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22/02/2010 | FRANCE | N°05/05233

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 22 février 2010, 05/05233


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 22/02/2010



***



TIERCE OPPOSITION



N° de MINUTE :

N° RG : 05/05233



Arrêt (N° 2003/3912)

rendu le 21 Mars 2005

par le Cour d'Appel de DOUAI



REF : JD/AMD





DEMANDERESSE A LA TIERCE OPPOSITION



Madame [D] [X] épouse [I]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 17]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 12]



Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avo

ués à la Cour

Assistée de Maître Guy SIX, avocat au barreau de LILLE





DEFENDEURS A LA TIERCE OPPOSITION



Monsieur [H] [G]

né le [Date naissance 7] 1938 à [Localité 13]

demeurant [Adresse 10]

[Localité 9]



Repr...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 22/02/2010

***

TIERCE OPPOSITION

N° de MINUTE :

N° RG : 05/05233

Arrêt (N° 2003/3912)

rendu le 21 Mars 2005

par le Cour d'Appel de DOUAI

REF : JD/AMD

DEMANDERESSE A LA TIERCE OPPOSITION

Madame [D] [X] épouse [I]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 17]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 12]

Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour

Assistée de Maître Guy SIX, avocat au barreau de LILLE

DEFENDEURS A LA TIERCE OPPOSITION

Monsieur [H] [G]

né le [Date naissance 7] 1938 à [Localité 13]

demeurant [Adresse 10]

[Localité 9]

Représenté par la SCP COCHEME-LABADIE-COQUERELLE, avoués à la Cour

Ayant pour conseil la SCP ROFFIAEN LE FUR VILLESECHE MAZE, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE

Madame [E] [W]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 14]

demeurant [Adresse 21]

[Localité 11]

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour

Assistée de Maître Frédéric STEIMER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Evelyne MERFELD, Président de chambre

Pascale METTEAU, Conseiller

Joëlle DOAT, Conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT

DÉBATS à l'audience publique du 14 Décembre 2009 après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 Février 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président, et Nicole HERMANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

VISA DU MINISTERE PUBLIC : 04 juin 2007

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 décembre 2009

*****

M. [T] [I] s'est marié avec Mme [D] [X] le [Date mariage 8] 1984.

Il est décédé le [Date décès 5] 2002, sans laisser d'héritier réservataire.

Trois testaments olographes en date des 2 décembre 1999, 21 février 2000 et 2 juin 2001, instituant Mme [E] [W] légataire universelle, ayant été déposés au rang des minutes de Maître [N] [A], notaire associé à [Localité 18], celle-ci, par requête en date du 16 décembre 2002, a sollicité son envoi en possession.

Par ordonnance du même jour, le président du tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE a accueilli cette requête.

M. [U] [G], demi-frère de M. [I], a demandé la rétractation de cette ordonnance.

Par ordonnance en date du 22 mai 2003 rendue par le président du tribunal statuant en la forme des référés, il a été débouté de sa demande et condamné au paiement de la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par arrêt en date du 21 mars 2005, la Cour a confirmé l'ordonnance, débouté les parties de toutes autres demandes et condamné M. [H] [G] aux dépens d'appel.

Le pourvoi formé contre cet arrêt a fait l'objet, le 12 décembre 2006, d'une décision de non-admission par la Cour de Cassation.

Par acte d'huissier en date du 22 août 2005, Mme [D] [X] épouse [I] a fait assigner Mme [W] et M. [G] en tierce opposition de l'arrêt rendu le 21 mars 2005.

Auparavant, d'une part, par actes d'huissier en date des 17 et 22 mai 2003, M. [H] [G] et les consorts [Y], [C] et [F] [G] avaient fait assigner Mme [W] et Maître [A] devant le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE, pour, notamment, voir prononcer la nullité des deux testaments instituant Mme [W] légataire universelle, d'autre part, par actes d'huissier en date des 21 et 24 octobre 2003, Mme [X] avait fait assigner Mme [W] et Maître [A], notaire, devant le tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER aux fins de voir annuler les testaments et condamner Mme [W] pour recel de succession.

Par jugement en date du 23 janvier 2007, le tribunal d'AVESNES SUR HELPE a ordonné une mesure d'expertise en écritures confiée à Mme [B].

Par jugement en date du 2 mai 2007, le tribunal de BOULOGNE SUR MER a sursis à statuer jusqu'au prononcé de la décision de cette Cour sur la tierce opposition.

Par arrêt en date du 22 octobre 2007, la Cour, statuant sur la tierce opposition, a:

- rejeté l'exception de compétence (territoriale) soulevée par Mme [X]

- sursis à statuer jusqu'au dépôt du rapport de Mme [B], expert commis par le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE

- ordonné une expertise et commis pour y procéder Maître [V] [L], notaire à [Localité 16], avec pour mission de faire l'inventaire de l'actif de succession au jour du décès de M. [I] et de dresser un état des actes de disposition réalisés par Mme [E] [W] depuis l'envoi en possession

- dit que la mission du notaire prendra fin à l'issue de la procédure sur tierce opposition.

La Cour a observé, en effet, que, dans le cadre de la tierce opposition, le troisième document en date du 2 juin 2001 était contesté, alors que dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 21 mars 2005, seuls les testaments du 2 décembre 1999 et du 21 février 2000 étaient contestés, ce qui modifiait les termes du litige et que trois expertises non contradictoires en écriture avaient été réalisées, ayant donné lieu à trois rapports en date des 27 mai 2003, 29 août 2003 et 2 mai 2006, dont la Cour a relevé qu'elles ne contenaient aucune conclusion catégorique.

Enfin, la Cour a constaté que l'écriture des trois documents présentait des variations pouvant être en lien avec l'affection dont était atteint M. [I] et que les documents soumis à son appréciation étaient constitués de photocopies de mauvaise qualité dont l'examen était difficile, tandis qu'une expertise en écritures avait d'ores et déjà été ordonnée.

Le rapport d'expertise de Mme [B] a été déposé le 25 février 2008 et transmis à la Cour.

Dans ses conclusions en date du 4 décembre 2009, Mme [D] [X] demande à la Cour:

à titre principal,

- de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du nouveau rapport d'expertise graphologique sollicité dans le cadre de la procédure initiée par les consorts [G] devant le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE

subsidiairement,

- de mettre à néant l'arrêt du 21 mars 2005 et de prononcer la rétractation de l'envoi en possession du 16 décembre 2002

à titre infiniment subsidiaire,

- de constater que Mme [B], expert graphologue désignée par jugement du 23 janvier 2007 n'a respecté ni le principe du contradictoire, ni les droits de la défense

- de constater l'inopposabilité du rapport déposé par cet expert

- de désigner tel expert qu'il plaira aux fins de rechercher les éléments permettant d'identifier le rédacteur et le signataire des trois testaments olographes revendiqués par Mme [W], de comparer l'écriture et la signature de ces trois testaments avec celle de Mme [W], de se rendre en tout lieu et de prendre possession de tout document nécessaire à l'accomplissement de sa mission

en tout état de cause,

- de débouter Mme [W] de l'ensemble de ses demandes

- de la condamner à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [X], à l'appui de sa demande de sursis à statuer, explique qu'elle n'était pas partie à la procédure initiée par les consorts [G] devant le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE et qu'il aurait été contraire au principe du contradictoire de lui opposer un rapport d'expertise graphologique pour lequel elle n'aurait pas fait valoir ses propres prétentions et documents relatifs à l'écriture de son mari, que, pour cette raison, elle est intervenue volontairement dans ladite procédure à laquelle elle est devenue partie, mais que, l'expert, Mme [B], ayant refusé de tenir compte de ses pièces et arguments (et notamment de la carte d'identité en original du défunt, de son testament rédigé en original le 5 janvier 2000 en faveur de son épouse et des deux expertises graphologiques amiables).

Elle rappelle qu'une expertise n'est opposable à une partie que si elle a été appelée ou représentée à ses opérations, qu'au surplus, elle a appris que Mme [B] s'était rendue en l'étude de Maître [A], notaire partie à l'instance ci-dessus, pour effectuer des investigations techniques sans en informer les parties, ni les convoquer, qu'en conséquence, elle a sollicité la nullité du rapport d'expertise de Mme [B] et l'organisation d'une nouvelle expertise confiée à un autre expert.

Elle considère ainsi que la décision du tribunal d'AVESNES SUR HELPE est de nature à influer sur la présente instance.

Elle soutient que les trois testaments en date des 2 décembre 1999, 21 février 2000 et 2 juin 2001 n'ont été enregistrés que le 5 décembre 2002 en l'étude de Maître [A], ce qui peut laisser supposer qu'ils ont été établis après le décès de M. [I], survenu le [Date décès 5] 2002, tandis qu'elle-même bénéficie du testament olographe en date du 5 janvier 2000, rédigé devant notaire et qui a date certaine puisqu'il a été enregistré le 13 janvier 2000 au Fichier Central des Dernières Volontés par Maître [O], notaire, dont les dispositions sont très claires.

Elle affirme:

- que le testament du 2 décembre 1999 ne peut être de la main de M. [I], que Maître [A] lui-même, dans le cadre de la procédure pendante devant le tribunal de BOULOGNE SUR MER, a reconnu que ce testament était d'une écriture assez différente de celle habituellement utilisée par M. [I], que Mme [M], expert en écritures près la cour d'appel de PARIS et agréée par la cour de cassation, conclut qu'il semblerait que Mme [W] ait rédigé le texte et daté le testament du 2 décembre 1999 qui pourrait avoir été signé par M. [I] sans qu'on puisse déterminer s'il s'agit ou non d'un blanc-seing

- que le témoignage du notaire en date du 5 mars 2004 vient contredire les indications qu'il avait portées dans son procès-verbal de description et de dépôt de testaments dressé le 5 décembre 2002, ce qui remet en cause l'authenticité du testament du 21 février 2000, tandis que le rapport d'expertise graphologique amiable réalisé par Mme [K] à la demande de M. [G] a conclu que M. [I] était l'auteur de ce testament mais qu'il n'en était pas le signataire

- qu'il est incompréhensible que M. [I] rédige le 2 juin 2001 un nouveau testament sans raison apparente, qu'il existe une contradiction entre le témoignage de Maître [A], notaire, en date du 5 mars 2004, et son acte authentique de description et dépôt des testaments en date du 5 décembre 2002 et qu'il ressort clairement des conclusions de Mme [S], analyste graphologue, expert près la cour d'appel de DOUAI, que l'écriture du testament du 2 juin 2001 est formellement contestée, que son analyse est confortée par celle de Mme [M] (ci-dessus citée), qu'enfin, dans son arrêt en date du 21 mars 2005, la cour elle-même a émis spontanément des doutes sur l'écriture du testament du 2 juin 2001, mais qu'elle n'a pu se prononcer sur cette remise en cause, M. [G] ne la soulevant pas.

Mme [X], à titre infiniment subsidiaire, fait observer que la cour, dans son arrêt du 22 octobre 2007, a déjà estimé qu'une expertise graphologique était nécessaire et que, des opérations d'expertise étant en cours dans le cadre d'une autre procédure, il y avait lieu de s'y rattacher.

Elle ajoute que la Cour a admis l'existence d'un risque de dilapidation puisqu'elle a ordonné des mesures conservatoires, qu'il est clairement démontré que Mme [W] s'est précipitée pour être envoyée en possession des biens de M. [I], n'hésitant pas à tronquer les informations données au juge.

Elle s'oppose à la demande en dommages et intérêts, faisant valoir que son recours en tierce opposition ne peut être qualifié d'abusif, puisqu'elle ne fait que rétablir et reconnaître ses droits dans la succession de son mari dont elle a été évincée sciemment.

Elle déclare émettre les plus expresses réserves quant à la décision rendue par la cour le 22 octobre 2007 qui a rejeté l'exception d'incompétence territoriale.

Dans ses conclusions en date du 11 décembre 2009, M. [H] [G] demande à la Cour:

- de débouter Mme [W] de toutes ses demandes

- de déclarer recevable la tierce- opposition formée par Mme [X]

- d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à la décision devant intervenir devant le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE sur la question relative à la nullité du rapport d'expertise de Mme [B] et jusqu'au dépôt du rapport d'expertise de Maître [R] [J], notaire à LILLE

à titre subsidiaire,

- de mettre à néant l'arrêt rendu le 21 mars 2005 par la Cour

- de prononcer la rétractation de l'ordonnance d'envoi en possession du 12 décembre 2002

- d'ordonner une expertise graphologique aux fins de rechercher les éléments permettant d'identifier le rédacteur et le signataire des trois testaments dont se prévaut Mme [W]

en tout état de cause,

- de nommer tel administrateur, aux fins de dresser un inventaire de l'actif de succession de M. [I] au jour de son décès ainsi que l'actif existant au jour de la prise de fonction de l'administrateur, dresser un inventaire de tous les actes de disposition réalisés par Mme [W] et accomplir plus généralement tout acte d'administration de la succession de M. [I]

- de condamner Mme [W] à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [G] indique que la demande en nullité du rapport d'expertise de Mme [B] ainsi que la demande d'une nouvelle expertise sont totalement justifiées, alors qu'il est produit aux débats d'autres expertises graphologiques contredisant le rapport d'expertise judiciaire.

Il estime que dans sa lettre écrite au tribunal d'AVESNES SUR HELPE, Mme [B] a confirmé que le principe du contradictoire n'avait pas été respecté.

Il rappelle que la cour avait considéré qu'elle ne disposait pas des éléments nécessaires pour statuer sur le fond du dossier puisqu'il lui fallait connaître le rapport d'expertise judiciaire en écritures en ce qui concerne la nullité des testaments.

Il demande en conséquence la prolongation du sursis à statuer, puisque la cour ne saurait se baser sur le rapport de Mme [B] qui sera vraisemblablement annulé et que les opérations d'expertise confiées au notaire sont toujours en cours.

A titre subsidiaire, au fond, il développe son argumentation relative à l'irrégularité des testaments litigieux, en précisant que le contrôle de la validité apparente des droits du légataire doit également porter sur l'existence ou non d'un legs universel puisque seule l'existence d'un tel legs confère la saisine et justifie l'envoi en possession, la cour ne pouvant se référer aux testaments établis les 2 décembre 1999 et 21 février 2000 puisqu'elle ne peut s'appuyer sur des éléments extrinsèques au testament, que le testament du 2 juin 2001 fait référence à un autre testament du 22 février 2000 qui n'est pas versé aux débats et non pas à celui du 21 février 2000.

M. [G] affirme qu'à défaut de produire aux débats le testament du 22 février 2000, il n'est pas possible de connaître les dispositions testamentaires auxquelles renverrait le testament du 2 juin 2001.

Il en conclut que Mme [W] ne saurait être envoyée en possession de la succession de M. [I] sur la base des testaments dont elle se prévaut, ceux-ci étant indiscutablement irréguliers en la forme.

Il ajoute que l'attestation rédigée par Maître [A] le 5 mars 2004 contient un certain nombre de contradictions flagrantes, mais qu'en tout état de cause, elle ne dément pas l'expertise graphologique de Mme [K].

Il déclare que la cour ne pourra que mettre à néant l'arrêt rendu le 21 mars 2005 et prononcer la rétractation de l'ordonnance d'envoi en possession du 12 décembre 2002, que, le présent litige étant indivisible, puisqu'il n'est pas possible d'exécuter les deux décisions à la fois, c'est la décision rendue sur tierce opposition au terme d'un débat auquel toutes les parties auront été appelées, qui doit l'emporter, que Mme [W] ne pourra être considérée à la fois comme étant envoyée en possession à son égard aux termes de l'arrêt du 21 mars 2005 et non à l'encontre de Mme [X] s'il était fait droit à la demande en tierce opposition.

Subsidiairement, il indique que si la cour s'estimait insuffisamment informée, une expertise graphologique pourrait toujours être ordonnée.

Il s'oppose à la demande en dommages et intérêts formée à son encontre, au motif qu'il n'est pas l'auteur de la demande en tierce opposition, laquelle, en l'occurrence ne saurait être considérée comme dilatoire ou abusive.

Dans ses conclusions en date du 10 décembre 2009, Mme [W] demande à la cour:

- de dire irrecevable et en tout état de cause non fondée la demande de sursis à statuer

- de dire que les testaments des 21 février 2000 et 2 juin 2001 visés dans la requête aux fins d'envoi en possession du 16 décembre 2002 sont parfaitement réguliers

- de dire qu'elle est bien légataire universelle de l'ensemble des biens constituant la succession de M. [I] conformément à la volonté de ce dernier

- de dire que la présente procédure est abusive et dilatoire et lui cause un préjudice

- de débouter Mme [X] et M. [G] de leurs demandes

- de confirmer l'ordonnance

- de lui donner acte de l'opposabilité à Mme [X] de la décision à intervenir, notamment quant à la validité des testaments

- de condamner Mme [X] et M. [G] à une amende civile dont la cour appréciera le montant, en application des dispositions des articles 32-1 et 581 du code de procédure civile

- de condamner solidairement Mme [X] et M. [G] à lui payer à titre de provision une somme de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts chacun, en application des dispositions de l'article 581 du code de procédure civile.

Mme [W] fait observer que Mme [X] n'a aucun droit dans la succession de M. [I] puisqu'elle était l'épouse en instance de divorce, depuis le 4 août 1999, et séparée de ce dernier.

Elle s'oppose à la demande de sursis à statuer en remarquant que Mme [B] a répondu qu'elle avait effectué sa mission en tout honneur et toute conscience, dans le respect du contradictoire, au vu des documents qui lui avaient été remis par les parties et que, s'agissant d'une expertise sur documents, le fait de ne pas avoir convoqué à nouveau les parties à la suite de l'intervention de Mme [X] est sans conséquence.

Elle rappelle que, saisi d'une demande d'envoi en possession, le rôle du Président et par suite, de la cour d'appel, est limité à un contrôle de la validité apparente des droits du légataire universel.

Elle soutient que Mme [X] n'apporte aucun élément nouveau par rapport aux arguments développés par M. [G] et que la validité de ses propres droits de légataire universelle ne pourra qu'être confirmée, que ses droits résultent d'un testament olographe en date du 21 février 2000 qui a bien été rédigé et signé par M. [I] et qui renvoie à un testament en date du 2 décembre 1999, qu'un testament complémentaire a été établi le 2 juin 2001, rédigé et signé par M. [I] lui-même.

Elle précise qu'il n'existe aucune contradiction entre les trois testaments auxquels les uns et les autres renvoient, qu'après avoir rédigé le 5 janvier 2000 un testament en faveur de son épouse, il a pris soin de l'annuler en le visant très expressément dans le testament du 21 février 2000 qui vise celui du 2 décembre 1999, que le tout forme un ensemble parfaitement cohérent qui démontre que M. [I] était en totale possession de tous ses moyens et que sa volonté était libre et éclairée, ce qui est confirmé par les analyses graphologiques produites par M. [G] et Mme [X] dont les contradictions ne font que la renforcer dans son droit.

Elle fait valoir que le rejet d'une voie extraordinaire de recours entraîne pour celui qui l'exerce une amende et parfois des dommages et intérêts.

Elle invoque le préjudice que lui cause le très grand retard pris dans le règlement de la succession de M. [I], ce qui empêche la prise de décision quant à l'entretien et à la gestion d'un patrimoine immobilier et foncier estimé à plusieurs centaines de milliers d'euros.

SUR CE:

Les dispositions de l'article 445 du Code de Procédure Civile s'opposent à ce qu'il soit tenu compte de la note en délibéré adressée par Mme [X] épouse [I] à la Cour le 11 février 2010.

Il convient de constater que, dans son arrêt en date du 22 octobre 2007,

la présente cour a déjà statué sur la compétence territoriale du président du tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE.

Sur le sursis à statuer

La présente Cour a ordonné le sursis à statuer dans l'attente du dépôt du

rapport de l'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE sur l'écriture de M. [I] dans les trois testaments olographes, dont deux ont servi de support à l'ordonnance d'envoi en possession rendue par le président de ce même tribunal critiquée par Mme [X] épouse [I] dans le cadre de la présente tierce opposition.

Cette expertise avait été ordonnée par un jugement du tribunal d'AVESNES SUR HELPE en date du 23 janvier 2007 statuant, à la demande de M. [H] [G], demi-frère de M. [T] [I], et des consorts [G], à la fois sur une demande en annulation d'un partage et sur la demande d'annulation des trois testaments olographes ci-dessus.

Le rapport a été déposé.

Il se trouve à présent argué de nullité, au motif que l'expert judiciaire n'aurait pas respecté le principe du contradictoire.

L'affaire est toujours pendante devant le tribunal auquel il est demandé désormais la nomination d'un nouvel expert, ce qui justifie, selon Mme [X], auteur de la tierce-opposition, et M. [G], qui s'associe à cette demande, le prononcé d'un sursis à statuer.

Or, il n'appartient pas à la cour de statuer sur le fond du litige relatif à la validité des trois testaments, puisque le rôle du président du tribunal saisi d'une requête d'envoi en possession de legs universel est limité au contrôle de la validité apparente des droits du légataire universel.

Dès lors, si la cour a estimé nécessaire d'attendre les conclusions d'une expertise judiciaire précédemment ordonnée, aux fins de disposer des éléments d'appréciation nécessaires au contrôle qu'elle doit effectuer, et dans la mesure où l'ordonnance d'envoi en possession n'est qu'une mesure provisoire concernant la seule possession effective de l'hérédité et qu'elle n'a aucune autorité de chose jugée, elle ne saurait être tenue par le contentieux soulevé à propos de la régularité de la procédure d'expertise judiciaire poursuivie devant une autre juridiction dans le cadre d'une instance au fond distincte.

A ce sujet, il sera toutefois observé que, dans son rapport, Mme [B] précise que les originaux des trois testaments olographes ont été analysés le 30 janvier 2008 toute la journée à l'étude de Maître [N] [A], notaire à [Localité 18], après en avoir informé les parties et que, par ailleurs, elle a procédé à la comparaison des écritures au vu de documents originaux qui lui ont été remis par M. [U] [G] et son avocat.

M. [H] [G] sollicite en outre qu'il soit suris à statuer jusqu'au dépôt du rapport d'expertise de Maître [J].

Toutefois, s'agissant d'une mission d'inventaire, son résultat n'aura pas d'incidence sur la solution du présent litige.

Les demandes tendant au sursis à statuer, qui ne sont pas justifiées, doivent être rejetées.

Sur l'envoi en possession de Mme [E] [W]

En application de l'article 583 du code de procédure civile, est recevable

à former opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu'elle n'ait été ni partie, ni représentée à la décision qu'elle attaque.

L'article 1008 du code civil énonce que, dans le cas de l'article 1006, si le testament est olographe ou mystique, le légataire sera tenu de se faire envoyer en possession, par une ordonnance du président, mise au bas d'une requête à laquelle sera joint l'acte de dépôt.

Le contrôle de la validité apparente des droits du légataire universel qui demande l'envoi en possession de son legs porte sur la validité apparente du testament, l'existence d'un legs universel et l'absence d'héritiers réservataires.

Il est constant que M. [T] [I] n'a laissé ni ascendant, ni descendant, c'est à dire aucun héritier pouvant prétendre à un droit réservataire.

Par ailleurs, en vertu de l'article 914-1 du code civil, son conjoint survivant, Mme [D] [X], avec laquelle il était en instance de divorce, n'avait plus la qualité d'héritier successible et ne bénéficiait pas de la réserve légale instituée par l'article 757-2 du code civil.

Le présent litige porte uniquement sur la validité apparente des trois testaments olographes attribués à M. [T] [I], le président (et par suite la cour d'appel) n'étant que le juge de l'apparence des droits du légataire universel institué par ces testaments et ne pouvant s'appuyer sur des éléments extrinsèques à ceux-ci.

La cour d'appel, dans son arrêt en date du 21 mars 2005, a considéré que

les contestations fondées sur une expertise non contradictoire, celle de Mme [K], n'apparaissaient pas suffisamment sérieuses pour écarter la régularité formelle des deux testaments en date des 2 décembre 1999 et 21 février 2000, que la validité apparente d'un seul de ces deux testaments suffisait à justifier l'envoi en possession dès lors que Mme [E] [W] était désignée dans chacun d'eux en qualité de légataire universelle, que la dénégation de la signature du testament du 21 février 2000 apparaissait d'autant moins sérieuse que Maître [N] [A], notaire, déclarait dans son attestation datée du 5 mars 2004 qu'il avait été régularisé en sa présence.

Mme [X], à l'appui de sa tierce opposition, conteste la validité des trois testaments, en invoquant, d'une part leur irrégularité formelle, au motif qu'ils n'auraient pas été tous les trois rédigés et signés par M. [I], d'autre part, les contradictions entre l'acte de notoriété et le procès-verbal de description et dépôt de testaments en date du 5 décembre 2002, dressés par Maître [A], notaire, et l'attestation rédigée par ce dernier le 5 mars 2004.

Les trois testaments, déposés au rang des minutes de Maître [N] [A], notaire à [Localité 18], le 5 décembre 2002, ainsi qu'il résulte de l'acte de notoriété successorale dressé par ce même notaire le 10 décembre 2002, sont rédigés dans les termes suivants:

1) Je soussigné

Monsieur [T] [I] Industriel

domicilié à [Adresse 15] Epoux en Instance de Divorce de Mme [D] [X]

Né à [Localité 16], le [Date naissance 4] 1946

Sain de corps et d'esprit

Fais ainsi qu'il suit mon Testament

Je lègue à Mme [E] [P] [Z] [W] - sans profession- Célibataire Majeure demeurant à [Adresse 19]. Célibataire Majeure, née à [Localité 14], le [Date naissance 6] 1949

La pleine propriété de tous les biens qui pourront composer ma succession, sans aucune exception ni réserve, je l'institue en conséquence ma légataire universelle en pleine propriété

Tous les biens qui composeront ma succession lui appartiendront en conséquence en toute propriété et ce compris tous les contrats d'assurance vie souscrits par moi-même ou les sociétés pour 'lesquels' je travaille.

Je révoque tout testament antérieur

Fait en entier de ma main à [Localité 18]

le 2 décembre 1999

[T] [I]

2) Je soussigné [T] [I] demeurant au Touquet

Fait ainsi qu'il suit mon testament

Je révoque les dispositions prises au Touquet le 5 janvier 2000 et j'entends au contraire 'prevé' mon épouse de tous les droits dans ma succession, en ce compris les droits que lui accorde l'article 767 du code civil

Je confirme en tous points mes volontés exprimées dans mon testament en date du 2 décembre 1999 et confirme le legs universel je dit legs universel que j'ai consenti à Mlle [E] [W]

et en ce compris tous les contrats d'assurances vie souscrits par moi même et dont je la nomme bénéficiaire. Fait à [Localité 18], le 21 février 2000.

3) Je soussigné

Monsieur [T] [I]

demeurant à [Adresse 20] né à [Localité 16] le [Date naissance 4] 1946

Fais ainsi qu'il suit mon Testament

qui vient en complément de mon testament du 21 février 2000

J'entends priver

Madame [D] [X] mon épouse de tous droits

dans ma succession et notamment

des droits et usufruit que confère l'article 767 du code civil

voulant et entendant que celle-ci

soit complètement étrangère à son

règlement

Fait en entier de ma main à

Maubeuge le 2 juin 2001

[T] [I]

Dans la mesure où seuls les éléments intrinsèques des trois testaments doivent être pris en considération pour apprécier leur validité apparente, les différences de dates relevées dans l'attestation de Maître [A], qui viendraient contredire le fait que M. [I] aurait lui-même rédigé et signé les trois testaments, ne seront pas examinées.

Comme l'a dit la cour d'appel dans son arrêt du 22 octobre 2007, les rapports d'expertise amiable produits devant elle ne contenaient pas de conclusions catégoriques puisque:

- Mme [K] remettait en question l'écriture du premier testament mais non sa signature et contestait la signature du deuxième testament, mais non son écriture

- Mme [S] expliquait que la conclusion de l'examen du document du 2 juin 2001 était peu significative et que la probabilité pour que ce document soit de la main de M. [I] était très grande (53 %)

au surplus, elle indiquait que son analyse, faite sur photocopie, ne permettait pas d'étudier le type de trait ni sa pression

il y a lieu de rappeler que ce document, qui se référait expressément à celui du 21 février 2000, n'avait pas été contesté par M. [U] [G]

- Mme [M] insistait sur la mauvaise qualité des photocopies qui lui étaient soumises et émettait des réserves sur ses propres conclusions

elle ajoutait que les photocopies des testaments manquaient très nettement de contraste, qu'en dehors du testament du 2 décembre 1999, il était impossible de vérifier si le texte, la date et la signature étaient de la même main pour chacun d'entre eux.

tandis que la cour constatait que l'écriture des trois documents présentait des variations pouvant être en lien avec l'affection dont était atteint M. [I].

Or, d'une part l'examen du deuxième testament en date du 21 février 2000, dont l'écriture n'est pas contestée, permet de relever que la signature de ce document présente d'importantes similitudes avec celle portée au bas du premier testament du 2 décembre 1999 qui n'est pas non plus contestée, d'autre part, l'expert judiciaire, Mme [B], dans son rapport en date du 25 février 2008, dont la Cour n'a pas à apprécier la validité, puisqu'elle n'a pas ordonné l'expertise, et qui constitue un élément d'information au même titre que les trois rapports amiables, conclut ainsi qu'il suit:

- le testament olographe du 2 décembre 1999 n'a pas été écrit par M. [T] [I] mais il en est le signataire (conclusion similaire à celle de Mme [K])

- le testament olographe du 21 février 2000 a été écrit et signé par M. [T] [I]

en effet, l'expert a remarqué sur l'original du testament une parfaite homogénéité de trait (épaississements, massues, appuis), pression, direction, forme, entre le texte et la signature et a dit que ce testament avait été écrit et signé par la même personne.

- le testament olographe du 2 juin 2001 a été écrit et signé par M. [T] [I], l'expert ayant relevé une écriture saccadée, anguleuse, abîmée, irrégulière, tendue, crispée, tremblée.

Dans ses écritures, seul M. [G] fait état d'un testament du 22 février 2000 auquel M. [I] se serait référé dans son troisième testament du 2 juin 2001.

Or, la lecture du document du 2 juin 2001 fait apparaître qu'il s'agit de la date du 21 février et non de celle du 22 février, étant observé que, dans ce troisième testament, l'écriture de M. [I] était déjà fortement altérée et tremblée, mais cependant lisible.

Les considérations de M. [G] sur ce 'testament du 22 février 2000" sont dès lors inopérantes.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de constater la validité apparente du testament en date du 21 février 2000, confirmant les volontés exprimées par M. [T] [I] dans son testament en date du 2 décembre 1999 ainsi que le legs universel consenti à Mme [E] [W] et révoquant toutes les dispositions prises au Touquet le 5 janvier 2000 au profit de son épouse, et la validité apparente du testament du 2 juin 2001 qui y fait référence, de sorte que c'est à bon droit que l'envoi en possession a été ordonné.

Statuant sur la tierce opposition de Mme [D] [X] épouse [I], il y a lieu de la rejeter et de confirmer l'arrêt en date du 21 mars 2005 en ce qu'il a lui-même confirmé l'ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance d'AVESNES SUR HELPE statuant en la forme des référés, le 22 mai 2003.

Toutes les autres demandes, étrangères à la présente procédure sur tierce opposition, doivent être rejetées.

Mme [W] sera déboutée de sa demande tendant à la condamnation de Mme [X] au paiement d'une amende civile, sur le fondement de l'article 581 du code de procédure civile, le caractère abusif ou dilatoire du recours formé par cette dernière n'étant pas démontré.

La faute commise par Mme [X] en introduisant le présent recours n'est pas non plus établie, celle-ci ayant pu se méprendre sur l'étendue de ses droits et ayant pu souhaiter être partie prenante de la procédure d'envoi en possession.

Mme [W] sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts tant à l'égard de Mme [X] qu'à celui de M. [G], qui n'a fait que confirmer sa position de toujours.

Mme [X], partie perdante, sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive dirigée contre Mme [W].

Il y a lieu de mettre à la charge de Mme [X] les frais irrépétibles supportés par Mme [W], à hauteur de 4 000 euros.

M. [G] conservera à sa charge les frais irrépétibles qu'il a pu exposer.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant sur tierce opposition et par arrêt contradictoire:

vu l'arrêt rendu par cette cour le 22 octobre 2007,

REJETTE les demandes de sursis à statuer

DEBOUTE Mme [D] [X] épouse [I] de sa tierce opposition à l'encontre de l'arrêt du 21 mars 2005

DIT en conséquence que cet arrêt sortira son plein effet,

DEBOUTE les parties de leurs demandes en dommages et intérêts et de leurs autres demandes

DIT n'y avoir lieu à amende civile

CONDAMNE Mme [D] [X] aux dépens de la présente procédure en tierce opposition et dit que la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués, pourra les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

DIT que M. [U] [G] conservera à sa charge ses propres dépens

CONDAMNE Mme [D] [X] à payer à Mme [E] [W] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE les autres demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

N. HERMANT.E. MERFELD.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 05/05233
Date de la décision : 22/02/2010

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°05/05233 : Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-22;05.05233 ?
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