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13/01/2014 | FRANCE | N°13/01761

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 13 janvier 2014, 13/01761


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 13/01/2014



***



N° de MINUTE : 12/2014

N° RG : 13/01761



Jugement (N° 08/00823)

rendu le 04 Juin 2010

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

Arrêt (N° 10/04548)

rendu le 05 Septembre 2011

par la Cour d'Appel de DOUAI

Arrêt (N° 1587)

rendu le 18 Décembre 2012

par la Cour de Cassation

REF : EM/VC





DEMANDEURS A LA DÉCLARATION DE SAISINE

APPELANTS

Monsieur [Z] [K]

né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

Madame [O] [B] épouse [K]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

Demeur...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 13/01/2014

***

N° de MINUTE : 12/2014

N° RG : 13/01761

Jugement (N° 08/00823)

rendu le 04 Juin 2010

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

Arrêt (N° 10/04548)

rendu le 05 Septembre 2011

par la Cour d'Appel de DOUAI

Arrêt (N° 1587)

rendu le 18 Décembre 2012

par la Cour de Cassation

REF : EM/VC

DEMANDEURS A LA DÉCLARATION DE SAISINE

APPELANTS

Monsieur [Z] [K]

né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

Madame [O] [B] épouse [K]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

Demeurant ensemble

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentés par Me Bernard FRANCHI, membre de la SCP FRANÇOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assistés de Me Patrice COTTIGNIES, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSES A LA DÉCLARATION DE SAISINE

INTIMÉES

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE [Localité 2]

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

déclaration d'appel signifiée le 17 juin 2013 à personne habilitée, n'ayant pas constitué avocat

SA CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE NORD

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Eric LAFORCE, membre de la SELARL ERIC LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Laurent HEYTE, avocat au barreau de LILLE, substitué à l'audience par Me Laurence DHERBOMEZ, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Evelyne MERFELD, Président de chambre

Fabienne BONNEMAISON, Conseiller

Vinciane DE JONGH, Vice Présidente placée à la première présidence, désignée pour siéger à la première chambre par ordonnance de Madame le Premier Président du 23 octobre 2013

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine VERHAEGHE

DÉBATS à l'audience publique du 18 Novembre 2013, après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Evelyne MERFELD, Président, et Delphine VERHAEGHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 6 novembre 2013

***

Par acte notarié du 2 octobre 1987 Monsieur [Z] [K] et son épouse, Madame [O] [B], ont acquis un immeuble à usage d'habitation situé à [Adresse 4] au prix de 130 000 F. Cette acquisition a été financée par un prêt de 300 000 F destiné en outre à l'exécution de travaux d'amélioration, consenti par le Crédit Immobilier de Lille (CIL) aux droits duquel se trouve le Crédit Immobilier de France Nord. Le prêt étant éligible de l'aide personnalisée au logement (APL), les époux [K] ont donné mandat au prêteur afin que cette aide lui soit directement versée.

Dans le cadre des opérations de réalisation des actifs de Monsieur [K], déclaré en liquidation judiciaire le 24 juillet 1990, l'immeuble a été vendu au prêteur par jugement d'adjudication du Tribunal de Grande Instance de Lille du 20 mai 1992 au prix de 75 000 F outre les frais.

Les époux [K] se sont maintenus dans les lieux et la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] a continué à verser l'APL au Crédit Immobilier.

Le 28 novembre 1995 le CIL a adressé à Monsieur [K] un courrier ainsi rédigé :

Nous faisons suite à notre entretien du 5 octobre 1994 lors de votre passage en nos bureaux.

La clôture de votre liquidation judiciaire nous permet de vous proposer le rachat du logement que nous avons été amenés à acquérir suite aux opérations de liquidation.

Nous vous proposons donc le plan de financement suivant :

prix de vente pour une signature en décembre 1996 :263 000,00 F

frais de notaire évalués à :32 000,00 F

solde des frais judiciaires occasionnés pour les

opérations de liquidation15 887,61 F

------------

Total310 887,61 F

En 2005 le Crédit Immobilier a remboursé à la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] la somme de 72 175,63 € correspondant à l'APL versée pour le compte de Monsieur [K] de juin 1992 à mars 2005.

Informés de ce remboursement les époux [K] ont fait assigner le 13 février 2006 le Crédit Immobilier devant le Tribunal de Grande Instance de Lille aux fins de voir constater qu'ils sont propriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] et voir ordonner aux parties de faire le compte entre elles sur la base du prix convenu au courrier du 28 novembre 1995, soutenant qu'en application de l'article 1583 du code civil la vente était parfaite dans la mesure où un accord était intervenu entre la banque et eux sur la chose et sur le prix.

Le 31 janvier 2008 ils ont assigné la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] afin que le jugement à intervenir lui soit déclaré opposable.

Le Crédit Immobilier a conclu au rejet de la demande des époux [K] soutenant qu'ils sont occupants sans droit ni titre et a sollicité leur condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation.

Par jugement du 4 juin 2010 le tribunal

- a donné acte à la FIRCIN de son changement de dénomination sociale au profit du Crédit Immobilier de France Nord,

- a débouté la Caisse d'Allocations Familiales de sa demande de nullité de l'assignation du 31 janvier 2008 et des conclusions du 4 juillet 2008,

- a débouté Monsieur [K] et Madame [B] épouse [K] de l'ensemble de leurs demandes,

- s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d'indemnité d'occupation du Crédit Immobilier de France Nord au profit du Tribunal d'Instance de Roubaix et renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

- a condamné in solidum les époux [K] à payer au Crédit Immobilier de France Nord la somme de 1 000 € et à la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- a débouté les parties de leurs autres demandes,

- a condamné in solidum les époux [K] aux dépens.

Les époux [K] ont relevé appel de ce jugement le 21 juin 2010.

Par arrêt du 5 septembre 2011 la Cour d'Appel de Douai a confirmé le jugement sauf sur l'incompétence pour connaître de la demande d'indemnité d'occupation et, statuant à nouveau de ce chef, a condamné les époux [K] à verser au Crédit Immobilier de France Nord une somme mensuelle de 500 € à compter du 6 novembre 2009 au titre de l'occupation sans droit ni titre.

Cet arrêt a été annulé en toutes ses dispositions par arrêt de la Cour de Cassation en date du 18 décembre 2012 et l'affaire a été renvoyée devant la Cour d'Appel de Douai autrement composée que les époux [K] ont saisie par déclaration du 26 mars 2013.

Ils demandent à la Cour d'infirmer le jugement et de :

- condamner la Caisse d'Allocations Familiales à rembourser au Crédit Immobilier du Nord la somme de 72 175,63 €,

- dire opposable à la Caisse d'Allocations Familiales la décision qui sera rendue dans le litige les opposant au Crédit Immobilier du Nord,

- constater, dire et juger qu'ils sont propriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4]

- dire que la décision à intervenir vaudra titre de propriété à leur profit,

- ordonner la publication de la décision au bureau des hypothèques,

- ordonner aux parties de faire le compte entre elles sur la base du prix convenu au courrier du Crédit Immobilier du 28 novembre 1995,

- ordonner qu'il en soit référé au tribunal en cas de difficulté,

- condamner le Crédit Immobilier de France Nord aux dépens et à leur verser la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire ils sollicitent la condamnation du Crédit Immobilier de France Nord à leur verser la somme de 72 215,63 € à titre de dommages et intérêts. Ils concluent à la confirmation du jugement sur l'incompétence pour connaître de la demande au titre de l'indemnité d'occupation ou subsidiairement au rejet de cette demande.

Ils invoquent les dispositions de l'article 1583 du code civil et soutiennent qu'ils apportent la preuve d'un accord sur la chose et sur le prix résultant d'une part de la proposition du CIL du 28 novembre 1995 et d'autre part de leurs paiements, de la poursuite des règlements de la Caisse d'Allocations Familiales et de leur occupation constante des lieux sans qu'à aucun moment le CIL ne les ait considérés comme occupants sans droit ni titre.

Ils font valoir :

- que le montant du prix de vente proposé dans le courrier du 28 novembre 1995 correspond à 2,85 F près au montant du capital restant dû sur le prêt qui leur a été octroyé lors de l'acquisition de l'immeuble le 2 octobre 1987,

- qu'il leur était clairement proposé de reprendre purement et simplement la poursuite du prêt initial,

- qu'il résulte des termes de l'arrêt de la Cour de Cassation que les dispositions de l'article 1583 du code civil doivent être appliquées, que c'est précisément l'argumentation qu'ils avaient développée,

- qu'ils ont non seulement répondu à la proposition de vente mais ont, de surcroît, exécuté les termes de la proposition du Crédit Immobilier en continuant à honorer le prêt dans les conditions nouvelles,

- que c'est à tort que le tribunal a considéré que la proposition du CIL était subordonnée à la réalisation d'un acte de vente en décembre 1996 alors qu'il ne s'agissait à l'évidence que de fixer le prix de vente pour une signature en décembre 1996, que le Crédit Immobilier est un professionnel auquel ils faisaient confiance, en attendant qu'il les convoque chez le notaire pour réaliser la vente,

- que le Crédit Immobilier a admis qu'aucun incident de paiement n'a jamais été enregistré,

- que leurs paiements ont commencé en juillet 1992, époque à laquelle Monsieur [K] était encore en liquidation judiciaire et ainsi pourrait-on considérer que la vente avait déjà pris effet à cette date tandis que le CIL attendait la clôture de la liquidation judiciaire pour formuler une proposition par écrit, qu'en réalité dès l'adjudication de mai 1992 la proposition d'une nouvelle vente était envisagée et concrétisée par leur premier paiement du 7 juillet 1992,

- qu'ils versent aux débats de multiples reçus signés par le CIL ainsi que des mandats démontrant l'existence des paiements directs auxquels ils ont procédé,

- que la lettre du 25 novembre 1995 exprime les raisons pour lesquelles cette proposition n'a été formulée qu'à cette date : il fallait attendre la clôture des opérations de liquidation judiciaire, qu'il leur avait été proposé de conserver la jouissance de l'immeuble jusqu'à ce qu'une vente puisse être authentifiée, en contrepartie des versements qu'ils continuaient à honorer ; qu'il ne s'agit manifestement pas d'une simple tolérance ; que le CIL n'a jamais menacé d'engager une quelconque mesure d'expulsion ni proposé la régularisation d'un bail,

- que la raison du revirement du Crédit Immobilier apparaît dans la lettre qu'il a adressée à la Caisse d'Allocations Familiales le 18 janvier 2005 où il expose que son employé Monsieur [V] à l'origine des propositions de vente était décédé et qu'une proposition de rachat de l'immeuble avait été faite par la SEM.

Sur leur demande indemnitaire subsidiaire formée à l'égard du Crédit Immobilier de France Nord ils invoquent la faute commise par la banque qui a continué à percevoir l'APL qu'elle a considérée à posteriori comme un indu et n'a pas cru devoir invoquer la prescription biennale de l'article L 835-3 du code de la sécurité sociale qui était pourtant acquise. Ils ajoutent que les paiements de la Caisse d'Allocations Familiales ont été réalisés à leur profit et non au profit du CIL et qu'ainsi se pose la question de savoir comment et pourquoi le CIL a pu rembourser directement la Caisse d'Allocations Familiales sans qu'ils en aient été informés.

Sur la demande en paiement de l'indemnité d'occupation ils soutiennent que cette prétention relève de la compétence du Tribunal d'Instance et subsidiairement font valoir que le Crédit Immobilier ne peut se prévaloir de sa propre faute d'autant plus qu'ils auraient également pu bénéficier d'une allocation de la Caisse d'Allocations Familiales en qualité de locataires si le CIL n'avait pas considéré que leur occupation ne résultait pas d'une vente.

Le Crédit Immobilier de France Nord, SA, a conclu à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a déclaré le Tribunal de Grande Instance incompétent pour statuer sur sa demande d'indemnité d'occupation. Par voie d'appel incident il soutient que l'exception d'incompétence doit être rejetée et demande que les époux [K] soient condamnés solidairement à lui verser une indemnité d'occupation de 500 € par mois à compter de mai 1997 sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

Subsidiairement pour le cas où il serait jugé qu'il a remboursé à tort à la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] la somme de 72 175,63 € il demande que la Caisse d'Allocations Familiales soit condamnée à lui restituer ladite somme.

Pour le cas où les époux [K] seraient jugés propriétaires de l'immeuble il demande leur condamnation au paiement du prix et des frais, soit la somme de 47 394,51 € avec intérêts au taux légal à compter de décembre 1996 et capitalisation.

Il se porte demandeur d'une somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient :

- qu'après la vente sur adjudication les époux [K] se sont maintenus dans les lieux et après la clôture de la procédure collective ont émis le souhait de racheter l'immeuble, qu'il leur a donc proposé, par courrier du 28 novembre 1995, de leur vendre le bien au prix de 263 000 F outre les frais de notaire et les frais d'adjudication, soit 310 887,61 F (47 394,51 €) au total,

- qu'aucune réponse même verbale, n'a été apportée par les époux [K] qui ont continué à occuper l'immeuble,

- qu'aucun acte de vente transférant à nouveau la propriété de l'immeuble aux époux [K] n'est intervenu après l'envoi du courrier du 28 novembre 1995 ; que si le consentement des parties n'est soumis à aucune condition de forme il incombe néanmoins à celui qui invoque les dispositions de l'article 1583 du code civil, de prouver l'échange des consentements et l'accord des volontés,

- que la Cour de Cassation reconnaît implicitement l'absence de réponse des époux [K] à sa proposition puisqu'elle indique qu'il convenait de rechercher si le rachat de l'immeuble n'avait pas été proposé aux époux [K] dès le mois de mai 1992,

- que les époux [K] n'ont jamais prétendu que des pourparlers pour une revente auraient existé dès cette époque, qu'il ne pouvait, dès le mois de mai 1992, proposer la revente alors que le jugement d'adjudication n'est intervenu que le 20 mai 1992,

- que les époux [K] qui prétendent qu'ils ont honoré le remboursement du prêt dans les conditions nouvelles qui leur avaient été proposées n'apportent aucune preuve de cette affirmation, qu'aucun nouveau plan de financement n'a été élaboré, ni nouveau tableau d'amortissement, que les époux [K] n'ont jamais effectué la moindre démarche pour concrétiser ce qui n'était qu'un projet de vente,

- que la somme de 1 500 F par mois versée par les époux [K] représente le montant de l'indemnité due par eux pour l'occupation des lieux ainsi que cela ressort des termes de ses courriers des 14 octobre 1993 et 28 septembre 1994, que cette indemnité a été réglée dès juillet 1992, c'est-à-dire juste après le jugement d'adjudication du 20 mai 1992, que les époux [K] ne peuvent donc aujourd'hui prétendre que la vente aurait été envisagée dès l'adjudication de mai 1992 et concrétisée par leur premier paiement de juillet 1992, que si tel avait été le cas les époux [K] n'auraient pas manqué de le rappeler devant le tribunal, ce qu'ils n'ont pas fait,

- que les époux [K] ne peuvent prétendre que l'accord résulterait du fait qu'elle a continué à percevoir les APL versées par la Caisse d'Allocations Familiales qui n'avait pas été informée du jugement d'adjudication ; que Madame [K] restait redevable du remboursement du prêt contracté pour l'acquisition de l'immeuble et qu'il n'est donc pas anormal qu'il ait continué à percevoir des règlements postérieurement au jugement d'adjudication ; qu'en aucun cas ces règlements ne peuvent être considérés comme venant en paiement du prix d'une vente qui n'est jamais intervenue faute d'accord sur la chose et sur le prix.

Sur la demande indemnitaire des époux [K] il soutient qu'il n'a commis aucune faute en remboursant à la Caisse d'Allocations Familiales des allocations que celle-ci n'aurait pas versées si elle avait eu connaissance du jugement d'adjudication.

La Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] n'a pas constitué avocat. Elle a été assignée le 17 juin 2013 par les époux [K] par acte remis à personne habilitée, contenant signification de leurs conclusions. Elle a été réassignée selon les mêmes modalités le 5 septembre 2013 par le Crédit Immobilier de France Nord qui lui a dénoncé ses conclusions.

Conformément à l'article 634 du code de procédure civile la Caisse d'Allocations Familiales est réputée s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elle avait soumis à la Cour avant l'arrêt de cassation. Il convient donc de se référer à ses conclusions du 8 mars 2011 par lesquelles elle demandait à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux [K] de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre elle,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le Crédit Immobilier de France Nord de sa demande à son encontre,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les époux [K] aux dépens et à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

y ajoutant,

- condamner Monsieur et Madame [K] aux dépens d'appel et à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Elle soutient que l'APL des mois de juin 1992 à mars 2005 qui couvrait l'intégralité de la mensualité due par les époux [K] au titre du prêt conventionné était indue puisque les époux [K] n'étaient plus propriétaires de l'habitation à la suite du jugement d'adjudication, que le Crédit Immobilier devait donc restituer ces prestations et qu'elle ne peut être condamnée à rembourser une quelconque somme à ce titre.

Elle ajoute que les époux [K] ne justifient d'aucun accord concernant la vente de l'immeuble et qu'au surplus la proposition du CIL était subordonnée à la réalisation d'un acte en décembre 1996.

SUR CE :

Attendu que le jugement n'est pas remis en cause en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation du 31 janvier 2008 et des conclusions du Crédit Immobilier du 4 juillet 2008 ;

1°) - Sur la propriété de l'immeuble sis [Adresse 4]

Attendu que selon l'article 1583 du code civil la vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ;

Attendu que par lettre du 28 novembre 1995 le CIL a proposé à Monsieur [K] de racheter l'immeuble au prix de 263 000 F en principal, frais de notaire et frais judiciaires occasionnés par les opérations de liquidation en sus, soit 310 887,61 F au total ;

Que c'est à tort que le tribunal a considéré que cette proposition était subordonnée à la réalisation d'un acte de vente en décembre 1996 ; que l'expression 'prix de vente pour une signature en décembre 1996 : 263 000 F a été employée par le CIL pour fixer le prix de vente et ne doit pas s'entendre de l'énoncé d'une condition suspensive ;

Attendu que si le consentement des parties n'est soumis à aucune condition de forme il incombe néanmoins à celui qui invoque les dispositions de l'article 1583 du code civil de prouver l'échange des consentements ; qu'une proposition de vente ne vaut vente qu'à partir du moment où elle est acceptée par celui qui la reçoit ;

Attendu que les époux [K] sur qui pèse la charge de la preuve d'un accord sur la chose et sur le prix ne justifient d'aucune réponse à la suite du courrier du 28 novembre 1995 afin de faire part de leur acceptation pour l'acquisition de l'immeuble au prix proposé par le CIL ;

Qu'ils affirment avoir manifesté leur accord en continuant à honorer le remboursement du prêt dans les nouvelles conditions mais ne démontrent pas avoir reçu du CIL un nouveau plan de financement ou un nouveau tableau d'amortissement ;

Attendu que, faisant état de versements effectués dès juillet 1992 ils soutiennent que la vente avait déjà pris effet à cette date et même dès l'adjudication de mai 1992 ; que cependant ils ne justifient pas qu'à cette date le prix de vente était déjà déterminé ;

Qu'ils produisent certes des reçus et mandats démontrant avoir effectué des versements mensuels de 1 500 F puis 2 000 F au CIL de juillet 1992 à avril 1997 ; que toutefois rien ne permet d'affecter ces versements au règlement du prix de vente de l'immeuble ; que le Crédit Immobilier prétend qu'il s'agit du règlement de l'indemnité d'occupation qui a été demandée aux époux [K] après l'adjudication et produit deux copies de courriers adressés les 14 octobre 1993 et 28 septembre 1994 par son chef de service à Monsieur [K] lui confirmant qu'il verse au CIL une indemnité d'occupation de 1 500 F au titre de la jouissance des lieux depuis que l'immeuble a été adjugé ; que les époux [K] n'ont formulé aucune observation sur ces deux lettres et ont laissé sans réponse les affirmations du Crédit Immobilier sur le paiement d'une indemnité d'occupation ;

Attendu qu'aucune preuve d'un échange de consentement concrétisant une vente ne peut résulter de la poursuite de l'encaissement par le Crédit Immobilier de l'APL servie, pour le compte des époux [K], par la Caisse d'Allocations Familiales qui n'avait pas été informée du jugement d'adjudication ;

Que c'est aux époux [K] qu'il appartenait d'aviser l'organisme social de l'événement leur ayant fait perdre leur qualité de propriétaires et donc leurs droits à l'APL ; qu'ils ne sauraient tirer argument de leur carence et de la poursuite des encaissements par le Crédit Immobilier alors que ces encaissements résultent manifestement d'une erreur de la banque dans la mesure où, malgré le jugement d'adjudication, elle restait créancière de Madame [K] pour le remboursement du prêt consenti en 1987, au titre duquel la Caisse d'Allocations Familiales réglait l'APL ;

Attendu que rien dans les termes du courrier que le Crédit Immobilier de France Nord a adressé à la Caisse d'Allocations Familiales le 18 janvier 2005 ne peut être analysé comme valant reconnaissance par le Crédit Immobilier du droit de propriété revendiqué par les époux [K] ; qu'au contraire le Crédit Immobilier explique dans cette lettre que l'immeuble lui a été vendu sur adjudication ; que le prêt 'toujours en amortissement et à jour d'échéance' dont il est fait référence dans cette lettre est celui consenti en 1987 lors de l'acquisition de l'immeuble par les époux [K] et non un nouveau prêt qui leur aurait été accordé pour leur permettre de racheter l'immeuble après adjudication ;

Attendu qu'il résulte de l'analyse qui précède que les époux [K] n'apportent pas la preuve d'un accord intervenu entre les parties pour la revente de l'immeuble à leur profit après le jugement d'adjudication ; qu'il convient de confirmer le jugement qui les a déboutés de leur demande à ce titre ;

2°) - Sur la demande indemnitaire des époux [K] à l'égard du Crédit Immobilier de France Nord

Attendu que les époux [K] ayant perdu leur qualité de propriétaires par l'effet du jugement d'adjudication, ils ne pouvaient continuer à percevoir l'APL ; que le Crédit Immobilier de France Nord n'a commis aucune faute en restituant à la Caisse d'Allocations Familiales la somme de 72 215,63 €, montant des allocations qu'il a indûment perçues pour le compte des époux [K] de juin 1992 à mars 2005 ;

Attendu que de même les époux [K] ne peuvent lui reprocher de ne pas avoir opposé à la Caisse d'Allocations Familiales le bénéfice de la prescription biennale de l'article L 835-3 du code de la sécurité sociale ; que ce texte énonce en son second alinéa que la prescription biennale est applicable à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement de la prestation indûment payée, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration ;

Que le règlement des allocations est fondé sur un système déclaratif ; qu'il incombe à l'allocataire d'informer la Caisse d'Allocations Familiales du changement de situation modifiant ses droits ; que les époux [K] qui ne pouvaient ignorer qu'ils n'étaient plus propriétaires de l'immeuble après l'adjudication n'ont pas déclaré à la Caisse d'Allocations Familiales ce changement de situation ; que dès lors les versements de la Caisse d'Allocations Familiales se sont poursuivis en raison d'une fausse déclaration sur la situation de l'allocataire ; qu'en conséquence la prescription biennale de l'article L 835-3 du code de la sécurité sociale n'est pas applicable et le Crédit Immobilier n'a donc commis aucune faute pour ne pas l'avoir soulevée ;

Attendu que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les époux [K] de leur demande indemnitaire à l'égard du Crédit Immobilier de France Nord ;

3°) - Sur la demande au titre de l'indemnité d'occupation

a) - sur la compétence

Attendu que le Crédit Immobilier présente à l'égard des époux [K] une demande d'indemnité d'occupation à compter de mai 1997 ;

Attendu que le tribunal s'est déclaré incompétent pour en connaître au motif qu'en vertu de l'article R 221-38 du code de l'organisation judiciaire cette demande relève de la compétence exclusive du Tribunal d'Instance ;

Mais attendu que cet article n'attribue compétence au Tribunal d'Instance que dans la mesure où la demande est fondée sur un contrat de louage d'immeuble ou un contrat portant sur l'occupation d'un logement ;

Que la demande du Crédit Immobilier n'est pas fondée sur un contrat mais sur l'enrichissement sans cause en application de l'article 1371 du code civil ; que le Tribunal de Grande Instance était donc compétent pour en connaître ; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement de ce chef et, par application de l'article 79 alinéa 1 du code de procédure civile, de statuer sur le fond ;

b) - sur le fond

Attendu que le Crédit Immobilier fait valoir que la circonstance qu'il ait laissé les époux [K] dans les lieux postérieurement au jugement d'adjudication n'impliquait pas pour autant qu'il avait donné son accord pour une occupation gratuite et rappelle que les époux [K] lui ont versé une indemnité d'occupation de juillet 1992 à avril 1997 ; qu'il s'estime fondé à demander une indemnité d'occupation pour la période postérieure au titre de l'enrichissement sans cause ;

Mais attendu que le Crédit Immobilier n'apporte pas la preuve d'un enrichissement des époux [K] qui, si un contrat de bail avait été conclu, auraient pu percevoir l'allocation logement ainsi qu'ils le soutiennent à juste titre dans leurs conclusions ; qu'il convient de débouter le Crédit Immobilier de sa demande ;

***

Attendu que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les époux [K] à verser, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 000 € au Crédit Immobilier de France Nord et la somme de 1 000 € à la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] ;

Qu'ils seront en outre condamnés à verser au Crédit Immobilier une somme de 2 000 € pour ses frais irrépétibles d'appel ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la Caisse d'Allocations Familiales les frais irrépétibles qu'elle a exposés devant la Cour dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l'arrêt du 5 septembre 2011, objet de la cassation ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant contradictoirement,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a accueilli l'exception d'incompétence pour connaître de la demande d'indemnité d'occupation présentée par le Crédit Immobilier de France Nord,

L'infirme de ce chef et statuant à nouveau,

Dit que le Tribunal de Grande Instance de Lille était compétent pour connaître de cette demande,

Statuant au fond par application de l'article 79 alinéa 1 du code de procédure civile,

Déboute le Crédit Immobilier de France Nord de sa demande d'indemnité d'occupation,

Condamne in solidum Monsieur [Z] [K] et Madame [O] [B] épouse [K] aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de Maître LAFORCE, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Les condamne in solidum à verser au Crédit Immobilier de France Nord une somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Déboute la Caisse d'Allocations Familiales de [Localité 2] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Le Greffier,Le Président,

D. VERHAEGHEE. MERFELD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 13/01761
Date de la décision : 13/01/2014

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°13/01761 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-13;13.01761 ?
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