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29/03/2019 | FRANCE | N°16/018528

France | France, Cour d'appel de Douai, C3, 29 mars 2019, 16/018528


ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 526/19

No RG 16/01852 - No Portalis DBVT-V-B7A-PZAV

ML/VM

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DUNKERQUE
en date du
22 Avril 2016
(RG 15/0005 -section 4)

GROSSE

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. K... I...
[...]
Comparant et assisté de Me Katell MADEC, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Me T... C... - Mandataire liquidateur de la Soci

été Agence Maritime Rommel (AMR)
[...]
Représenté par Me Jean-Pierre MOUGEL, avocat au barreau de DUNKERQUE, substitué par Me HAUDIQUET
UNEDIC DELEGATION A...

ARRÊT DU
29 Mars 2019

N 526/19

No RG 16/01852 - No Portalis DBVT-V-B7A-PZAV

ML/VM

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DUNKERQUE
en date du
22 Avril 2016
(RG 15/0005 -section 4)

GROSSE

le 29/03/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. K... I...
[...]
Comparant et assisté de Me Katell MADEC, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Me T... C... - Mandataire liquidateur de la Société Agence Maritime Rommel (AMR)
[...]
Représenté par Me Jean-Pierre MOUGEL, avocat au barreau de DUNKERQUE, substitué par Me HAUDIQUET
UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE
[...]
Représenté par Me François DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI, substitué par Me CAMUS

DÉBATS : à l'audience publique du 06 Mars 2019

Tenue par Michèle LEFEUVRE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Véronique GAMEZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Philippe LABREGERE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Muriel LE BELLEC : CONSEILLER
Michèle LEFEUVRE : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur K... I... a été engagé à compter du 1er janvier 2006 en qualité de directeur d'exploitation-cadre de l'Agence Maritime Rommel, AMR, filiale de l'Agence Maritime Delpierre appartenant au groupe Delpierre, et ayant pour activité l'assistance et l'information dans les procédures douanières, moyennant une rémunération mensuelle brute de 7.875 €. La convention collective applicable à la relation du travail est celle du transport routier.

Il était déjà employé depuis le 1er février 1991 par la société Agence Maritime Delpierre ayant pour activité la consignation des navires pétroliers.

Monsieur K... I... a également été PDG de la société AMR Logistique, émanation de la société Agence Maritime Rommel, spécialisée dans les activités de logistique de fruits et légumes, dont il détenait des parts sociales. Il a démissionné de ces fonctions le 5 décembre 2014.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable par lettre du 8 novembre 2014 par la société Agence Maritime Rommel et placé en congés payés dans l'attente, Monsieur K... I... a été informé par lettre du 19 novembre 2014 des motifs économiques motivant la rupture du contrat de travail envisagé. Il a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle proposé et le contrat de travail a pris fin le 13 décembre 2014.

Monsieur K... I... était dans le même temps, licencié pour motif économique par la société Agence Maritime Delpierre.

Les motifs du licenciement, tels qu'énoncés dans la lettre, sont les suivants :

" la société AMR, pour laquelle vous travaillez depuis le 1er janvier 2006 se trouve dans une position financière fortement dégradée, notamment en raison de la très forte diminution de son chiffre d'affaires depuis plusieurs mois, voire plusieurs années.

Le chiffre d'affaires est passé de plus de 13 millions d'euros en 2011 à moins de 7 millions d'euros au 30 septembre 2014, la baisse s'étant fortement accentuée ces deux dernières années puisque le chiffre d'affaire était de près de 11 millions d'euros en 2013. Il passe sous la barre des 7 millions d'euros au 30 septembre 2014.

Parallèlement, les coûts fixes (loyers et salaires) demeurent constants, créant une balance déficitaire.

Le résultat d'exploitation se solde par une perte de 283.000 euros à fin septembre 2014.

Dans ce contexte économique fortement dégradé, qui compromet la survie de l'entreprise, nous sommes également confrontés à un manque de soutien des banques qui nous a contraints à solliciter la désignation d'un mandataire ad'hoc pour nous aider à faire face à nos difficultés économiques , lequel est entré en fonction depuis quelques semaines maintenant. "

Monsieur K... I... a saisi le 8 janvier 2015 le conseil des prud'hommes de Dunkerque des demandes d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et conditions vexatoires.

Par jugement du tribunal de commerce du 26 mai 2015, la procédure de redressement judiciaire ouverte au profit de la société Agence Maritime Rommel le 14 avril 2015 a été convertie en liquidation judiciaire, Me T... étant nommé mandataire liquidateur.

Après s'être déclaré matériellement compétent, le conseil des prud'hommes a par jugement du 22 avril 2016, débouté Monsieur K... I... de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné à verser à la société Agence Maritime Delpierre la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur K... I... a interjeté appel de ce jugement le 12 mai 2016 et par conclusions soutenues oralement, demande à la cour de l'infirmer, de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société Agence Maritime Delpierre à lui verser les sommes suivantes:
- 141.750 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 23.625 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 2.362,50 euros au titre des congés payés sur préavis,
- 47.250 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct en raison des conditions vexatoires de la rupture du contrat de travail,
-7.875 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la réglementation en matière de congés payés,
- 7.875 euros pour privation de mutuelle,
- 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
Il demande également de dire l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS-CGEA.

Il fait valoir que la lettre l'informant des motifs économiques de la rupture du contrat de travail ne mentionne pas l'incidence du motif économique sur son emploi et que le motif économique n'est pas établi, la rupture étant motivée par un motif personnel. Il indique que l'employeur n'a procédé à aucune recherche de reclassement dans l'entreprise et au sein des sociétés du groupe. Il considère que son licenciement est intervenu dans des conditions vexatoires et que placé d'office en congés payés, il n'a pu bénéficier de l'indemnité de congés payés auquel il aurait pu prétendre lors de la rupture du contrat. Enfin, il ajoute ne pas avoir bénéficié de mutuelle contrairement aux autres salariés.

Par conclusions en réponse soutenue oralement à l'audience, Me T..., en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Agence Maritime Delpierre sollicite de la cour la confirmation du jugement déféré, le débouté des demandes de Monsieur I... et sa condamnation à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Me T..., es qualités, expose que Monsieur K... I... avait de par ses fonctions une parfaite connaissance des difficultés économiques rencontrées auxquelles son train de vie a contribué par de nombreux frais et un logement de fonction, ce qui explique sa démission de la société AMR Logistique. Il précise que des recherches de reclassement ne pouvaient aboutir puisque son emploi était unique et considère qu'il ne peut prétendre avoir subi un préjudice puisque dès la fin d'année 2014, il démarché toute la clientèle Delpierre en annonçant l'ouverture d'un bureau de douane dans différents lieux.

Par conclusions déposées à l'audience, l'AGS-CGEA de Lille, qui fait sienne les écritures du mandataire liquidateur, demande à la cour la confirmation du jugement déféré, le débouté des demandes de Monsieur K... I... et subsidiairement, de dire l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D 3253-5 du code du travail, toutes créances confondues et que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement conformément aux dispositions de l'article L3253-20 du code du travail.

SUR CE

En application de l'article L'article L1233-3 du code du travail, la lettre de licenciement de Monsieur K... I..., qui fixe les limites du litige, motive celui-ci par une forte diminution du chiffre d'affaire, un résultat d'exploitation déficitaire et un manque de soutien des banques, ce qui a nécessité la nomination d'un administrateur ad'hoc.

Cependant, cette lettre ne comporte pas de mention sur l'incidence de ces difficultés économiques sur l'emploi de Monsieur K... I..., comme exigé par l'article L1233-16 du code du travail, ce qui prive le licenciement litigieux de cause réelle et sérieuse.

Monsieur K... I... ne produisant aucune pièce établissant la réalité d'un préjudice résultant de la perte de cet emploi alors qu'il a créé dès décembre 2014 une société concurrente, sera, en application de l'article L 1235-3 du code du travail, indemnisé par le versement d'une somme limitée à 47.250 euros. Il sera également fait droit à sa demande d'indemnité compensatrice de préavis conventionnel de trois mois à hauteur de 23.625 euros ainsi que les congés payés y afférents.

A défaut de toute pièce démontrant que les conditions du licenciement étaient vexatoires alors que l'appelant avait une parfaite connaissance des difficultés financières de la société et du montant excessif de ses frais de représentation, la demande de dommages et intérêts formée à ce titre sera rejetée. Il en sera de même en ce qui concerne le non-respect des dispositions de l'article D 3141-6 du code du travail relatif aux congés payés, le salarié n'établissant pas l'existence d'un préjudice en résultant.

Par ailleurs, à l'appui de sa demande d'indemnisation pour absence de mutuelle, il convient de constater qu'il ne justifie pas de frais de santé non remboursés, ce qui justifie le rejet de sa demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mise à disposition au greffe,

REFORME le jugement déféré,

STATUANT à nouveau:

FIXE la créance de Monsieur K... I... au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Maritime Rommel aux sommes suivantes:
- 47.250 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 23.625 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 236,25 euros au titre des congés payés s'y rapportant,

DIT le présent arrêt opposable à l'AGS de Lille dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l'article D 3253-5 du code du travail, toutes créances confondues,

DIT que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement conformément aux dispositions de l'article L3253-20 du code du travail.

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

MET les dépens qui comprendront les dépens de première instance, à la charge de la liquidation judiciaire de la société Agence Maritime Rommel.

LE GREFFIER

A. GATNER

LE PRÉSIDENT

P. LABREGERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : C3
Numéro d'arrêt : 16/018528
Date de la décision : 29/03/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-03-29;16.018528 ?
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