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06/05/2008 | FRANCE | N°07/01590

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0039, 06 mai 2008, 07/01590


COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 06/05/2008
N° RG : 07/01590
Jugement (N° 2006/00877)rendu le 09 Novembre 2006par le Tribunal de Commerce de LILLE

APPELANTE
S.A. ACTE IARD prise en la personne de ses représentants légauxayant son siège social 6 Rue de Nidenbrown - B.P. 230 - 67006 STRASBOURG

Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la CourAssistée de Me Jean François PILLE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE
S.A.S. VAN MAERCKE prise en la personne de ses représentants légauxayant son siège social 10 B rue d'Avelin

59175 VENDEVILLE

Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la CourAssistée de Me Phil...

COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 06/05/2008
N° RG : 07/01590
Jugement (N° 2006/00877)rendu le 09 Novembre 2006par le Tribunal de Commerce de LILLE

APPELANTE
S.A. ACTE IARD prise en la personne de ses représentants légauxayant son siège social 6 Rue de Nidenbrown - B.P. 230 - 67006 STRASBOURG

Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la CourAssistée de Me Jean François PILLE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE
S.A.S. VAN MAERCKE prise en la personne de ses représentants légauxayant son siège social 10 B rue d'Avelin 59175 VENDEVILLE

Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la CourAssistée de Me Philippe CHAILLET, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 04 Mars 2008, tenue par Madame NEVE DE MEVERGNIES magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame NOLIN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉMonsieur FOSSIER, Président de chambreMadame NEVE DE MEVERGNIES, ConseillerMonsieur CAGNARD, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président et Madame NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 29 février 2008

La SAS VAN MAERCKE était entreprise générale dans le cadre de la construction d'un entrepôt de stockage pour la société MAISONS HENRI DEVRED à GLISY (Somme). La SA ACTE IARD est intervenue comme assureur dans le cadre d'une police unique de chantier à laquelle la SAS VAN MAERCKE notamment a adhéré. La réception de l'ouvrage est intervenue le 26 juin 1995. Trois sinistres survenus depuis 1998 ont été pris en charge par la SA ACTE IARD en vertu de cette police, soit :
- la chute et la casse de vitrages en façade,
- des infiltrations dans l'entrepôt résultant d'un défaut de soudure,
- un affaissement du plancher.
Dans chaque cas, la responsabilité de la SAS VAN MAERCKE ou d'un de ses sous-traitants a été caractérisée, et la SA ACTE IARD a indemnisé le maître d'ouvrage. Elle poursuit contre son assurée le paiement des franchises prévues au contrat.
Par jugement du 9 novembre 2006, le Tribunal de Commerce de LILLE a, notamment, retenu que l'action de la SA ACTE IARD était prescrite et condamné la SA ACTE IARD à rembourser à la SAS VAN MAERCKE la somme de 19 076,23 € payée par cette dernière en cours de procédure, enfin dit n'y avoir lieu à indemnisation sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par déclaration au greffe en date du 9 mars 2007, la SA ACTE IARD a interjeté appel de cette décision. Dans ses dernières conclusions en date du 6 février 2008, elle demande la réformation du jugement et la condamnation de la SAS VAN MAERCKE à lui payer la somme de 19 076,23 € outre intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2005 pour le montant total des franchises, et celle de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle fait valoir, à l'appui de sa position et de ses demandes, que la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances n'a pu commencer à courir en l'espèce qu'à compter du paiement de l'indemnité d'assurance à la victime, c'est-à-dire le 7 juin 2004 pour le sinistre du 1er mai 2003, le 26 janvier 2001 pour le sinistre du 10 novembre 2000, la prescription ayant été interrompue par l'envoi de différents courriers le dernier en date du 30 mars 2005, enfin le 12 mars 1998 pour le sinistre de janvier 1998 avec, là encore, l'interruption de la prescription par des courriers dont le dernier est aussi en date du 30 mars 2005. A titre subsidiaire, elle soutient que la SAS VAN MAERCKE aurait renoncé à se prévaloir de la prescription en procédant au paiement de la somme de 19 076,23 € le 10 février 2006, un nouveau délai de deux ans ayant commencé à courir le cas échéant à compter de ce paiement.
La SAS VAN MAERCKE, dans ses dernières conclusions du 25 janvier 2008, demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de la SA ACTE IARD à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle soutient que la prescription aurait commencé de courir à compter de la connaissance des différents sinistres selon les termes de l'article L. 114-1 du code des assurances.
Elle ajoute que le paiement des sommes réclamées ne peut faire obstacle à une prescription qui était déjà acquise avant ce paiement, et que les dispositions légales invoquées sont d'ordre public de sorte que la partie qui en bénéficie ne peut y renoncer. Elle poursuit ainsi le reversement de la somme qu'elle a été amenée à payer sur le fondement de la répétition de l'indu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription
- sur le point de départ
Aux termes de l'article L. 114-1 du code des assurances, "toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. Toutefois, ce délai ne court : (...) 2o En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque là". Il en résulte que le principe du point de départ de la prescription est, en matière d'assurance, l'événement qui donne naissance à l'action fondée sur le contrat, l'exception permettant, en cas de sinistre, de reporter ce moment à la date où le demandeur à l'action a eu connaissance du sinistre c'est-à-dire une date postérieure ; cela ne permet pas pour autant, a contrario, d'avancer le point de départ de la prescription à la date du sinistre si cette dernière est antérieure à l'événement donnant naissance à l'action fondée sur le contrat d'assurance.
C'est ainsi que, en l'espèce, l'événement qui a donné naissance à l'action aujourd'hui intentée par la SA ACTE IARD est le paiement de l'indemnité d'assurance à la victime, sur laquelle l'assureur est en droit de poursuivre contre son assuré la part fixée contractuellement pour demeurer à la charge de ce dernier c'est-à-dire la franchise, et non pas la date du sinistre elle-même, à laquelle ce droit à recouvrement de la franchise n'était pas encore né.
- sur le décompte du délai
Pour le sinistre du 1er mai 2003, le quitus du maître d'ouvrage pour 11 810,40 € est en date du 7 juin 2004 ce qui équivaut à la date du paiement de cette indemnité ; dès lors, l'action introduite par assignation du 31 janvier 2006 l'a été moins de deux années après ce paiement et l'action n'est pas prescrite.
En revanche, concernant les deux autres sinistres, l'action n'a pas été introduite dans les deux ans qui ont suivi la date du paiement de l'indemnité au maître d'ouvrage, puisque ce paiement est intervenu le 26 janvier 2001 pour le sinistre du 10 novembre 2000, et le 12 mars 1998 pour le sinistre du 6 janvier 1998, la date de l'introduction de l'instance étant toujours celle du 31 janvier 2006. La SA ACTE IARD invoque l'envoi de plusieurs courriers qui ont, selon elle, interrompu la prescription. Mais, aux termes de l'article L. 114-2 du code des assurances, seules les causes ordinaires d'interruption de la prescription peuvent jouer, et ce n'est pas le cas de simples courriers, fussent-ils adressés en recommandé, l'article 2244 du Code Civil citant, à cet égard, uniquement une citation en justice, un commandement ou une saisie. Par ailleurs, si l'article L. 114-2 du code des assurances qui vient d'être cité prévoit, certes, un effet interruptif pour l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception en matière d'assurance, c'est uniquement, et s'agissant d'exceptions il doit être considéré que la liste en est limitative, en ce qui concerne le paiement de la prime dans l'action assureur contre assuré, et le paiement de l'indemnité dans l'action assuré contre assureur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce où l'assureur poursuit non pas le paiement de la prime mais celui d'une franchise. Dès lors, il n'y a pas eu d'interruption de la prescription en l'espèce.
Cependant, la SA ACTE IARD invoque à bon droit la possibilité d'une renonciation, par la SAS VAN MAERCKE, à se prévaloir de la prescription. En effet, les dispositions d'ordre public de l'article L. 114-1 du code des assurances ne font pas obstacle à ce qu'une partie renonce à une prescription déjà acquise. Or, en l'espèce, force est de constater que la SAS VAN MAERCKE a, en réalité, payé le montant total des franchises qui lui étaient réclamées le 10 février 2006 en mentionnant qu'elle réglait cette somme "au titre des franchises restant dues", cet acte, non équivoque, emportant bien reconnaissance de l'existence de la dette et de son montant et en conséquence renonciation à invoquer la prescription conformément aux dispositions de l'article 2221 du Code Civil. Dès lors, la SAS VAN MAERCKE est bien débitrice de la franchise pour l'indemnité payée en juin 2004 pour laquelle la prescription n'était pas acquise au moment de l'introduction de l'instance, et pour les deux autres dès lors qu'elle a renoncé à se prévaloir de la prescription.
Sur le fond
La SA ACTE IARD établit le bien-fondé de sa réclamation par les pièces justificatives qu'elle produit, et le montant des franchises contractuellement dues n'est au demeurant pas contesté, au fond, par la SAS VAN MAERCKE.
La somme due sera donc réglée en deniers ou quittance, et assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2005, date de présentation de la lettre recommandée avec avis de réception de mise en demeure pour les deux sommes sur lesquelles elle portait (548,81 € et 6 717,02 €) soit un total de 7 265,83 € et de l'assignation du 31 janvier 2006 pour le surplus faute de justification d'une mise en demeure antérieure pour ce montant en application de l'article 1153 du Code Civil.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA ACTE IARD tout ou partie des frais qu'elle a dû engager dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens ; il y a donc lieu de lui allouer une somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Aucune considération d'équité ne conduit à faire application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en faveur de la SAS VAN MAERCKE qui succombe et qui devra, pour les mêmes motifs, supporter les dépens en application de l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré.
Et, statuant à nouveau,
CONDAMNE la SAS VAN MAERCKE à payer à la SA ACTE IARD, en deniers ou quittance :
- la somme principale de 19 076,23 € outre intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2005 sur 7 265,83 € et du 31 janvier 2006 sur le surplus, et jusqu'à complet règlement,
- la somme de 1 800 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
REJETTE toutes les autres demandes.
CONDAMNE la SAS VAN MAERCKE aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP THÉRY LAURENT, avoués associés, en application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0039
Numéro d'arrêt : 07/01590
Date de la décision : 06/05/2008

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Prescription - Prescription biennale - Point de départ - Détermination

Il résulte de l'article L.114-1 du Code des assurances que le principe du point de départ de la prescription est, en matière d'assurance, l'événement qui donne naissance à l'action fondée sur le contrat, l'exception permettant, en cas de sinistre, de reporter ce moment à la date où le demandeur à l'action a eu connaissance du sinistre, c'est-à-dire une date postérieure. Cela ne permet pas pour autant, a contrario, d'avancer le point de départ de la prescription à la date du sinistre si cette dernière est antérieure à l'événement donnant naissance à l'action fondée sur le contrat d'assurance.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lille, 09 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2008-05-06;07.01590 ?
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