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30/03/2018 | FRANCE | N°16/03756

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 1, 30 mars 2018, 16/03756


ARRÊT DU

30 mars 2018







N° 588/18



RG 16/03756



PL / TD







RO

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Septembre 2016

(RG 14/00124 -section 5)



































GROSSE :
r>

Aux avocats



le 30/03/18



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. Mohammed X...

[...]

Représentant : Me Stéphane Y..., avocat au barreau de LILLE substituée par Me Coralie Z...



INTIMÉ :



Me G...

Mandataire liquidateur de SA SIE

[...]

Représentant : Me Beno...

ARRÊT DU

30 mars 2018

N° 588/18

RG 16/03756

PL / TD

RO

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LANNOY

en date du

13 Septembre 2016

(RG 14/00124 -section 5)

GROSSE :

Aux avocats

le 30/03/18

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. Mohammed X...

[...]

Représentant : Me Stéphane Y..., avocat au barreau de LILLE substituée par Me Coralie Z...

INTIMÉ :

Me G...

Mandataire liquidateur de SA SIE

[...]

Représentant : Me Benoit A..., avocat au barreau de LILLE

AGS CGEA LILLE

[...] [...] LILLE CEDEX

Représentant : Me François B... de la SCP FRANCOIS B...-F... FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

substitué par Me H... assisté de Me Arnaud C... avocat au barreau de PARIS substitué par Me I... Pierre

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Philippe D...

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Renaud E...

: CONSEILLER

Muriel J...

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Maryse ZANDECKI

DÉBATS :à l'audience publique du 06 Décembre 2017

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Mars 2018,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe D..., Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 13/01/2017, avec effet différé jusqu'au 13/09/2017

EXPOSE DES FAITS ET DES DEMANDES

Par arrêt devenu définitif en date du 17 décembre 2010, à la suite du rejet du pourvoi par la cour de cassation, la cour d'appel de Douai, statuant sur l'appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Lille, a notamment fixé la créance de Mohammed X... au passif de la liquidation judiciaire de la Société Industrielle Energie à la somme de 4000 € à titre de dommages et intérêts consécutifs au refus de délivrance de l'attestation d'exposition à l'amiante par le mandataire liquidateur.

En réponse à la demande du salarié qui sollicitait le versement de la somme qui lui avait été allouée, le liquidateur judiciaire lui a fait savoir par courrier en date du 3 avril 2013 que la liquidation judiciaire ne détenait pas les fonds lui permettant de procéder au règlement de la somme et qu'en outre l'actif de la liquidation judiciaire devait servir prioritairement au remboursement de l'AGS des sommes versées au titre des super-privilèges des salariés.

Par requête reçue le 23 mai 2014, le salarié a saisi le Conseil de prud'hommes de Lannoy en vue de dire que l'AGS garantirait le paiement du montant de la condamnation et de condamner l'AGS au paiement de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 13 septembre 2016, le conseil de prud'hommes a dit que l'unicité de l'instance était opposable au salarié et a déclaré sa demande irrecevable.

Le salarié a interjeté appel du jugement le 10 octobre 2016.

Par ordonnance en date du 13 janvier 2017, prise en application de l'article 905 du code de procédure civile, la clôture de la procédure a été différée au 13 septembre 2017, l'appelant devant conclure avant le 13 avril 2017 et l'intimé avant le 13 juillet 2017 et l'audience de plaidoirie a été fixée au 6 décembre 2017.

Selon ses écritures reçues le 9 janvier 2017, Mohammed X... appelant sollicite de la cour la garantie par le CGEA du paiement de la somme de 4000 € fixée par l'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 17 décembre 2010 et la condamnation du CGEA au paiement de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelant expose que sa déclaration d'appel n'est pas caduque, que l'exception de procédure est irrecevable car elle n'a pas été soulevée in limine litis mais à titre principal et dans les mêmes conditions que celles évoquant le fond, que la demande de caducité ne repose sur aucun fondement, que la cour, ayant appliqué à la procédure les dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, les articles 908 et 930-1 dudit code relatifs au délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour la signification des conclusions, ne sont pas applicables à l'espèce, que le calendrier fixé par l'ordonnance de clôture a été respecté, qu'en tout état de cause aucun manquement ne peut lui être imputé, que les conclusions ont été notifiées au greffe de la cour par RPVA le 9 janvier 2017 dans le délai de trois mois qui courait à compter du 10 octobre 2016 et au seul avocat constitué, qu'à cette date le CGEA n'avait pas constitué avocat, cette constitution n'étant survenue que le 17 janvier 2017, que de ce fait il pouvait, jusqu'au 10 février 2017, procéder par voie de notification, que le calendrier de procédure prévu par l'ordonnance de clôture était seul applicable et opposable aux parties.

L'appelant ajoute que l'AGS ne peut lui opposer la règle de l'unicité de l'instance, qu'en outre aucun jugement au fond n'était survenu, qu'en toute hypothèse le fondement de la demande s'est révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes, soit le 23 octobre 2012, date du droit à réparation, correspondant à la date de l'arrêt de rejet de la cour de cassation, qu'à cette date il a été demandé au liquidateur de formuler une demande d'avance de fonds, que celui-ci n'a pas fait connaître sa position, que le CGEA ne démontre pas qu'il ait signifié, avant le 29 janvier 2013, son refus de prise en charge, qu'il a dû saisir le conseil de prud'hommes pour rendre la décision opposable à l'AGS, que la position du CGEA n'a été révélée que très récemment.

L'appelant souligne que le liquidateur a été condamné en qualité de mandataire liquidateur et non à titre personnel, que le CGEA a refusé implicitement de garantir la créance, que la règle de l'unicité de l'instance n'est pas applicable au litige trouvant son fondement dans le refus de l'AGS.

Il considère que la prescription n'est pas acquise, que la créance est postérieure au 23 octobre 2012, que le CGEA ne garantit que les créances définitives, que le point de départ de la prescription court à compter du fait révélant le droit que le requérant aurait dû connaître, soit en l'espèce à la date de la lecture des écritures du CGEA, c'est-à-dire novembre 2015, qu'au demeurant le délai de deux ans n'était pas expiré en mai 2014.

Il soutient enfin que la garantie du CGEA est due, que le liquidateur, en qualité d'employeur, a commis une faute dans le cadre du contrat de travail, que la créance n'est pas née postérieurement à la liquidation judiciaire mais en raison des agissements du liquidateur dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire, que la délivrance de l'attestation en cause fait partie des obligations à la charge de l'employeur lors de la rupture du contrat de travail.

Selon ses écritures reçues le 12 juillet 2017 au greffe de la cour, le liquidateur judiciaire de la société Industrielle Energie sollicite qu'il lui soit donné acte de ce qu'aucune demande n'est formée à son encontre et conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Il fait valoir qu'une liquidation judiciaire est une situation subie par tous, que la cour d'appel a fixé à la somme de 4000 € la créance des salariés dans la liquidation judiciaire à titre de dommages et intérêts, que, faute de fonds disponibles, le litige ne porte que sur la question de savoir si la créance de l'appelant doit ou non être garantie.

Selon ses écritures reçues le 12 juillet 2017 au greffe de la cour, et ses conclusions récapitulatives reçues le 8 septembre 2017, le Centre de Gestion et d'Etudes-AGS de Lille conclut à titre principal à la caducité de l' appel, à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement et à l'irrecevabilité de la demande en raison de la prescription acquise, à l'absence d'opposabilité à l'AGS de la créance, en raison de son caractère civil, de la date à laquelle elle est née, et en toute état de cause du fait qu'elle n'est pas en mesure d'avancer les fonds par suite d'un défaut de relevé de créances, à titre subsidiaire à la fixation de sa garantie dans le respect des dispositions de l'article L3253-8 ancien du code du travail et à la condamnation de l'appelant aux dépens.

A l'audience du 6 décembre 2017, le CGEA renonce à soulever la caducité de l'appel, et ne fait valoir la prescription que pour les requêtes présentées devant le conseil de prud'hommes postérieurement au 17 juin 2015.

Le CGEA soutient que la demande est irrecevable en application du principe de l'unicité de l'instance, que l'appelant avait précédemment saisi le conseil de prud'hommes de Lannoy d'une demande à l'encontre de la société relative au préjudice d'anxiété, qu'il n'avait pas demandé à l'AGS de garantir sa créance, que ce dernier a connu le fondement de son action dès l'arrêt de la cour d'appel de Douai, qui constituait un titre exécutoire dès le 17 décembre 2010, que l' AGS n'a jamais été mise en cause devant le tribunal de grande instance au demeurant incompétent pour statuer sur le préjudice d'un salarié du fait des manquements de son employeur, que cette juridiction a retenu la responsabilité personnelle du liquidateur.

Il estime que la demande est prescrite en application de la loi du 14 juin 2013 qui a abaissé à deux ans le délai de prescription, que l'appelant connaissait l'existence de sa créance depuis le 17 décembre 2010 qu'il n'a jamais saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de garantie.

Il soutient que la créance ne lui est pas opposable, du fait de la nature civile de celle-ci, qu'en tout état de cause la créance n'est pas née antérieurement à l'ouverture de la procédure, qu'elle est consécutive à la résistance abusive du mandataire à la remise de l'attestation qui devait être effectuée au départ de l'établissement, soit postérieurement à la liquidation judiciaire de la société, qu'enfin il ne peut procéder à l'avance des fonds à défaut de relevé de créance.

MOTIFS DE L'ARRET

Attendu que la cour devant statuer sur la prise en charge des dépens occasionnés par la procédure, la mise hors de cause du liquidateur judiciaire de la Société Industrielle Energie ne peut être prononcée ;

Attendu que le CGEA n'excipant plus de la caducité de l'appel, il n'y a plus lieu de statuer sur cette fin de non-recevoir;

Attendu que le CGEA ne soulève la prescription que des actions engagées devant le conseil de prud'hommes postérieurement au 17 juin 2015; que la requête de l'appelant ayant été reçue le 23 mai 2014 au secrétariat du conseil de prud'hommes, l'exception soulevée par l'intimé ne vise pas le salarié ;

Attendu sur l'unicité de l'instance, en application de l'article R1452-6 du code du travail dans ses dispositions alors en vigueur, que cette règle édictée pour le règlement des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail, n'est pas applicable au litige qui trouve son fondement dans le refus de l'AGS de garantir une créance; que la demande de l'appelant a bien pour origine un tel refus;

Attendu sur la garantie de l'AGS, en application des artic1es 1142 et 1147 du code civil et L. 3253-8 et R4412-58 du code du travail, que toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts ; qu'il s'ensuit que les dommages-intérêts dus au salarié en raison de l'inexécution par l'employeur d'une obligation résultant du contrat de travail sont garantis par l'AGS dans les conditions prévues à l'article L3253-8 du code du travail ;

Attendu qu'aux termes des dispositions légales précitées la Société Industrielle Energie devait, lors de son départ de l'établissement, remettre à l'appelant une attestation d'exposition aux agents chimiques dangereux mentionnés à l'article R4412-40 du code du travail; que ce document devait en outre être rempli par la société également ; que la remise de cette attestation constituait donc l'une des obligations auxquelles l'employeur était tenu en exécution du contrat de travail; qu'il importe peu qu'elle ait été délivrée postérieurement à la cessation de la relation de travail, l'obligation de remettre ce document étant née du contrat de travail; que les dommages et intérêts ont été alloués du fait de l'inexécution de cette obligation par le liquidateur, substituant l'employeur; qu'ils entrent donc dans le champ de garantie de l'AGS;

Attendu que le litige portant sur l'étendue de la garantie de l'AGS, il appartiendra au mandataire liquidateur de communiquer un relevé de créances en vue de la mise en 'uvre de cette garantie;

Attendu que les sommes dues en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile sont nées d'une procédure judiciaire et ne sont pas dues en exécution du contrat de travail; qu'en conséquence le CGEA ne peut être tenu au paiement de telles sommes;

Attendu que l'appel en garantie de l'AGS a pour origine l'allocation de dommages et intérêts au profit de l'appelant à la suite du refus par le mandataire liquidateur de délivrer l'attestation d'exposition à l'amiante; qu'il convient en conséquence de mettre à la charge de la liquidation judiciaire les dépens occasionnés par la présente procédure;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré

ET STATUANT A NOUVEAU

DIT que le Centre de Gestion et d'Étude-AGS de Lille devra garantir le paiement de la somme de 4000 € allouée à Mohammed X... à titre de dommages et intérêts consécutifs au refus par le mandataire liquidateur de délivrer l'attestation d'exposition à l'amiante;

DIT qu'il ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-8 et suivants du code du travail que dans les conditions résultant des dispositions des articles L3253-15 à L3253-17, L3253-19 à L3253-21 et dans la limite des plafonds définis aux articles D3253-2 et D3253-5 dudit code, dans leurs dispositions en vigueur à la date de la rupture du contrat de travail;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

INSCRIT les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la Société Industrielle Energie.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

A. GATNERP. D...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 1
Numéro d'arrêt : 16/03756
Date de la décision : 30/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-30;16.03756 ?
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