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06/09/2010 | FRANCE | N°09/00082

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 06 septembre 2010, 09/00082


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 06/09/2010



***



N° de MINUTE :



N° RG : 09/00082

Jugement (N° 06/4687) rendu le 23 Octobre 2008

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : MM/VR





APPELANT



Monsieur [M] [W]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 16]

demeurant [Adresse 5]

[Localité 15]



représenté par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour

assisté de Maître Marc MICHEL, avo

cat au barreau de LILLE





INTIMÉE



Madame [D] [J]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 10]

demeurant [Adresse 6]

[Localité 8]



représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour

assisté...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 06/09/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 09/00082

Jugement (N° 06/4687) rendu le 23 Octobre 2008

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : MM/VR

APPELANT

Monsieur [M] [W]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 16]

demeurant [Adresse 5]

[Localité 15]

représenté par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour

assisté de Maître Marc MICHEL, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

Madame [D] [J]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 10]

demeurant [Adresse 6]

[Localité 8]

représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour

assistée de Maître Abderrazek KHELFAT, avocat au barreau de SAINT QUENTIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Evelyne MERFELD, Président de chambre

Monique MARCHAND, Conseiller

Joëlle DOAT, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT

DÉBATS à l'audience publique du 17 Mai 2010 après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président, et Nicole HERMANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 05 Janvier 2010

***

Monsieur [M] [W] et Madame [D] [J] se sont mariés le [Date mariage 7] 1973. Ils avaient fait précéder leur union d'un contrat de mariage par lequel ils adoptaient le régime de la communauté d'acquêts.

Ledit contrat comportait en son article huit la clause suivante :

« Réserve de cabinet médical

Le futur époux se réserve propre tout cabinet de médecin, toute clinique, dont il pourrait devenir titulaire pendant le mariage, en conséquence, si lors de la dissolution de la communauté le futur époux est encore médecin, lui ou ses héritiers et représentants exerceront la reprise du cabinet médical, de la clinique ou de toutes parts de sociétés ou d'associations professionnelles quelle qu'en soit la forme par laquelle serait assuré l'exercice de sa profession médicale et les meubles, objets mobiliers, appareils, instruments, bibliothèque, qui se trouveront dans le cabinet médical sans limitation ni prisée, à charge seulement d'indemniser la communauté des sommes qu'elle aurait déboursées à ce sujet.

Si au contraire, le futur époux a cédé son cabinet ou sa clinique, pendant le cours de la communauté, la reprise à en exercer sera du prix moyennant lequel cette cession aura eu lieu sous déduction des sommes déboursées par la communauté. »

Le 17 juillet 1990, Monsieur [M] [W] a fait assigner Madame [D] [J] en divorce.

Par arrêt en date du 13 avril 2003, la cour a prononcé le divorce des époux, ordonné les opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre eux et commis pour y procéder le Président de la Chambre Départementale des Notaires du Nord ou son délégataire.

Par arrêt du 11 janvier 2005, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par Madame [D] [J] à l'encontre cette décision.

Les ex-époux n'ayant pu s'accorder sur les modalités de la liquidation de leur régime matrimonial, Maître [H] [Y], notaire associé à [Localité 16], a dressé le 19 février 2007 un procès-verbal de difficultés relatant les divers points les opposant.

Par exploits d'huissier des 18 avril 2006 et 30 avril 2007, Madame [D] [J] a fait assigner Monsieur [M] [W] devant le tribunal de grande instance de Lille en afin d'obtenir la désignation d'un expert.

Par jugement du 23 octobre 2008, le tribunal de grande instance de Lille a :

- homologué le projet liquidatif de Maître [H] [Y] sur les points non contestés par les parties ;

- dit que Maître [H] [Y] sera désormais remplacé par Maître [S], notaire à [Localité 14] ;

- constaté que les parties ne formulent plus aucune demande relativement à l'immeuble commun ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à obtenir une réévaluation de la valeur des meubles meublants ayant garni l'immeuble commun ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à obtenir que soit intégré à l'actif de communauté un cabinet d'exercice libéral de la médecine et de la profession d'infirmière ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à obtenir que soit intégrées à l'actif de communauté des parts d'une société gérant un tennis club ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande de révocation des donations fondée sur l'ancien article 267-1 du code civil ;

- dit que Monsieur [M] [W] doit à l'indivision une indemnité d'occupation d'un montant de 416 000 € ;

- dit que les parts et actions que Monsieur [M] [W] détient dans les sociétés anonymes et les sociétés civiles et immobilières servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13] lui appartiennent en propre ;

- débouté en conséquence Madame [D] [J] de sa demande d'attribution préférentielle en nature desdites parts et actions ;

- débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à ce que soient intégrés à l'actif de l'indivision les revenus produits par les biens professionnels de Monsieur [M] [W] depuis 1990 ;

- dit que Monsieur [M] [W] doit récompense à la communauté des sommes par elle avancées pour l'acquisition des parts et actions qu'il détient dans les sociétés anonymes et les sociétés civiles immobilières servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13] ;

- dit que ces parts et actions doivent être évaluées selon la règle du profit subsistant telle qu'exposée à l'article 1469 alinéa 3 du code civil ;

avant dire droit sur le montant de la récompense,

- ordonné une mesure d'expertise comptable aux frais avancés de Madame [D] [J] ;

- commis pour y procéder Monsieur [E] [Z] avec la mission d'évaluer selon la règle du profit subsistant la récompense due par Monsieur [M] [W] à la communauté pour l'achat par celle-ci des parts et actions par lui détenues dans les sociétés anonymes et les sociétés civiles immobilières servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13] ;

- réservé les dépens ;

- sursis à statuer sur les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 janvier 2009, Monsieur [M] [W] a interjeté appel de cette décision. Madame [D] [J] a relevé appel incident.

Les dernières conclusions des parties ont été déposées respectivement le 30 novembre 2009 pour l'appelant et le 13 juillet 2009 pour l'intimée.

MOTIFS :

1) sur les dispositions du jugement déféré ne faisant l'objet d'aucune critique de la part des parties

Les parties ne formulent aucune critique à l'encontre des dispositions du jugement déféré par lesquelles le tribunal :

- a homologué le projet liquidatif de Maître [H] [Y] sur les points non contestés par les parties ;

- a dit que Maître [H] [Y] sera désormais remplacé par Maître [S], notaire à [Localité 14] ;

- a débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à obtenir une réévaluation de la valeur des meubles meublants ayant garni l'immeuble commun ;

- a débouté Madame [D] [J] de sa demande de révocation des donations fondée sur l'ancien article 267-1 du code civil.

La décision entreprise sera par conséquent confirmée de ces chefs.

2) sur les biens professionnels

Monsieur [M] [W] sollicite la réformation du jugement en ce que le tribunal a dit que les parts et actions qu'il détient dans les sociétés anonymes et les sociétés civiles immobilières servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13] doivent être évaluées selon la règle du profit subsistant telle qu'exposée à l'article 1469 alinéa 3 du code civil.

 

Il demande à la cour de dire que les dépenses exposées par la communauté pour le financement de ses biens professionnels propres seront reprises pour leur montant nominal tel que fixé dans le projet liquidatif notarié.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :

- que c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré, compte tenu des stipulations de l'article 8 du contrat de mariage, que les actions de la SA la Polyclinique [12] et de la SA la Clinique [13], tout comme les parts de SCI, étaient des biens propres du concluant ;

- qu'ils ont cependant commis une erreur de droit en indiquant qu'il y avait lieu de faire application de l'article 1469 du code civil, ce qui au demeurant n'était pas demandé par Madame [D] [J] ;

- que ces dispositions légales n'ont pas un caractère d'ordre public ;

- que la clause relative aux récompenses intégrée au contrat de mariage fait la loi des parties et qu'elle ne peut être interprétée autrement que comme fixant la récompense au montant nominal des sommes déboursées par la communauté ;

- que le tribunal a dénaturé les clauses claires du contrat.

Madame [D] [J] demande à la cour :

- de confirmer la désignation de Maître [Z] en qualité d'expert ;

- de « confirmer la règle du profit subsistant préconisé par le tribunal pour l'évaluation de la récompense due ainsi que l'application de l'article 1469 alinéa 3 du code civil » ;

- d'infirmer le jugement en ce qui concerne l'exclusion de l'actif de la communauté de la clientèle du cabinet médical et des parts sociales détenues dans les sociétés civiles immobilières ;

- d'intégrer à l'actif de la communauté les revenus provenant des biens propres, à savoir :

.la valeur de la clientèle rattachée au cabinet médical de [Localité 15] en Bareuil,

.les parts sociales acquises par la communauté dans les sociétés civiles immobilières de la Clinique [13] et de la Clinique des Bois Blancs,

- de lui attribuer en nature les parts sociales détenues dans les deux sociétés civiles immobilières et les deux sociétés anonymes chargées de l'exploitation de la Clinique [13] et de la Clinique [12].

Elle indique en premier lieu qu'elle ne s'oppose pas à l'attribution à Monsieur [M] [W] des biens à usage professionnel mais qu'elle sollicite une récompense équitable, ainsi que la réintégration des revenus provenant des biens propres dans l'actif de la communauté.

Elle expose :

- qu'elle rapporte la preuve par les pièces qu'elle verse aux débats de l'existence d'un cabinet d'exercice libéral de la médecine au [Adresse 4], au sein duquel elle a exercé une activité d'aide opératoire entre le mois d'avril 1980 et le mois de décembre 1988, ledit cabinet ayant été créé conjointement par les époux qui exerçaient ensemble, chacun dans son domaine d'activité ;

- que depuis le mois d'avril 2004, ce cabinet a pris la forme d'une SELARL, immatriculée au registre du commerce et des sociétés ;

- qu'elle a contribué par son travail au développement de la clientèle de ce cabinet et que la clientèle médicale doit être portée à l'actif de la communauté pour sa valeur patrimoniale estimée au jour du partage ;

- qu'il convient donc de prononcer la réintégration dans l'actif de la communauté du droit de représentation de la clientèle du cabinet médical.

Elle fait valoir ensuite que la communauté est propriétaire de trois sociétés civiles immobilières : la SCI MARENDIN, située [Adresse 9], la SCI des Bois Blancs, sise [Adresse 9] et la SCI [13] sise à [Localité 11] et précise qu'elle réitère sa demande d'attribution en nature des parts desdites sociétés ;

Elle prétend :

- qu'elle a été co-emprunteur avec Monsieur [M] [W] le 13 novembre 1978 d'une somme de 337.575 francs qui était destinée à financer 643 parts de l'extension de la SCI Clinique [12] Blanc et qu'il convient donc d'intégrer « ce bien » dans l'actif immobilier de la communauté ;

- que la déclaration de revenus pour l'année 1990 mentionne l'existence d'une SCI MARENDIN domiciliée [Adresse 9] ; que cette SCI doit être intégrée dans l'actif de la communauté ;

- qu'il ressort d'un acte du 29 février 1980 qu'elle a été co-emprunteur de sommes destinées à financer les droits d'entrée dans le capital social de la Clinique [13] à [Localité 11] et qu'elle est par conséquent « co-propriétaire » ;

- que le projet d'état liquidatif établi par le notaire viole l'article 1476 du code civil puisqu'il propose un règlement des récompenses en francs constants ;

- que le tribunal a omis de prendre en compte les revenus provenant des biens propres comme des biens communs.

Elle souligne enfin qu'elle sollicite un partage en nature des parts sociales détenues par la communauté dans les trois sociétés civiles immobilières dont l'évaluation ne peut être effectuée que par voie d'expertise.

*****

SUR CE :

a) sur les actions des SA et les parts de SCI

Le projet d'état liquidatif établi par le notaire fait état de l'acquisition, pendant le mariage :

- de 278 actions de la SA la Polyclinique [12]

- de 200 actions de la SA Clinique [13]

- de 759 parts de la SCI des Bois Blancs.

La lecture de la déclaration fiscale des revenus non commerciaux de Monsieur [M] [W] pour l'année 1990, produite par Madame [D] [J], révèle en outre l'existence à cette date de parts dans une SCI MARENDIN[Adresse 9]e et dans une SCI [13] à [Localité 11].

L'appelant qui ne fournit aucune explication à cet égard, ne vient nullement prétendre que lesdites parts auraient fait l'objet d'une cession.

Aux termes de l'article 8 du contrat de mariage des parties, dont les stipulations ont été ci-dessus rappelées, Monsieur [M] [W] se réserve propre tout cabinet médical, toute clinique et toutes parts de sociétés, quelle qu'en soit la forme par lesquelles est assuré l'exercice de sa profession médicale.

C'est par conséquent à juste titre que le tribunal a considéré :

- que les actions de la SA de la Clinique [13] et de la SA de la Polyclinique [12], acquises pendant le mariage, constituaient des biens propres de l'appelant ;

- qu'il en était de même des parts de SCI destinées à l'exploitation des deux cliniques ;

- qu'en application de l'article 8 susvisé, lequel prévoyait au profit de l'époux un droit de reprise « à charge seulement d'indemniser la communauté des sommes qu'elles auraient déboursées à ce sujet », Monsieur [M] [W] devait récompenses à la communauté des sommes par elle versées pour l'acquisition desdites parts et actions.

Aux termes de l'article 1 du contrat de mariage, il est indiqué que « les futurs époux déclarent adopter pour base de leur union le régime de la communauté d'acquêts, tel qu'il est établi par l'article 1400 et suivants du code civil sauf les modifications pouvant résulter des stipulations ci-après ».

Les époux ont donc entendu soumettre leurs rapports patrimoniaux au régime de la communauté légale, sauf dérogation expresse aux règles prescrites par les articles 1400 et suivants du code civil.

En l'absence de toute indication dans le contrat de mariage sur les modalités de calcul de la récompense due par l'appelant à la communauté, il convient, dès lors, de faire application de l'article 1469 alinéa 3 du code civil en vertu duquel la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise comptable aux fins d'évaluation, selon la règle du profit subsistant, de la récompense due Monsieur [M] [W] à la communauté pour l'achat par celle-ci des actions et parts détenues par l'appelant dans les SA et les SCI servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13].

b) sur le droit de représentation de la clientèle du cabinet médical

Madame [D] [J] produit un imprimé de remboursement de frais au titre de l'assurance maladie revêtu d'un cachet portant les mentions suivantes « Docteur [W] [M] 04 chirurgien conventionné hono. Libres [Adresse 4] ».

Dans le courrier qu'il a adressé au conseil de Madame [D] [J] le 5 juin 2006, le notaire instrumentaire évoque en outre la cession d'un cabinet médical pour un prix qui ne lui a pas été communiqué.

Il se déduit de ces deux pièces qu'un cabinet médical a été créé par l'appelant pendant la durée du mariage.

S'il ressort d'une attestation du Docteur [G] [A] que Madame [D] [J] a travaillé en qualité d'aide opératoire du docteur [M] [W] du mois d'avril 1980 à décembre 1988, il n'est nullement démontré que l'intimée aurait exercé une activité d'infirmière libérale au sein du cabinet susmentionné.

Dès lors et conformément aux stipulations de l'article 8 du contrat, ce cabinet constituait un bien propre de l'appelant, de sorte que la demande de Madame [D] [J] tendant à ce que soit prononcée la réintégration dans l'actif de la communauté du droit de représentation de la clientèle du cabinet médical ne peut prospérer.

Il y a donc lieu de confirmer la décision entreprise en ce que l'intimée a été déboutée de ce chef.

c) sur les revenus des biens professionnels

Ainsi que l'a indiqué de façon pertinente le tribunal, après l'assignation en divorce du 17 juillet 1990, qui constitue la date à partir de laquelle le divorce a pris effet entre les époux en ce qui concerne leurs biens, les revenus produits par les bien propres de Monsieur [M] [W] sont restés des propres sur lesquels Madame [D] [J] ou l'indivision post-communautaire n'ont aucun droit.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce que Madame [D] [J] a été déboutée de sa demande tendant à ce que soient intégrés à l'actif de la communauté les revenus des biens propres.

d) sur la demande d'attribution préférentielle des actions des SA et des parts de SCI à Madame [D] [J]

Madame [D] [J] ne présente aucun moyen, de fait ou de droit, au soutien de sa demande d'attribution préférentielle des actions et parts dans les SA et les SCI servant à l'exploitation de la Polyclinique [12] et de la Clinique [13], lesquelles, ainsi qu'il l'a été ci-avant exposé, constituent des propres de Monsieur [M] [W].

Il ne peut être fait droit à ces prétentions, qui ne sont pas juridiquement fondées. La décision entreprise sera par conséquent confirmée de ce chef.

3) sur les parts sociales de la SCI « le tennis club de la Cousinerie » 

Madame [D] [J] demande la réintégration dans l'actif de la communauté des parts sociales de la SCI « le tennis club de la Cousinerie » que celle-ci a acquises.

Elle sollicite un partage en nature de ces parts sociales.

*****

SUR CE :

Madame [D] [J] verse aux débats une « déclaration récapitulative des opérations sur les valeurs mobilières et revenus de capitaux mobiliers » pour l'année 2001 portant mention d'une SCI TENNIS CLUB DE LA COUSINERIE.

Monsieur [M] [W] produit pour sa part :

- un procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire de clôture de liquidation du 25 juin 2002 de la SCI TENNIS CLUB DE LA COUSINERIE, société civile en liquidation amiable ;

- un courrier adressé le 29 avril 2005 par le liquidateur de ladite société à Monsieur [M] [W].

Il ressort de ces documents qu'à la suite de la liquidation amiable de la SCI, l'appelant a perçu une somme de 262,72 euros, calculée en proportion des droits qu'il détenait dans le capital de la société.

Dès lors que Monsieur [M] [W] ne prétend, ni a fortiori ne démontre que les parts qu'il détenait dans ladite SCI avaient été acquises à l'aide de ses deniers propres, il s'en déduit que ces biens mobiliers constituaient des acquêts de communauté.

Il convient par conséquent, réformant de ce chef le jugement déféré, de dire que la somme de 262,72 euros représentant le produit de la liquidation de la SCI calculé à proportion des droits détenus par la communauté dans le capital de la société, doit être intégrée à l'actif de l'indivision post-communautaire.

Il en est de même des revenus générés par les parts détenues par la communauté pour la période antérieure à la liquidation de la SCI.

4) sur l'indemnité d'occupation due par Monsieur [M] [W]

Monsieur [M] [W] demande à la cour de dire qu'il a joui gratuitement du domicile conjugal au titre de l'obligation alimentaire de Madame [D] [J] à l'égard des enfants communs.

A titre subsidiaire, il soulève une fin de non recevoir tirée de la prescription quinquennale et sollicite une mesure d'expertise aux fins de fixation du montant de l'indemnité d'occupation en tenant compte de l'évolution de la valeur de l'immeuble, année après année.

Il soutient :

- que la question de l'indemnité d'occupation a été abordée lors de l'établissement du procès-verbal d'ouverture des opérations liquidatives le 1er juillet 2005, de sorte qu'en application de l'article 815-10 du code civil, l'indemnité ne peut courir qu'à compter du 1er juillet 2000 ;

- que le notaire a considéré que le concluant était redevable à l'égard de l'indivision post-communautaire d'une somme de 116.000 euros puisque l'immeuble avait été libéré le 25 avril 2005 ;

- qu'il entend contester le principe même de l'exigibilité de cette indemnité ; que dans l'ordonnance de non conciliation, le juge aux affaires familiales n'a pas indiqué que l'attribution au concluant de la jouissance du domicile conjugal interviendrait à titre onéreux ; qu'il a assumé la charge des enfants du couple, sans aucune contribution de la part de la mère qui n'était cependant pas sans revenus ;

- que l'article 1122 du code de procédure civile exclut de l'effet suspensif du pourvoi en cassation les dispositions relatives à la jouissance du logement familial et qu'il appartenait à Madame [D] [J] de faire délivrer tout acte suspensif de prescription ;

- que le tribunal ne pouvait donc « faire rétroagir les effets de l'indemnité d'occupation » au 24 avril 1992 et devait les limiter à une période de 5 années à compter du 30 avril 2007, date de l'assignation délivrée à la requête de Madame [D] [J] ;

- que le montant de cette indemnité doit être fixé sur la base de la valeur locative, en tenant compte de la précarité de l'occupation ; que le tribunal ne pouvait fixer ce montant sur la base de la valeur du bien arrêtée à 400.000 euros alors qu'aux termes du procès-verbal de difficultés, le notaire avait acté que les conseils de Madame [D] [J] étaient d'accord pour que la valeur de l'immeuble soit établie année après année pour asseoir le montant de l'indemnité.

Madame [D] [J] sollicite la confirmation du jugement en ses dispositions relatives à l'indemnité d'occupation due par Monsieur [M] [W] à l'indivision.

Elle fait sienne la motivation des premiers juges, s'agissant du rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par Monsieur [M] [W] et du montant de ladite indemnité.

*****

SUR CE :

Il est constant que Monsieur [M] [W] a joui privativement de l'immeuble commun situé au [Adresse 3] à compter du 24 avril 1992. Il justifie par le procès-verbal de constat d'huissier qu'il verse aux débats, avoir libéré les lieux et déposé les clefs de l'immeuble en l'étude du notaire le 22 avril 2005.

Aux termes de l'article 815-9, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

a) sur la fin de non recevoir tirée de la prescription, soulevée par Monsieur [M] [W]

En application de l'article 815-10 du code civil, aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être.

La cause de l'obligation au paiement d'une indemnité d'occupation incombant à Monsieur [M] [W] est la jouissance privative de l'immeuble indivis dont il a bénéficié et non une quelconque disposition du jugement prononçant le divorce des époux.

Dès lors, l'argumentation développée par l'appelant sur le fondement de l'ancien article 1122 du code de procédure civile est dépourvue de pertinence.

Il résulte de l'ancien article 2253 du code civil que la prescription ne court pas entre époux et qu'elle se trouve suspendue jusqu'à la dissolution du mariage, de sorte que le délai de cinq ans susvisé n'a commencé à courir que du jour où la décision de divorce est passée en force de chose jugée.

Selon l'ancien article 1121 du code de procédure civile, le délai de pourvoi en cassation suspend l'exécution de l'arrêt qui prononce le divorce. Le pourvoi en cassation exercé dans ce délai est également suspensif.

En l'espèce, le divorce est devenu irrévocable le 11 janvier 2005, date du rejet du pourvoi formé par l'intimée contre l'arrêt de la cour du 13 avril 2003.

Madame [D] [J] ayant présenté sa demande relative à l'indemnité d'occupation aux termes de l'assignation qu'elle a fait délivrer à Monsieur [M] [W] le 30 avril 2007, il en résulte que sa demande n'est pas prescrite et que l'intimée est par conséquent recevable à solliciter la fixation d'une indemnité d'occupation à la charge de l'appelant pour la période comprise entre le 24 avril 1992 et le 22 avril 2005.

La fin de non recevoir tirée de la prescription, soulevée par ce dernier, sera par conséquent rejetée.

b) sur la demande de Monsieur [M] [W] relative à la jouissance gratuite du domicile conjugal

L'ordonnance de non conciliation du 30 mai 1990 comporte la mention suivante :

« Compte tenu de ce que seul Monsieur [W] peut assurer le remboursement du prêt immobilier, que les enfants résident chez lui, disons que le domicile conjugal lui sera attribué ».

Cette décision du juge aux affaires familiales ne fait aucune référence à une quelconque gratuité de la jouissance de l'immeuble accordée au mari.

Il convient de relever que pour fixer à 20.000 francs mensuels la pension alimentaire devant être versée par Monsieur [M] [W] à son épouse, le magistrat conciliateur avait, aux termes de son ordonnance, pris en considération les éléments suivants :

- à cette époque, Madame [D] [J] ne travaillait plus depuis deux ans et n'avait aucune ressource ;

- les revenus de Monsieur [M] [W] pour l'année 1989 s'élevaient à la somme totale de 1.997.437 francs ; déduction faite des échéances de remboursement des emprunts, il restait au mari la somme mensuelle de 145.647,75 francs.

Si, dans son arrêt en date du 28 octobre 1999 la cour, prenant en considération les salaires perçus par Madame [D] [J] en sa qualité d'infirmière à l'hôpital de [Localité 17], est venue réduire à 10.000 francs par mois à compter du 5 septembre 1994 la pension alimentaire mise à la charge de Monsieur [M] [W], il n'en demeure pas moins qu'à cette époque une importante disparité subsistait entre les situations financières respectives des époux.

Au regard de ces éléments, la demande de Monsieur [M] [W] tendant à ce que la gratuité de la jouissance du domicile conjugal lui soit accordée au titre de la contribution de l'intimée à l'entretien de ses enfants ne peut prospérer.

Il convient par conséquent de l'en débouter.

c) sur le montant de l'indemnité

Il est constant que le notaire avait évalué l'immeuble commun à la somme de 400.000 euros en 2000.

En première instance, Monsieur [M] [W] sollicitait l'homologation du projet d'état liquidatif, lequel fixait l'indemnité d'occupation au taux de 6 % annuel sur la base d'une valeur du bien fixée à 400 .000 euros.

L'appelant est donc mal fondé à reprocher au tribunal d'avoir « pratiqué de façon linéaire pour la période comprise entre le 24 avril 1992 et le 25 août 2005 », les modalités d'évaluation de l'indemnité retenues par le tribunal étant celles que l'appelant avait lui-même proposées.

Les allégations de Monsieur [M] [W] sur le caractère précaire de l'occupation de l'immeuble sont dépourvues de pertinence dès lors qu'il est constant qu'il a bénéficié de la jouissance privative de l'ancien domicile conjugal de façon continue pendant une période de 13 années.

C'est par conséquent à juste titre que le tribunal a considéré que la valeur locative dudit immeuble devait être estimée à 6 % de la valeur de celui-ci.

Compte tenu d'augmentation de la valeur du bien entre 2000 et 2005 - étant rappelé que l'immeuble a été vendu par les parties en août 2005, moyennant le prix de 655.530 euros - il apparaît justifié de retenir une valeur moyenne de 400.000 euros, laquelle permet de prendre en compte l'évolution de la valeur locative de l'immeuble entre 1992 et 2005.

Il convient dès lors, sans, réformant de ce chef le jugement déféré, et sans qu'il soit besoin de recourir à la mesure d'expertise sollicitée par l'appelant, de fixer l'indemnité d'occupation mise à la charge de Monsieur [M] [W] à la somme de 2.000 euros par mois (soit 6% de 400.000 euros).

Ladite indemnité a cessé d'être due, non au jour de la vente de l'immeuble comme retenu par les premiers juges, mais au jour de la libération des lieux par Monsieur [M] [W], soit le 22 avril 2005.

Au regard de ces éléments, l'appelant est par conséquent débiteur à l'égard de l'indivision post-communautaire d'une somme de 312.000 euros (soit 2.000 euros x 156 mois).

5) sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive présentée par Madame [D] [J]

Madame [D] [J] sollicite la condamnation de Monsieur [M] [W] à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Elle lui reproche de n'avoir cessé d'utiliser des moyens dilatoires pour ralentir la procédure de compte liquidation et partage.

*****

SUR CE :

Madame [D] [J], qui succombe en une partie de ses demandes, ne rapporte pas la preuve du caractère abusif de la résistance opposée par Monsieur [M] [W] à ses prétentions.

La décision entreprise sera par conséquent confirmée en ce que Madame [D] [J] a été déboutée de ce chef de demande.

6) sur les dépens et les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [M] [W] sollicite la condamnation de Madame [D] [J] aux dépens, ainsi qu'à lui payer une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [D] [J] forme les mêmes demandes à l'encontre de l'appelant.

*****

SUR CE :

Tant l'appelant que l'intimée succombent en une partie de leurs prétentions.

Il convient par conséquent de dire que chacun d'entre eux supportera la charge de la moitié des dépens d'appel et de les débouter de leurs demandes d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, qu'ils ont exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription, soulevée par Monsieur [M] [W] ;

Déboute Monsieur [M] [W] de sa demande tendant à ce que la gratuité de la jouissance du domicile conjugal lui soit accordée au titre de la contribution de l'intimée à l'entretien de ses enfants ;

Confirme le jugement en ses dispositions non contraires au présent arrêt ;

L'infirme en ce qu'il a :

- débouté Madame [D] [J] de sa demande tendant à obtenir que soit intégrées à l'actif de communauté des parts d'une société gérant un tennis club ;

- fixé à 416.000 euros le montant de l'indemnité d'occupation due par Monsieur [M] [W] à l'indivision post-communautaire ;

Et, statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que la somme de 262,72 euros représentant le produit de la liquidation de la SCI TENNIS CLUB DE LA COUSINERIE calculé à proportion des droits détenus par la communauté dans le capital de la société, doit être intégrée à l'actif de l'indivision post-communautaire.

Dit que les revenus générés par les parts détenues par la communauté pour la période antérieure à la liquidation de la SCI TENNIS CLUB DE LA COUSINERIE doivent être intégrés à l'actif de l'indivision post-communautaire ;

Dit que Monsieur [M] [W] est débiteur à l'égard de l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation de l'immeuble situé au [Adresse 3] d'un montant de 312.000 euros pour la période comprise entre le 24 avril 1992 et le 22 avril 2005 ;

Y ajoutant,

Dit que chacune des parties supportera la charge de la moitié des dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP CARLIER-REGNIER, avoués ;

Déboute les parties de leurs demandes d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, qu'elles ont exposés devant la cour.

Le Greffier,Le Président,

Nicole HERMANTEvelyne MERFELD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 09/00082
Date de la décision : 06/09/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°09/00082 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-09-06;09.00082 ?
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