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29/11/2010 | FRANCE | N°09/07621

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 29 novembre 2010, 09/07621


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 29/11/2010



***



N° de MINUTE :

N° RG : 09/07621



Jugement (N° 08/02304)

rendu le 29 Septembre 2009

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER



REF : BM/AMD





APPELANT



Monsieur [I] [L]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] ([Localité 4])

demeurant '[Adresse 9]

[Localité 5]



Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la

Cour

Assisté de Maître François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER





INTIMÉS



Monsieur Bernard [V]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 8]



Madam...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 29/11/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 09/07621

Jugement (N° 08/02304)

rendu le 29 Septembre 2009

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : BM/AMD

APPELANT

Monsieur [I] [L]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] ([Localité 4])

demeurant '[Adresse 9]

[Localité 5]

Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assisté de Maître François DEROUET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

INTIMÉS

Monsieur Bernard [V]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 8]

Madame [N] [U]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 8]

Représentés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

Assistés de Maître Christophe DESURMONT, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 21 Octobre 2010 tenue par Bernard MERICQ magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bernard MERICQ, Président de chambre

Pascale METTEAU, Conseiller

Joëlle DOAT, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bernard MERICQ, Président et Nicole HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 20 septembre 2010

***

LA COUR,

FAITS ET PROCÉDURE :

1. Selon acte sous seing privé en date des 2 et 5 août 2007, il a été convenu de la vente par Bernard [V] et son épouse, née [N] [U], à [I] [L] d'une maison à usage d'habitation sise [Adresse 6] (62), moyennant prix principal de 650 000,00 €, commission d'agence en sus (sachant que l'opération a été passée par l'intermédiaire de deux agences immobilières, l'agence Ravin ayant reçu mandat des vendeurs et l'agence Pare ayant reçu mandat de l'acquéreur) ; l'acte comportait une condition suspensive relative au financement par prêt bancaire à obtenir par [I] [L] à hauteur de 649 000,00 € ou 650 000,00 € ; il comportait en outre la stipulation d'une clause pénale de 65 000,00 € au cas où un partie refuserait de réitérer la vente par acte authentique, cette formalité étant prévue comme devant avoir lieu au plus tard le 30 octobre 2007 par les soins de Maître [M] [W], notaire associé à [Localité 8].

Une somme de 35 000,00 € a été consignée par [I] [L] entre les mains de l'agence Ravin.

En définitive, [I] [L], invoquant la non obtention du prêt bancaire qu'il avait sollicité, a refusé, selon courrier du 2 novembre 2007, de réitérer l'opération.

2. Saisi par les époux [G], qui sollicitaient le paiement de la clause pénale et de dommages-intérêts complémentaires en ce qu'[I] [L] devait être considéré comme responsable de la défaillance apparente de la condition suspensive, le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-mer a pour l'essentiel, selon jugement rendu le 29 septembre 2009 auquel il est entièrement fait référence pour l'exposé des données de base du procès et des prétentions et moyens respectifs des parties :

- débouté [I] [L] de son moyen de nullité affectant l'acte de vente,

- dit réputée accomplie la condition suspensive d'octroi d'un prêt et constaté la défaillance d'[I] [L],

- condamné [I] [L] à payer aux époux [G] la somme en principal de 65 000,00 €, outre indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens du procès.

3. [I] [L] a relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS ACTUELS DES PARTIES :

1. [I] [L], par ses dernières conclusions à fins d'infirmation, reprend et précise ses moyens de défense de première instance pour faire valoir que :

* l'exemplaire en original du 'compromis' qu'il a en sa possession ne comporte pas en dernière page la signature d'un des deux époux [G] : il en tire la conséquence qu'aucun contrat valide et parfait, dont pourraient aujourd'hui se prévaloir les époux [G], n'a été passé,

* il s'est vu refuser un prêt par la banque Crédit agricole dûment consultée, ce qui a entraîné la caducité de l'opération sans faute de sa part,

* il conteste l'application revendiquée de la clause pénale de même que le préjudice prétendu.

Il sollicite en conséquence le rejet des demandes formées contre lui et la restitution de la somme consignée de 35 000,00 €.

2. Les époux [G] sollicitent la confirmation du jugement déféré, appel incident étant seulement formé pour obtenir indemnisation complémentaire de leur préjudice moral.

Ils contestent la prétendue nullité de l'acte d'août 2007 (en toute hypothèse ratifié par les deux époux, et alors que seul l'époux 'spolié' pourrait éventuellement agir en nullité) et soutiennent qu'[I] [L], par sa carence à rechercher utilement et loyalement les prêts nécessaires à l'acquisition en jeu, a empêché la réalisation de la vente en sorte que la condition suspensive doit être réputée accomplie en application de l'article 1178 du code civil et que le défaut de réitération doit entraîner le paiement de la clause pénale ou, subsidiairement, l'indemnisation du préjudice subi.

3. L'exposé et l'analyse plus amples des moyens et des prétentions des parties seront effectués à l'occasion de la réponse qui sera apportée à leurs écritures opérantes.

* * *

DISCUSSION :

1. L'acte sous seing privé de vente qui a été passé entre les époux [G] et [I] [L] a été signé par [I] [L] le 2 août 2007 en page finale 12, avec la mention manuscrite 'lu et approuvé' ; [I] [L] a en outre apposé son paraphe 'YT' sur toutes les pages de l'acte, y compris cette page 12 et y compris les annexes.

À consulter l'exemplaire produit en original par [I] [L] à son dossier, il se comprend que l'acte a été soumis à la signature des vendeurs le 5 août 2007 ; le document comporte sur toutes ses pages, y compris la page finale 12 et les annexes, un

paraphe apposé par chacun des époux [G], à savoir 'BV' pour Bernard [V] et 'BW' pour [N] [U] épouse Bernard [V] ; il comporte en page finale 12 la signature de [N] [U] épouse Bernard [V], avec la mention manuscrite 'lu et approuvé' ; il ne comporte pas la signature de Bernard [V].

[I] [L] tire de cette anomalie, au visa de l'article 1316-4 du code civil, la conséquence que l'acte n'est pas parfait.

Cependant, il se constate que :

* le document est rédigé, quant à l'identité des vendeurs, au nom de Bernard [V] et de [N] [G],

* il comporte sur toutes ses pages, y compris la page finale 12 et y compris les annexes, le paraphe de chacun des époux [G], et ce quel que soit l'exemplaire consulté, notamment celui en mains d'[I] [L].

Dans cette situation, il doit être dit que la vente en cause n'a pas été passée par un seul des époux qui aurait outrepassé ses pouvoirs sur les biens immobiliers communs (au sens de l'article 1424 du code civil) : elle a au contraire été passée par les deux époux agissant ensemble ; spécialement, il ne peut être envisagé que Bernard [V] aurait été tenu dans l'ignorance de l'opération ni qu'il n'y aurait pas acquiescé.

Il peut être ajouté que le document présenté au dossier d'[I] [L] répond, en matière de preuve littérale, aux exigences de l'article 1316 du code civil.

Aussi les époux [G] étaient-ils pleinement tenus par cet acte ... tout autant qu'[I] [L] qui n'invoque en ce qui le concerne aucune anomalie.

Il s'en déduit que, contrairement à ce que soutient [I] [L], l'acte des 2 et 5 août 2007 est parfait pour toutes les parties (les vendeurs et l'acquéreur) et doit recevoir application.

2. En présence d'une condition suspensive de financement, il appartient à l'acquéreur au bénéfice duquel cette condition a été stipulée d'apporter la preuve de ce qu'il a effectivement demandé un financement conforme aux prévisions de l'acte de vente.

Or [I] [L] n'apporte sur ce point aucun élément, en ce qu'il ne communique pas le dossier qu'il a nécessairement établi à destination de l'organisme bancaire qu'il entendait solliciter.

Ainsi ne produit-il qu'une lettre rédigée le 9 août 2007 par la banque Crédit agricole, attestant que le dossier de financement est en cours d'instruction, puis une lettre rédigée le 26 octobre 2007 par le même organisme, refusant de donner une suite favorable au dossier.

Plusieurs autres éléments soumis à l'examen de la cour convainquent de ce qu'[I] [L] a demandé à la banque Crédit agricole un financement supérieur au chiffre de 649 000,00 € ou 650 000,00 € convenu en août 2007 :

+ les deux courriers Crédit agricole relatés supra portent en référence la mention 'Opération promotion immobilière' concernant l'immeuble de la [Adresse 6], ce qui révèle qu'[I] [L] a soumis à cette banque un dossier représentant un coût global bien plus important que celui du seul achat de la maison, alors que lui-même ne donne aucune indication du prêt qu'il a sollicité,

+ plusieurs courriels échangés entre les agences immobilières et le notaire font état de travaux envisagés par [I] [L] : ainsi un courriel de l'agence Pare édité le 14 septembre 2007 relate qu'[I] [L] a visité les lieux 'accompagné de son banquier et de son architecte' et que 'son prêt porte sur le montant de l'acquisition majoré du coût des travaux qu'il envisage de faire dans la maison', s'agissant de travaux importants pour lesquels 'il lui faut un permis de construire'.

3. La carence d'[I] [L], dans le cadre du présent procès, pour démontrer l'ampleur du prêt qu'il a sollicité auprès du Crédit agricole et les éléments annexes analysés supra (par. 2) conduisent la cour à retenir, à l'instar du premier juge, qu'[I] [L] ne prouve pas - ainsi que la charge lui en incombe - qu'il a bien sollicité, avec diligence et dans le délai convenu, un (ou des) prêt(s) conforme(s) aux caractéristiques définies à l'acte du 2 et 5 août 2007.

4. Il y a lieu, en conséquence de cette carence, de :

° dire que la condition suspensive est réputée accomplie par application de l'article 1178 du code civil,

° constater que l'acquéreur a délibérément refusé de réitérer la vente, pourtant parfaite.

5. Le 'compromis' des 2 et 5 août 2007 contient, au paragraphe 'acte authentique', une mention de clause pénale ainsi rédigée :

'Dans le cas où l'une des parties viendrait à refuser de signer l'acte authentique, elle y sera contrainte par tous les moyens et voies de droit (...) et devra, en outre, payer à l'autre partie, à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale pour le retard dans l'exécution, la somme de DIX POUR CENT DU PRIX NET VENDEUR'.

[I] [L], en ce qu'il est responsable de la défaillance de la condition suspensive et que celle-ci est réputée accomplie, est considéré comme ayant à tort refusé de réitérer l'opération.

Ainsi les conditions d'application de la clause pénale de 10 % sont-elles réunies.

Aucun élément du dossier -alors qu'[I] [L], opérateur immobilier, a cherché à réaliser une opération complexe de promotion bien qu'il ne fût, dans sa relation contractuelle avec les époux [G], lié que par une opération d'acquisition- ne permet de considérer que l'application de la clause pénale serait susceptible d'entraîner pour [I] [L] des conséquences manifestement excessives.

6. Les éléments de la cause ne caractérisent pas de préjudice moral complémentaire qu'auraient subi les époux [G] et qui ne serait pas réparé par l'application de la clause pénale.

Il n'est pas demandé par les époux [G] de statuer sur les fonds consignés ; en tout cas, [I] [L] ne peut obtenir la restitution qu'il revendique.

* * *

PAR CES MOTIFS :

- confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

ET, Y AJOUTANT :

- condamne [I] [L] à payer aux époux [G] la somme de 3 000,00 € (trois mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour l'instance d'appel ;

- rejette toutes autres prétentions plus amples ou contraires ;

- condamne [I] [L] aux dépens de l'instance d'appel, avec faculté de recouvrement direct en application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Deleforge-Franchi, avoués.

Le Greffier,Le Président,

Nicole HERMANT.Bernard MERICQ.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 09/07621
Date de la décision : 29/11/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°09/07621 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-29;09.07621 ?
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