conclut à la réformation intégrale du jugement entrepris.
Il demande à la cour de:
- constater que l'instance n'est pas périmée ;
- dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
- condamner l'EURL SYSTECO à lui verser les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal:
* 1 040,88 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement
* 2 936,06 euros au titre de l'indemnité de préavis.
* 293, 60 euros au titre des congés payés afférents
* 973,87 euros au titre du rappel de salaires sur mise à pied conservatoire outre les congés payés afférents
* 15 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement non fondé.
* 7 199,07 euros au titre des heures supplémentaires outre les congés payés afférents
* 2 689,22 euros au titre des repos compensateurs non pris
* 1 816,99 euros au titre des commissionnements dûs au titre des contrats antérieurs à la rupture;
* 1 158,58 euros au titre de l'indemnisation de l'arrêt maladie
* 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .
Selon conclusions adressées via le RPVA le 2 octobre 2017, l'EURL SYSTECO conclut, à titre principal, à la confirmation intégrale de la décision déférée et à l'irrecevabilité des demandes de la partie adverse ;
A titre subsidiaire, elle sollicite le rejet des prétentions de Monsieur U... et demande à la cour de constater « que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ».
Elle sollicite en outre la condamnation de son ancien salarié aux paiement des sommes suivantes:
* 150 000, 00 euros en réparation du préjudice subi du fait du vol de fichier, restitué ensuite, de façon partielle.
* 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis par Monsieur carre.
* 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
SUR CE, LA COUR :
Sur la péremption d'instance :
L'EURL SYSTECO, se fondant sur l'ordonnance de radiation prise par le conseil des prud'hommes de Lannoy le 1er octobre 2013, soutient que l'instance est périmée et que les différentes demandes de Monsieur U... sont irrecevables, dans la mesure où ce dernier n'a pas effectué les diligences requises dans le délai de 2 ans prévu à l'article 386 du code de procédure civile, courant à compter de la notification de la décision. A ce titre, elle rappelle que cette décision ordonnait aux parties «de conclure avec bordereau de communication de pièces pour remise au rôle» avant le délai fixé par le texte précité. Elle fait observer que Monsieur U... n'a procédé à la demande de réinscription et au dépôt des conclusions et bordereau de pièces que le 6 juillet 2016, soit, tardivement.
Elle estime que l'appelant ne peut, pour contourner cette difficulté, faire état des écritures qu'elle lui a effectivement adressées le 17 juillet 2014, et soutenir que celles-ci auraient interrompu le délai de péremption, dans la mesure où en matière de procédure orale, seules les conclusions préalablement soutenues à l'audience, sont recevables. Elle ajoute que ces écritures, d'une part, n'ont aucunement été déposées au greffe du conseil des prud'hommes, d'autre part, ne tendaient pas à la réinscription de l'affaire au rôle, de sorte qu'elles ne pouvaient avoir d'effet interruptif.
Enfin, elle souligne qu'aux termes de l'ordonnance de radiation, seul le dépôt des conclusions et bordereau de pièces des deux parties étaient de nature à interrompre le délai de deux ans.
Monsieur U... estime que la péremption n'est pas acquise, puisque le conseil de la société SYSTECO lui a adressé ses conclusions, le 17 juillet 2014, ce qui est acte de procédure démontrant la volonté de l'intéressée de poursuivre l'instance, entraînant l'interruption du délai prévu par l'article 386 du code de procédure civile. Il en conclut qu'il avait en réalité jusqu'au 17 juillet 2016 pour conclure et communiquer ses pièces, ce qu'il a fait, dès le 6 juillet 2016.
L'article 386 du code de procédure civile dispose que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
L'article R. 1452-8 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige dispose qu'"en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction."
Le délai court à compter de la notification de la décision.
En l'espèce, l'ordonnance du 1er octobre 2013 prononçant la radiation de l'affaire mentionne que cette sanction est prise «conformément aux dispositions de l'article 381 et suivant du code de procédure civile, le délai de péremption prévu à l'article 386 commençant à courir à compter de la présente notification ;»et «Ordonne aux parties de conclure avec bordereau de communication de pièces pour remise au rôle avant le délai prévu à l'article 386 du code de procédure civile ».
Cette décision prescrit donc des diligences à la charge des deux parties, lesquelles ne pouvaient interrompre le délai de péremption qu'à la condition d'être réalisées de façon complète.
Il ressort de l'examen du dossier du conseil des prud'hommes que l'ordonnance a bien été notifiée aux parties le 11 octobre 2013, comme en attestent les accusés de réception joints à celle-ci.
Monsieur U... et la société SYSTECO avaient donc jusqu'au 11 octobre 2015 pour réagir et se mettre en état pour plaider.
Or, comme l'ont justement relevé les premiers juges, Monsieur U... a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle par courrier du 6 juillet 2016, reçu au greffe le 12 juillet suivant, en communiquant à cette occasion ses conclusions ainsi que les écritures adverses, reçues le 17 juillet 2014.
Il a donc réagi tardivement, les écritures de la société SYSTECO, communiquées, certes bien avant l'expiration du délai imparti, n'étant pas suffisantes pour interrompre celui-ci, et n'ayant, en outre, pas fait l'objet, à cette époque, d'un dépôt au greffe de la juridiction saisie.
Ainsi, comme l'ont relevé les premiers juges, force est de constater que l'instance est périmée et que les demandes de Monsieur U... sont irrecevables.
Le jugement entrepris sera donc confirmé dans toutes ses dispositions .
II) sur les frais non répétibles et les dépens :
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur I... U... sera, en revanche, condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu, en cause d'appel, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Monsieur I... U... aux dépens d'appel ;
LE GREFFIER
A. GATNER
LE PRÉSIDENT
S. MARIETTE