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19/02/2015 | FRANCE | N°13/04140

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 19 février 2015, 13/04140


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 19/02/2015



***



N° de MINUTE : 120/2015

N° RG : 13/04140



Jugement (N° 10/01286)

rendu le 21 Juin 2013

par le Tribunal de Grande Instance d'AVESNES SUR HELPE



REF : DD/AMD





APPELANTE



SAS ARCADIM FUSION venant aux droits de la société ARCADIM VISION

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 3]


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Assistée de Maître Karl VANDAMME, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉS



Monsieur [F] [O]

né le [Date naissa...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 19/02/2015

***

N° de MINUTE : 120/2015

N° RG : 13/04140

Jugement (N° 10/01286)

rendu le 21 Juin 2013

par le Tribunal de Grande Instance d'AVESNES SUR HELPE

REF : DD/AMD

APPELANTE

SAS ARCADIM FUSION venant aux droits de la société ARCADIM VISION

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Maître Bernard FRANCHI, membre de la SCP DELEFORGE FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître Karl VANDAMME, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS

Monsieur [F] [O]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 10]

Madame [C] [K] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

Représentés par Maître Virginie LEVASSEUR, membre de la SCP Dominique LEVASSEUR Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI

Assistés de Maître Pascal HOLLENSETT, avocat au barreau de VALENCIENNES

ASSIGNES EN APPEL PROVOQUE

Monsieur [G] [B]

né le [Date naissance 3] 1949 à [Localité 7] ( BELGIQUE)

Madame [Z] [U] [N] épouse [B]

née le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 8] (ITALIE)

demeurant [Adresse 6]

[Localité 4] (BELGIQUE)

Mademoiselle [M] [B]

née le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 9] (BELGIQUE)

demeurant [Adresse 8]

[Localité 1] (BELGIQUE)

Représentés par Maître Isabelle CARLIER, avocat au barreau de DOUAI

Assistés de Maître Philippe LEFEVRE, avocat au barreau de LILLE, substitué à l'audience par Maître PELLETIER, avocat

DÉBATS à l'audience publique du 08 Décembre 2014 tenue par Dominique DUPERRIER magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine VERHAEGHE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Maurice ZAVARO, Président de chambre

Dominique DUPERRIER, Conseiller

Bruno POUPET, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 Février 2015 après prorogation du délibéré en date du 05 Février 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Maurice ZAVARO, Président et Delphine VERHAEGHE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 octobre 2014

***

Suivant compromis signé le 31 juillet 2009 avec le concours de la sarl Arcadim Vision, [F] [O] et [C] [K] épouse [O] ont promis de vendre à [M] [B] d'une part, et à ses parents les époux [B] [N], d'autre part, respectivement la nue-propriété et l'usufruit d'un immeuble situé [Adresse 2] (Nord) moyennant le prix de 710.000 euros comprenant les frais d'agence (30.000 euros), sans recours à un prêt, sous condition suspensive de lever des purges et droit de préemption.

La réitération de la vente a été fixée en l'étude de maître [R] [X], notaire à [Localité 5], au plus tard le 26 octobre 2009. Il a été prévu qu'en cas de refus par l'une des parties, elle y sera contrainte par tous moyens et devra en outre payer à l'autre partie dix pour cent du prix de vente augmenté des honoraires de négociation dus au rédacteur du compromis à titre de dommages et intérêts.

Préalablement, suivant acte du 24 juillet 2009 valant délégation de pouvoir, les époux [B] [N], domiciliés principalement à [Adresse 7] et disposant d'une résidence en France [Adresse 6] ont donné à leur fille domiciliée à Bruxelles, délégation de pouvoir pour traiter en leur nom toutes décisions relatives à l'achat de cette propriété, et se porter fort pour cette acquisition elle en qualité de nue-propriétaire, eux en qualité d'usufruitiers.

Par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 5 novembre 2009, les époux [B] [N], ont informé les vendeurs qu'ils exerçaient leur faculté de rétractation et qu'ils mettaient un terme définitif au projet d'achat de leur propriété.

Suivant acte délivré le 6 mai 2010, les époux [O] [K] ont assigné les époux [B] [N] et leur fille [M] [B] à comparaître devant le tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helpe sur le fondement des articles 1134, 1147, 1178 et 1185 du code civil, 1589 et suivant du même code, et de l'article L 271-1 du code de la construction et de l'habitation afin de voir :

constater que la rétractation des consorts [B] est abusive,

constater la résolution de la vente aux torts exclusifs de ces derniers.

Par acte délivré le 10 mai 2010, les époux [O] [K] ont assigné la sarl Arcadim Visio devant le même tribunal afin d'obtenir notamment :

que le jugement soit étendu et opposable à la sarl Arcadim,

au cas où le tribunal ferait droit à l'argumentaire des consorts [B], constater que la sarl Arcadim Visio est responsable de la situation subie par les époux [O],

condamner cette dernière à réparer leur préjudice.

Ces deux procédures ont été jointes.

Par jugement rendu le 21 juin 2013, le tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helple a :

rejeté l'exception de nullité de l'acte de saisine du tribunal,

débouté les époux [O] [K] de leurs demandes formées à l'encontre des consorts [B],

déclaré que la sarl Arcadim Visio a manqué à ses obligations découlant du mandat qui lui a été confié par les époux [O],

condamner la sarl Arcadim Visio à payer aux époux [O] [K] les sommes de :

98.000 euros en réparation de la perte financière subie,

15.000 euros au titre de l'indemnité d'immobilisation,

3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

débouté les époux [O] [K] de leurs demandes formées à l'encontre des consorts [B],

débouté les époux [O] de leurs demandes formées à l'encontre des consorts [B] au titre des frais irrépétibles,

condamné les époux [O] à payer aux consorts [B] la somme de :

4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la sarl Arcadim Visio à verser aux époux [O] la somme de :

3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la sarl Arcadim Visio aux dépens.

La sarl Arcadim Visio a relevé appel de jugement à l'égard des époux [O] Carpentier.

Suivant acte délivré le 6 décembre 2013, ces derniers ont assigné [M] [B], [G] [B] et [U] [N] à comparaître devant la cour en appel provoqué.

Dans ses dernières conclusions régulièrement signifiées et déposées le 10 juin 2014, la sarl Arcadim Fusion demande à la cour, au visa des articles L 271-1 et L 271-4 du code de la construction et de l'habitation, et 1998 du code civil, de :

réformer le jugement déféré,

débouter purement et simplement les époux [O] [K] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

condamner in solidum [M] [B], [G] [B] et [U] [N] à la garantir de toutes condamnations à son encontre,

en toutes hypothèses,

condamner in solidum [M] [B], [G] [B] et [U] [N] à lui payer la somme de :

3.000,00 euros au titre des frais irrépétibles,

condamner in solidum les époux [O] [K] aux entiers frais et dépens dont distraction au profit de maître Bernard Franchi, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions régulièrement signifiées et déposées le 4 août 2014, [M] [B], [G] [B] et [U] [N] demandent à la cour au visa des articles 114 et 648 du code de procédure civile, L 271-1 et L 271-4 du code de la construction et de l'habitation, des articles 1984 et suivants du code civil, de :

dire que les époux [O] ont violé les dispositions de l'article 648 en donnant une fausse adresse,

dire que le défaut d'indication du domicile réel des époux [O] cause un grief aux consorts [B],

prononcer l'annulation de l'assignation en appel provoqué,

dire que les époux [B] pouvaient exercer leur droit de rétractation,

dire que [M] [B] n'avait pas mandat de recevoir les lettres recommandées prévus à l'article L 271-1 du code de la construction et de l'habitation,

dire que la société Arcadim devait adresser les lettres recommandées avec accusé de réception au domicile des époux [B],

dire que les époux [B] devaient bénéficier en raison d'une modification substantielle sur le bien, objet de la vente, entre la promesse de contrat et le projet d'acte notarié d'un nouveau délai de sept jours,

dire que l'absence de remise du dossier technique à la date de signature du compromis à [M] [B] entraîne la nullité du compromis,

en conséquence,

confirmer le jugement déféré,

en tout état de cause,

condamner les époux [O] à leur payer la somme de :

6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux dépens dont distraction au profit de maître Isabelle Carlier, avocat.

Dans leurs dernières conclusions régulièrement signifiées et déposées le 10 octobre 2014, les époux [O] [K] demandent à la cour au visa des articles 771-1, 907, 763 à 787 et 905 du code de procédure civile, 1134, 1147, 1178, 1185, 1589 et suivants du code civil, L 271-1 du code de la construction et de l'habitation, de :

déclarer irrecevable la demande de nullité soulevée in limine litis par les consorts [B],

débouter les derniers de leur demande à cette fin,

donner acte aux époux [O] de ce qu'ils justifient de leur nouvelle adresse, [Adresse 1],

recevoir l'appel de la société Arcadim,

le déclarer mal fondé,

au cas où la cour estimerait la rétractation régulière pour défaut de notification,

confirmer purement et simplement le jugement déféré en y ajoutant :

une indemnité d'immobilisation de 75.000 euros et non de 15.000 euros,

à défaut, pour le cas où la cour estimerait la rétractation des consorts [B] abusive,

la dire sans effet,

constater la résolution de la vente aux torts exclusifs des consorts [B],

en conséquence,

condamner les consorts [B] à leur payer les sommes de :

75.000 euros représentant 10 % du prix de vente augmentée des honoraires de négociation, indemnités prévues au contrat,

98.000 euros pour leur préjudice supplémentaire,

5.000 euros pour résistance abusive,

3.000 euros au titre des frais irrépétibles,

condamner solidairement la sarl Arcadim et les consorts [B] à leur payer la somme de :

5.000 euros au titre des frais irrépétibles,

et en outre les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2014.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

Sur ce :

sur les moyens de procédure :

Les consorts [B] soulèvent in limine litis la nullité de l'assignation en appel provoqué au visa de l'article 648 selon lequel tout acte d'huissier de justice doit contenir à peine de nullité le domicile des requérants, formalité qui n'a pas été respecté puisque l'adresse des époux [O] figurant dans l'acte d'appel est le [Adresse 2] (Nord) alors que le jugement signifié à cette adresse le 11 septembre 2013 par maître [M] [Q], huissier de justice a été délivré suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 771 alinéa 1er du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure ; les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu'ils ne surviennent ou soit révélés postérieurement au dessaisissement de ce magistrat.

Les consorts [B] sont irrecevables dans cette prétention soumise à la cour.

L'exception est rejetée.

2. sur la mise en 'uvre de la faculté de rétractation :

La société Arcadim fait grief au premier juge d'avoir retenu sa responsabilité pour manquement au devoir de conseil à l'égard des époux [B] faute de s'être assurer de ce que parmi les décisions prévues au mandat, il convenait de prévoir expressément la faculté de rétractation prévue par l'article L. 271-1 du code de la construction. Elle assure avoir respecté l'intégralité des obligations imposées par ce texte et se heurter à la mauvaise foi des époux [B] ; à toutes fins, elle invoque la théorie du mandat apparent.

Les époux [B] soutiennent qu'ils ont usé à bon droit de leur faculté de rétractation par lettre recommandée du 3 novembre 2009 puisque la sarl Arcadim ne leur a pas notifié le compromis à leur adresse personnelle de sorte que le délai prévu par l'article L.271-1 n'a pas commencé à courir ; ils demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de l'agence immobilière qui a failli à son obligation de conseil. Ils soutiennent encore qu'ils n'ont pas rédigé eux-mêmes le mandat adressé à leur fille mais qu'ils se sont contentés de signer le document préparé par la société Arcadim.

Les époux [O] précisent qu'ils ont subi un préjudice du fait de la non réitération du compromis de vente à l'origine d'un préjudice résultant notamment de l'immobilisation de l'immeuble qu'ils souhaitaient vendre rapidement en raison de leur mutation professionnelle.

Le compromis de vente produit aux débats contient en première page, l'identité des acquéreurs, tous trois de nationalité belge, et la précision s'agissant des époux [B] qu'ils sont domiciliés [Adresse 7] et s'agissant de [M] [B], leur fille, qu'elle est domiciliée [Adresse 5] (Belgique).

A la page 4 au paragraphe 4. autre condition suspensive il est indiqué :

Melle [B] [M] achète la nue propriété

Mr et Mme [B] / [N] achètent l'usufruit de la propriété.

A la page 7 au paragraphe prévu pour la signature des parties, dans l'espace réservé à l'acquéreur, mademoiselle [B] a repris les formules manuscrites d'engagement « tant en nom propre que pour le compte de mes parents : Mr [B] [G] et Mme [N] [Z]. »...

Le document porte la signature de [M] [B] ainsi que ses paraphes sur chaque page et au niveau du lieu et de la date : le Quesnoy le 31 juillet 2009.

Il ne comporte pas les signatures des époux [B].

Le compromis se poursuit par les pages suivantes :

le mandat confié à la sarl Arcadim par les époux [O],

la liste des éléments constituant une reprise dans l'immeuble ainsi que leur évaluation chiffrée,

l'attestation des époux [B] donnant pouvoir à leur fille signée à Pointe Noire le 24 juillet 2009,

l'annexe au compromis relatif au raccordement aux réseaux signé par [M] [B] en nom propre et pour le compte de ses parents Mr [B] [G] et Mme [N] [Z].

La société Arcadim a notifié ce compromis à [M] [B] ainsi qu'à Mr [B] [G] et Mme [N] [Z], tous trois individuellement, au domicile de [M] [B] à Bruxelles par trois lettres recommandées avec accusé de réception tous signés le 3 août 2009 par [M] [B].

Les époux [B] soutiennent d'une part qu'ils n'ont jamais été informés de la faculté de rétractation, que l'agence immobilière aurait dû en application des dispositions légales leur notifier le compromis à leur domicile personnel en France [Adresse 6] (Nord) dans un courrier indiquant la faculté de rétractation dans le délai de sept jours à compter du lendemain de la réception de la lettre recommandée, que leur fille [M] n'a pas pu signer le compromis le 31 juillet 2009 puisque ce jour là elle participait à un stage en Belgique.

S'agissant de la signature de l'acte, l'argument selon lequel [M] [B] ne pouvait pas signer le compromis ce jour-là pour être ailleurs, revient implicitement mais nécessairement à suspecter ce document de faux.

La cour relève premièrement, que [M] [B] est la seule à invoquer cet argument étant observé qu'elle a expressément ratifié la date et le lieu par son paraphe de sorte que dans l'hypothèse où elle aurait signé en blanc, elle l'a fait en connaissance de cause et devrait en assumer la responsabilité.

Deuxièmement, que le compromis sus-visé comporte à la page 6 la mention de la faculté de rétractation visée à la page suivante ; à la 7 les dispositions de l'article L 271-1 du code de la construction sont mentionnées dans leur intégralité et donc y compris la faculté de rétractation.

Troisièmement, que la société Arcadim a notifié ce compromis à [M] [B] ainsi qu'à Mr [B] [G] et Mme [N] [Z], tous trois individuellement, au domicile de [M] [B] à Bruxelles par trois lettres recommandées avec accusé de réception tous signés le 3 août 2009 par [M] [B] ;

que cette dernière n'a émis aucune protestation ou réserve sur cette façon de procéder dont les époux [O] soutiennent qu'il en avait été convenu ainsi lors de la signature, [M] [B] ayant indiqué que la notification au Congo serait hasardeuse ; que dans le cas contraire, il lui suffisait de ne pas signer les accusés de réception des deux lettres adressées à ses parents, de sorte que la sarl Arcadim au retour de ces trois accusés de réception signés a pu considérer légitimement en vertu de la délégation de pouvoir avoir valablement notifié le compromis et documents annexes à chacun des époux [B].

Les époux [B] soutiennent qu'étant de nationalité belge, ils ne connaissaient pas le droit de rétractation contenu dans la législation française.

Toutefois, leur fille, a qui ils ont confié le pouvoir de se porter fort, a eu connaissance de ces dispositions légales. Au surplus, l'envoi de document par courrier recommandé est implicitement mais nécessairement une formalité qui a pour finalité de produire des effets. Dans le cas contraire, un courrier simple, ou une seule lettre recommandée suffisait.

Quatrièmement que les époux [B], entrepreneurs dans le secteur pétrolier international, sont des commerçants avisés qui ne peuvent soutenir s'être mépris sur les effets du texte proposé par l'agence Arcadim qu'ils ont signé.

Par ailleurs, le courrier d'accompagnement daté du 3 août 2009 émanant de la sarl Arcadim précise que la notification contient la copie du compromis de vente (établi en un unique exemplaire à la demande des parties page 7) ainsi que les documents s'y référant : Diagnostic GAZ, Diagnostic PLOMB, Diagnostic Amiante, Diagnostic DPE, Diagnostic Electricité, datés du 29 juillet 2009.

[M] [B] qui a signé les trois accusés de réception, n'a formé aucune réclamation sur l'absence de l'un ou l'autre de ces documents.

Le compromis contient l'intégralité des dispositions légales relatives à la faculté de rétractation qu'il appartenait le cas échéant à [M] [B], pour le cas où comme elle le soutient sans toutefois en rapporter la preuve qu'elle n'aurait pas eu connaissance des documents annexés avant la signature du compromis le 31 juillet 2009, d'exercer la faculté de rétractation qui lui était offerte dans le délai de sept jours.

Contrairement aux affirmations des consorts [B] qui tendent à ajouter une obligations à la loi, la sarl Arcadim n'était pas tenue de mentionner à nouveau dans les notifications la faculté de rétractation prévue dans l'acte, et ce, conformément à une jurisprudence établie de la cour de cassation.

Ayant adressé, dans le contexte exposé, les deux notifications destinées aux époux [B] au domicile de leur fille désignée expressément par ces derniers pour prendre toute décision à leur place relative à la vente, et implicitement de les représenter en se « portant fort », la sarl Arcadim n'a pas failli à ses obligations issues des dispositions de l'article L. 271-1 du code de la consommation.

Les consorts [B] n'ont pas exercé leur faculté de rétractation dans le délai de sept jours dont ils disposaient.

Au contraire, ils ont manifesté leur volonté d'acquérir.

Ainsi, par courriers électroniques du 3 août 2009, [M] [B] a indiqué à l'agence, que conformément à leur accord verbal, elle « faxait » l'attestation bancaire justifiant de la disponibilité du prix puisque le financement devait s'opérer sans recours à un prêt ; le 5 août, elle communiquait le livret de mariage de ses parents.

Le 6 août 2009, madame [N] effectuait un versement de 100.000 euros destiné à maître [X], notaire, désigné pour dresser l'acte authentique de vente. Un second virement de 100.000 euros a été le 7 août 2009.

Le second courriel émanant de madame [N] épouse [B] précise : ... « je vous prie de trouver ci-joint une confirmation du deuxième virement de 100.000 euros, pour la vente de la propriété de monsieur [O] à [Localité 2].

Les fonds vous parviennent du compte courant de mon époux, via la société Opale Offshore, dont mon époux est propriétaire.

(Nous travaillons dans l'offshore pétrolier, essentiellement au Congo). »...

Par un courrier daté du 15 septembre 2009, maître [H], notaire à [Localité 6], a informé maître [X] « au sujet de la vente par les époux [O] d'une maison sise à [Localité 2] au profit des consorts [B], qu'il a été chargé par ces derniers de les représenter dans cette opération et qu'ils souhaitaient réaliser la vente pour la fin du mois. » ...

Il s'en suit qu'à cette date, aucun grief n'était émis quant aux formalités de notification effectuées par la sarl Arcadim aux époux [B].

Par courrier du 14 octobre 2009, maître [H] demande à son confrère d'apporter des modifications au projet d'acte rédigé par maître [X].

Il a ainsi confirmé à deux reprises l'intention des époux [B] d'acquérir.

Ce courrier comprend en outre deux paragraphes rédigés comme suit :

Le premier d'entre eux est ainsi rédigé :

... « En page 13 : paragraphe « Dommages à l'ouvrage » : pourrez-vous nous confirmer la date de réception des travaux ainsi que la date de déclaration d'achèvement des travaux faite en mairie ' Merci également de nous joindre une copie de l'attestation d'assurance de l'entreprise Seddiki à l'époque des travaux. »....

La cour relève que ces indications figurent dans le projet de compromis, mais également qu'il appelle un dernier paragraphe rédigé comme suit :

... « Je vous informe enfin que les époux [B] seront en France en fin de semaine prochaine à leur domicile Français sis à [Adresse 6] où la notification du délai de réflexion pourra leur être adressée . » '

Il est singulier que les époux [B] revendiquent le 14 octobre 2009 par la voix de leur notaire la mise en 'uvre de la notification du compromis à un domicile en France alors que cette indication n'a jamais été mentionnée ni cette formalité requise jusque là.

Les époux [B] soutiennent pour la première fois dans leurs écritures d'appel que dans la mesure où une modification est portée dans le projet d'acte authentique non contenue dans le compromis, une nouvelle notification s'imposait qui faisait courir un nouveau délai de rétractation de 7 jours.

En effet, dans le projet d'acte dressé par maître [X], aux pages 13 et 14 au paragraphe Dommages à l'ouvrage ' Assurance il est indiqué :

... « Le vendeur déclare :

que le bien a fait l'objet de travaux susceptibles d'engager la responsabilité décennale des constructeurs, à savoir :

travaux d'extension de l'habitation ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré par la mairie d'[Localité 2] en date du 19 décembre 2002,

création d'une piscine escamotable à la construction existante et création d'une couverture ardoise pour toiture existante qui a fait l'objet d'une déclaration de travaux exemptés de permis de construire en date du 8 décembre 2013,

que la réception a été faite le 4 mars 2004, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de réception des travaux, demeuré ci-annexé aux présentes après mention pour l'extension de l'habitation mais n'ont pas donné lieu à la délivrance par la maire d'[Localité 2] d'un certificat de conformité, ce dernier n'ayant pas été sollicité par le vendeur.

Le ou les débiteurs des garanties résultant des articles 1792 et suivants du code civil sont : Entreprise Générale de Bâtiment Seddiki Frères à [Adresse 3].

Les diverses garanties et responsabilités attachées à la construction de l'immeuble sont régies par les articles 1792 et suivants du code civil dans leur rédaction résultant de la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article L. 243-2 du code des assurances, Le Vendeur précise qu'il n'a pas souscrit l'assurance dommages prévue par l'article L. 242-1 de ce code, et il reconnaît avoir été, également, informé par le notaire soussigné des obligations qui vont peser sur lui compte tenu de l'absence de cette assurance. »...

Par courrier recommandé du 3 novembre 2009, le conseil des époux [B] fait valoir leur droit à rétractation auprès des époux [O] et de la sarl Arcadim ; ce courrier ne comprend aucune indication sur la motivation de ce renoncement.

Par courrier recommandé du 3 novembre 2009 du conseil des époux [B] à maître [X], il est soutenu que les diagnostics techniques n'ont pas été remis à [M] [B] lors de la signature du 24 juillet, mais ont été présentés aux vendeurs, en même temps qu'ils signaient le 30 juillet 2009 (alors qu'en réalité il porte la date du 31 juillet), de sorte que l'avant contrat serait annulable, sinon susceptible de résolution à ce titre.

Dans un courrier recommandé en réponse adressé le 5 novembre 2009 aux époux [O] et à la sarl Arcadim, les époux [B] exposent d'une part, que le compromis porte improprement la date du 30 juillet 2009 ; d'autre part, qu'ils n'ont jamais reçu notification de l'avant contrat, ainsi que l'exigent les dispositions de la loi, et qu'ils n'ont conféré aucune délégation pour exercer leur droit personnel de rétractation. Ils en concluent que le délai n'ayant pas couru, ils mettent un terme définitif à ce projet et annulent en conséquence l'avant contrat souscrit.

Ils n'évoquent nullement la modification des termes de la vente avec ceux du compromis tirée de l'absence de souscription par les époux [O] d'une assurance dommages-ouvrage obligatoire pour les travaux réalisés dans l'immeuble.

La cour relève que le projet d'acte authentique rédigé par maître [X] a été en possession de maître [H], mandataire des acquéreurs, au plus tard le 14 octobre 2009, de sorte que, à la date du 3 novembre 2009, les époux [B] avaient parfaitement connaissance de l'absence de souscription par les époux [O] d'une assurance dommages-ouvrage, leur notaire, ayant spécifié ce point.

Ce n'est donc pas ce motif qui est à l'origine de la rétractation des consorts [B] car dans ce cas, leur conseil n'aurait pas manqué de faire valoir cet argument.

D'ailleurs, le projet d'acte authentique reprend l'indication de ce que, à défaut de souscription d'une assurance dommages-ouvrage, les vendeurs sont susceptibles de voir leur garantie recherchée par les acquéreurs en leur qualité de constructeurs d'ouvrage conformément aux dispositions de l'article 1792 du code civil.

A supposer que l'éventuelle modification invoquée ait pu constituer pour les acquéreurs une modification substantielle de la vente, motif dont ils ont fait mention pour la première fois dans le cadre de la procédure, et alors qu'ils étaient conseillés à l'époque de la transaction par deux professionnels du droit, un notaire et un cabinet d'avocat, ils n'ont pas exercé le droit de rétractation dans le délai de sept jours à compter du 14 octobre 2009, date à laquelle au plus tard, leur mandataire avait reçu le projet d'acte, de sorte qu'en l'exerçant le 3 novembre 2009, il ne peut produire d'effets.

Aucune preuve n'est rapportée d'une quelconque faute de la sarl Arcadim dans l'accomplissement de sa mission.

Le jugement déféré est réformé en ce qu'il a retenu la responsabilité de cette dernière et est entré en voie de condamnation à son égard.

3. sur l'appel incident :

Les époux [O] sont fondés à revendiquer à l'égard des consorts [B] l'application des dispositions contractuelles lesquelles prévoient une pénalité de 10 % en cas de non réitération de l'acte authentique, soit la somme de 75.000 euros.

L'acte du 31 juillet 2009 emporte la vente de l'immeuble sous condition suspensive de réalisation des formalités obligatoires en matière de purge des hypothèques, d'urbanisme et autres et hors faculté de rétractation conformément aux dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction.

S'agissant d'une pénalité pour le cas où l'une des parties ne réitèrerait pas l'acte authentique, elle constitue une clause pénale destinée à compenser le préjudice résultant de la non réalisation de la vente.

Dès lors, aux termes de l'article 1152 du code civil, les époux [O] ne peuvent prétendent à une peine plus forte ni moindre, laquelle n'apparaît ni excessive ni dérisoire, ni à l'octroi de dommages et intérêts complémentaires pour l'immobilisation du bien.

La cour condamne in solidum les époux [B] et les époux [B] [N] au paiement de la somme de 75.000 euros à titre de dommages et intérêts.

4. sur les mesures accessoires :

Les époux [B] et [M] [B], partie perdante, sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel et à payer aux époux [O] et à la sarl Arcadim, chacun, la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté l'exception de procédure,

Statuant à nouveau,

Condamne les époux [B] et leur fille à payer aux époux [O] la somme de :

soixante quinze mille euros (75.000,00 euros) à titre de dommages et intérêts,

trois mille euros (3.000,00 euros) au titre des frais irrépétibles,

Condamne les époux [B] et leur fille à payer à sarl Arcadim la somme de :

trois mille euros (3.000 euros) au titre des frais irrépétibles.

Condamne les époux [B] et leur fille aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier,Le Président,

Delphine VERHAEGHE.Maurice ZAVARO.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 13/04140
Date de la décision : 19/02/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°13/04140 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-19;13.04140 ?
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