La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2009 | FRANCE | N°09/03226

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 29 juin 2009, 09/03226


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 29/06/2009



***



JOUR FIXE



N° de MINUTE : /09

N° RG : 09/03226



Jugement (N° 08/03420)

rendu le 13 Mars 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : BR/AMD





APPELANTS



Monsieur [K] [D]

né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 9]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]



Monsieur [M] [D]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 7]



demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]



Représentés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués associés à la Cour

Assistés de Maître TALLEUX, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE



Société Civile ARPEGE

ayant son siège social...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 29/06/2009

***

JOUR FIXE

N° de MINUTE : /09

N° RG : 09/03226

Jugement (N° 08/03420)

rendu le 13 Mars 2009

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BR/AMD

APPELANTS

Monsieur [K] [D]

né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 9]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]

Monsieur [M] [D]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]

Représentés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués associés à la Cour

Assistés de Maître TALLEUX, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

Société Civile ARPEGE

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par son gérant

Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués associés à la Cour

Assistée de Maître Gérald LAPORTE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 08 Juin 2009, tenue par Madame ROUSSEL magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Madame ROUSSEL, Président de chambre

Madame METTEAU, Conseiller

Madame MARCHAND, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame ROUSSEL, Président et Madame HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par jugement rendu le 13 mars 2009, le Tribunal de Grande Instance de Lille a :

- débouté Messieurs [K] et [M] [D] de leur demande de vente judiciaire,

- débouté la SCI ARPÈGE de sa demande au titre de la clause pénale,

-condamné solidairement Messieurs [K] et [M] [D] à garantir la SCI ARPÈGE de toute condamnation qui pourrait éventuellement intervenir à raison de l'impossibilité de réitérer la vente intervenue avec Monsieur [V],

- condamné Messieurs [K] et [M] [D] à payer à la SCI ARPÈGE la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Messieurs [K] et [M] [D] aux dépens.

Ces derniers ont relevé appel de cette décision.

A la requête de la SCI ARPÈGE le dossier a fait l'objet d'une fixation prioritaire.

Il est fait référence pour l'exposé des moyens et prétentions des parties devant la Cour à leurs dernières conclusions déposées le :

- 5 juin 2009 pour Messieurs [K] et [M] [D],

- 8 juin 2009 pour la SCI ARPÈGE.

RAPPEL DES DONNÉES DU LITIGE :

Selon acte sous seing privé, en date du 3 juin 2005, la SCI ARPÈGE a vendu à Messieurs [D] 9 appartements à usage d'habitation, dans un immeuble sis à [Adresse 8], au prix de 240 000 euros, sous condition suspensive d'obtention d'un prêt.

La vente devait être réitérée au plus tard le 30 septembre 2005, sauf prorogation possible d'un mois.

Les consorts [D] ont obtenu leur prêt le 30 juin 2007.

Le 18 février 2008 la SCI ARPÈGE a signé une promesse de vente concernant le même immeuble au profit d'un tiers, Monsieur [H], devant être réitérée pour le 18 avril 2008.

Le 29 février 2008, Messieurs [D] ont vainement mis en demeure la SCI ARPÈGE de réitérer la vente à leur profit.

Par acte du 18 mars 2008, Messieurs [D] ont fait assigner la SCI ARPÈGE afin de voir prononcer la vente judiciaire de l'immeuble à leur profit et d'obtenir la somme de 24 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La décision déférée a été rendue dans ces conditions.

A l'appui de leur appel, Messieurs [D] font essentiellement valoir que :

- la SCI ARPÈGE est de mauvaise foi alors qu'ils avaient signé le 10 juin 2005 un compromis de vente avec la SCI FORBEL, concernant un autre immeuble, et que les deux ventes devaient être réitérées concomitamment ; cependant la ville a indiqué vouloir exercer son droit de préemption pour l'immeuble de la SCI FORBEL,

- la venderesse a entendu proroger les délais contractuels, comme le montre les courriers du notaire du 29 août 2007 et du 3 octobre 2007,

- une cession de parts sociales a été conclue le 20 mars 2008 sur l'immeuble de la SCI FORBEL, ayant le même gérant que la SCI ARPÈGE, afin d'éviter l'exercice du droit de préemption,

- c'est à compter de cette signature que la SCI ARPÈGE n'a plus souhaité vendre l'immeuble [Adresse 8],

- ils attendent toujours la communication des diagnostics technique et de l'attestation 'Loi Carrez',

- le compromis de vente n'est pas caduc, les délais ayant été prorogés d'un commun accord,

- une clause de caducité serait potestative et donc nulle,

- le notaire pouvait confirmer l'engagement des parties ; il était le mandataire apparent du vendeur,

- la lettre de Monsieur [T], gérant de la SCI, en date du 13 septembre 2007, montre qu'il souhaitait toujours leur vendre l'immeuble,

- la condition suspensive d'obtention d'un prêt prévoit une clause de caducité qui concerne non le contrat mais seulement les conditions suspensives,

- cette clause vise la protection de l'acquéreur qui seul peut s'en prévaloir ou y renoncer,

- faute de notification de l'obtention ou du refus de prêt, dans les délais, la condition était considérée comme réalisée, et la vente parfaite,

- ils font sommation à la SCI de communiquer les diagnostics et l'attestation Loi Carrez,

- la SCI ne peut obtenir le paiement de la clause pénale, faute de mise en demeure,

- la demande de garantie doit être rejetée alors que les liens contractuels n'ont pas été rompus et qu'ils sont en droit de solliciter la vente judiciaire.

La SCI ARPÈGE conclut à la confirmation du jugement, sauf à obtenir la somme de 5 183 euros à titre de dommages-intérêts, en exposant que :

- le compromis signé le 3 juin 2005 est caduc dès lors que Messieurs [D] disposaient d'un délai expirant le 3 août 2005 pour justifier de leur prêt, sous peine de caducité de l'acte,

- l'interprétation de la clause de caducité faite par Messieurs [D] ne peut être retenue,

- la clause de caducité joue de plein droit,

- les parties ont entendu faire de la date de réitération un terme extinctif de droit,

- aucune prorogation amiable du compromis n'est intervenue,

- aucune clause ne prévoit l'interdépendance entre les deux ventes en cours,

- la cession conclue avec la SCI FORBEL n'est pas subordonnée à la vente de l'immeuble de la SCI ARPÈGE,

- 11 décembre 2006, Monsieur [T] a indiqué clairement que le compromis du 3 juin 2005 étant caduc et le 21 mars 2007, il a affirmé avoir remis son immeuble en vente,

- le courrier du notaire est postérieur à la date de caducité et le notaire ne disposait pas d'un pouvoir exprès pour proroger le compromis,

- Messieurs [T] ont expressément indiqué à Messieurs [D] que le compromis était caduc et ils ne peuvent donc se prévaloir d'un mandat apparent du notaire,

- Messieurs [D] doivent la garantir des éventuelles poursuites de Monsieur [V] pour ne pas avoir régularisé la vente dans le délai prévu,

- la résistance abusive de Messieurs [D] lui cause un préjudice.

SUR CE :

Il ressort de l'examen de l'ensemble des éléments du dossier que les premiers juges ont effectué en l'espèce une exacte analyse des faits de la cause et une juste appréciation des droits des parties relativement à la demande en vente judiciaire.

Il s'avère, en effet, que l'acte du 3 juin 2005 comprend, au sein de la condition suspensive d'obtention d'un prêt, une clause de caducité de plein droit pour le cas où l'acquéreur n'aurait pas obtenu une offre de prêt dans les deux mois de la signature de l'acte, soit le 3 août 2005.

Cette clause, ainsi rédigée, 'A défaut, les présentes seront caduques et de nul effet sans qu'il soit besoin d'aucune mise en demeure ni formalité judiciaire' n'est pas stipulée au profit de l'acquéreur et ne peut être considérée comme une condition purement potestative dès lors que sa réalisation ne dépend pas du vendeur.

Cette clause qui concerne la caducité de la vente doit recevoir application alors qu'aucune renonciation conventionnelle à s'en prévaloir, à l'époque de la seconde vente au profit de Monsieur [V] effectuée par acte sous seing privé du 18 février 2008, n'est caractérisée.

En effet, si la SCI ARPÈGE a, durant une certaine période, tenté de poursuivre la vente malgré la caducité encourue, il apparaît qu'à compter de Mars 2007 elle n'entendait plus contracter aux conditions de l'acte du 3 juin 2005.

Ainsi, dans son courrier du 11 décembre 2006, Monsieur [T], gérant de la SCI ARPÈGE relevait : 'le compromis de vente est depuis longtemps périmé'.

Par courrier du 21 mars 2007 elle invoquait l'évolution du prix de l'immobilier et la nécessité de renégocier, aucun accord de prêt n'étant justifié.

De même, le 9 juillet 2007, Monsieur [T] écrivait à Monsieur [D] : 'Le compromis n'est pas valable'.

Dans ces conditions, la lettre du 29 août 2007 de Maître [X], notaire chargé de la réitération de la vente, faisant état de l'accord de Monsieur [T] pour vendre à Messieurs [D] les lots de copropriété en cause, concomitamment avec la cession de l'immeuble [Adresse 6], ne suffit pas à caractériser l'accord du vendeur pour renoncer à la caducité contractuelle encourue;

En effet, aucun mandat exprès n'a été donné au notaire et Messieurs [D] ne peuvent valablement se prévaloir d'un mandat apparent de celui-ci alors qu'au regard des longues discussions intervenues avec le vendeur et de la volonté réitérée de la SCI de renoncer à la résolution de l'acte du 3 juin 2005, ils ne pouvaient, sans interroger le notaire sur la volonté réelle de la SCI, être assurée de la volonté persistante de celle-ci de leur vendre les lots en cause.

Il sera ajouté qu'en tout état de cause, la tolérance admise par la SCI, qui n'a pas invoqué immédiatement la clause de caducité, pouvait être révoquée par celle-ci en cas de non obtention persistante du prêt.

En l'espèce et en l'état du dossier Messieurs [D] ne justifient toujours pas d'une offre de prêt.

En effet, les 'notifications d'accord de prêt' (pièce 4 de Messieurs [D]) datées du 30 juin 2007 et 31 mai 2007 correspondent en réalité, non à des offres de prêt mais à de simples accords de principe, ces notifications précisant que 'ce financement n'interviendra qu'après réalisation des formalités contractuelles et la prise des garanties stipulées dans le contrat qui vous sera prochainement remis'.

Ce contrat n'est pas produit et il n'est nullement établi que ce projet de financement ait abouti, notamment au regard des conditions d'assurances et de garanties.

D'ailleurs, par courrier du 3 octobre 2007, le notaire interrogeait Messieurs [D] afin d'être informé de l'obtention de leurs crédits.

Aucune réponse à ce courrier n'est justifiée.

Il s'avère, ainsi, que postérieurement au courrier du notaire du 29 août 2007, Messieurs [D] n'ont pas justifié de l'obtention d'un prêt pour acquérir le lot de copropriété, [Adresse 8], et qu'ils n'en justifient toujours pas en l'état du dossier.

La SCI ARPÈGE est donc fondée à invoquer la clause de caducité stipulée à l'acte du 3 juin 2005.

Il sera, de plus, relevé que cet acte ne vaut pas vente au sens de l'article 1589 du code civil dès lors que les parties ont expressément entendu déroger à ce texte en stipulant :

- Page 2 : 'le vendeur demeure propriétaire de l'immeuble',

- Page 6 : 'par dérogation à l'article 1589 du code civil, les parties conviennent que la vente n'existera qu'à la régularisation de cet acte authentique de vente (accompagné du paiement de l'intégralité du prix et des frais)'.

Au vu de ces considérations, il convient de débouter Messieurs [D] de leurs demandes en vente forcée.

Ceux-ci doivent également être déboutés de leurs demandes en dommages-intérêts alors que la non-réalisation effective de la vente résulte du fait qu'ils n'ont pas justifié avoir obtenu un prêt, tant dans le délai stipulé à l'acte du 3 juin 2005 que postérieurement et même qu'actuellement.

La vente ne pouvant être réitérée eu égard à l'absence d'accord du prêt et à la caducité contractuelle constatée, la non-réalisation des conditions suspensives relatives aux diagnostics et au mesurage s'avère sans incidence sur le présent litige.

En ce qui concerne la demande de la SCI ARPÈGE en paiement de la clause pénale, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a relevé l'absence de mise en demeure délivrée conformément aux stipulations de l'acte du 3 juin 2005.

En ce qui concerne la condamnation de Messieurs [D] à garantir d'éventuelles condamnations qui pourraient intervenir en raison de l'impossibilité de réitérer la vente intervenue avec Monsieur [V], il apparaît en l'état du dossier qu'il n'est justifié d'aucune action de ce chef et a fortiori d'aucune condamnation et que cette demande, présentée en l'absence de litige né et actuel, est irrecevable.

La décision déférée sera réformée de ce chef.

Les premiers juges ont effectué une juste application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SCI ARPÈGE la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Messieurs [D], qui succombent dans leurs principales prétentions, doivent être déboutés de leurs demandes à ce titre et condamnés aux entiers dépens.

La procédure ne s'avérant pas manifestement abusive, la SCI ARPÈGE doit être déboutée de sa demande en dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné Messieurs [D] à garantir la SCI d'éventuelles condamnations,

Le réforme de ce chef,

Déclare cette demande irrecevable,

Y ajoutant :

Condamne Messieurs [K] et [M] [D] à payer à la SCI ARPÈGE la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Condamne Messieurs [K] et [M] [D] aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP COCHEME KRAUT LABADIE, avoués associés, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

N. HERMANT.B. ROUSSEL.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 09/03226
Date de la décision : 29/06/2009

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°09/03226 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-06-29;09.03226 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award