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30/05/2008 | FRANCE | N°07/01024

France | France, Cour d'appel de Douai, 30 mai 2008, 07/01024


ARRET DU 30 Mai 2008

N° 960 / 08

RG 07 / 01024

JUGEMENT
Conseil de Prud'hommes de LILLE
EN DATE DU 08 Juillet 2005

NOTIFICATION

à parties

le 30 / 05 / 08

Copies avocats

le 30 / 05 / 08

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre sociale

-Prud'hommes-

APPELANT :

M. Matthieu X...


...

Représentant : Me Christophe PAUCHET (avocat au barreau de LILLE)
substitué par Me BENSOUSSAN

INTIME :

SARL SAFETY KLEEN FRANCE
65 Avenue Jean Mermoz
93126 LA COURNEUVE CEDEX


Représentant : Me Valérie TROMAS (avocat au barreau de PARIS)

DEBATS : à l'audience publique du 03 Avril 2008

Tenue par B. MERICQ
magistrat chargé d'instruire l'...

ARRET DU 30 Mai 2008

N° 960 / 08

RG 07 / 01024

JUGEMENT
Conseil de Prud'hommes de LILLE
EN DATE DU 08 Juillet 2005

NOTIFICATION

à parties

le 30 / 05 / 08

Copies avocats

le 30 / 05 / 08

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre sociale

-Prud'hommes-

APPELANT :

M. Matthieu X...

...

Représentant : Me Christophe PAUCHET (avocat au barreau de LILLE)
substitué par Me BENSOUSSAN

INTIME :

SARL SAFETY KLEEN FRANCE
65 Avenue Jean Mermoz
93126 LA COURNEUVE CEDEX
Représentant : Me Valérie TROMAS (avocat au barreau de PARIS)

DEBATS : à l'audience publique du 03 Avril 2008

Tenue par B. MERICQ
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : M. A. PERUS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

B. MERICQ : PRESIDENT DE CHAMBRE

P. NOUBEL : CONSEILLER

A. COCHAUD-DOUTREUWE : CONSEILLER

ARRET : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Mai 2008,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par B. MERICQ, Président, et par M. BURGEAT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR,

FAITS ET PROCÉDURE /
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

1. Matthieu X..., engagé à compter du 2 septembre 1996 comme responsable d'agence (Lille), statut cadre par la société (SA) Safety Kleen France (Safety Kleen), celle-ci exploitant une activité de commerce de gros de fournitures et équipements industriels (s'agissant de produits solvants et de nettoyage industriel commercialisés au travers de contrats de services), s'est vu notifier un avertissement le 2 juillet 2002 suite à des constatations faites en juin 2002 avant de faire l'objet d'un licenciement pour motif personnel (insuffisance professionnelle) prononcé le 9 décembre 2002, sous préavis de trois mois avec dispense d'exécution.

2. Saisi sur demande formée par Matthieu X..., qui contestait la légitimité de la rupture et estimait n'avoir pas été rempli de ses droits, le conseil de prud'hommes de Lille a, selon jugement rendu le 8 juillet 2005 auquel il est entièrement fait référence pour l'exposé des données de base du procès et des prétentions et moyens respectifs des parties, débouté Matthieu X... de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, la société Safety Kleen se voyant allouer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Matthieu X... a relevé appel de ce jugement.

3. Par ses conclusions écrites et observations orales développées à l'audience à fins d'infirmation, Matthieu X... procède en appel à une présentation nouvelle de ses moyens et demandes.

Il insiste sur le fait que sa carence prétendue, qui serait à l'origine des mauvais chiffres visés par l'employeur à la lettre de licenciement, n'est pas caractérisée, sur ses bons résultats acquis jusqu'à ce que l'employeur impose des résiliations de contrats, sur les manœuvres de la société Safety Kleen.

Il donne des explications quant aux critères VAN ou OTP, dégradés à cause de la politique de l'entreprise ou par lui respectés au regard de la moyenne nationale ; il s'explique également sur les autres griefs, non établis à sa charge.

Il sollicite en conséquence de voir dire qu'il a été victime d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et reprend sa demande en paiement de dommages-intérêts selon un chiffre actualisé par rapport à la première instance.

4. De son côté, par ses conclusions écrites et observations orales développées à l'audience à fins de confirmation pure et simple, la société Safety Kleen reprend ses moyens de défense de première instance et détaille les motifs énoncés à la lettre de licenciement-spécialement quant aux critères VAN et OTP ou à la question des contrats inactifs.

Elle sollicite que soient dits établis et sérieux les motifs qu'elle a énoncés à la lettre de licenciement ; elle insiste sur les fonctions exactes confiées à Matthieu X..., sur son activité faible aboutissant à des résultats très inférieurs à la moyenne attendue et sur les différentes insuffisances qui lui ont été à raison reprochées.

5. Par lettre du 9 avril 2008, la cour a demandé aux parties des explications quant à une pièce du dossier Safety Kleen (la pièce 9) et quant à la mesure de la réalisation par Matthieu X... de ses objectifs (étant en jeu le " critère VAN ") ; la société Safety Kleen a répondu au prescrit de la cour par note en délibéré du 22 avril 2008 (avec une annexe cotée 9 bis), Matthieu X... a répondu par note en délibéré du 16 mai 2008.

DISCUSSION :

1. Au présent stade de l'appel, il n'est plus rien réclamé par Matthieu X... au titre de la clause de non-concurrence.

2. La lettre de licenciement du 9 décembre 2002 est intégralement reproduite aux conclusions de Matthieu X... (p. 2 à 4) auxquelles le présent arrêt fait entièrement référence.

Elle formule essentiellement à l'encontre de Matthieu X... quatre griefs :

* insuffisance de résultats,

* taux d'OTP insatisfaisant,

* mauvaise gestion des contrats (deux reproches étant faits à Matthieu X... d'une part quant à la question de la résiliation des contrats inactifs, d'autre part quant au retrait de fontaines dans le cas de contrats résiliés),

* non-respect des procédures.

3. Avant d'examiner ces griefs, notamment celui en rapport avec les objectifs commerciaux et le " critère VAN " (critère qui sera détaillé infra par. 4), la cour constate que la société Safety Kleen fonde son argumentation sur un certain nombre de pièces, dont des tableaux (relatifs à l'agence Safety Kleen de Lille dirigée par Matthieu X... voire par son successeur Manuel D... ou à d'autres agences Safety Kleen en France) qui récapitulent les objectifs annuels fixés au chef d'agence, par exemple pour 2000, 2001, 2002 ou 2003, et mentionnent ensuite les chiffres de réalisation.

Si les tableaux relatifs à Matthieu X... tels que communiqués aux débats ont pu sembler ne pas comporter les chiffres de réalisation (spécialement le tableau afférent à 2002, pièce Safety Kleen 9), au contraire des autres tableaux communiqués relatifs aux autres agences, la note en délibéré établie à la demande de la cour par la société Safety Kleen éclaire la question puisque les chiffres de réalisation sont désormais connus.

Il importe de souligner que les chiffres en eux-mêmes, d'une part, n'ont jamais été contestés par Matthieu X..., d'autre part et surtout, sont connus de lui puisque, dans sa propre thèse, il s'empare de certains chiffres de 2002 censés révéler, au rebours de ce que plaide la société Safety Kleen, qu'il aurait réalisé ponctuellement les objectifs (voir ses conclusions p. 6 où il indique : " En ce qui concerne l'année 2002, une analyse précise de l'évolution des chiffres d'affaires et de la VAN démontre qu'aucun manquement dans l'exécution de sa mission ne peut être reproché à Monsieur X.... En fin de période 7, le Centre de Lille a réalisé 71 % de son objectif " ou p. 9 où il indique : " La bonne exécution de sa mission de travail par Monsieur X... est encore confirmée par le fait que :- Pour la période 11, la VAN à réaliser était de 24. 392, et en réalité le Centre a réalisé une VAN de 26. 467, soit environ 110 % de l'objectif. De même, pour la période 12, la VAN à réaliser était de 23. 173 et le Centre a largement dépassé cet objectif puisqu'il a réalisé une VAN de 33. 284, soit 145 % de son objectif. Il en va de même pour les périodes 2, 3, 5, 6 et 7 où le Centre de Lille a respectivement réalisé 106 %, 73 %, 97 %, 100 % et 99 % de ces objectifs en terme de VAN ").

L'annexe 9 bis, en ce qu'elle ne sert qu'à éclairer les autres pièces du débat, doit donc être acceptée.

4. Quant au premier grief - que la société Safety Kleen présente comme le plus grave -, il est expliqué que Matthieu X... avait des objectifs commerciaux " mesurés en Valeur Ajoutée Nette (VAN) " et que ceux-ci, au regard de la VAN totale cumulée " au terme de la période 11 " (c'est-à-dire après octobre 2002), présentaient un taux de réalisation " inacceptable " car correspondant seulement à " 34, 8 % de l'objectif ".

En premier lieu, la cour fait sienne l'analyse que la société Safety Kleen propose à ses conclusions (p. 4 et 5) quant à l'importance et à la spécificité du critère VAN, compte tenu de ce que la rentabilité commerciale de l'entreprise repose non pas tant sur la fourniture de fontaines de produits solvants - fourniture qui est gratuite - que sur les prestations facturables de services périodiques associés qui y sont attachées.

D'autre part, Matthieu X... a signé chaque année une fiche d'objectifs comportant divers critères dont le critère VAN en sorte qu'il n'est pas convaincant à soutenir aujourd'hui, a posteriori, l'inanité de ce critère ou son caractère non déterminant.

Ainsi, la société Safety Kleen démontre-t-elle que Matthieu X... a eu chaque année - et spécialement pour 2002, année du licenciement - des objectifs contractuels en termes de chiffres d'affaires mais également en termes de VAN.

Enfin, la cour retient, à l'instar des premiers juges, que l'objectif cumulé VAN examiné à la fin de la période 11 de l'année 2002 n'a pas été réalisé puisqu'il présentait un taux de réalisation de seulement 34, 8 %.

Les arguments de défense de Matthieu X... ne critiquent pas explicitement ce pourcentage déficitaire puisqu'il explique à ses conclusions que le taux de réalisation VAN était correct en juillet 2002 car atteint à 71 % ce qui correspondait à la moyenne nationale (p. 6) ou que le chiffre ponctuel de telle ou telle période a été réalisé, voire dépassé (p. 9), et que la dégradation ultérieurement constatée a pour origine la volonté de la société Safety Kleen de voir résilier les contrats inactifs (p. 7).

À ce stade du raisonnement, la cour retient ainsi que les critères de base d'une insuffisance de résultats sont réunis puisqu'il est acquis que Matthieu X... avait des objectifs contractuellement déterminés et que le centre Safety Kleen de Lille dont il avait la responsabilité ne les a pas réalisés, en tout cas à l'examen des chiffres de la période 11.

Cela posé, la société Safety Kleen propose à son dossier des éléments d'objectifs VAN et de réalisation en rapport avec d'autres centres que celui de Lille (Paris Sud, Angers, Marseille, etc.) et elle convainc de ce que les résultats - qui peuvent utilement servir de base à des comparaisons - nettement meilleurs obtenus par ces centres (à l'exception de celui de Toulouse) révèlent l'insuffisance constatée sur le centre de Lille qui est imputable à la gestion de ce site... c'est-à-dire à Matthieu X... .

Aux moyens de défense soutenus par Matthieu X..., le dossier permet de répondre que :

- d'autres tableaux d'objectifs et de réalisation relatifs à d'autres agences Safety Kleen comportent ponctuellement des résultats négatifs, même sur des périodes qui ont enregistré des réalisations : ainsi la méthode de calcul qu'applique la société Safety Kleen est-elle la même pour toutes ses agences,

- la perte de deux gros clients fait partie de l'aléa normal de la vie commerciale de l'entreprise et, si elle est en effet susceptible d'affecter le résultat VAN, elle devait être compensée par des clients nouveaux,

- le fait que l'objectif de certaines des périodes de 2002 aurait été ponctuellement atteint, voire dépassé (conclusions X... p. 9), ne contredit pas le résultat fortement déficitaire constaté en cumul à la fin de la période 11,

- la résiliation demandée par la société Safety Kleen de contrats inactifs relevait d'une politique avisée de l'entreprise, puisqu'il était important que son critère VAN repose sur des calculs pertinents afférents à des contrats donnant lieu effectivement à prestations périodiques régulières (sur ce point, l'attestation D... n'apporte pas d'élément déterminant),

- le successeur de Matthieu X... a réalisé dès l'année 2003 des résultats corrects en termes de VAN.

Le premier grief énoncé à la lettre de licenciement est ainsi établi.

5. Quant au deuxième grief, la société Safety Kleen démontre par éléments de comparaison pertinents que le centre de Lille avait un taux d'OTP (" on time performance ") inférieur à celui de la plupart des autres centres.

Même si la société Safety Kleen n'invoque pas ici d'objectifs contractuellement fixés, il reste que la comparaison effectuée démontre l'insuffisance du centre de Lille.

6. Quant au troisième grief, la société Safety Kleen démontre qu'elle a adressé le 2 juillet 2002 à Matthieu X... un avertissement à propos des contrats inactifs à résilier, ce dont Matthieu X... a pris bonne note le 13 juillet 2002 ; il a été expressément demandé à Matthieu X... d'entamer le " nettoyage " des contrats sans attendre.

Or, en fin période 11, la société Safety Kleen a constaté derechef un quota important de contrats inactifs non résiliés.

Même si les contrats inactifs constatés en octobre 2002 n'étaient pas nécessairement les mêmes que ceux visés en juillet 2002 car un effort avait été fait sur les résiliations et si certains cas visés à la pièce 7 du dossier Safety Kleen pouvaient recevoir des explications ponctuelles, il demeurait un taux de non-résiliation important et non justifiable.

Le grief est ainsi établi.

Il sera en revanche dit que la démonstration de la reprise tardive de trois fontaines installées chez le client Stora dont les contrats ont été résiliés n'est pas faite suffisamment.

7. Quant au quatrième grief, la cour adopte les motifs pertinents des premiers juges qui se sont livrés à une analyse précise des moyens et éléments soumis à leur appréciation.

8. Au terme des considérations ci-dessus développées, il apparaît que la plupart des motifs énoncés par la société Safety Kleen à la lettre de licenciement, spécialement la non-réalisation d'objectifs contractuels dont ceux mesurés au regard du critère VAN, sont établis.

Aussi le jugement doit-il être confirmé en ce qu'il a dit le licenciement justifié.

9. Les éléments de la cause, spécialement la comparaison des situations économiques respectives des parties, ne conduisent pas à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Safety Kleen pour l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS :

- confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

- condamne Matthieu X... aux entiers dépens de la première instance et de l'instance d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 07/01024
Date de la décision : 30/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lille


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-30;07.01024 ?
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