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09/03/2009 | FRANCE | N°07/05018

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 09 mars 2009, 07/05018


COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 09/03/2009



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* *



N° de MINUTE : /09

N° RG : 07/05018



Jugement (N° 03/9683)

rendu le 28 Juin 2007

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE



REF : MM/CB





APPELANTS



S.A.R.L. CROKENDY

ayant son siège social

[Adresse 2]

[Localité 19]

représentée par son représentant légal



Monsieur [L] [H]

né le [Date naissance 8] 1952 à [Localité 21

]

demeurant [Adresse 13]

[Localité 11]



Monsieur [E] [A]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 18]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 19]



tous représentés par la SCP THERY-LAURENT, avoués associés à la Cour

ayant pou...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 09/03/2009

*

* *

N° de MINUTE : /09

N° RG : 07/05018

Jugement (N° 03/9683)

rendu le 28 Juin 2007

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : MM/CB

APPELANTS

S.A.R.L. CROKENDY

ayant son siège social

[Adresse 2]

[Localité 19]

représentée par son représentant légal

Monsieur [L] [H]

né le [Date naissance 8] 1952 à [Localité 21]

demeurant [Adresse 13]

[Localité 11]

Monsieur [E] [A]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 18]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 19]

tous représentés par la SCP THERY-LAURENT, avoués associés à la Cour

ayant pour conseil Maître Patricia CHEVALLIER-DOUAUD, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS

Monsieur [F] [D]

né le [Date naissance 7] 1959 à [Localité 14] (LIBAN)

Madame [X] [J] épouse [D]

née le [Date naissance 6] 1959 à [Localité 17]

demeurant ensemble [Adresse 3]

[Localité 10]

représentés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués associés à la Cour

assistés de Maître Jean-Louis POISSONNIER, avocat au barreau de LILLE

Monsieur [S] [W]

né le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 20]

Madame [Z] [C] épouse [W]

née le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 19]

demeurant ensemble [Adresse 12]

[Localité 9]

représentés par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués associés à la Cour

ayant pour conseil Maître LOSFELD, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 04 Décembre 2008, tenue par Madame MARCHAND magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Madame ROUSSEL, Président de chambre

Madame METTEAU, Conseiller

Madame MARCHAND, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 9 Mars 2009 après prorogation du délibéré en date du 16 Février 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame ROUSSEL, Président et Madame HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 24 Novembre 2008

*****

Par acte sous seing privé du 7 janvier 2003, Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] ont vendu une maison à usage d'habitation, située à [Adresse 16] à Monsieur [R] [A] et Monsieur [L] [H], qui se sont engagés à acquérir ledit immeuble, sous réserve de la réalisation de conditions suspensives, moyennant le prix de 548.145 euros.

Aux termes de cet acte, il était notamment stipulé :

- que l'acquéreur serait propriétaire du bien à compter du jour de la signature de l'acte authentique dont la date était prévue pour le 30 mai 2003 au plus tard ;

- que dans le cas où les époux [D] - [J] n'auraient pas trouvé de relogement, l'acquéreur acceptait de laisser les vendeurs dans le bien vendu jusqu'au 30 juin 2003 au plus tard ;

- que Messieurs [R] [A] et [L] [R] procédaient à cette acquisition sans recourir à aucun prêt.

Le compromis de vente comprenait en outre les clauses suivantes :

« Les présentes constituent dès leur signature un accord définitif sur la chose et sur le prix.

En application de la rubrique réalisation ci-avant, il est convenu qu'au cas où l'une des parties viendrait à refuser de régulariser par acte authentique la présente vente dans le délai imparti, sauf à justifier de l'application d'une condition suspensive, elle pourra y être contrainte par tous les moyens et voies de droit en supportant les frais de poursuites et de recours à justice et sans préjudice de tous dommages et intérêts.

Toutefois, la partie qui n'est pas en défaut pourra, à son choix, prendre acte du refus de son cocontractant et invoquer la résolution du contrat.

Dans l'un et l'autre cas, il est expressément prévu que la partie qui n'est pas en défaut percevra, à titre d'indemnisation forfaitaire de son préjudice la somme de 32.370 euros. »

*****

Par acte sous seing privé du 8 avril 2003, Messieurs [R] [A] et [L] [H] ont vendu une partie de la maison susmentionnée à Monsieur [S] [W] et Madame [Z] [C] épouse [W], qui se sont engagés à acquérir ledit bien, sous réserve de la réalisation de conditions suspensives, moyennant le prix de 457.350 euros.

Aux termes de cet acte, il était notamment stipulé :

- que l'acquéreur serait propriétaire du bien à compter du jour de la signature de l'acte authentique dont la date était prévue pour le 25 juin 2003 ;

- que les époux [W] - [C] procédaient à cette acquisition sans recourir à aucun prêt.

Il était inséré par mention manuscrite, une condition suspensive, au profit du vendeur, libellée ainsi qu'il suit :

« Cette vente est liée à la bonne fin du compromis signé entre les vendeurs et Monsieur et Madame [D], actuel propriétaire de la maison vendue en date du 7 janvier 2003 ' cette clause étant limitée à la date du 31 mai 2003. »

Ledit acte comprenait en outre les mêmes clause que celles-ci dessus énoncées figurant dans le compromis du 7 janvier 2003, le montant de l'indemnité forfaitaire étant fixé à la somme de 46.000 euros.

Le 3 juin 2003, Maître [T], notaire des époux [W] - [C] écrivait à Maître [V], notaire de Messieurs [R] [A] et [L] [H] :

« Je reviens vers vous dans le cadre du dossier cité en références (vente [A] et [H] à [W]).

La régularisation de l'acte de vente par Monsieur et Madame [D] au profit de Messieurs [A] et [H] qui devait intervenir en date du 2 juin 2003 n'a pas eu lieu.

La promesse de vente par Messieurs [A] et [H] au profit de Monsieur et Madame [W], en date du 8 avril 2003, était conditionnée à la réalisation de cette vente.

La condition suspensive de la vente de la maison par Monsieur et Madame [D] au profit de Messieurs [A] et [H] , n'étant pas réalisée, nous ne pouvons que constater la caducité de la promesse, vos clients n'étant pas à même de respecter leurs engagements ' »

*****

Le 4 juin 2003, les époux [D] ' [J] faisaient sommation par voie d'huissier à Messieurs [R] [A] et [L] [H] d'avoir à se présenter en l'étude notariale le 11 juin 2003 à 17h00, à l'effet de signer l'acte définitif de vente, avec paiement à cette date du prix de vente, des frais et droits dudit acte et de la commission de l'agence à la charge des acquéreurs.

Cette sommation comportait la mention suivante :

« A défaut de régularisation de l'acte de vente à cette date, les vendeurs seront, conformément à la promesse de vente en date du 7 janvier 2003, libres de tout engagement vis-à-vis des acquéreurs défaillants et exigeront conformément aux termes de ladite promesse, la somme de 32.370 euros à titre de clause pénale compte tendu de la défaillance des acquéreurs. »

Le 12 juin 2003, Maître [T] écrivait aux époux [D] - [J] :

« Comme vous le savez, Monsieur [A] s'est présenté le 11 juin 2003, sans Monsieur [H], suite à la signification que nous avions faite par huissier sans pouvoir payer le prix et les frais de l'acte de vente. 

Vous êtes donc aujourd'hui normalement dégagés de toute obligation vis-à-vis de Monsieur [A] et Monsieur [H].

Monsieur [A] et Monsieur [K] représentant l'agence immobilière ont proposé le montage suivant :

.signature d'un acte constatant la réalisation de la promesse de vente initiale et la défaillance de Monsieur [A] moyennant le paiement d'une indemnité par l'acquéreur à votre profit d'un montant de 45.734,71 euros,

.signature d'un acte de vente définitif avec paiement d'une partie du prix comptant soit 60.979,61 euros et le surplus payable à terme soit la somme de 487.165,39 euros.

Cette somme devrait être payée à la date du 4 juillet 2003, date à laquelle vous devez libérer les lieux '

Je me tiens à votre disposition pour en discuter et vous remercie de me faire part de votre décision définitive le plus rapidement possible ' »

Le 27 juillet 2003, Monsieur [L] [H] adressait à Maître [T] le courrier suivant :

« Les termes de nos accords passés à votre étude étant restés sans suite, je vous remercie de me restituer mon dépôt de garantie de 22.865 euros pour clore ce dossier. »

Par courrier du 23 septembre 2003, Maître [T] indiquait à Monsieur [L] [H] :

« Je n'ai pas l'accord du vendeur pour vous restituer le dépôt de garantie que vous avez versé ».

*****

Par acte sous seing privé du 18 juin 2003, les époux [D] - [J] ont conclu avec les époux [W] ' [C], une promesse synallagmatique de vente de leur maison d'habitation, moyennant le prix de 590.000 euros.

*****

Par exploit d'huissier du 28 octobre 2003, les époux [D] ' [J] ont fait assigner Messieurs [R] [A] et [L] [H] devant le tribunal de grande instance de Lille.

Suivant acte d'huissier du 3 novembre 2003, Messieurs [R] [A] et [L] [H] ont fait assigner les époux [D] - [J] et les époux [W] - [C] devant la même juridiction.

La jonction entre les deux instances a été ordonnée par le juge de la mise en état.

La SARL CROKENDY est intervenue à l'instance aux côtés de Messieurs [R] [A] et [L] [H].

Par jugement en date du 28 juin 2007, le tribunal a :

- rejeté la fin de non recevoir tirée du principe de l'estoppel, soulevée par les époux [W] - [C] ;

- rejeté l'exception d'irrecevabilité sur le fondement de l'article 30-5 du décret du 4 janvier 1955, soulevée par les époux [W] - [C] ;

- débouté Messieurs [R] [A] et [L] [H] de leurs demandes ;

- condamné Messieurs [R] [A] et [L] [H] à verser aux époux [D] - [J] la somme de 32.370 euros au titre de la clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;

- débouté les époux [D] - [J] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné Messieurs [R] [A] et [L] [H] à verser aux époux [D] - [J] la somme de 1.500 euros et aux époux [W] - [C] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- condamné Messieurs [R] [A] et [L] [H] aux dépens.

Par déclaration du 2 août 2007, la SARL CROKENDY et Messieurs [R] [A] et [L] [H] ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 7 octobre 2008, ils demandent à la cour :

vu les articles 1134 et suivants, 1152, 1589 et suivants du code civil,

- de constater l'existence de la fraude entre les époux [D] ' [J] et les époux [W] ' [C] au préjudice des bénéficiaires de la promesse, Messieurs [R] [A] et [L] [H] ;

- d'ordonner l'annulation de la vente conclue entre les époux [D] ' [J] et les époux [W] ' [C] ;

- de constater la défaillance des époux [D] ' [J] à la suite du compromis de vente signé le 7 janvier 2003 ;

- de dire que l'absence de régularisation de la vente de l'immeuble est exclusivement imputable aux époux [D] - [J] ;

- de condamner les époux [D] ' [J] à leur payer la somme de 32.370 euros à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale ;

- d'ordonner la régularisation du compromis en date du 7 janvier 2003 signé entre Messieurs [R] [A] et [L] [H] et les époux [D] ' [J] et de dire que le « jugement » à intervenir vaudra acte authentique ;

- de constater la défaillance des époux [W] ' [C] à la suite du compromis de vente signé le 8 avril 2003 ;

- de dire que l'absence de régularisation de la vente de l'immeuble est exclusivement imputable aux époux [W] ' [C] ;

- de condamner les époux [W] ' [C] à payer à Messieurs [R] [A] et [L] [H] la somme de 46.000 euros à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale ;

- d'ordonner la libération des fonds actuellement déposés sous forme séquestre entre les mains de Maître [T] et s'élevant à la somme de 22.865 euros ;

- de condamner solidairement les époux [D] ' [J] et les époux [W] ' [C] à leur payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- de les condamner solidairement aux dépens.

Ils exposent que l'immeuble objet du compromis conclu avec les époux [D] ' [J] était destiné à la revente sous forme de trois lots.

Ils soutiennent que cet acte ne prévoit aucune sanction dans l'hypothèse d'un non respect du terme prévu pour réaliser la vente ; qu'il n'est en effet nullement stipulé l'existence d'une caducité automatique.

Ils font valoir qu'en vertu des clauses de ce contrat, chaque partie peut exiger de l'autre l'exécution de son engagement, c'est-à-dire la vente forcée ou la résolution du contrat avec octroi de dommages et intérêts.

Ils prétendent que les époux [D] ' [J] n'ont pas manifesté de manière expresse et non équivoque leur volonté de ne pas réitérer la vente par la régularisation de l'acte authentique.

Ils allèguent que l'existence d'une interdépendance entre les deux promesses de vente signées avec les époux [D] ' [J] d'une part et avec les époux [W] - [C] d'autre part, implique que le deuxième compromis est valide, la validité du premier acte entraînant l'impossibilité de se prévaloir de la défaillance de la condition suspensive insérée dans le deuxième compromis.

Ils soutiennent que les intimés se sont rendus coupables de concertation frauduleuse ; que les époux [W]-[C] étaient opposés à ce que soit établie une division cadastrale avec servitude de surplomb et que de leur côté, les époux [D] - [J] ont trouvé plus avantageux de contracter avec ces derniers ; que les concluants sont dès lors fondés à solliciter l'annulation de la seconde vente, laquelle est constitutive d'une faute contractuelle de la part du vendeur, engageant sa responsabilité.

Ils précisent que les époux [W] ' [C] ont finalement concrétisé le projet que les concluants avaient élaboré en revendant une partie de l'immeuble dont ils avaient fait l'acquisition auprès des époux [D] ' [J].

Par conclusions déposées le 19 mai 2008, les époux [D] - [J] demandent à la cour :

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il a omis la SARL CROKENDY au titre des parties condamnées et la solidarité entre elles ;

- de le confirmer pour le surplus ;

- en conséquence, de condamner solidairement Messieurs [R] [A] et [L] [H] et la SARL CROKENDY à leur payer la somme de 32.370 euros, avec intérêts judiciaire à compter du 27 octobre 2003, jour de la délivrance de l'assignation ;

- d'ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ;

- de condamner solidairement les appelants et, subsidiairement Messieurs [R] [A] et [L] [H] seuls, à leur payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- subsidiairement, de confirmer la décision entreprise et, y ajoutant en cause d'appel, d'ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner solidairement Messieurs [R] [A] et [L] [H] et la SARL CROKENDY à payer aux concluants la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et celle de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- de les condamner solidairement aux dépens.

Ils font valoir que les appelants ne s'étant pas présentés en l'étude du notaire le 11 juin 2003, en dépit de la sommation qui leur avait été délivrée, ils ont été dégagés de toute obligation à l'égard de Messieurs [R] [A] et [L] [H].

Ils précisent que peu de temps après, l'agence immobilière du Fer à [Adresse 15], qui avait servi d'intermédiaire pour la signature des deux compromis, leur a proposé de faire affaire avec les époux [W] ' [C].

Ils prétendent que l'assignation qui leur a été délivrée par Messieurs [R] [A] et [L] [H] et l'appel que ces derniers ont interjeté revêtent un caractère abusif.

Par conclusions déposées le 10 novembre 2008, les époux [W] - [C] demandent à la cour :

- de confirmer le jugement déféré ;

- de débouter Messieurs [R] [A] et [L] [H] de leurs demandes ;

- de les condamner in solidum à payer aux concluants la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- de condamner in solidum Messieurs [R] [A] et [L] [H] et la SARL CROKENDY aux dépens, de première instance et d'appel.

Ils font valoir qu'à la date du 31 mai 2003, la condition suspensive stipulée dans le compromis conclu avec Messieurs [R] [A] et [L] [H] n'était pas réalisée et que de plus, l'immeuble n'était pas libre d'occupation ; que la défaillance de cette condition a entraîné un anéantissement automatique de l'acte ; que les concluants se sont trouvés en conséquence déliés de tout engagement à l'égard des appelants, de sortes qu'ils n'avaient nul besoin de manifester leur intention de ne plus acquérir.

Ils exposent qu'hormis la condition suspensive liée à la bonne fin du compromis signé entre Messieurs [R] [A] et [L] [H] et les époux [D] - [J], il n'existe aucun interdépendance entre l'acte signé le 7 janvier et celui signé le 8 avril 2003 ; qu'il n'a nullement été stipulé dans cette dernière convention que le délai de réalisation de la condition suspensive suivrait les aléas du compromis signé le 7 janvier 2003.

Ils prétendent par ailleurs que l'acte sous seing privé du 8 avril 2003 ne mentionnait pas l'existence d'une servitude de surplomb et qu'ils pouvaient légitimement refuser de se voir imposer a posteriori des sujétions sur l'immeuble qu'ils envisageaient d'acquérir.

MOTIFS :

Il convient tout d'abord de relever qu'aucune des parties ne critique le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée du principe de l'estoppel et l'exception d'irrecevabilité fondée sur l'article 30-5 du décret du 4 janvier 1955, soulevées par les époux [W]-[C], de sorte que la cour n'est pas saisie de ces chefs.

1) sur le compromis de vente du 7 janvier 2003

Le 24 avril 2003, Maître [V], notaire de Messieurs [R] [A] et [L] [H] écrivait à Maître [T], notaire des époux [D] ' [J] et des époux [W] ' [C] :

« J'accuse réception de votre projet d'acte concernant le dossier repris sous rubrique (vente [D]/ [A] et [H]) qui n'appelle aucune observation particulière de ma part.

Je vous précise néanmoins que Monsieur [A] va constituer une SARL pour acquérir, sous le statut de marchand de biens et qu'il a obtenu un prêt'

Le compromis de vente prévoit une date butoir de signature au 30 mai prochain, dans l'immédiat, il y a lieu de reporter la date de régularisation. »

Le 10 mai 2003, Maître [T] lui répondait en ces termes :

«  Mon client souhaite que la signature de l'acte intervienne en mon étude le lundi 2 juin 2003 à 11h00 '

La signature du compromis étant intervenue le 7 janvier 2003, mon client n'acceptera pas un report de la date de la signature. »

Il est établi par cet échange de courriers que Messieurs [R] [A] et [L] [H] sont les seuls responsables du non respect du délai fixé dans la promesse pour la réitération de la vente par acte authentique.

La délivrance le 4 juin 2003 par les époux [D]-[J] aux appelants d'une sommation par voie d'huissier d'avoir à se présenter en l'étude notariale le 11 juin 2003 à 17h00, à l'effet de signer l'acte définitif de vente, avec paiement le même jour du prix de vente, des frais et droits dudit acte et de la commission de l'agence à la charge des acquéreurs, caractérise de manière non équivoque le refus des vendeurs d'une prolongation dudit délai au-delà du 11 juin 2003, peu important à cet égard qu'entre le 31 mai et le 3 juin 2003, des négociations aient pu se poursuivre entre les parties sous l'égide de l'agence immobilière du Fer à Cheval.

Il ressort de la lettre adressée dès le lendemain par Maître [T] aux époux [D]-[J], que le 11 juin 2003, Monsieur [R] [A] s'est présenté seul en l'étude du notaire pour indiquer qu'il n'était pas en mesure de payer le prix de vente de la maison.

Aucune pièce du dossier ne permet d'établir qu'un accord serait postérieurement intervenu entre les parties sur la base de la proposition faite par Monsieur [R] [A] devant Maître [T] consistant :

- en la signature d'un acte constatant la défaillance de l'acquéreur moyennant le paiement d'une indemnité par ce dernier d'un montant de 45.734,71 euros,

- en la signature d'un acte de vente définitif avec paiement d'une partie du prix comptant soit 60.979,61 euros,

- en un règlement le 4 juillet 2003 du solde du prix, soit la somme de 487.165,39 euros.

Il apparaît au demeurant que dans son courrier du 12 juin 2003, le notaire avait appelé l'attention de ses clients sur les risques importants que leur aurait fait courir cette opération.

Il se déduit de ces différents éléments que la rupture des relations contractuelles est entièrement imputable à la défaillance de Messieurs [R] [A] et [L] [H], qui se sont montrés dans l'incapacité de respecter les obligations qu'ils avaient contractées aux termes du compromis.

Les appelants sont par conséquent mal fondés à revendiquer le bénéfice de la clause pénale insérée au contrat.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il les a déboutés de leur demande en paiement d'une somme de 32.370 euros formée à l'encontre des époux [D]-[J].

Par ailleurs, ainsi que le relèvent à juste titre les appelants, le compromis du 7 janvier 2003 ne comporte aucune disposition sanctionnant le non respect de la date limite du 31 mai 2003, fixée pour la réitération de la vente, par une caducité automatique de la convention.

Il sera rappelé que la rubrique intitulée « clause pénale » de la promesse est libellée ainsi qu'il suit :

« Les présentes constituent dès leur signature un accord définitif sur la chose et sur le prix.

En application de la rubrique réalisation ci-avant, il est convenu qu'au cas où l'une des parties viendrait à refuser de régulariser par acte authentique la présente vente dans le délai imparti, sauf à justifier de l'application d'une condition suspensive, elle pourra y être contrainte par tous les moyens et voies de droit en supportant les frais de poursuites et de recours à justice et sans préjudice de tous dommages et intérêts.

Toutefois, la partie qui n'est pas en défaut pourra, à son choix, prendre acte du refus de son cocontractant et invoquer la résolution du contrat.

Dans l'un et l'autre cas, il est expressément prévu que la partie qui n'est pas en défaut percevra, à titre d'indemnisation forfaitaire de son préjudice la somme de 32.370 euros. »

Or, force est de constater que les époux [D]-[J] n'ont pas usé de la faculté qui leur était offerte par ces dispositions contractuelles d'engager à leur choix à l'encontre des acquéreurs, soit une action en vente forcée, soit une action en résolution judiciaire de la vente. Aucune demande n'est formée en l'état du dossier visant à constater la résolution de la vente.

Il en résulte que les conditions requises pour qu'il soit fait application de l'indemnisation forfaitaire prévue au compromis ne sont pas réunies en l'espèce.

Il y a donc lieu d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Messieurs [R] [A] et [L] [H] à verser aux époux [D]-[J] la somme de 32.370 euros au titre de la clause pénale.

Par voie de conséquence, la libération au profit de Messieurs [R] [A] et [L] [H] de la somme de 22.865 euros, déposée sous forme séquestre entre les mains de Maître [T], sera ordonnée.

2) sur le compromis de vente du 8 avril 2003

Il a été précédemment exposé que dans l'acte du 8 avril 2003, avait été insérée, par mention manuscrite, une condition suspensive, au profit du vendeur, libellée ainsi qu'il suit :

« Cette vente est liée à la bonne fin du compromis signé entre les vendeurs et Monsieur et Madame [D], actuel propriétaire de la maison vendue en date du 7 janvier 2003 ' cette clause étant limitée à la date du 31 mai 2003. »

Il ressort des stipulations claires de cette clause que la vente conclue entre les appelants et les époux [W] ' [C] était conditionnée à la signature, pour le 31 mai 2003 au plus tard, de l'acte authentique opérant transfert de propriété de l'immeuble litigieux au profit de Messieurs [R] [A] et [L] [H].

Il convient dès lors de constater la défaillance, à la date du 31 mai 2003, de cette condition suspensive, ladite défaillance, en l'absence de renonciation des vendeurs au bénéfice de la condition, ayant entraîné la caducité automatique du compromis.

C'est donc de façon totalement infondée que Messieurs [R] [A] et [L] [H] sollicitent la condamnation des époux [W] ' [C] au paiement de la clause pénale prévue au contrat.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a déboutés les appelants de ces prétentions.

3) sur la demande de Messieurs [R] [A] et [L] [H] tendant à l'annulation du compromis du 18 juin 2003 pour concertation frauduleuse entre les intimés

Il appartient à Messieurs [R] [A] et [L] [H], qui entendent obtenir l'annulation du compromis signé le 18 juin 2003, de rapporter la preuve de l'existence d'une concertation frauduleuse entre les intimés.

Or force est de constater que les appelants ne versent aux débats aucun élément susceptible de le démontrer.

Il convient au contraire de rappeler d'une part que Messieurs [R] [A] et [L] [H] sont les seuls responsables de l'échec de la rupture des relations contractuelles avec les époux [D]-[J] et d'autre part, qu'à compter du premier juin 2003, les époux [W]-[C] étaient déliés de tout engagement à l'égard des appelants.

Dès lors, le simple fait que les parties à la promesse du 18 juin 2003 aient retiré de cet acte des avantages supérieurs à ceux qu'ils auraient pu obtenir dans le cadre des conventions initialement conclues avec Messieurs [R] [A] et [L] [H], ne peut à lui seul caractériser une quelconque volonté de fraude aux droits des appelants.

Il y a lieu par conséquent de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté ces derniers de leur demande de ce chef.

4) sur la demande de Messieurs [R] [A] et [L] [H] tendant à ce que soit ordonnée la régularisation du compromis en date du 7 janvier 2003 et à ce que la présente décision vaille acte authentique 

Il est constant que les époux [D]-[J] ne sont plus à ce jour propriétaires de l'immeuble litigieux.

La demande des appelants tendant à ce que soit ordonnée la régularisation du compromis en date du 7 janvier 2003 et à ce que la présente décision vaille acte authentique,  ne peut par conséquent prospérer.

5) sur les demandes de dommages et intérêts pour procédure et appel abusif, formées par les époux [D] - [J]

Les époux [D] ' [J], qui succombent devant la cour en une partie de leurs prétentions, ne rapportent la preuve du caractère abusif, ni de l'action engagée par Messieurs [R] [A] et [L] [H] devant le tribunal, ni de l'appel que ces derniers ont interjeté du jugement déféré.

Il ne peut par conséquent être fait droit aux demandes de dommages et intérêts que les intimés présentent de ce chef.

6) sur les demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et sur les dépens

Les dispositions du jugement déféré seront confirmées en ce que les appelants ont été condamnés à payer aux époux [W] ' [C] la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Messieurs [R] [A] et [L] [H] seront en outre condamnés in solidum à payer aux époux [W] - [C] la somme de 1.500 euros à titre d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, que ceux-ci ont exposés au cours de l'instance d'appel.

Tant les appelants que les époux [D] ' [J] seront déboutés de leurs demandes présentées sur le même fondement.

Enfin, il sera fait masse des dépens, de première instance et d'appel, qui seront supportés à concurrence d'un tiers par les époux [D] ' [J] et des deux tiers pour Messieurs [R] [A] et [L] [H].

PAR CES MOTIFS :

Statuant dans la limite des dispositions déférées,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Messieurs [R] [A] et [L] [H] de leurs demandes ;

- débouté les époux [D] - [J] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné Messieurs [R] [A] et [L] [H] à payer à Monsieur [S] [W] et Madame [Z] [C] épouse [W] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Infirme pour le surplus la décision déférée ;

Et, statuant à nouveau,

Déboute Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] de leur demande de condamnation de Messieurs [R] [A] et [L] [H] et de la SARL CROKENDY à leur payer la somme de 32.370 euros au titre de la clause pénale ;

Ordonne la libération au profit de Messieurs [R] [A] et [L] [H] de la somme de 22.865 euros déposée sous forme séquestre entre les mains de Maître [T] ;

Déboute Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] de leur demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] de leur demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

Condamne in solidum Messieurs [R] [A] et [L] [H] à payer à Monsieur [S] [W] et Madame [Z] [C] épouse [W] la somme de 1.500 euros à titre d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, que ceux-ci ont exposés au cours de l'instance d'appel ;

Déboute Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] d'une part et Messieurs [R] [A] et [L] [H] d'autre part de leurs demandes présentées sur le même fondement ;

Fait masse des dépens, de première instance et d'appel, et dit qu'ils seront supportés à concurrence d'un tiers par Monsieur [F] [D] et Madame [X] [J] épouse [D] et des deux tiers par Messieurs [R] [A] et [L] [H] ;

Autorise les avoués à la cause à recouvrer directement les dépens d'appel, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

N. HERMANTB. ROUSSEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 07/05018
Date de la décision : 09/03/2009

Références :

Cour d'appel de Douai 1A, arrêt n°07/05018 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-03-09;07.05018 ?
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