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14/06/2010 | FRANCE | N°09/08546

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 14 juin 2010, 09/08546


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 14/06/2010



***



N° de MINUTE :



N° RG : 09/08546

Jugement (N° 06/06770) rendu le 12 Novembre 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : EM/VR





APPELANTES



S.C.I. LE POINT ROND

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]



S.A.R.L. CABINET RICHARD THUM

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]



S.C.I. LES CIGALES

aya

nt son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]



représentées par Maître QUIGNON, avoué à la Cour

assistées de Maître VERITE substituant Maître Yves MARCHAL, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE



S.N.C. TUDOR INN

aya...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 14/06/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 09/08546

Jugement (N° 06/06770) rendu le 12 Novembre 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : EM/VR

APPELANTES

S.C.I. LE POINT ROND

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

S.A.R.L. CABINET RICHARD THUM

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]

S.C.I. LES CIGALES

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

représentées par Maître QUIGNON, avoué à la Cour

assistées de Maître VERITE substituant Maître Yves MARCHAL, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

S.N.C. TUDOR INN

ayant son siège social [Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

assistée de Maître Philippe TALLEUX du Cabinet d'Avocats TALLEUX CUNY BUFFETAUD, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 03 Mai 2010 tenue par Evelyne MERFELD magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Evelyne MERFELD, Président de chambre

Pascale METTEAU, Conseiller

Monique MARCHAND, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président et Nicole HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte sous seing privé du 24 mars 1993, la SCI Le Point Rond a donné à bail commercial à la SNC TUDOR INN, pour une durée de neuf années à compter du 1er septembre 1991, un immeuble situé à [Adresse 6]. Ce contrat comporte une clause dite 'pacte de préférence' ainsi rédigée :

'Si au cours du présent bail le bailleur se décide à vendre le bien loué, le preneur aura le droit d'en devenir acquéreur de préférence à tout autre amateur pour un prix égal à celui qui serait offert au bailleur et aux-mêmes conditions, à charge pour ledit preneur de faire connaître son intention d'user de ce droit de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au bailleur dans les 15 jours de la notification que celui-ci aurait faite en la même forme, de l'état civil de l'acquéreur, du prix, des modalités de paiement et des conditions qu'il aura obtenues'.

Par acte du 15 mai 1997, la SCI Le Point Rond a vendu l'immeuble à la SARL Cabinet Richard THUM pour le prix de 1 300 000 francs (198 183,72 euros).

Par acte du 10 mai 2001, la société Cabinet Richard THUM a revendu l'immeuble à la SCI Les Cigales pour le prix de 1 400 000 Francs (213 428,62 euros).

Soutenant ne pas avoir été informée de ces ventes qu'elle a découvertes dans le cadre d'une procédure d'expertise l'opposant à son bailleur, la SNC TUDOR INN a fait assigner, par actes des 30 juin et 05 juillet 2006, la SCI POINT ROND, la SARL Cabinet Richard THUM et la SCI Les Cigales devant le Tribunal de Grande Instance de LILLE pour faire constater que ces cessions ont été passées en fraude de ses droits puisque les trois sociétés qui ont le même gérant avaient connaissance de l'existence du pacte de préférence, en conséquence prononcer la nullité des cessions du 15 mai 1997 et 10 mai 2001, constater qu'elle a indiqué qu'elle entendait acquérir l'immeuble moyennant le prix de 198 183,72 euros, par lettre officielle du 09 décembre 2005, constater en conséquence qu'en raison de l'accord sur la chose et sur le prix la vente est parfaite et condamner sous astreinte la SCI LE POINT ROND à régulariser la vente à son profit par acte authentique.

Par jugement du 12 novembre 2009, le Tribunal a fait droit à ces demandes, condamnant en outre la SCI LE POINT ROND et le Cabinet Richard THUM à rembourser à la SNC TUDOR INN les sommes perçues au titre des loyers et charges depuis le 15 mai 1997 et allouant à la SNC TUDOR INN une indemnité procédurale de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI LE POINT ROND, la SARL Cabinet Richard THUM et la SCI Les Cigales ont relevé appel de ce jugement le 02 décembre 2009.

Par ordonnance du 04 mars 2010 le Premier Président a arrêté l'exécution provisoire du jugement et, faisant application de l'article 917 alinéa 2 du code de procédure civile, a fixé l'affaire pour être plaidée à bref délai devant la Cour.

La SCI Le Point Rond, la société Cabinet Richard THUM et la SCI Les Cigales demandent à la Cour de débouter la SNC TUDOR INN de sa fin de non recevoir fondée sur l'article 918 du code de procédure civile, d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté la SNC TUDOR INN de ses demandes de dommages et intérêts et statuant à nouveau :

-sur la recevabilité de l'action de la SNC TUDOR INN :

constater que les assignations des 30 juin et 05 juillet 2006 n'ont pas été publiées à la conservation des hypothèques, en conséquence dire que les demandes sont irrecevables par application de l'article 28 du décret du 04 janvier 1955,

subsidiairement, dire que l'action est prescrite en vertu de l'article 1304 du code civil,

subsidiairement, pour la vente du 15 mai 1997, dire que la SNC TUDOR INN a renoncé tacitement à se prévaloir du pacte de préférence, pour la vente du 10 mai 2001 dire que le pacte de préférence n'était plus applicable et plus subsidiairement encore, dire que la SNC TUDOR INN y a renoncé, en conséquence dire qu'elle n'a subi aucun préjudice et la débouter de ses demandes à ce titre ;

-sur le fond :

constater les circonstances particulières de la réalisation de la vente du 15 mai 1997 dues à l'attitude de la SNC TUDOR INN suite à l'envoi par le bailleur du projet de bail du 24 mars 1993,

dire que la deuxième condition posée par la jurisprudence de la Cour de cassation à savoir la connaissance par le tiers acquéreur de l'intention du bénéficiaire du pacte de préférence de s'en prévaloir ne se trouvait pas réalisée lors de la conclusion des ventes successives,

en conséquence, débouter la société TUDOR INN de sa demande d'annulation des ventes et de substitution dans les droits de la société Cabinet Richard THUM,

subsidiairement, dire que l'annulation des ventes ne saurait générer la substitution de la SNC TUDOR INN dans les droits de la société Cabinet Richard THUM en l'absence de collusion frauduleuse,

en toute hypothèse, dire que la SNC TUDOR INN ne rapporte pas la preuve qu'elle a subi un préjudice lié au non respect du pacte de préférence dès lors qu'elle n'était pas en mesure d'acquérir l'immeuble au regard de sa situation économique et financière en 1997 et 2001;

la débouter de sa demande en remboursement des loyers.

Elles se portent demanderesses d'une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et d'une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SNC TUDOR INN demande à la Cour, au visa de l'article 918 du code de procédure civile, de déclarer irrecevables les demandes et moyens contenus dans l'assignation à jour fixe non développés dans l'assignation en référé et de confirmer le jugement, sauf à fixer l'astreinte à 1 000 euros par jour de retard et à lui allouer une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts, relevant de ce chef appel incident.

Dans l'hypothèse où la Cour estimerait ne pouvoir ordonner sa substitution dans les droits de l'acquéreur elle se porte demanderesse de la somme de 4 500 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle sollicite en outre la condamnation de chacune des appelantes à lui verser la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Vu les conclusions déposées par les appelantes le 03 mai 2010,

Vu les conclusions déposées par l'intimée le 03 mai 2010,

1°) Sur la recevabilité des moyens et prétentions des appelantes au regard de l'article 918 du code de procédure civile

Attendu que par assignation du 15 décembre 2009 les appelantes ont saisi le Premier Président pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire ; que dans cette assignation elles demandaient également que l'appel qu'elles avaient interjeté soit évoqué par priorité à une proche audience de la Cour, conformément à l'article 917 alinéa 2 du code de procédure civile ; que le Premier Président a fait droit à leurs demandes ;

Attendu que l'arrêt de la Cour de cassation invoqué par la société TUDOR INN (2e civ 7 déc 2000) pour soutenir que les appelantes ne sont pas recevables à soumettre à la Cour des prétentions ou moyens non inclus dans l'assignation en référé, a été rendu au visa de l'article 788 alinéa 4 du code de procédure civile alors applicable, devenu article 811 relatif à la passerelle entre le juge des référés et le Tribunal de Grande Instance ;

que l'argument est inopérant devant la Cour dans le cadre d'une procédure à jour fixe ordonnée par le Premier Président statuant sur une demande d'arrêt de l'exécution provisoire sans, par définition, aborder le fond du litige ;

Attendu au demeurant que les demandes des appelantes ne sont pas nouvelles et que les dispositions des articles 917 et 918 du code de procédure civile ne dérogent pas à celles des articles 122 et 123 selon lesquelles les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause ;

2°) Sur la fin de non recevoir fondée sur le défaut de publication à la conservation des hypothèques

Attendu que la société TUDOR INN justifie par production du certificat du conservateur des hypothèques avoir déposé l'assignation du 05 juillet 2006 tendant à obtenir la nullité des ventes des 15 mai 1997 et 10 mai 2001, le 03 mai 2010 à la conservation des hypothèques, en application de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955 ;

que la situation donnant lieu à la fin de non recevoir ayant été régularisée conformément à l'article 126 du code de procédure civile au moment où le juge statue, l'irrecevabilité doit être écartée ;

3°) Sur la prescription

Attendu que les appelantes opposent à la société TUDOR INN la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil ;

Mais attendu que la demande de cette société est une action en exécution forcée d'un pacte de préférence contenu dans un contrat ; que la nullité des ventes n'est sollicitée que pour permettre cette exécution ;

que la prescription quinquennale de l'article 1304 ne concerne que les actions en nullité d'une convention, introduites par les parties contractantes ; que la société TUDOR INN qui n'est pas partie aux ventes des 15 mai 1997 et 10 mai 2001 ne peut donc se voir opposer cette prescription ;

4°) Sur la renonciation

Attendu que le Tribunal a rejeté le moyen fondé sur la renonciation en relevant qu'il n'est pas justifié que les ventes successives aient été portées à la connaissance du locataire et que le seul défaut d'exercice du droit de préférence ne peut être interprété comme une renonciation tacite dès lors qu'aucune formalité n'est accomplie lors de la vente, sollicitant l'intervention du bénéficiaire ;

Attendu que les appelantes reprennent leur moyen devant la Cour et font valoir à juste titre que la jurisprudence admet de façon constante que la renonciation à un droit peut résulter d'un ensemble de circonstances dès lors que trois conditions cumulatives sont réunies : postériorité de la renonciation, caractère certain et non équivoque de la renonciation qui peut toutefois être tacite, renonciation en connaissance de cause ;

qu'elles versent aux débats :

-une copie d'une lettre datée du Juin 1997 adressée par l'Agence Richard THUM à la société TUDOR INN, lui confirmant que par acte du 15 mai 1997 la SCI POINT ROND lui a vendu l'immeuble et lui demandant de libeller le chèque représentant le montant du loyer à l'ordre du Cabinet Richard THUM ; que la société TUDOR INN conteste avoir reçu ce courrier et fait observer qu'il n'est pas justifié de son envoi en recommandé ; que son chèque du 25 juin 1997 pour paiement du loyer a toutefois été libellé à l'ordre de THUM ;

-le congé avec offre de renouvellement de bail que la société Cabinet Richard THUM a adressé à la SNC TUDOR INN le 07 février 2000 pour le 31 août 2000 où il est indiqué que par acte reçu par Maître [E], notaire, le 15 mai 1997 la SCI LE POINT ROND a vendu l'immeuble à usage de commerce et d'habitation à la SCI Cabinet Richard THUM qui se trouve être, à l'heure actuelle, aux droits de la SCI LE POINT ROND ;

- l'assignation en référé délivrée le 05 octobre 2000 à la SNC TUDOR INN par la société Cabinet Richard THUM qui rappelait qu'elle se trouvait aux droits de la SCI LE POINT ROND suivant acte notarié du 15 mai 1997 ; que dans la liste des pièces produites annexée à cette assignation figure son titre de propriété ;

-les conclusions signifiées le 28 mars 2001 par la SNC TUDOR INN et Maître [Z], 'liquidateur judiciaire' de cette société, devant la Cour sur appel de l'ordonnance de référé du 16 janvier 2001, dans lesquelles la SNC TUDOR INN a écrit 'le 15 mai 1997 la SCI LE POINT ROND a vendu l'immeuble loué commercialement à la SCI TUDOR INN, à la SARL Cabinet Richard THUM' ;

-les conclusions signifiées le 02 décembre 2002 par la société TUDOR INN et Maître [S], commissaire à l'exécution du plan de redressement dans une affaire les opposant à la SCI Les Cigales devant le Tribunal de Grande Instance de LILLE aux fins d'expulsion, dans lesquelles il est fait état de la vente du 15 mai 1997 à la société Cabinet Richard THUM ;

-le mémoire en demande adressé le 24 juin 2002 par l'avocat de la SCI Les Cigales à la SNC TUDOR INN et à Maître [S] aux fins de fixation du loyer du bail renouvelé où il est fait état de la vente du 15 mai 1997 et qui comporte en annexe la liste des pièces communiquées dont l'acte de vente du 15 mai 1997 et l'acte de vente du 10 mai 2001 ;

- l'assignation en référé expertisé délivrée le 20 décembre 2001 à la SCI Les Cigales par Monsieur [Y], gérant de la SNC TUDOR, qui écrit que 'le 15 mai 1997 la SCI LE POINT ROND vendait l'immeuble à la SARL Cabinet Richard THUM. Désormais la SCI Les Cigales est propriétaire de l'immeuble et intervient aux lieu et place du Cabinet Richard THUM' ;

-copies des chèques pour paiement de loyers établis par la société TUDOR INN le 05 juin 2001, 06 décembre 2001, 17 septembre 2002, 05 septembre 2003, 05 mars 2004, 13 juillet 2004, 05 septembre 2004, 05 décembre 2004, 1er mars 2005 et 05 septembre 2005, à l'ordre de la SCI Les Cigales.

Attendu que dans les divers actes de procédure les deux parties ont fait l'une et l'autre à plusieurs reprises, référence aux ventes des 15 mai 1997 et 10 mai 2001 ; que les actes de ventes ont été versés aux débats en 2000 et 2002.

Attendu que la société TUDOR INN soutient que les procédures concernaient un point de droit différent de celui relatif au pacte de préférence, qu'elle n'est pas un professionnel de l'immobilier, qu'elle devait faire face à un plan d'apurement du passif et aux multiples difficultés qui en résultaient, que la notification dans les formes prévues par le pacte de préférence aurait précisément permis d'attirer son attention sur les ventes dont elle n'a eu connaissance qu'au cours des opérations d'expertise de 2005 et qu'elle a immédiatement fait part de son intention d'acquérir par courrier en date du 09 décembre 2005 ;

Mais attendu que la société TUDOR INN a payé ses loyers au nouveau propriétaire, la société Cabinet Richard THUM dès juin 1997 et à la SCI Les Cigales dès juin 2001 ; qu'elle ne peut donc prétendre qu'elle n'a eu connaissance des ventes qu'en 2005 ;

Attendu que le 21 juillet 1994 la SNC TUDOR INN a fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire prononcé par le Tribunal de Commerce de LILLE qui, par un second jugement du 11 mai 1995, a arrêté le plan de redressement par continuation de l'entreprise ; que ce plan qui lui imposait pour apurer ses dettes, de régler des annuités de 701 295,28 francs soit 106 911,78 euros n'a pris fin qu'en mai 2003 ce qui explique qu'en 1997 et 2001 la société TUDOR INN ne s'est pas manifestée pour acquérir l'immeuble ; qu'elle ne pouvait en effet créer un passif supplémentaire pendant la durée du plan ;

Attendu qu'il ressort de l'ensemble des éléments soumis à la Cour :

-que la société TUDOR INN a eu connaissance des deux ventes dans le mois qui a suivi leur réalisation ;

-qu'elle a eu connaissance des conditions financières de la cession du 15 mai 1997 lorsqu'elle a reçu communication en 2000, des pièces de la procédure en référé introduite par assignation du 05 octobre 2000 et des conditions de la cession du 10 mai 2001 lorsqu'elle a reçu communication, en 2002, des pièces de la procédure en fixation du loyer du bail renouvelé ;

-qu'elle n'était pas en mesure d'acquérir l'immeuble en 1997 ni en 2001 ;

- qu'elle ne s'est manifestée que par lettre du 09 décembre 2005 à l'occasion d'opérations d'expertise faisant apparaître une modification des facteurs locaux de commercialité entraînant un déplafonnement du loyer ;

Attendu que si un locataire peut renoncer à se prévaloir d'un pacte de préférence lorsque le bailleur lui notifie les conditions de la vente, il peut également y renoncer lorsqu'il a connaissance de l'existence d'une vente intervenue sans notification préalable de l'intention de vendre ; que la renonciation n'est pas subordonnée à la réalisation de cette notification préalable ;

Attendu que l'inaction prolongée de la société TUDOR INN pendant plusieurs années après avoir eu connaissance des ventes et de leurs conditions, alors qu'elle payait les loyers au nouveau propriétaire et n'a formulé aucune observation lors du congé avec offre de renouvellement du bail délivré par ce nouveau propriétaire, s'analyse en une renonciation tacite, certaine et non équivoque de la locataire, à se prévaloir du pacte de préférence ;

Attendu que de surcroît, c'est à bon droit que les appelantes soutiennent que le pacte de préférence s'est atteint à l'expiration du bail du 31 août 2000 et qu'il n'était donc plus applicable lors de la vente du 10 mai 2001, intervenue pendant la durée du bail renouvelé au 1er septembre 2000 ;

qu'en effet le renouvellement du bail commercial entraîne la reconduction des clauses et conditions relatives aux rapports locatifs et non des conditions qui sont indépendantes de ces rapports ; qu'ainsi le pacte de préférence inséré dans le bail commercial du 24 mars 1993 relatif à une vente 'au cours du présent bail' constitue une convention distincte du bail et devient caduc à l'expiration de ce bail ;

Attendu que le jugement sera donc infirmé et la société TUDOR INN déboutée de toutes ses prétentions tant principales que subsidiaires ;

*

* * *

Attendu que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas, en soit, constitutive d'une faute ; que les appelantes doivent être déboutées de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Attendu que l'indemnité procédurale à la charge de la société TUDOR INN sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile est fixée à 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement,

INFIRME le jugement et statuant à nouveau,

DÉBOUTE la SNC TUDOR INN de toutes ses demandes ;

DÉBOUTE la SCI LE POINT ROND, la SARL Cabinet Richard THUM et la SCI Les Cigales de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la SNC TUDOR INN aux dépens de première instance et d'appel avec, pour les dépens d'appel, droit de recouvrement direct au profit de Maître QUIGNON, avoué ;

LA CONDAMNE en outre à verser aux appelantes une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

Nicole HERMANTEvelyne MERFELD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 09/08546
Date de la décision : 14/06/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°09/08546 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-14;09.08546 ?
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