COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 05 / 06 / 2008
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N° RG : 08 / 00367 Offre FIVA du 04 Décembre 2007
DEMANDEUR Monsieur André
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né le 25 Octobre 1935 à MERCKEGHEM (59470) Demeurant
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59640 DUNKERQUE
représenté par Me HAAS de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE Ayant son siège social Tour Galliéni II-36 Avenue du Général de Gaulle 93175 BAGNOLET CEDEX
représenté par Me Mario CALIFANO, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Présidente de chambre Monsieur KLAAS, Conseiller Madame ALVARADE, Conseillère--------------------- GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ
DÉBATS à l'audience publique du 23 Avril 2008, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 Juin 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Présidente, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur André
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, né le 25 octobre 1935, a exercé son activité professionnelle au sein de la Société NORMED, entre le 12 janvier 1955 et le 26 avril 1956 et entre le 20 août 1958 et le 10 octobre 1961 en qualité de menuisier. L'existence de plaques pleurales a été diagnostiquée le 10 février 1995.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de DUNKERQUE a reconnu le caractère professionnel de cette maladie et lui a octroyé un taux d'incapacité de 5 %.
Le pretium doloris, le préjudice moral et le préjudice d'agrément de Monsieur André
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ont été indemnisés par jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de LILLE du 30 janvier 2003.
Monsieur André
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a saisi le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (ci-après FIVA) qui par lettre du 4 décembre 2007, lui a notifié une offre d'indemnisation se décomposant comme suit :
* préjudice patrimonial sur la base d'un taux d'incapacité de 5 % à compter du 11 février 1995 et d'une rente annuelle de 429 € * arriérés de rente du 11 février au 31 décembre 1995 429 € x 324 / 365380, 81 € * années 1996 à 2006 429 € x 11 ans4. 719, 00 € * du 1er janvier au 30 septembre 2007 429 € x ¾ 321, 75 € * capitalisation de la rente à compter du 1er octobre 2007 429 € x 10, 4374. 477, 47 €
9. 899, 03 € à déduire : capital versé par la sécurité sociale-1. 448, 42 € majoration pour faute inexcusable de l'employeur-1. 448, 00 €
soit un solde dû au titre du préjudice patrimonial de7. 002, 61 €
Monsieur André
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a contesté cette offre devant la Cour par lettre reçue le 16 janvier 2008.
Dans ses écritures déposées le 21 avril 2008 et reprises oralement lors de l'audience, il demande à la Cour d'évaluer comme suit son incapacité fonctionnelle et de lui attribuer sur la base d'une rente de 858 €
* arriérés de rente du 10 février 1995 au 30 septembre 2007 (858 € x 324 / 365) + (858 € x 11 ans) + (858 € x ¾) 10. 843, 12 € * rente capitalisée à compter du 1er octobre 2007 858 € x 12, 34010. 587, 72 €
Total21. 430, 84 €
Il sollicite l'application du barème de capitalisation fondé sur la table de mortalité 2002-2004 publiée par l'INSEE et un taux d'intérêt de 2, 5 %.
Il soutient que la somme versée par l'organisme social au titre de la capitalisation de la rente accident du travail présente, compte tenu de ses critères d'attribution et de calcul, un caractère professionnel et ne doit pas venir en déduction de l'indemnité allouée en réparation de l'incapacité fonctionnelle qui est un préjudice personnel.
Il invoque notamment l'avis rendu le 29 octobre 2007 par la Cour de Cassation sur l'application de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, duquel il résulte que la rente versée par l'organisme social en application de l'article L 434-2 du code la sécurité sociale à la victime d'un accident du travail, doit s'imputer sur les pertes de gains professionnels et sur la part d'indemnité réparant l'incidence professionnelle et l'arrêt du Conseil d'Etat du 5 mars 2008 par lequel il a été jugé que l'objet exclusif de la rente accident du travail est de contribuer à la réparation du préjudice subi par l'intéressé dans sa vie professionnelle du fait du handicap.
A titre subsidiaire, pour le cas où la Cour considérerait que la rente versée par la CPAM au titre de la maladie professionnelle doit venir en déduction de l'indemnité réparant le déficit fonctionnel, il se porte demandeur de la somme de 18. 534, 42 €.
Plus subsidiairement encore, pour le cas où la Cour estimerait devoir appliquer le barème de capitalisation adopté par le FIVA soit un prix de rente de 10, 437 pour un homme de 71 ans, il se porte demandeur de la somme de 16. 901, 65 €.
Il demande que la somme allouée soit assortie des intérêts au taux légal et sollicite en outre une somme de 1. 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dans ses écritures déposées le 21 avril 2008 et reprises oralement à l'audience, le FIVA a conclu à la confirmation de son offre d'indemnisation et au rejet de la demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Il demande à la Cour de ne pas appliquer le principe de linéarité pour déterminer la valeur du point d'incapacité soutenant que ce principe n'est pas adapté car il n'existe aucune proportionnalité de gravité, eu égard au taux d'incapacité, entre une maladie bénigne et une maladie maligne. Il soutient que l'indemnisation doit être progressive et que la linéarité est incompatible avec la réparation sociale assurée par le FIVA.
Il prétend par ailleurs que sa table de capitalisation est fondée sur des paramètres actualisés et que son application résulte des préconisations du rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) d'avril 2002 (rapport YAHIEL).
Il considère que les dispositions du IV de l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000 imposent de déduire, pour le calcul de la rente, les indemnités de toute nature qui ont été versées à la victime et en particulier les indemnités servies par l'organisme social.
Il rappelle l'interdiction des doubles indemnisations et des enrichissements sans cause et invoque le caractère historiquement mixte de la rente d'invalidité qui a vocation à la fois à indemniser le déficit fonctionnel et à fournir un revenu de remplacement.
Il ajoute qu'il n'incombe pas au FIVA d'établir que la prestation versée par l'organisme de sécurité sociale indemnise l'incapacité fonctionnelle mais que conformément au droit commun, c'est au demandeur de démontrer qu'il conserve un préjudice non indemnisé par la sécurité sociale.
SUR CE :
Attendu que les plaques pleurales ont été diagnostiquées alors que Monsieur André
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était âgé de 59 ans ; que le FIVA a reconnu un taux d'incapacité de 5 % ;
Attendu que les parties s'accordent sur ce taux d'incapacité ; qu'elles sont en désaccord sur la valeur du point d'incapacité ;
Attendu que la présente action n'a pas pour objet d'apprécier la pertinence du barème indicatif auquel le FIVA se réfère ; qu'elle n'a pas d'autre fin que de rechercher si, dans le cas d'espèce, l'offre du fonds répond concrètement à l'objectif de réparation intégrale ;
Que le compte rendu de scanner thoracique du 7 avril 1995 fait état séquelles pleurales isolées se présentant sous l'aspect de plaques fibro-hyalines calcifiées pour la plupart d'entre elles, situées de façon préférentielle au niveau des plèvres diaphragmatiques, des plèvres pariétales des compartiments antéro latéraux et à un moindre degré, des plèvres para-vertébrales dans leur segment inférieur ;
Que la Cour considère que la proposition du FIVA, soit une somme de 429 € par an pour une incapacité de 5 % est insuffisante à réparer le déficit fonctionnel dont Monsieur André
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est atteint du fait des éléments décrits dans le scanner thoracique et qu'afin d'assurer une juste et totale indemnisation il y a lieu de porter l'indemnité à 858 € ;
Attendu que les parties sont également en désaccord sur le barème à appliquer pour la capitalisation de la rente à compter du 1er octobre 2007 ;
Que la table de capitalisation retenue par Monsieur André
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intègre un taux d'intérêt de 2, 5 % qui apparaît sous-évalué compte tenu des taux de rendement financiers actuels ;
Que le barème de capitalisation adopté par le FIVA résulte des préconisations du rapport de l'Inspection Générale des Affaires Sociales d'avril 2002 dit rapport YAHEL, fondé sur une table de mortalité établie selon les projections démographiques de l'INSEE en 2002 et sur un taux d'intérêt de 3, 5 % conforme aux données économiques actuelles ; que ce barème sera retenu ;
Attendu qu'il est donc dû par le FIVA :
* pour la période du 11 février 1995 au 30 septembre 2007 : (858 € x 324 jours) + (858 € x 11 ans) + (858 € x ¾) 10. 843, 12 € 365 * capitalisation de la rente au 1er octobre 2007 Monsieur
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étant âgé de 71 ans 858 € x 10, 4378. 954, 94 €
Total19. 798, 06 €
Attendu que Monsieur André
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conteste la déduction opérée par le FIVA de l'indemnité en capital versée par la CPAM en application des articles L 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte des dispositions du IV de l'article 53 de la loi du 23 décembre 2000 que dans son offre d'indemnisation présentée au demandeur, le FIVA doit indiquer « l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation et des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice » ;
Attendu que selon l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 venu modifier l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale et l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985, les recours subrogatoires des caisses de sécurité sociale s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'elles ont pris en charge à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ; que cependant si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;
Attendu que l'indemnité offerte par le FIVA au titre de l'incapacité fonctionnelle répare, selon la définition adoptée dans son barème indicatif, « la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant d'une atteinte à l'intégrité corporelle d'une personne » ; qu'il s'agit donc de l'indemnisation d'un chef de préjudice personnel et non d'un préjudice patrimonial, le FIVA indemnisant distinctement la perte de gains et le préjudice économique ;
Attendu que le capital ou la rente versée en application des article L 434-1 et suivants du code de la sécurité sociale à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise, notamment, les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité ; qu'il doit en conséquence s'imputer sur les pertes de gains professionnels et sur la part d'indemnité réparant l'incidence professionnelle ;
Que si le FIVA souhaite l'imputer sur un poste de préjudice personnel, il lui appartient d'établir qu'une part de cette prestation a effectivement et préalablement indemnisé la victime, de manière incontestable pour un tel poste de préjudice personnel ;
Que le FIVA qui n'apporte pas la preuve dont il a la charge ne peut opérer la déduction du capital versé par la caisse de sécurité sociale ;
Attendu qu'en conséquence, l'indemnité revenant à Monsieur André
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au titre du déficit fonctionnel s'élève à la somme de 19. 798, 06 € ;
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Attendu que conformément à l'article 31 du décret du 23 octobre 2001, les dépens seront pris en charge par le FIVA qui versera en outre à Monsieur André
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une somme de 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,
Alloue à Monsieur André
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la somme de 19. 798, 06 Euros en réparation de son déficit fonctionnel, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Dit que cette somme sera versée par le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante déduction faite des provisions éventuellement déjà réglées,
Met les dépens à la charge du FIVA,
Dit qu'il devra verser à Monsieur André
X...
une somme de 500 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.