COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIEME CHAMBRE
ARRÊT DU 05/06/2008
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N° RG : 08/00596
Offre FIVA du 30 Novembre 2007
DEMANDEUR
Monsieur Claude
X...
né le 20 Juillet 1940 à SAINT MAGNE (33125)Demeurant
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59240 DUNKERQUE
représenté par Me HAAS de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTEAyant son siège socialTour Galliéni II36 Avenue du Général de Gaulle93175 BAGNOLET CEDEX
représenté par Me Mario CALIFANO, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉMadame MERFELD, Président de chambreMonsieur KLAAS, ConseillerMadame ALVARADE, Conseiller---------------------GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ
DÉBATS à l'audience publique du 23 Avril 2008,Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Monsieur Claude
X...
, né le 20 juillet 1940, a exercé son activité professionnelle au sein d'EDF du 16 décembre 1968 au 31 juillet 1995 en qualité de chaudronnier.
Des plaques pleurales ont été diagnostiquées le 12 janvier 2006.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de DUNKERQUE a reconnu le caractère professionnel de cette maladie et lui a attribué un taux d'incapacité de 5 %.
Monsieur
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a saisi le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (ci-après FIVA) qui, par lettre en date du 30 novembre 2007 lui a notifié une offre d'indemnisation de son préjudice se décomposant comme suit : - Préjudice patrimonialsur la base d'un taux d'incapacité de 5 % et d'une rente annuelle de 429 euros - arriérés de rentedu 13 janvier 2006 au 31 décembre 2006429 euros x 319 / 365 414,90 euros du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2007429 euros x 3/4 321,75 euros
736,65 euros - capitalisation de la rente à compter du 1er octobre 2007429 euros x 12,048 5.168,59 euros à déduire : capital versé par l'organisme social - 2.094,34 euros
3.810,90 euros
- Préjudice extra-patrimonialsouffrances endurées 500 euros préjudice moral 13.000 eurospréjudice d'agrément 500 euros
Monsieur
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a contesté cette offre devant la Cour par lettre recommandée reçue au greffe le 28 janvier 2008.
Dans ses conclusions déposées le 16 avril 2008 et reprises oralement à l'audience, il demande à la Cour d'évaluer le préjudice lié à l'incapacité fonctionnelle sur la base d'une rente annuelle de 858 euros et en conséquence de lui attribuer à ce titre une somme de 13.750,41 euros établie comme suit : arriérés de la rentedu 13 janvier 2006 au 31 décembre 2006858 euros x 353 / 365 829,79 euros du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2007858 euros x 3/4 643,50 euros
1.473,29 euros
capitalisation de la rente à compter du 1er octobre 2007858 euros x 14,309 12.277,12 euros
13.750,41 euros
Il soutient que la somme versée par l'organisme social au titre de la rente accident du travail présente, compte tenu de ses critères d'attribution et de calcul, un caractère professionnel et ne doit pas venir en déduction de l'indemnité allouée en réparation de l'incapacité fonctionnelle qui est un préjudice personnel. Il invoque notamment l'avis rendu le 29 octobre 2007 par la Cour de Cassation sur l'application de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, duquel il résulte que la rente versée par l'organisme social en application de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale, à la victime d'un accident du travail, doit s'imputer sur les pertes de gains professionnels et sur la part d'indemnité réparant l'incidence professionnelle et l'arrêt du Conseil d'Etat du 5 mars 2008 par lequel il a été jugé que l'objet exclusif de la rente accident du travail est de contribuer à la réparation du préjudice subi par l'intéressé dans sa vie professionnelle du fait du handicap.
Pour la capitalisation de la rente il propose de retenir la table de mortalité 2002-2004 qui est la table la plus récente publiée par l'INSEE avec un taux d'intérêt de 2,5 %.
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour considérerait que la rente versée au titre de la maladie professionnelle doit venir en déduction des sommes dues par le FIVA au titre du préjudice lié au déficit fonctionnel, il soutient que le montant des sommes dues par le FIVA s'élèverait à 11.656,07 euros.
A titre infiniment subsidiaire pour le cas où la Cour ne devrait pas retenir le barème de capitalisation proposé, il sollicite l'application du barème de capitalisation adopté par le FIVA. Dans cette hypothèse le montant de la rente capitalisée s'élèverait à la somme de 10.337,18 euros et il resterait devoir selon lui par le FIVA la somme de 11.810,47 euros (arriérés : 1.473,29 euros + capital : 10.337,18 euros) dont à déduire le capital de 2.094,34 euros versé par l'organisme social, soit un solde de 9.716,13 euros.
Il conteste également l'évaluation de ses autres chefs de préjudice et sollicite :- au titre des souffrances endurées : 3.500 euros,- au titre du préjudice moral : 30.000 euros,- au titre du préjudice d'agrément : 5.000 euros
Il se porte en outre demandeur d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses écritures déposées le 21 avril 2008 et reprises oralement à l'audience, le FIVA conclut à la confirmation de son offre d'indemnisation et au rejet de la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Il conteste notamment le principe de la linéarité appliqué par Monsieur
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pour déterminer la valeur du point d'incapacité, soutenant que ce principe n'est pas adapté car il n'existe aucune proportionnalité de gravité, eu égard au taux d'incapacité, entre une maladie bénigne et une maladie maligne. Il ajoute que le barème que lui-même propose forme un ensemble cohérent de sorte que l'on ne peut en retenir certains éléments et en écarter d'autres sans aboutir à une grave dénaturation ayant pour effet de générer une double indemnisation et une inégalité entre les victimes.
Il considère que les dispositions du IV de l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000 imposent de déduire, pour le calcul de la rente, les indemnités de toute nature qui ont été versées à la victime et en particulier les indemnités servies par l'organisme social.
Il rappelle l'interdiction des doubles indemnisations et des enrichissements sans cause et invoque le caractère historiquement mixte de la rente invalidité qui a vocation à la fois à indemniser le déficit fonctionnel et à fournir un revenu de remplacement.
Il ajoute qu'il n'incombe pas au FIVA d'établir que la prestation versée par l'organisme de sécurité sociale indemnise l'incapacité fonctionnelle mais que, conformément au droit commun, c'est au demandeur de démontrer qu'il conserve un préjudice non indemnisé par la sécurité sociale.
Il soutient que l'anxiété invoquée par le requérant ne se trouve pas établie par la production de pièces médicales et que compte tenu de la normalité des examens de Monsieur
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, il serait difficile d'indemniser ses préjudices physiques et d'agrément au delà de ce qu'il a proposé.
SUR CE :
1) Déficit fonctionnel
Attendu que des plaques pleurales ont été diagnostiquées le12 janvier 2006 alors que Monsieur
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était âgé de 65 ans ;
Que le FIVA a reconnu un taux d'incapacité de 5 % ;
Attendu que les parties s'accordent sur le taux d'incapacité de 5 % ;
Qu'elles sont en désaccord sur la valeur du point d'incapacité ;
Attendu que la présente action n'a pas pour objet d'apprécier la pertinence du barème indicatif auquel le FIVA se réfère ; qu'elle n'a pas d'autre fin que de rechercher si, dans le cas d'espèce, l'offre du fonds répond correctement à l'objectif de réparation intégrale ;
Que la Cour considère que la proposition du FIVA, soit une somme de 429 euros par an, est insuffisante à réparer le déficit fonctionnel dont Monsieur
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est atteint du fait des épaississements pleuraux postérieurs bilatéralement associés à une image nodulaire pleurale de 3 mm de diamètre, dont il est porteur tels que décrits dans le compte rendu du scanner thoracique du 12 janvier 2006 ; qu'afin d'assurer une juste et totale indemnisation il y a lieu de porter l'indemnité à 858 euros par an ;
Attendu que les parties sont également en désaccord sur le barème à appliquer pour la capitalisation de la rente ; que la table de capitalisation retenue par Monsieur
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intègre un taux d'intérêt de 2,5 % qui apparaît sous-évalué compte tenu des taux de rendement financiers actuels ;
Que le barème de capitalisation adopté par le FIVA résulte des préconisations du rapport de l'Inspection Générale des Affaires Sociales, dit rapport YAHIEL ; qu'il est fondé sur la table de mortalité établie selon les projections démographiques de l'INSEE en 2002 et sur un taux d'intérêt de 3,5 % conforme aux données économiques actuelles ; que ce barème sera retenu ;
Attendu que le FIVA est donc redevable :- arriérés de la rente du 13 janvier 2006 au 31 décembre 2006 (353 jours)858 euros x 353 / 365 829,79 euros du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2007 (3 trimestres)858 euros x 3/4 643,50 euros
1.473,29 euros - capitalisation de la rente à compter du 1er octobre 2007Monsieur
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étant alors âgé de 67 ans858 euros x 12,048 10.337,18 euros
11.810,47 euros
Attendu que Monsieur
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conteste la déduction opérée par le FIVA de l'indemnité en capital versée par la CPAM en application des articles L 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte des dispositions du IV de l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000 que dans son offre d'indemnisation présentée au demandeur, le FIVA doit indiquer "l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice" ;
Attendu que selon l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 venu modifier l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale et l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985 les recours subrogatoires des caisses de sécurité sociale s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'elles ont pris en charge à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ; que cependant si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;
Attendu que l'indemnité offerte par le FIVA au titre de l'incapacité fonctionnelle répare, selon la définition adoptée dans son barème indicatif, "la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant d'une atteinte à l'intégrité corporelle d'une personne" ; qu'il s'agit donc de l'indemnisation d'un chef de préjudice personnel et non d'un préjudice patrimonial, le FIVA indemnisant distinctement la perte de gains et le préjudice économique ;
Attendu que le capital ou la rente versé en application des articles L 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise notamment les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité ; qu'il doit en conséquence s'imputer sur les pertes de gains professionnels et sur la part d'indemnité réparant l'incidence professionnelle ;
Que si le FIVA souhaite l'imputer sur un poste de préjudice personnel, il lui appartient d'établir qu'une part de cette prestation a effectivement et préalablement indemnisé la victime, de manière incontestable, pour un tel poste de préjudice personnel ;
Que le FIVA qui n'apporte pas la preuve dont il a la charge ne peut opérer la déduction du capital versé par la caisse de sécurité sociale ;
Attendu qu'en conséquence l'indemnité revenant à Monsieur
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au titre du déficit fonctionnel s'élève à 11.810,47 euros ;
2) Préjudice physique
Attendu que Monsieur
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invoque uniquement son essoufflement en raison d'un syndrome restrictif avec une capacité pulmonaire totale à 71 % de la théorique ;
Que la somme de 500 euros offerte par le FIVA est satisfactoire ;
Que Monsieur
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ne justifie d'aucun préjudice complémentaire distinct de celui indemnisé au titre du déficit fonctionnel ;
3) Préjudice moral
Attendu que le préjudice moral de Monsieur
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est certain et est caractérisé par l'angoisse, attestée par les déclarations de ses proches, ressentie à l'annonce de sa maladie liée à l'amiante et de son éventuelle évolution ; que l'offre du FIVA ne constitue pas une juste réparation du préjudice moral de Monsieur
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; qu'il lui sera alloué la somme de 15.000 euros ;
4) Préjudice d'agrément
Attendu que Monsieur
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démontre, par les attestations de son épouse et de ses enfants, qu'en raison de sa maladie, il n'a plus les moyens de pratiquer certaines activités de loisir tel que le jardinage ou le bricolage, ou sportives ;
Que ce préjudice sera réparé par une somme de 1.000 euros ;
Attendu que le préjudice total de Monsieur
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s'établit donc à la somme de 28.310,97 euros ;
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Attendu qu'en application de l'article 31 du décret du 23 octobre 2001 les dépens seront mis à la charge du FIVA qui versera en outre à Monsieur
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une somme de 550 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique et contradictoirement,
Alloue à Monsieur Claude
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la somme de 28.310,47 euros en réparation de son préjudice, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Dit que cette somme lui sera versée par le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante sous déduction des provisions éventuellement déjà réglées,
Met les dépens à la charge du FIVA,
Dit qu'il devra verser à Monsieur
X...
une somme de 550 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.