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29/03/2019 | FRANCE | N°16/029978

France | France, Cour d'appel de Douai, D1, 29 mars 2019, 16/029978


ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 511/19

No RG 16/02997 - No Portalis DBVT-V-B7A-P6PS

VS/VM

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de DOUAI
en date du
16 Juin 2016
(RG F 15/00231 -section 5)

GROSSE

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. B... F...
[...]
Comparant et assisté de Me Yamin AMARA, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

SAS GAME INGENIERIE
[...]
Représentée par M

e Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me VIANE CAUVAIN

DÉBATS : à l'audience publique du 14 Février 2019

Tenue par Véronique SOULIER
magistrat ...

ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 511/19

No RG 16/02997 - No Portalis DBVT-V-B7A-P6PS

VS/VM

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de DOUAI
en date du
16 Juin 2016
(RG F 15/00231 -section 5)

GROSSE

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. B... F...
[...]
Comparant et assisté de Me Yamin AMARA, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

SAS GAME INGENIERIE
[...]
Représentée par Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me VIANE CAUVAIN

DÉBATS : à l'audience publique du 14 Février 2019

Tenue par Véronique SOULIER
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Véronique GAMEZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique SOULIER : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Leila GOUTAS : CONSEILLER
Caroline PACHTER-WALD : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Véronique SOULIER, Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :

Monsieur B... F... a été embauché par la société GAME INGENIERIE, qui appartient au groupe CLEMESSY, la branche énergie du groupe EIFFAGE le 1er mars 2000 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de technicien de maintenance, position 1.4.2 coefficient 250, catégorie Etam de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils, société de conseil dite SYNTEC, alors appliquée dans la société.

La société GAME INGENIERIE développe une activité de conception, d'installation, de maintenance et d'amélioration des systèmes et équipement en génie électrique et génie mécanique.

Cette société compte plus de 50 salariés et applique à ses salariés la convention collective nationale de la métallurgie de la région parisienne.

Le lieu de travail de Monsieur B... F... était fixé à DOUAI sur le site de STORAENSO, ce dernier y effectuant des tâches de "visiteur graisseur".

En 2014, la société de papeterie du site de STORAENSO DOUAI a fermé ses portes procédant au licenciement économique de plus de 350 salariés.

Le 27 mars 2014, la société GAME INGENIERIE a proposé à Monsieur B... F... un transfert de son contrat de travail vers la société COGELUB, une des filiales du groupe CLEMESSY ce qui transférait son lieu de travail sur le site de la papeterie de NORSKE SKOG à GOLBEY dans le département des Vosges.

Le 30 mars 2015, un ordre de mission courant du 30 mars 2015 au 29 mai 2015 l'a amené à intervenir, dans le cadre d'un grand déplacement, au sein de la société SNECMA SQY, cliente de la société GAME INGENIERIE, située dans le département des YVELINES.

Le 2 avril 2015, la société lui a proposé un avenant à son contrat de travail prévoyant une mutation géographique sur ce dernier site qu'il a refusée.

Le 29 mai 2015, dernier jour de sa mission, Monsieur B... F... a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement.

Le 25 juin 2015, il a été licencié pour avoir refusé sa mutation sur le site de la société SNECMA SQY à SAINT QUENTIN EN YVELINES et dispensé de son préavis de deux mois, son solde de tout compte lui étant versé le 31 août 2015.

Contestant son licenciement, Monsieur B... F... a saisi le Conseil de Prud'hommes de DOUAI lui demandant de:
- dire que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse,
- condamner la société GAME INGENIERIE à lui régler une somme de 65 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- dire que la société avait manqué à ses obligations en matière de mise en oeuvre des règles applicables au licenciement économique ;
- constater qu'il avait été privé des mesures d'accompagnements dont la société aurait dû assortir le licenciement pour motif économique;
- condamner la société à lui régler une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail;
- dire que l'employeur n'avait pas respecté son obligation légale de formation et le condamner au paiement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 16 juin 2016, le Conseil de Prud'hommes de DOUAI a:
- dit que le licenciement de Monsieur B... F... reposait sur une cause réelle et sérieuse.
- débouté celui-ci de toutes ses demandes.
- débouté la SAS GAME INGENIERIE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration régulièrement formée le 11 Juillet 2016 par voie électronique, Monsieur B... F... a interjeté appel de toutes les dispositions du jugement du 16 juin 2016, le Conseil de Prud'hommes de DOUAI .

Aux termes de ses conclusions d'appelant déposées le 20 mars 2018, soutenues oralement à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens, il a demandé à la Cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de:
- dire que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse .
- constater que la clause de mobilité invoquée par la société était illicite et avait été mise en oeuvre de manière illégitime .
- constater que le licenciement reposait en réalité sur un motif économique.
- condamner la SAS GAME INGENIERIE à lui régler une somme de 65 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif.
Il a également repris en cause d'appel ses demandes relatives au manquement par l'employeur à ses obligations d'exécution loyale du contrat de travail et de formation et d'adaptation sollicitant respectivement la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour chaque préjudice, outre 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a principalement soutenu qu'il ne pouvait être licencié pour avoir refusé une mutation, qu'il s'agissait d'une modification unilatérale de son contrat de travail, que la clause de mobilité évoquée par la SA GAME INGENIERIE était nulle, que la Cour était tenue par les termes de la lettre de licenciement et qu'elle ne pourrait examiner la cause de la modification du contrat de travail, que la proposition de mutation n'avait pour but que de contourner les règles applicables au licenciement pour motif économique, que l'employeur n'avait ni saisi le GPEC ni étudié toutes les possibilités de mobilité professionnelle et/ou géographiques et les postes disponibles dans le secteur géographique le plus proche de DOUAI et qu'enfin, elle avait manqué à son obligation de formation et d'adaptation à l'emploi.

Par conclusions en réponse déposées le 26 Juillet 2017 et oralement soutenues à l'audience, la société GAME INGENIERIE a sollicité la confirmation du jugement rendu en toutes ses dispositions et la condamnation de Monsieur F... au paiement d'une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à titre subsidiaire elle a demandé la réduction du montant des dommages-intérêts alloués au titre de la rupture du contrat de travail.

Elle a soutenu la validité de la clause de mobilité et à défaut, a fait valoir que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, la proposition de mutation s'inscrivant dans le contexte de fermeture du chantier de l'entreprise STORAENSO la contraignant à proposer à Monsieur F... un travail sur un autre site.

Elle a indiqué avoir exécuté loyalement le contrat de travail, n'avoir aucunement entendu contourner les règles du licenciement économique, inapplicables en l'espèce puisque d'une part GAME INGENIERIE n'était pas en difficulté sur le plan économique et que d'autre part, elle n'avait pas l'intention initialement de rompre la relation de travail, l'emploi de Monsieur B... F... n'ayant d'ailleurs pas été supprimé. Elle a affirmé ne pas avoir manqué à son obligation de formation et d'adaptation à l'emploi affirmant ne pas être contrainte de proposer des formations destinées à permettre au salarié de changer d'orientation professionnelle, en l'espèce en matière électrique ce d'autant que le niveau requis par les annonces versées aux débats par Monsieur B... F... était un bac professionnel dans la spécialité, voire un bac plus deux alors que ce dernier était titulaire d'un BEP.

Initialement fixée au 22 mars 2018, l'affaire a été renvoyée au 20 mars 2018 puis au 18 décembre et au 14 février 2019.

SUR CE :

Sur le licenciement :

En application des dispositions de l'article L1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est motivé. Il est justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1232-6 du même code prévoit que l'employeur qui décide de licencier un salarié, lui notifie sa décision par lettre recommandée avec accusé de réception comportant l'énoncé du ou des motifs qu'il invoqués.

Le doute doit profiter au salarié.

La lettre de licenciement fixe en l'espèce ainsi qu'il suit les limites du litige :

"Les faits invoqués à l'appui de cette décision tels qu'ils vous ont été exposés à cette occasion sont les suivants :
"Votre refus d'être muté sur le site de Saint Quentin en Yvelines en application de la clause de mobilité de son contrat de travail et de l'avenant reprenant les conditions de mobilité qui vous ont été remis en mains propres le 2 avril 2015".

Le contrat de travail signé par le salarié le 28 février 2000 précisait que son lieu de travail habituel était fixé à DOUAI, site de STORAENSO, lieu où il a effectivement travaillé durant quinze années, mais comportait cependant la clause de mobilité suivante:

"Toutefois, en raison des activités de l'entreprise et conformément aux usage en vigueur dans le groupe conformes à la convention collective, vous pouvez être détaché ou muté dans toute autre implantation de GAME, chantiers ou filiales ou dans toute société avec laquelle nous aurions des intérêts communs en France ou à l'étranger. Vous pouvez également être amené à exercer vos fonctions en tout lieu ou notre société développera ses activités et à effectuer des déplacements pour les besoins du service en dehors de votre lieu de travail habituel."

L'avenant du 2 avril 2015, remis en mains propres notifiait à Monsieur B... F... qu'il travaillerait durant trois mois en tant que technicien de maintenance sur le site de SNECMA SQY à MAGNY LES HAMEAUX dans les Yvelines, bénéficiant durant cette période d'indemnités de grand déplacement avant sa mutation sur ce même site. Il lui était précisé qu'il disposait d'un délai de 7 semaines à compter de la réception de cet avenant pour accepter ou refuser cette modification de son contrat de travail, mutation qu'il refusait.

Si l'employeur peut, en principe, imposer une mutation au salarié dont le contrat comporte une clause de mobilité, c'est à la condition que celle-ci définisse de façon, claire et précise sa zone géographique d'application, ce qui n'est nullement le cas en l'espèce, la clause litigieuse ne déterminant aucune zone géographique précise visant de manière vague et générale non un périmètre déterminé mais "des intérêts communs qu'auraient l'employeur avec une société de son groupe ou tiers en France ou à l'étranger" et" tout lieu où il développerait ses activités".

Par ailleurs, un salarié ne pouvant pas accepter par avance un changement d'employeur, la clause de mobilité par laquelle il s'engage à accepter toute mutation dans une autre société est nulle, et ce même si cette dernière appartient au même groupe ou à la même unité économique et sociale. En l'espèce, il s'est agi, pour les deux mutations refusées par Monsieur B... F... de mutations auprès de sociétés clientes de la société, depuis 2009 s'agissant de la société SNECMA SQY .

Dès lors, la nullité de la clause de mobilité sur laquelle s'est fondée la société GAME INGENIERIE pour tenter d'imposer à son salarié une mutation professionnelle ne peut qu'être constatée.

Dans l'hypothèse où la Cour retiendrait l'illicéité de la clause de mobilité, la société GAME INGENIERIE a fait valoir que le licenciement d'un salarié ayant refusé la modification de son contrat de travail pouvait toutefois être considéré comme justifié au regard des motifs pour lesquels la mesure avait été décidée et a ainsi demandé l'examen par la Cour de la cause de la modification du contrat de travail de Monsieur B... F... afin d' apprécier le caractère légitime ou non de son licenciement affirmant que la fermeture du site de STORAENSO l'avait contrainte à proposer un travail à son salarié sur un autre site.

Cependant, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige mentionnant exclusivement comme cause du licenciement le refus de mutation de Monsieur B... F... en application de la clause de mobilité sans faire état des motifs ayant rendu nécessaire la modification du contrat de travail de ce dernier, la Cour ne peut examiner la cause de cette modification.

Dès lors, s'agissant d'un licenciement exclusivement fondé sur le refus du salarié de la modification de son contrat de travail, celui-ci est sans cause réelle et sérieuse, le jugement déféré étant ainsi infirmé sur ce point.

Monsieur B... F... avait 52 ans au moment de son licenciement intervenu après 15 années d'ancienneté sans que son employeur, qui s'est toujours déclaré satisfait de son travail, n'ait aucun manquement à lui reprocher et pour autant n'ait jugé nécessaire en application de l'accord conventionnel fixé par l'accord d'entreprise relatif à la gestion prévisionnelle des emplois, du développement des compétences et de la progression professionnelle dans les sociétés du groupe CLEMESSY (GPEC), prévoyant dans son article 2 dans l'hypothèse d'un refus par le salarié d'une mobilité professionnelle, de saisir la Commission paritaire destinée à étudier toutes les possibilités de mobilité professionnelle et/ou géographique ou de repositionnement dans les sociétés du groupe CLEMESSY.

En effet, alors que ce même article rappelle que "les parties savent qu'une mobilité réussie est une mobilité consentie et qu'en la matière, le volontariat sera systématiquement privilégié, la Commission paritaire de suivi sera saisie de tout refus de mobilité exprimé par un salarié aux fins d'analyser cette situation et de chercher toutes voies permettant de trouver une solution à cette situation".

Or, la société GAME INGENIERIE a rappelé dans ses écritures qu'elle était informée depuis janvier 2013 du projet de la société STORAENSO de mettre en vente son site, que si un nouveau contrat d'entreprise avait été signé le 4 février 2013 pour une durée de trois ans, la société STORAENSO avait la possibilité de résilier ce contrat de manière anticipée ce qu'elle a fait informant ses fournisseurs une cessation d'activité à l'issue du second trimestre 2014, une première proposition de mutation dans les Vosges datant du 27 mars 2014 ayant été refusée par Monsieur B... F... puis une seconde en avril 2015 ce qui aurait dû avoir pour conséquence la saisine de la Commission paritaire de suivi du GPEC avant la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement imposé à un salarié qui donnait satisfaction avant même l'achèvement de la période probatoire de trois mois, renouvelable une fois et non de sept semaines, fixée par l'article 3.2 de l'accord GPEC.

Monsieur B... F... s'est ainsi retrouvé au chômage percevant l'allocation d'aide au retour à l'emploi alors que ses charges financières étaient conséquentes à l'époque en raison de la poursuite d'études supérieures d'un enfant majeur et que ses chances de retrouver un emploi dans un environnement industriel sinistré étaient compromises.

Selon l'attestation pôle emploi produite, la moyenne du salaire brut de Monsieur B... F... durant les trois derniers mois s'est élevée à la somme de 2.189,06 euros et non à 4. 054 euros ainsi que l'indique le salarié.

En réparation du préjudice résultant des conditions abusives de la rupture de son contrat de travail, il sera alloué à Monsieur B... F... à titre de dommages-intérêts une somme de 35 000 euros.

Sur le remboursement à Pôle Emploi Hauts de France d'indemnités de chômages :

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il incombe à la juridiction d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés, de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage.

En l'espèce, il convient de condamner la société GAME INGENIERIE à rembourser à Pôle Emploi des Hauts de France (agence SIN LE NOBLE) les indemnités de chômage versées par cet organisme à Monsieur B... F... à compter du 1er septembre 2015 durant six mois.

Sur l'exécution du contrat de travail :

L'article L 1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Il n'est nullement établi par Monsieur B... F... que la société GAME INGENIERIE, en lui proposant une mutation, entendait contourner les règles relatives au licenciement économique les conditions requises par l'article L 1233-3 du code du travail n'étant pas réunies puisque la société ne rencontrait aucune difficulté économique, n'était pas contrainte de se réorganiser, que le poste du salarié n'était pas supprimé, que la perte d'une société cliente n'est d'ailleurs pas un motif de nature à justifier un licenciement économique.

En revanche, la Cour ayant constaté d'une part la nullité de la clause de mobilité sur laquelle l'employeur s'est fondé pour licencier Monsieur B... F... d'autre part, une application partielle de l'accord conventionnel d'entreprise du GPEC sur le délai probatoire laissé au salarié pour prendre sa décision lors de la proposition d'une mutation et l'absence de saisine préalable de la commission paritaire de suivi par l'employeur auquel il incombait nécessairement de vérifier devant un refus de mobilité opposé à deux reprises par son salarié que la mise en oeuvre de cette clause de mobilité était proportionnée au but recherché compte tenu de l'emploi occupé, du travail demandé et de l'atteinte portée à la vie personnelle et familiale du salarié, cette vérification devant nécessairement être un préalable à une procédure de licenciement exclusivement fondée sur un refus de mobilité et ce, quand bien même la plupart des postes de technicien de maintenance recrutés pour la région NORD était destinée à pourvoir des emplois en Normandie ou en région parisienne, le poste de Monsieur L..., technicien de maintenance, recruté le 1er avril 2015 pour un poste situé à ALNAY S/BOIS dans un périmètre géographique moins éloigné de DOUAI, ayant pu être utilement proposé à Monsieur F....

En conséquence, le jugement déféré sera également réformé de ce chef et une somme de 5 000 euros sera allouée à Monsieur B... F... en raison de l'exécution déloyale de son contrat de travail.

Sur le manquement de l'employeur à l'obligation de formation et d'adaptation :

L'article L.6321-1 du code du travail dispose que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Monsieur B... F..., titulaire d'un BEP de mécanicien monteur, n'établit pas que son employeur ait manqué à cette obligation dans la mesure où les pièces versées aux débats établissent qu'il a suivi régulièrement des formations entre 2003 et 2014, notamment une formation conséquente d'une durée de 143 heures destinée au renouvellement CACES, agent de maintenance papier ainsi qu'une formation recyclage lui permettant de mettre à niveau ses connaissances en matière électrique.

Par ailleurs, l'employeur n'a pas l'obligation de permettre au salarié d'acquérir des diplômes dont il n'est pas titulaire comme en l'espèce, un bac pro dans sa spécialité ou un bac + 2 ce d'autant qu'en l'espèce, le salarié n'établit pas avoir formulé des demandes en ce sens, il convient de confirmer la décision déférée ayant débouté Monsieur B... F... de ce chef de demande.

Sur la demande de Monsieur B... F... au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il convient de condamner la société GAME INGENIERIE à régler à Monsieur B... F... une somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de condamne la société GAME INGENIERIE aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR :

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celles relatives au rejet de la demande de Monsieur B... F... pour manquement à l'obligation de formation et d'adaptation.

STATUANT A NOUVEAU :

CONSTATE la nullité de la clause de mobilité.

DIT que le licenciement de Monsieur B... F... est sans cause réelle et sérieuse.

CONDAMNE la société GAME INGENIERIE à régler à Monsieur F... une somme de TRENTE CINQ MILLE (35 000 ) euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif

CONDAMNE la société GAME INGENIERIE à régler à Monsieur F... une somme de CINQ MILLE (5 000) euros à titre de dommages-intérêts en raison de l'exécution déloyale de son contrat de travail.

CONDAMNE la société GAME INGENIERIE à rembourser à Pôle Emploi des Hauts de France (agence SIN LE NOBLE) les indemnités de chômage versées par cet organisme à Monsieur B... F... dans les limites légales fixées par l'article l'article L.1235-4 du code du travail .

CONDAMNE la société GAME INGENIERIE à régler à Monsieur F... une somme de MILLE (1 000) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société GAME INGENIERIE aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

A. GATNER

LE PRÉSIDENT

V. SOULIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : D1
Numéro d'arrêt : 16/029978
Date de la décision : 29/03/2019
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-03-29;16.029978 ?
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