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03/05/2010 | FRANCE | N°09/03741

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 03 mai 2010, 09/03741


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 03/05/2010



***



N° de MINUTE :



N° RG : 09/03741

Jugement (N° 8124/07) rendu le 14 Mai 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : PM/VR





APPELANTE



Société COVERFIL, société de droit belge

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

ayant pour conseil Maître Aymeric DRUESNE, avocat au

barreau de LILLE





INTIMÉE



S.A.S. MERCIER AUTOMOBILES

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

ayant pour conseil Maître Emeric VEL...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 03/05/2010

***

N° de MINUTE :

N° RG : 09/03741

Jugement (N° 8124/07) rendu le 14 Mai 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : PM/VR

APPELANTE

Société COVERFIL, société de droit belge

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour

ayant pour conseil Maître Aymeric DRUESNE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

S.A.S. MERCIER AUTOMOBILES

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

ayant pour conseil Maître Emeric VELLIET, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 08 Mars 2010 tenue par Pascale METTEAU magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Evelyne MERFELD, Président de chambre

Pascale METTEAU, Conseiller

Joëlle DOAT, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 Mai 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président et Nicole HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 05 Janvier 2010

* * * * *

Par jugement rendu le 14 mai 2009, le tribunal de grande instance de Lille a :

débouté de la société COVERFIL de sa demande tendant à la condamnation de la SAS MERCIER AUTOMOBILES au paiement de la TVA non recouvrée auprès des acquéreurs,

débouté la société COVERFIL de sa demande tendant à l'application d'un taux de commission de 5 % sur le montant des adjudications,

débouté la société COVERFIL de sa demande tendant à la condamnation de la SAS MERCIER AUTOMOBILES à lui payer la somme de 65.916,19 euros,

débouté de la société COVERFIL de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société COVERFIL à payer à la SAS MERCIER AUTOMOBILES la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société COVERFIL aux dépens.

La société de droit belge COVERFIL a interjeté appel de cette décision le 25 mai 2009.

RAPPEL DES DONNÉES UTILES DU LITIGE

La société COVERFIL, qui exerce son activité dans le domaine du textile, a souhaité, courant 2005, céder des machines qu'elle n'utilisait plus. Elle a été mise en relation d'affaires avec la SAS MERCIER AUTOMOBILES située à [Localité 4], société de vente volontaire de meubles aux enchères publiques, régie par les articles L321-1 et suivants du code de commerce.

Cette dernière a organisé une vente aux enchères des machines, le 20 septembre 2005, étant précisé que le matériel devait rester en Belgique où il pourrait être examiné par les acquéreurs potentiels qui devraient, après la vente, venir en prendre livraison.

La SAS MERCIER AUTOMOBILES a fait éditer une plaquette publicitaire pour annoncer cette vente.

Le montant de totale des adjudications s'est élevé à 264.230 euros.

Une fois la vente réalisée, la SAS MERCIER AUTOMOBILES a adressé à la société COVERFIL une somme de 240.590,61 euros, après déduction du montant de sa commission.

Estimant qu'au montant des adjudications devait s'ajouter la TVA belge au taux de 21%, et que c'est donc la somme de 319.718,30 euros qui aurait dû lui être adressée, la société COVERFIL a contesté le décompte qui lui était présenté par la SAS MERCIER AUTOMOBILES.

Faute de pouvoir parvenir à un accord, elle a saisi le tribunal de commerce de Tournai en Belgique du litige.

En application de la convention internationale de [Localité 3] du 15 juin 1955 relative à la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels, cette juridiction s'est déclarée incompétente au profit des juridictions françaises, par jugement du 23 avril 2007.

Invoquant les dispositions de l'article L. 320-37 du code de commerce selon lesquelles les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître des actions en justice relatives aux activités de vente dans lesquelles est partie une société de vente volontaire de meubles aux enchères publiques, la société COVERFIL a fait assigner la SAS MERCIER AUTOMOBILES devant le tribunal de grande instance de Lille, par acte d'huissier du 5 septembre 2007, pour la voir condamnée à lui payer la somme de 65.916,19 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2005 ainsi qu'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La décision déférée a été rendue dans ces conditions.

La société COVERFIL demande à la cour de :

réformer le jugement,

vu les articles L. 321-4 et suivants du code de commerce, vu les articles 1991 et suivants du Code civil, vu l'article 1315 du code civil, vu les usages des professionnels de la vente volontaire de meubles aux enchères publiques :

constater que la vente aux enchères publiques du 20 septembre 2005 organisée par la SAS MERCIER AUTOMOBILES ne comportait aucune indication sur le régime de la TVA applicable à l'opération de vente,

constater que cette vente portant sur des machines industrielles au profit d'acquéreurs professionnels s'entendait hors taxes,

constater que le régime de TVA applicable est celui de la TVA belge et des règles intracommunautaires,

dire que la société MERCIER AUTOMOBILES n'a pas exécuté son mandat dans toute son étendue et qu'elle aurait dû veiller à recouvrer auprès des acquéreurs l'accessoire du prix que constitue la TVA,

constater qu'en tout état de cause, la SAS MERCIER AUTOMOBILES a été défaillante dans son obligation d'information et de conseil sur la question de la TVA et dire qu'elle engage sa responsabilité civile contractuelle,

dire et juger que le montant de la commission de la SAS MERCIER AUTOMOBILES dû par le mandataire ne peut excéder 5 % hors taxes soit la somme de 13.211,50 euros et que tout montant supérieur serait excessif compte tenu de la commission de 9 % hors taxes déjà perçue par la SAS MERCIER AUTOMOBILES sur les acquéreurs,

compte tenu des comptes entre les parties, condamner la SAS MERCIER AUTOMOBILES au paiement de la somme de 65.916,19 euros et à titre de dommages et intérêts complémentaires, dire que le taux d'intérêt légal commencera à courir à compter du 20 septembre 2005,

condamner la SAS MERCIER AUTOMOBILES au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens de l'instance.

Elle explique que la SAS MERCIER AUTOMOBILES a agi comme mandataire du propriétaire du bien, c'est-à-dire elle-même. Elle indique qu'elle est soumise, en sa qualité de société de vente de biens mobiliers aux enchères publiques, à l'autorité du conseil de vente volontaire de meubles aux enchères publiques qui avait notamment recommandé l'établissement d'une réquisition de vente pour établir l'existence et le contenu du mandat confié par le vendeur. Elle constate cependant, qu'aucun écrit n'a été fait entre la SAS MERCIER AUTOMOBILES et elle, tout en soulignant qu'un tel acte n'est pas une condition de validité du mandat qui peut être verbal.

Elle estime que les sociétés de vente volontaire sont débitrices, en leur qualité de professionnelles, d'une obligation d'information et de conseil s'agissant des conditions de la vente tant à l'égard du vendeur que des acquéreurs, et ce, notamment sur la question de la TVA. Elle relève qu'étant mandataire du vendeur, une telle société agit dans le cadre d'une représentation parfaite et qu'elle doit percevoir non seulement le prix de vente mais également ses accessoires pour le compte du vendeur avec obligation de restitution de ce prix, déduction faite de sa commission.

Elle affirme qu'en l'espèce, la SAS MERCIER AUTOMOBILES a failli à ses obligations. En effet, elle constate que le catalogue édité ne comportait aucune information sur le sort de la TVA quant aux prix proposés aux futurs acquéreurs, mentionnant uniquement que la TVA était incluse s'agissant des frais de vente. Or, elle relève qu'entre commerçants, il est d'usage constant que les prix s'entendent hors taxes et que cette règle aurait dû être appliquée dans la mesure où la vente s'adressait à des professionnels intéressés par l'acquisition de machines textiles. Elle estime donc que le montant total des adjudications était de 264.230 euros hors taxes et qu'il appartenait à la SAS MERCIER AUTOMOBILES, son mandataire, de recouvrer à son nom et pour son compte l'accessoire du principal c'est-à-dire la TVA.

Selon elle, en faisant supporter la TVA par le vendeur et non par l'acquéreur, la SAS MERCIER AUTOMOBILES a commis une faute et ce d'autant qu'elle reconnaît elle-même dans ses écritures que les prix des lots payés par les acheteurs l'ont été hors taxes.

Elle soutient, de plus, que c'était la TVA belge au taux de 21 % qui devait être appliquée, à charge éventuellement pour les acquéreurs de récupérer cette TVA auprès de l'administration fiscale belge en fournissant les documents nécessaires.

Elle conclut donc que la SAS MERCIER AUTOMOBILES a failli dans l'exécution de son mandat en ne recouvrant pas la TVA belge, qu'en tout état de cause, elle a fait preuve d'une extrême légèreté sur la question de la TVA et qu'elle n'a pas rempli son obligation de conseil et d'information.

Elle demande donc, à titre d'indemnité, le montant de la TVA non recouvrée.

Elle ajoute que la SAS MERCIER AUTOMOBILES lui a facturé une commission de 10 % hors taxes assise sur le montant hors taxes des adjudications alors qu'il n'y a eu aucun accord des parties sur ce taux puisqu'un montant de commission de 5 % avait été conclu.

Elle fait valoir que le fait que son conseil n'ait pas, dans un premier temps, élevé de contestations sur ce point ne constitue pas une renonciation à un droit, une telle renonciation ne pouvant être présumée.

Elle en déduit que la SAS MERCIER AUTOMOBILES reste redevable à son égard à hauteur de 65.916,19 euros soit :

montant hors taxes des adjudications : 264 230 euros

montant de la TVA à 21 % : 55 488,30 euros

à déduire le montant des acomptes déjà réglés : 240 590,61 euros

à déduire le montant de la commission de 5 % sur 464 230 euros : 13 211,50 euros

La SAS MERCIER AUTOMOBILES demande à la Cour de débouter la société COVERFIL de ses demandes, fins et conclusions. À titre subsidiaire, elle sollicite la réduction du montant du préjudice allégué à la somme de 4.410,69 euros et plus subsidiairement encore à la somme de 20.211,64 euros. En tout état de cause, elle prétend à la condamnation de la société COVERFIL à lui payer la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité procédurale sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Elle explique que :

la signature d'une réquisition de vente n'est que facultative, un accord verbal étant parfaitement valable

les recommandations du conseil national des ventes concernant la TVA ne s'appliquent qu'à la commission due par l'acquéreur et au sort applicable aux lots qui ne sont pas retirés dans un certain délai. En l'espèce, le catalogue édité pour la vente précisait clairement que les frais de vente étaient de 10,764% TVA incluse.

Des attestations démontrent, par ailleurs, que la vente aux enchères publiques a bien été précédée d'une information aux termes de laquelle les enchères seraient portées TVA incluse.

La vente organisée s'est avérée très complexe puisque certains adjudicataires étaient français, d'autres étaient des sociétés ressortissantes de l'union européenne, d'autres enfin étaient des sociétés étrangères n'ayant pas leur siège dans un état de l'union européenne. Il fallait donc tenir compte des différentes règles régissant les ventes aux enchères internationales de biens industriels d'occasion, ce qui a motivé la fixation d'une commission au taux de 10 %.

Selon un arrêt du conseil d'État du 14 décembre 1979, le principe applicable à de telles ventes est que lorsqu'un assujetti réalise une affaire moyennant un prix convenu qui ne mentionne aucune TVA, dans des conditions qui ne font pas apparaître que les parties seraient convenues d'ajouter au prix stipulé un supplément de prix égal à la TVA applicable à l'opération, la taxe due au titre de cette affaire doit être assise sur une somme égale au prix stipulé diminué notamment du montant de ladite taxe. Elle a donc considéré que :

La vente avait eu lieu TVA incluse

les adjudicataires ne payaient toutefois que le prix hors TVA

elle a transmis au vendeur le prix TTC en lui faisant donc l'avance de la TVA

le vendeur qui a reçu le prix TTC a réglé la TVA à l'administration fiscale territorialement compétente (ici l'administration belge) et a conservé le prix hors taxes

ayant fait l'avance de la TVA, elle s'est faite rembourser cette taxe par l'administration fiscale considérée.

Il devait donc revenir à la société COVERFIL une somme de 220.928,02 euros, après déduction sur le prix de vente de la TVA au taux de 21 %.

les frais vendeurs de 22.092,80 euros ont été calculés sur 10 % du montant hors taxes des ventes.

Après déduction de ces frais, la somme de 198.835,22 euros HT a été adressée à la société COVERFIL augmentée de la TVA avancée soit 41.755,39 euros, cette dernière somme devant être reversée à l'administration fiscale belge. C'est donc bien une somme de 240.590,61 euros TTC qui a, au final, été réglée par trois virements bancaires à la société COVERFIL. Si cette dernière a émis des factures erronées et a réglé trop de TVA, elle doit supporter les conséquences de ses erreurs.

Elle constate que les discussions relatives à la prétendue ignorance par COVERFIL d'une vente aux enchères publiques TVA incluses ou non, n'a, en réalité, aucun intérêt puisque le préjudice dont elle se prévaut n'en dépend pas. Elle rappelle, à toutes fins utiles, qu'un responsable de COVERFIL était présent lors des opérations de vente et qu'il n'a fait aucune remarque lorsqu'il a été indiqué que les opérations seraient menées TTC. Dans la mesure où aucun prix de réserve n'était fixé, elle explique que le prix d'adjudication résulte seulement de la loi de l'offre et de la demande, et que ce prix n'est en réalité que ce que les adjudicataires étaient prêts à payer pour obtenir le bien (alors que ceux-ci ont tenu compte de l'incidence de la TVA pour proposer les montants relatifs aux différentes machines de la société COVERFIL, seule la somme nette à débourser les intéressant). Ainsi, selon elle, si les enchères ont atteint les niveaux de prix relevés dans le décompte final, c'est parce que les adjudicataires savaient que la vente était faite TVA incluse et que si la vente avait été faite TVA en sus, les acquéreurs auraient émis des enchères d'un montant inférieur (probablement de 21 %). Elle estime dans ces conditions que la société COVERFIL ne rapporte la preuve d'aucun préjudice.

S'agissant du montant de la rémunération, elle constate qu'après réception du décompte de vente établi par ses soins et faisant clairement apparaître des frais vendeurs de 10 % hors taxes calculés sur le prix des adjudications hors taxes, la société COVERFIL n'a émis aucune protestation, alors que selon l'usage appliqué en Belgique flamande si une facture n'est pas contestée, elle devient purement et simplement applicable.

Dans l'hypothèse où la cour ferait droit à l'argumentation de la société COVERFIL et estimerait que les adjudications ont été faites TVA en sus, elle affirme que les demandes de la société COVERFIL ne se comprennent pas puisque les ventes sont exemptées de taxe sur la valeur ajoutée si les biens sont transportés de la Belgique vers un autre État de l'union européenne, ce qui a été le cas pour la plupart des machines (soit un montant de 205 310 euros du total de la vente) et qu'ainsi seule la somme de 276.603,20 euros aurait dû être transmise à COVERFIL avant déduction des honoraires, ce qui conduit à ce qu'elle lui soit redevable de 4.410,69 euros si le taux de commission est de 10 % et 20.211,64 euros si le taux de commission est de 5 %.

*

* * *

MOTIFS DE LA DECISION

L'article 1134 du code civil prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Selon l'article 1315 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, celui qui s'en prétend libéré doit justifier du paiement.

En l'espèce, les parties sont liées par un contrat de mandat tel que prévu par l'article L321-4 du code de commerce selon lequel 'l'objet des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques est limité à l'estimation de biens mobiliers, à l'organisation et à la réalisation de vente volontaires de meubles aux enchères publiques dans les conditions fixées à la présente loi. Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques agissent comme mandataires du propriétaire du bien (....)'.

Il appartient à la société COVERFIL qui prétend que le mandat conclu entre les parties n'a pas été correctement exécuté par le mandataire, la SAS MERCIER AUTOMOBILES, de rapporter la preuve du contenu du mandat (contesté par cette dernière) et notamment de l'accord des parties concernant la TVA.

Il n'est versé aucun élément aux débats sur ce point, les parties alléguant :

- d'une part, des usages entre commerçants (entre lesquels les prix sont habituellement entendus hors taxes), ce qui conduirait à dire que le mandat donné par la société COVERFIL, s'agissant de machines industrielles qui devaient être achetées par des sociétés ou entreprises commerciales même si la vente publique pouvait également accueillir des particuliers non commerçants, prévoyait que la vente serait faite hors taxes,

- d'autre part, de la jurisprudence du Conseil d'Etat, selon laquelle lorsqu'un document contractuel indique un prix sans préciser s'il comprend ou non la TVA, ce prix doit s'entendre TVA comprise, ce qui conduirait à penser que le mandat prévoyait une vente devant intervenir TTC.

En définitive, les principes et règles ci-dessus rappelés ne peuvent apporter d'éléments permettant de déterminer quelle était la commune intention des parties s'agissant de la TVA dans le cadre du mécanisme particulier que constitue le mandat donné à une société volontaire de vente aux enchères publiques.

Par contre, il y a lieu de constater que les opérations de vente aux enchères publiques se sont déroulées le 20 septembre 2005. Le catalogue édité à cette occasion ne faisait aucune référence au problème de TVA à l'exception de celle prévue pour les frais à la charge des acquéreurs (et ce conformément aux recommandations du conseil de vente volontaire de meubles aux enchères publiques). La SAS MERCIER AUTOMOBILES a indiqué aux acquéreurs, avant le début des enchères, que les prix annoncés étaient TTC (attestations de Monsieur [T] [Y], de Monsieur [W] [F], de Monsieur [R] [V] et de Monsieur [D]). Le fait qu'un responsable technique de la société COVERFIL ait été présent lors de cette annonce et qu'il n'ait fait aucune observation ne peut toutefois constituer la preuve de ce que le mandat était prévu pour que la vente soit faite TTC, la société COVERFIL précisant, sans être contredite, que son salarié était uniquement présent pour d'éventuelles informations techniques qui seraient demandées par les acquéreurs potentiels.

Cependant, il doit être déduit de ces éléments que la société COVERFIL ne rapporte aucun élément de preuve s'agissant du contenu précis du mandat qu'elle a donné à la SAS MERCIER AUTOMOBILES, et ne justifie pas, en conséquence, que cette dernière a commis une faute dans l'exécution de ce mandat. En effet, le montant des enchères, conformément aux modalités effectives de la vente du 20 septembre 2005, lui a été adressé à hauteur de 240.590,61 euros TTC (après déduction de la commission retenue par le commissaire priseur).

S'agissant de l'obligation d'information pesant sur la société de vente volontaire de meubles aux enchères publiques, il incombait à la SAS MERCIER AUTOMOBILES, professionnelle en la matière, de renseigner complètement son mandant sur les conditions de déroulement des opérations de vente. Il est certain, compte tenu du litige opposant les parties, qu'elle n'a pas complètement rempli cette obligation et notamment qu'elle ne lui a pas précisé si les enchères se dérouleraient TTC ou HT. Cependant, il convient de constater que les acquéreurs potentiels ont, eux, été informés dès le début des enchères sur ce point. Ils ont, en conséquence fait leurs offres et porté leurs enchères en tenant compte du fait que la TVA était incluse dans les montants annoncés. S'il leur avait été indiqué que les enchères portées ne comprenaient pas cette TVA et qu'il fallait donc ajouter 21% à celles-ci, seul le prix final à leur charge retenant leur attention, ils auraient proposé des montants minorés de 21%. Les sommes perçues par la société COVERFIL auraient, en définitive, été les mêmes. Elle ne rapporte donc la preuve d'aucun préjudice consécutif à cette mauvaise information.

Dès lors, la société COVERFIL doit être déboutée de sa demande tendant à la condamnation de la SAS MERCIER AUTOMOBILES au paiement de la TVA non recouvrée auprès des acquéreurs.

La SAS MERCIER AUTOMOBILES a facturé à la société COVERFIL une commission de 10% hors taxes assise sur le montant hors taxe des adjudications. Sollicitant le paiement de ce montant par son mandant, elle doit rapporter la preuve d'un accord sur ce point.

Or, la société COVERFIL conteste le taux de commission appliqué. Si, dans son courrier de réclamation du 22 mars 2006, son conseil n'avait pas contesté ce point, il n'en demeure pas moins que le défaut de réclamation à ce sujet ne peut valoir preuve d'un accord, et ce d'autant que le litige portait avant tout sur des sommes plus élevées représentant la TVA réclamée sur les ventes.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le taux de commission applicable est de 5 %, et ce d'autant que la SAS MERCIER a déjà facturé aux acquéreurs des commissions à hauteur de 9% hors taxes. La société COVERFIL était donc redevable à ce titre de la somme de 11.046,40 euros HT (soit montant des adjudications HT x 5% : 220.928,02 euros HT x 5%) ou 13.211,49 euros TTC (en prenant en compte la TVA française applicable, s'agissant d'une prestation de service effectuée en France par une entreprise française). Dans la mesure où la SAS MERCIER AUTOMOBILES a retenu à ce titre la somme de 22.092,80 euros HT, elle doit être condamnée au paiement de la somme de 11.046,40 euros HT soit 13.211,49 euros TTC.

En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté la société COVERFIL de sa demande d'application d'un taux de commission à 5%.

Les parties succombant partiellement en leurs prétentions, elles conserveront la charge de leurs dépens de première instance comme d'appel. Par ailleurs, il n'est pas inéquitable de laisser à la SAS MERCIER comme à la société COVERFIL la charge des frais exposés et non compris dans les dépens. Les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société COVERFIL de sa demande tendant à la condamnation de la SAS MERCIER AUTOMOBILES au paiement de la TVA non recouvrée auprès des acquéreurs ;

Statuant à nouveau,

DIT que le taux de la commission de la SAS MERCIER AUTOMOBILES doit être fixé à 5% du montant des adjudications ;

CONDAMNE, en conséquence, la SAS MERCIER AUTOMOBILES à payer à la société COVERFIL la somme de 13.211,49 euros TTC ;

LAISSE aux parties la charge de leurs dépens de première instance et d'appel ;

DIT n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ou en cause d'appel.

Le Greffier,Le Président,

Nicole HERMANTEvelyne MERFELD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 09/03741
Date de la décision : 03/05/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°09/03741 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-03;09.03741 ?
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