ARRÊT DU
28 Février 2019
N 370/19
No RG 16/01642 - No Portalis DBVT-V-B7A-PX2K
SC/SD
JUGT
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
EN DATE DU
17 Décembre 2015
GROSSE:
aux avocats
le 28/02/19République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING
[...]
Représentée par Me Henri ROUCH, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Soizic NADAL
INTIMÉS :
Me M... D... (SELAFA MJA) - Mandataire judiciaire de SASU SAFIG
[...]
Représenté par Me Nabil KEROUAZ, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me MARTINEZ
M. K... X...
[...]
assisté de Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE
SA CANON FRANCE BUSINESS SERVICES
[...]
Représenté par Me Sophie LEMAITRE, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me AUBRY
SARL HSK PARTNERS
[...]
non comparant non représenté (AR de convocation signé le 28/07/2017)
AGS CGEA IDF EST
[...]
Représenté par Me François DELEFORGE de la SCP FRANCOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI, substitué par Me CAMUS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Sylvie COLLIERE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Leila GOUTAS : CONSEILLER
Caroline PACHTER-WALD : CONSEILLER
GREFFIER lors des débats : Valérie COCKENPOT
DÉBATS : à l'audience publique du 25 octobre 2018
ARRÊT : Réputé contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 janvier 2019 et prorogé au 28 Février 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Leila GOUTAS, Conseiller et par Annie LESIEUR , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire-EXPOSE DU LITIGE
La société SAFIG, dont le siège social est situé à Sain Ouen ( 93), exerçait une activité de «Business Process Outsourcing », consistant dans la dématérialisation documentaire et l'externalisation de traitements de back- office pour les marchés bancaires, assurances et santé . Elle disposait de nombreux sites implantés sur tout le territoire national.
A compter du 13 juin 1994, elle a engagé à temps plein Monsieur K... X... en qualité d'opérateur «Tri de chèques ». Le salarié a été affecté sur le site lillois.
Au cours de la relation professionnelle ses fonctions ont évolué puisqu'il est devenu technicien moyens de paiement puis, en janvier 2004, technicien d'exploitation, coefficient 275 de la convention collective du Bureau des Etudes ( SYNTEC).
La société SAFIG, rencontrant des difficultés économiques, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 31 mai 2013.
Dans ce cadre, la SCP N... F... a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire. Une procédure d'appel d'offres nationale a été mise en oeuvre en vue de la cession de l'ensemble des activités de la société.
Le 19 août 2013, le tribunal de commerce de Bobigny a arrêté trois plans de cessions partielles d'activité au profit des sociétés suvantes:
-la société CFBS pour ce qui concerne les activités BPO, patrimonial, caritatif et activités connexes.
-la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING (BBO) en ce qui concerne les moyens de paiement et activités connexes
-la société HSK PARTNERS pour ce qui concerne l'activité de prestation de services pour le markéting direct ( hors caritatif).
Ces plans impliquaient des suppressions de postes.
Ainsi, s'agissant de l'activité Moyens de paiement, reprise par la société BBO, 76 postes devaient être repris conformément aux dispositions de l'article L 1224-1 du code travail dont 13 sur le site de Marquette Lez Lille.
Dans ces conditions, une procédure de licenciements collectifs accompagnée d'un plan de sauvegarde de l'emploi a été mise en œuvre.
La SCP N... F... a, ainsi, par courrier du 2 octobre 2013, sollicité l'inspection du travail afin d'obtenir l'autorisation de licencier Monsieur K... X... celui-ci étant titulaire d'un mandat électif de délégué du personnel.
Quelques jours plus tard, soit le 8 octobre 2013, la société SAFIG a été placée en liquidation judiciaire et Maître E... a été désigné en qualité de liquidateur.
Par décision en date du 2 décembre 2013, l'inspection du travail a refusé de délivrer l'autorisation de licencier Monsieur X..., estimant que la suppression du poste du salarié n'était pas établie.
Le 23 décembre 2013, la SCP F... a, alors, sollicité de l'inspection du travail l'autorisation de procéder au transfert du contrat de travail de Monsieur X... au profit de la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING.
Par décision en date du 30 janvier 2014, l'inspection du travail a estimé qu'elle n'avait pas compétence pour délivrer une telle autorisation au motif qu' «en cas de refus d'autorisation de licenciement de salariés protégés dans un contexte de plan de cession, les contrats de travail desdits salariés se poursuivent de plein droit.»
Par lettre en date du 12 février 2014, la SCP F... a informé la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING des différentes décisions rendues par l'autorité administrative concernant Monsieur X..., impliquant la reprise du contrat de travail de l'intéressé.
Dans une correspondance datée du 28 février 2014, la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING a notifié à l'administrateur judiciaire son désaccord avec l'analyse de l'Inspection du travail, en l'avisant qu'elle allait former un recours contre la décision rendue le 2 décembre 2013 et qu'en tout état de cause, elle refusait la réintégration du salarié au sein de ses effectifs.
Monsieur X... ne percevant plus de rémunération depuis le 31 janvier 2014 et ne pouvant prétendre au versement d'indemnités de chômage, en l'absence de licenciement a, alors saisi, le 10 avril 2014, la juridiction prud'homale en référé afin d'obtenir à titre provisionnel le paiement par la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING de ses salaires à compter du 1er février 2014.
Parallèlement, par requête en date du 24 avril 2014, il a saisi au fond, le conseil des prud'hommes aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, désigné comme étant la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING en dirigeant ses demandes subsidiairement à l'encontre de l'une ou l'autre des sociétés ayant repris le reste de l'activité la société SAFIG .
Le conseil des prud'hommes, statuant en référé, a, par ordonnance du 27 mai 2014, dit n'y avoir lieu à référé en présence d'une contestation sérieuse.
Monsieur X... a relevé appel de cette décision et la cour d'appel de Douai , par arrêt du 10 octobre 2014, a condamné la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler au salarié les sommes suivantes :
13 186,09 euros à titre de provision sur les salaires du 14 avril à fin septembre 2014
1 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour le surplus, elle a estimé que les contestations élevées par la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING concernant les congés payés et la demande de dommages et intérêts formulées par le salarié, étaient sérieuses et nécessitaient un examen au fond.
De son côté, la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING a, le 11 août 2014, déposé un mémoire devant le tribunal administratif de Montreuil aux fins d'obtenir l'annulation de la décision de refus d'autorisation à licenciement de Monsieur X....
Le refus de licenciement a, cependant, été confirmé par la juridiction administrative, le 15 juin 2015.
La société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING a relevé appel de cette décision.
Entre temps, par jugement en date du 17 décembre 2015, notifié aux parties le 18 avril 2016, la juridiction prud'homale a :
rejeté le sursis à statuer sollicité par la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING dans l'attente de la décision de la Cour de Cassation concernant un autre salarié protégé de la société SAFIG.
dit et jugé qu'il y a application de l'article L 1224-1 du code du travail en ce qui concerne le contrat de travail de Monsieur X... ;
-dit et jugé que le contrat de travail de Monsieur X... est transféré au profit de la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à compter du 14 février 2014.
-ordonné la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur K... X... aux torts exclusifs de la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING et ce, à compter du prononcé du jugement.
-dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
-condamné la société la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à Monsieur K... X... les sommes suivantes :
- 4 837,50 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
- 483,75 euros au titre des congés payés afférents
-13 934,68 euros net au titre de l'indemnité de licenciement
-58 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- 2000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
-rappelé les dispositions applicables en matière d'intérêts au taux légal
-rappelé les dispositions relatives l'éxécution provisoire
-ordonné la délivrance de bulletins de paie, ce, sous astreinte de 15 euros par jour et par bulletin de paye, après un mois suivant la notification du jugement.
-débouté Monsieur X... du surplus de ses demandes
-mis hors de cause les société CANON BUSINESS et HSK ainsi que els organes de la procédure de la liquidation de la société SAFIG.
-débouté la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING de sa demande reconventionnelle.
-condamné la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING aux entiers dépens.
La SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING a, le 26 avril 2016, régulièrement interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées entre les parties.
Avant que la cour d'appel de Douai n'évoque le dossier, la cour administrative d'appel de Versailles a, le 20 juillet 2017 annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil ayant confimé le refus de l'inspection du travail d'autoriser le licenciement de Monsieur X....
Dans ces circonstances, les organes de la procédure collective de la société SAFIG ont formé un pourvoi contre cette décision, devant le Conseil d'Etat lequel est en cours d'examen.
L'affaire, appelée une première fois devant la cour d'appel de Douai, le 24 mai 2018, a été renvoyée au 25 octobre 2018.
A l'audience, les parties reprennent oralement leurs dernières écritures déposées pour la plupart le jour même, à l'exception de la société CANON FRANCE BUSINESS SERVICES qui a transmis ses conclusions le 23 octobre 2018 et de l'Unédic agissant sur délégation des AGS et CGEA de Levallois Perret qui a fait parvenir les siennes, le 16 octobre 2018.
La SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING sollicite la réformation du jugement entrepris.
Elle demande à la cour de :
-dire et juger que le contrat de travail de Monsieur X... au sein de la société SAFIG n'était pas exclusivement rattaché à l'activité « moyens de paiement » qu'elle a repris à la suite du plan de cession.
-par conséquent de déclarer irrecevables l'ensemble des demandes formulées par Monsieur X... à son encontre.
-condamner la SELAFA MJA prise en la personne de Maître D... M... , ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société SAFIG , ou à défaut la société CANON , à lui payer la somme de 70 443,24 euros bruts indûment payée à titre de rappel de salaires, indemnités de préavis et congés payés ou à défaut, condamner le salarié à leur remboursement
-rappeler que l'infirmation du jugement impose à Monsieur X... de lui restituer l'intégralité des sommes qui lui ont été versées en exécution du jugement.
A titre subsidiaire:
-dire et juger que le salaire de Monsieur X... s'élève à la somme de 2418,75 euros.
-dire et juger qu' elle ne peut en aucun cas être tenue au paiement de salaire antérieurement au 22 avril 2014.
-par conséquent, débouter Monsieur X... de toute demande de rappel de salaires calculées sur des bases supérieures.
-prononcer, le cas échéant, toute condamnation à ce titre en deniers ou quittances compte tenu des règlements qu'elle a dores et déjà effectués à titre de provision.
-dire et juger qu'aucun manquement suffisamment grave ne peut lui être reproché, de nature à justifier la résiliation du contrat de travail.
-en conséquence, débouter la partie adverse de sa demande de ce chef.
A titre infiniment subsidiaire, sur les conséquences de la résiliation judiciaire :
-dire et juger que les indemnités de préavis et congés payés y afférents et indemnités de licenciement doivent être calculées sur une base de salaire brut mensuel de 2418,75 euros.
-dire et juger que Monsieur X... ne justifie pas d'un préjudice justifiant de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse supétieure aux 6 derniers mois de salaires.
-fixer dans ce cadre, le montant des dommages et intérêts à la somme de 14 512,50 euros
-débouter Monsieur X... du surplus de ses demandes
-condamner tout succombant à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Monsieur X..., pour sa part, conclut à la confirmation du jugement entrepris.
Il demande à la cour de :
-dire et juger que son contrat de travail a été transféré au profit de la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à compter du 14 février 2014.
-ordonner la résiliation judiciiare de son contrat de travail
-condamner la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à lui verser un rappel de salaire à compter du 14 février 2014 sur la base de 2418,75 euros jusqu'à la décision à intervenir outre les congés payés afférents.
-condamner la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à lui verser, par ailleurs, les sommes suivantes :
- 4 837,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 483,75 euros au titre des congés payés afférents.
-15 721,87 euros net titre d'indemnité de licenciement, somme arrêtée au 1er décembre 2018 à parfaire.
-75 000,00 euros à titre d'inedmnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
-de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en fixant la date de celle-ci à celle de la décision à intervenir
-dire que les rappels de salaires et les congés payés afférents seront dûs à compter du 14 février 2014 et jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir.
A titre subsidiaire :
-dire que les mêmes condamnations seront mises à la charge de la SA CANON FRANCE BUSINESS SERVICES et de la SARL HSK PARTNERS .
A titre plus subsidiaire :
-dire que son contrat de travail est toujours rattaché à la liquidation de la société SAFIG
-dire dans cette hypotèse que les condamnations seront portées au passif de la liquidation judiciaire de la société SAFIG
-déclarer l'arrêt opposable aux AGS et CGEA, lesquels devront garantir les sommes réclamées.
En tout état de cause :
-débouter la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING de sa demande en remboursement ou, à titre subsidiaire, limiter le remboursement aux sommes nettes qu'il a effectivement perçues.
-condamner la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING et, à défaut, la SA CANON FRANCE BUSINESS SERVICES et de la SARL HSK PARTNERS à lui verser une indemnité de 4000 euros au titre des frais non répétibles.
-dire l'arrêt opposable à la SA CANON FRANCE BUSINESS SERVICES et à la SARL HSK PARTNERS, ainsi qu'à la liquidation de la société SAFIG .
La société CANON FRANCE BUSINESS SERVICES sollicite également la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a mise hors de cause. Elle conclut au rejet de toutes prétentions formulées à son contre ainsi qu'à la condamnation de Monsieur X... à lui verser une indemnité de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
La liquidation de la société SAFIG, représentée par la SELAFA MJA en la personne de Maître M..., reprenant les mandats de Maître Jacques E... demande à la cour de :
-constater la fin de mission de Maître O..., ès qualité d'administrateur judiciaire
-confirmer le jugement dans toutes ses dispositions
-constater le respect de la procédure spéciale de licenciement menée par les organes de justice
-constater le transfert du contrat de travail de Monsieur X... à la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING ;
-en conséquence débouter la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING de l'intégralité de ses demandes
-de condamner la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à lui rembourser la somme de 4837,50 euros correspondant aux saalires versés à Monsieur X... entre le 2 décembre 2013 et le 31 janvier 2014.
A titre subsidiaire :
-prononcer une fixation au passif de la société SAFIG des sommes à verser ;
-ordonner l'application de la garantie AGS
En tout état de cause:
-condamner la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à lui verser la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
statuer ce que de droit sur les dépens.
L'Unédic agissant sur délégation des AGS et CGEA de Levallois Perret sollicite également la confirmation de la décision déférée et le débouté intégral des prétentions émises par la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING.
A titre subsidiaire, elle rappelle les limites et conditions de la garantie de l'AGS en rappellant qu'elle ne peut être tenue au cas d'espèce, à garantir les rappels de salaires réclamés par Monsieur X..., de même qu'il ne peut lui être demandé de venir garantir les condamnations prononcées contre la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING.
La société HSK PARTNERS, bien que dûment convoquée n'est ni présente, ni représentée.
SUR CE, LA COUR :
I) Sur la question du transfert du contrat de travail de Monsieur X... au profit de la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING.
Monsieur X... expose qu'au moment de la mise en redressement judiciaire de la société SAFIG ayant abouti à l'établissement de différents plans de cession partielle, il avait en charge le démarrage des traitements de chèques BNPP et LCL et ce, sur tous les centres, il participait à la mise en place de nouveaux traitements moyens de paiement et avait des astreintes le week-end , propres à cette activité.
Il indique par ailleurs, qu'il était affecté sur le site de Lille, seul concerné par le transfert d'activité au profit de la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING, ce qui suffit à démontrer son rattachement à l'activité reprise par la partie appelante.
Il soutient que, nonobstant les affirmations de la partie adverse, son poste figurait dans la liste des contrats transférés à la société BBO, sous l'intitulé opérateur production.
Il ajoute que l'inspection du travail a constaté son rattachement à l'activité moyens de paiement, comme le tribunal administratif, d'ailleurs. Il précise que la SASU BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING, qui a refusé de se conformer aux décisions de l'autorité administrative, pourtant exécutoires, ne peut utilement se prévaloir de l'arrêtrendu par la cour administrative d'appel de Versailles, le 20 juillet 2017, pour opposer une fin de non recevoir à ses demandes, dans la mesure où cette décision a fait l'objet d'un pourvoi devant le conseil d'état et n'est donc pas définitive.
Il ajoute qu'à plusieurs reprises, au travers de ses écrits et par ses actes, notamment en contestant les décisions de l'inspection du travail, puis du tribunal administratif, la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING a admis être son employeur.
Il indique qu'en tout état de cause, postérieurement à la cession partielle, il a continué à travaillé sur le site de Lille pour le compte de la société BBO.
La liquidation de la société SAFIG et l'Unédic, agissant sur délégation de l'AGS et du CGEA de Levallois Perret s'associent à ces developpements. Maître M..., agissant ès qualité de liquidateur de la société SAFIG, pointe en outre, le non respect par la société BBO des dispositions légales en matière de transfert des contrats de travail et une fraude aux droits des salariés, après avoir relevé que certains salariés, comme Monsieur X..., dont le poste apparaissait comme supprimé ont, continué à exercer le même emploi pour le compte du cessionnaire.Il rappelle que les recours contentieux formés contre la décision de refuser el licenciement sont dépourvus de tout effet suspensif.
La partie appelante fait valoir, pour sa part, qu'elle ne peut être considérée comme l'employeur de Monsieur X... et que les demandes de ce dernier à son encontre sont irrecevables dans la mesure où les conditions de transfert du contrat de travail du salarié ne sont pas réunies, celui-ci pour être effectif, supposant d'une part, que les fonctions exercées par l'intéressé soient exclusivement rattachées à l'activité qu'elle a reprise, d'autre part, que la décision de refus du licenciement de l'inspection du travail lui soit opposable.
A ce titre, elle fait valoir que le poste de Monsieur X... relevait d'une activité transversale de support présentant un lien partiel avec l'activité moyens de paiement et se rattachant à d'autres activités qui ne lui ont pas été transférées.
Elle ajoute que la décision de refus d'autorisation du licenciement prise par l'inspection du travail ne lui a pas été notifiée, de sorte qu'elle ne s'imposait pas à elle.
Elle rappelle qu'en tout état de cause, cette décision a été annulée par la cour administrative d'appel de Versailles, le 20 juillet 2017, et qu'aux termes de son arrêt la juridiction a fort justement constaté que Monsieur X... ne faisait pas partie de l'activité Moyens de Paiement qui lui a été transférée et que son poste figurait dans la liste de ceux non repris dans le cadre de la cession, homologuée par le tribunal de commerce.
L'article L 1224-1 du code du travail stipule que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.
Ces dispositions d'ordre public s'appliquent lorsqu'il y a transfert d'une entité économique autonome, laquelle s'entend d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre.
Les salariés protégés affectés à l'activité transférée suivent dans cette hypothèse le sort de celle-ci sans formalité.
Lorsque un salarié a des attributions se rattachant à plusieurs activités dont certaines seulement sont transférées, il y a lieu, de prendre en considération le secteur d'activité dans lequel il exécutait l' essentiel de ses missions afin de déterminer le sort de son contrat de travail. Ainsi, en vertu de la règle de l'indivisibilité du contrat de travail, si celui-ci s'exécutait pour l'essentiel dans le secteur d'activité repris, cette situation suffit pour considérer que l'ensemble du contrat de travail a été transféré.
En l'espèce, il n'est pas discuté que le licenciement de Monsieur X..., salarié protégé n'a pas été autorisé par l'inspection du travail suivant décision du 2 décembre 2013. A cette époque, la société SAFIG était déjà placée en liquidation judiciaire et n'avait plus d'activité, de sorte que le refus de l'autorité administrative, qui s'imposait aux parties en cause, a emporté transfert de plein droit du contrat de travail du salarié au profit de l'une des sociétés cessionnaires et plus particulièrement au profit de celle ayant repris l'activité à laquelle Monsieur X... était rattaché, identifiée par l'autorité administrative comme étant sans conteste la société BBO.
Cette analyse est contestée par la partie appelante .
La cour relève toutefois les éléments suivants :
-Aux termes de la décision du tribunal de commerce en date du 19 août 2013, il apparaît que les différentes activités de la société SAFIG ont été reprises par trois sociétés selon la répartition suivante:
-la SA CANON FRANCE BUSINESS SERVICES s'est vu transférer les services BPO des sites du Mans, Melun, La Charté et Saint Ouen ainsi que els services d'externalisation de la relation donateur dans le secteur caritatif/ logicile collectdons opérés sur les sites de Saint Ouen et de Melun.
-la société HSK PARTNER a notamment repris les activités de prestation de services pour le marketing direct à Saint Ouen, la commercialisation ds bases de données BtloB, la gestion de base de données pour le compte de tiers sous marque Dalive
-la société BBO a repris l'activité moyens de paiement dont l'activité est raalisée sur les sites de Lille, Bordeaux, Orléans, Rennes Melun et Saint Ouen.
Le plan de cession établi au profit de la société BBO fait état de la transmission d' actifs tant corporels qu'incorporels liés à l'activité moyens de paiement, ce qui, permet de considérer qu'il y a bien eu transfert d'une entité économique autonome.
- La société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING est la seule société concernée par la reprise de l'activité exercée sur le site de Lille où était affecté Monsieur X....
- Le contrat de travail de l'intéressé, les avenants qui lui ont succédé, les fiches de paie ainsi que les attestations produites par l'intimé, établissent que celui-ci a toujours exercé une activité liée au traitement des moyens de paiement sur le site lillois. Le terme «technicien d'exploitation» figurant sur les bulletins de paie à compter de Janvier 2004, désigne une fonction support (en l'occurence support informatique), mai ne permet aucunement d'en déduire, en l'absence d'autres éléments, que l'intéressé se serait vu confier essentiellement des missions transversales présentant un lien résiduel avec l'activité reprise par la partie appelante alors que les pièces de la procédure attestent du contraire.
Il est d'ailleurs justifié de ce que Monsieur X... assurait des astreintes le samedi et le dimanche sur la plateforme de télécollecte chèque et sur le traitement chèques BNPP, ces sujétions étant propres à l'activité Moyens de paiement .
Ces constatations permettent de conclure que les missions du salarié étaient effectivement et à titre principal rattachées à l'activité Moyens de paiement, reprise par la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING.
S'il ne peut, au vu du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny, être contesté que le poste de Monsieur X... ne figurait pas expressément dans la liste des postes repris par la société cessionnaire, force est de constater qu'il est établi par les éléments figurant au dossier que le salarié a, cependant, poursuivi son activité après la cession et ce, pendant deux mois, au profit de la la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING. Il est, en effet, rapporté et non contesté que celle-ci lui a attribué une messagerie électronique professionnelle, l'a convié à des réunions de services et lui a demandé d'effectuer une formation par téléphone.
La partie appelante se contente, sur ce point, de jutifier cette situation par la nécessité d'assurer «une bonne passation des activités et la mutation vers les systèmes informatiques des repreneurs», sans préciser dans quel cadre juridique, elle a sollicité le concours de Monsieur X... à une époque où la société SAFIG était déjà en liquidation depuis plusieurs mois. Dans les faits, il est constant qu'elle a repris provisoirement dans ses effectifs Monsieur X... pour effectuer des missions nécessairement en lien avec l'activité qui lui a été transférée, à savoir l'activité «Moyens de paiement». Elle lui a fourni les moyens de poursuivre les fonctions antérieurement exercées au profit de la société SAFIG, ce qui vient établir que le poste de Monsieur X... n'était, à cette époque, pas supprimé. Elle lui a donné, dans ce cadre, des directives et s'est, ni plus ni moins, comportée à son égard comme son employeur.
Les éléments présentés par la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING et notamment le courrier transmis par l'administrateur judiciaire en date du 5 septembre 2013, ne sont pas de nature à remettre en cause la nature des relations ayant existé entre elle et Monsieur X... et le comportement qu'elle a adopté, par la suite, consistant à contester les différentes décisions administratives portant refus d'autoriser le licenciement de Monsieur X..., ne peut se comprendre qu'en raison de son statut d'employeur.
La cour souligne que par courrier en date du 31 juillet 2014, l'Inspection du travail a alerté le directeur des ressources humaines de la société BBO sur les obligations de la société en tant qu'employeur à l'égard du salarié en lui précisant : « Il vous appartient le cas échéant et sous réserve d'avoir un motif légitime d'engager une procédure de rupture ( le ) concernant » et en lui rappelant qu'elel avait l'obligation de lui fournir une prestation de travail et un salaire, nonobsant l'issue du recours introduit, celui-ci n'étant pas suspensif.
Les premiers juges ont donc fait une analyse pertinente de la situation en retenant que le contrat de travail avait bien été transféré à la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING, laquelle doit seule répondre des demandes formulées en justice par Monsieur X....
Le jugement ayant mis hors de cause les autres sociétés appelées à la procédure sera donc confirmé sauf à préciser que la mise hors de cause s'applique désormais à la liquidation de la société SAFIG.
II) sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et els demandes subséquentes :
En application des dispositions des articles 1224 du code civil et L 1231-1 du code du travail, le salarié est fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur si ce dernier ne respecte pas ses obligations contractuelles.
Il appartient au salarié de prouver la réalité des manquements invoqués, lesquels doivent revêtir une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.
Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail était justifiée.
En l'espèce, comme cela a déjà été évoqué, l'analyse des pièces versées à la procédure établissent qu'après avoir sollicité durant deux mois, Monsieur X... afin qu'il assure diverses prestations au sein de son entreprise, la société BBO a fait comme si l'intéressé n'avait jamais intégré ses effectifs, s'abstenant de lui fournir du travail et de le rémunérer. Dès le 14 février 2014, la SCP F... l'a, pourtant, informée de ce que l'inspection du travail avait rendu une décision refusant l'autorisation à licenciement du salarié protégé, ce qui impliquait la poursuite du contrat de travail. La société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING, loin de régulariser la situation, s'est comportée comme si la décision administrative dont elle avait connaissance n'avait jamais existé, ce, malgré un courrier de l'Inspection du travail en date du 31 juillet 2014, venant lui rappeler ses obligations et l'informer qu'il lui appartenait , soit de licencier Monsieur X..., soit de poursuivre la relation professionnelle avec toutes les conséquences qui s'y attachent.
Bien que parfaitement informée du caractère non suspensif des recours contentieux formés contre la décision initale de refus d'autorisation de licenciement, la partie appelante a persévéré dans son attitude, au mépris des droits du salarié qui s'est trouvé dépourvu de toutes ressources et dans une situation précaire financièrement et moralement difficile.
Les manquements graves invoqués par Monsieur X... à l'appui de sa demande en résiliation judiciaire sont donc amplement démontrés et justifie la requalification ed la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse .
Le jugement entrepris ayant conclu en ce sens en fixant la date de résiliation du contrat au 17 décembre 2015 et ayant alloué au salarié, sur la base d'une rémunération brute mensuelle de 2418,75 euros, une indemnité compensatrice égale à 2 mois de salaires outre les congés payés afférents ainsi qu'une indemnité de licenciement à hauteur de 13 934,68 euros, sera confirmé.
En revanche au vu des circonstances particulières dans lesquelles Monsieur X... a perdu son emploi, du comportement délibéré adopté par la société BBO, il y aura lieu de majorer à la somme de 62 000 euros, le montant des dommages et intérêts revenant au salarié au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Monsieur X... est, par ailleurs fondé à solliciter les rappels de salaires dûs à compter du 14 février 2014 et jusqu'au 17 décembre 2015, sur la base mensuelle de 2418,75 euros , desquels il y aura lieu de déduire les sommes déjà versées à titre de provision à la suite de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 10 octobre 2014 ( soit une somme de 13 186,09 euros correspondant aux salaires dûs entre le 14 avril et fin septembre 2014).
La liquidation de la société SAFIG qui a procédé au règlement de la somme de 4837,50 euros au titre des salaires versées à Monsieur X... entre le 2 décembre 2013 et le 31 janvier 2014, est, par ailleurs, bien fondée à solliciter le remboursement de ces sommes auprès de la société BBO.
Les autres dispositions du jugement seront intégralement confirmées.
III) Sur les frais non répétibles et les dépens :
L'équité commande de condamner la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à Monsieur K... X... une indemnité de 2000 euros et à la liquidation de la société SAFIG représentée par Maître M..., une indemnité de 1500 euros au titre des frais non répétibles exposés en cause d' appel.
Les autres demandes formulées à ce titre seront rejetées.
La société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions sauf celle relative au quantum de dommages et intérêts alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et celles portant sur la demande en rappel de salaires formulées par Monsieur X... ainsi que sur la demande en remboursement de la somme de 4837,50 euros formulée par les organes dela procédure collective de la société SAFIG sur lesquelles, il a omis de statuer.
Statuant à nouveaux de ces chefs et y ajoutant
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à Monsieur K... X... la somme de 62 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à Monsieur K... X... les salairse qui lui sont dûs depuis le 14 février 2014 et jusqu'au 17 décembre 2015, date de la rupture du contrat de travail, sur la base d'une rémunération mensuelle de 2418,75 euros , desquels il y aura lieu de déduire les sommes déjà versées à titre de provision à la suite de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 10 octobre 2014 ( soit une somme de 13 186,09 euros correspondant aux salaires dûs entre le 14 avril et fin septembre 2014).
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à la liquidation de la société SAFIG représentée par Maître D... M..., liquidateur ayant repris les mandats de Maître E..., préalablement désigné pour cette mission par le Tribunal de Commerce de Bobigny la somme de 4837,50 euros correspondant aux salaires versés à Monsieur K... X... pour la période comprise entre le 2 décembre 2013 et le 31 janvier 2014.
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à Monsieur K... X... une indemnité de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING à régler à la liquidation de la société SAFIG représentée par Maître D... M..., liquidateur ayant repris les mandats de Maître E..., préalablement désigné pour cette mission par le Tribunal de Commerce de Bobigny, une indemnité de 1500 euros au titre des frais non répétibles engagés en appel.
Rejette les demandes plus amples ou contraires ;
Condamne la société BANCTEC BUSINESS OUTSOURCING aux dépens d'appel.
LE GREFFIER P/ Le Président Empêché
Le Conseiller
A.LESIEUR L.GOUTAS