COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 17 / 06 / 2008
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N° RG : 07 / 01157
Jugement (N° 2005-00896) rendu le 12 Décembre 2006 par le Tribunal de Commerce de CAMBRAI
APPELANTE S. C. I. MARTI PIERRELAYE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Bois d'Enchemont 59813 LESQUIN
Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour Assistée de Maître Sylvie GUILLEVIC, Avocate
INTIMÉ Maître Yvon
Y...
ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sté DOPAFEN Demeurant
...
Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assisté de Me Manuel DE ABREU, avocat au barreau de VALENCIENNES
ASSIGNÉE EN APPEL PROVOQUÉ : SCP
A...
B...
C...
ayant son siège social
...
Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Me Emeric VELLIET, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS à l'audience publique du 03 Juin 2008, tenue par Monsieur FOSSIER magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame NOLIN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Monsieur FOSSIER, Président de chambre Madame NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller Monsieur CAGNARD, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président et Madame NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 mai 2008
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Par acte notarié du 23 mars 2004, la SCI Marti a acquis un immeuble occupé par une société dénommée Dopafen, déjà en liquidation judiciaire.
La SCI Marti a demandé au liquidateur, Me
Y...
, le paiement des loyers de mars, puis avril, mai et juin 2004. Me
Y...
a résolu de faire cesser le bail et l'occupation, au 7 juin 2004. Un commissaire priseur, la SCP
A...
, a été désigné par le juge-commissaire qui, le 13 mai 2004, a vendu les meubles de Dopafen qui étaient encore dans les lieux.
La SCI a récupéré les clefs le 8 juin mais les locaux semblent être demeurés accessibles et encombrés et avoir été visités à plusieurs reprises, notamment par des acheteurs de lots de meubles qui ont tardé à procéder à l'enlèvement. La libération complète des lieux n'est intervenue, aux dires du bailleur, que le 15 mars 2005. Il a été constaté la disparition d'appareils aérothermes.
Par jugement contradictoire en date du 12 décembre 2006, le Tribunal de commerce de Cambrai a condamné Me
Y...
à payer les loyers jusqu'au 7 juin 2004 (7 975 euros) ; à payer en sus une indemnité d'occupation jusqu'au 15 mars 2005 (29 233 euros) ; a débouté Me
Y...
de l'action en garantie qu'il poursuivait contre le commissaire priseur, Me
A...
; a débouté la SCI Marti de la demande qu'elle formait à propos des aérothermes.
Par acte d'avoué en date du 22 février 2007, la SCI MARTI PIERRELAYE a interjeté appel de la décision intervenue.
A l'attention du second degré de juridiction, la partie appelante a déposé des conclusions conformes aux articles 915 et 954 du Code de Procédure Civile, dont les dernières en date sont du 25 janvier 2008 et dans lesquelles il est demandé à la Cour de dire que Me
Y...
est responsable de la disparition des aérothermes, d'une valeur de 42 382 euros.
L'appelante réclame 4 000 euros pour frais irrépétibles de procédure.
La partie intimée, Me Yvon
Y...
pour la Société Dopafen, a conclu le 25 avril 2008 à son absence de responsabilité au-delà du 7 juin 2004, date de restitution des clefs, et a renvoyé la SCI Marti à se pourvoir contre la SCP de commissaire priseur
A...
, qui n'a pas assuré la libération effective et complète des lieux.
Me
Y...
réclame 2000 euros pour frais de procédure.
La SCP de commissaire-priseur
A...
a conclu le 15 novembre 2007 à son absence de responsabilité et a réclamé 1500 euros pour frais.
Selon ce qu'autorise l'article 455 du Code de Procédure Civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
SUR QUOI LA COUR,
- Au principal
Attendu que la créance de loyers jusqu'au 7 juin 2004 ne paraît plus susciter de litige persistant ;
Que la condamnation sera prononcée en derniers ou quittances, le bailleur ayant peut-être pu conserver un dépôt de garantie et l'affecter aux arriérés de loyers ;
Attendu, sur la durée de l'occupation et son imputabilité, que le bailleur, qui n'a pas choisi la date du 7 juin 2004, était en droit de reprendre les locaux libre de tousses meubles et propice à une relocation ; que la présence de meubles et les visites épisodiques de tiers, ont fait obstacle à l'exercice de cette prérogative légitime ; que Me
Y...
est responsable civilement de cet état de fait aux yeux du bailleur, qui n'avait aucune relation ni contractuelle ni légale avec la SCP
A...
et moins encore avec tel ou tel acheteur de certains meubles, qui aurait tardé à procéder à leur enlèvement ;
Que vainement il est maintenant soutenu par Me
Y...
que le bailleur aurait dû veiller lui-même au débarras des locaux lui appartenant, alors que l'obligation qui pèse sur le locataire de restituer les lieux, emporte celle d'en extraire les objets et personnes de son chef, sans mise en demeure ou sommation ou démarche quelconque du bailleur ;
Que pour d'identiques raisons, est inopérant le moyen de la SCP
A...
, selon lequel le bailleur connaissait le tiers qui occupait indûment les lieux et qui devait en enlever les meubles qu'il avait acquis ; ou encore le moyen selon lequel les deux mandataires de justice s'étaient défaits de toutes les clefs, en sorte que la SCI était seule à pouvoir veiller à ses propres intérêts ; qu'une telle argumentation fait fi de la prérogative fondamentale du bailleur, le locataire ou ses mandataires légaux ou conventionnels ayant pour mission de conserver tous les moyens de fait pour assumer la charge de libérer l'immeuble ;
Attendu que les premiers juges étaient donc bien fondés à imputer à Me
Y...
l'indemnité d'occupation calculée sur la base du dernier loyer et jusqu'au 15 mars 2005 ; que leur erreur de calcul sera seulement rectifiée (28 009 euros TTC et non 29 233 euros TTC) ;
Attendu qu'il est par ailleurs établi par les procès-verbaux, également exploités à bon escient par les premiers juges, que les aérothermes, appareils fixés au mur et destinés à assurer tout le chauffage ou la climatisation des locaux, ont été empruntés, subtilisés ou démontés, dans des circonstances non précisées mais entre le 8 juin 2004 et le 29 septembre 2004 ;
Que le bailleur, pour qui cette perte est considérable, a également droit à réparation par son seul cocontractant en l'espèce, Me
Y...
, ès qualités de liquidateur de la société Dopafen n'ayant pas restitué valablement les lieux et demeurant donc leur gardien ;
Attendu, sur le recours de Me
Y...
contre la SCP
A...
, que cette dernière a reçu mission particulière du juge commissaire de faire procéder à l'enlèvement des meubles ;
Qu'elle n'a pas décliné auprès du juge mandant cette mission qui, pour excéder les prévisions ordinaires de la loi, ne lui est pas non plus contraire (comp. notaires, Civ. 1o, 7 déc. 1977, DS 78. 221 note Savatier, approuvant Bourges 9 juill. 1974, DS 78. 58 note Aubert) ;
Que son attention a pourtant été alertée sur les spécificités de la situation, le bailleur souhaitant à l'évidence disposer de ses locaux très vite, les ayant acquis occupés par un locataire déjà en liquidation judiciaire ;
Que du tout, il résulte que Me
Y...
, comme représentant légal du locataire sortant, et la SCP
A...
, comme mandatée spécialement par la justice pour une mission particulière et licite, partagent la responsabilité de ne pas avoir libéré, ou fait libérer les locaux par les tiers, dont ils connaissaient naturellement les coordonnées et la conduite négligente ;
Que la SCP
A...
devra donc sa garantie à Me
Y...
pour une somme de 10. 000 euros ;
- Accessoires
Attendu que Me
Y...
et la SCP
A...
supporteront les dépens de première instance et d'appel ;
Qu'au titre des frais exposés pour le présent appel et non compris dans les dépens, la partie condamnée aux dépens paiera à l'autre par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile la somme de 3 500 euros ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, Confirme le jugement rendu à Cambrai le 12 décembre 2006 en ce qu'il a retenu la responsabilité de Me Yvon
Y...
ès qualités de liquidateur judiciaire de la société DOPAFEN ;
Emendant quant aux montants des condamnations,
Dit que les loyers échus au 7 juin 2004 ont atteint 7 975, 12 euros EN DENIERS OU QUITTANCES, outre les intérêts comme dit au premier jugement ;
Dit que l'indemnité d'occupation échue entre cette date et le 15 mars 2005 a atteint 28. 009, 50 euros TTC, outre les intérêts comme dit au premier jugement ;
Dit qu'à ces sommes s'ajoute la valeur d'aérothermes sous la garde de Me
Y...
ès qualités, soit 42. 382, 35 euros TTC, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 16 août 2005 ;
Réforme en outre sur la responsabilité de la SCP de commissaire priseur
A...
B...C... et statuant à nouveau de ce chef, condamne ladite SCP à garantir Me
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des condamnations visées plus haut à hauteur de VINGT CINQ MILLE (25. 000) euros ;
Condamne solidairement Me
Y...
ès qualités à payer à la SCI Marti Pierrelaye la somme de 3500 (trois mille cinq cents) euros pour frais irrépétibles de procédure, et les dépens de première instance et d'appel, le tout sous la garantie à 25 / 70e de la SCP
A...
et autres ;
Accorde aux avoués constitués, le bénéfice de l'article 699 du Code de Procédure Civile.