ARRET DU
30 avril 2008
N 163/08ss
RG 06/02532
JUGT
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de DOUAI
EN DATE DU
12 Septembre 2006
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Sécurité Sociale -
APPELANTE :
Société RENAULT SAS
13-15 quai Alphonse Le Gallo
92513 BOULOGNE BILLANCOURT CEDEX
Représentant :Me POLA de la SCP PROSKAUER ROSE (avocats au barreau de PARIS)
INTIMEE :
URSSAF ARRAS DOUAI
Boulevard Allende
62017 ARRAS CEDEX 9
représentée par M. WATERLOT, agent de l'organisme, régulièrement mandaté
DEBATS : à l'audience publique du 20 Mars 2008
Tenue par B.MERICQ
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : A. GATNER
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE
B. MERICQ
: PRESIDENT DE CHAMBRE
P. NOUBEL
: CONSEILLER
A. COCHAUD-DOUTREUWE
: CONSEILLER
ARRET : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 avril 2008,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par B. MERICQ, Président et par N. CRUNELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE :
1. La société (SAS) Renault a fait l'objet pour son établissement exploité à Douai (59) dit "Usine Georges Besse" d'un contrôle, portant sur la période 1er juillet 1999 / 31 décembre 2000, mis en oeuvre par l'Union de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations familiales (Urssaf) de Douai ; une lettre d'observations a été émise le 21 juin suivie d'une lettre d'observations rectificative du 18 février 2003, décidant d'un redressement portant sur plusieurs chefs - dont le point 3 relatif à la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales des primes dites "primes d'éloignement" assimilées par l'entreprise à des primes de panier et servies à des salariés non cadres en déplacement sur d'autres sites Renault avec accès à un restaurant de l'entreprise bénéficiant d'une participation financière de l'employeur.
Une mise en demeure a été notifiée le 26 juillet 2002 puis corrigée, le seul point 3 générant un redressement de 12.631,00 euros en principal de cotisations.
La société Renault a saisi la commission de recours amiable laquelle a, le 27 septembre 2005, rejeté la réclamation.
2. Saisi par la société Renault qui contestait plusieurs des points du redressement, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Douai a pour l'essentiel, selon jugement rendu le 12 septembre 2006 auquel il est entièrement fait référence pour l'exposé des données de base du procès et des prétentions et moyens respectifs des parties, rejeté le recours.
La société Renault a relevé appel limité de ce jugement.
3. Par ses conclusions écrites et observations orales développées à l'audience à fins d'infirmation, la société Renault, qui limite sa contestation du redressement au point 3, reprend et précise devant la cour ses moyens de défense de première instance à fins d'annulation du point de redressement en litige ; elle soutient que les dispositions de l'arrêté du 26 mai 1975 et notamment l'article 2 de ce texte (en vigueur à l'époque des faits) combinées aux dispositions de l'accord national de la Métallurgie du 26 février 1976 sont applicables aux faits de l'espèce ; elle insiste particulièrement sur le fait qu'elle verse à ses salariés qui doivent effectuer "un grand déplacement" une somme forfaitaire ("prime d'éloignement") dont le montant n'excède pas la limite d'exonération applicable aux indemnités de repas, la dite indemnité ayant donc la nature de frais professionnels exonérés de cotisations et la société devant bénéficier de la présomption irréfragable d'utilisation des frais professionnels conformément à leur objet ; le seul fait que les salariés concernés ont éventuellement accès à un restaurant d'entreprise est sans portée particulière dès lors qu'ils subissent de fait les sujétions d'un déplacement et entrent dans les prévisions de la convention collective.
4. De son côté, par ses conclusions écrites et observations orales développées à l'audience à fins de confirmation, l'Urssaf d'Arras-Douai (qui vient, après regroupement des Urssaf d'Arras et de Douai, aux droits de l'Urssaf de Douai) reprend devant la cour l'intégralité de ses propres moyens de défense tels que présentés en première instance essentiellement aux fins de voir dire le redressement justifié ; elle sollicite en conséquence le rejet du recours.
Elle rappelle que l'article 1er de l'arrêté du 26 mai 1975 limite l'exclusion de l'assiette des cotisations uniquement aux indemnités versées au cas où les circonstances de fait entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture pour le salarié ; elle souligne ainsi que la société Renault verse à ses salariés non cadres une "prime d'éloignement" lorsqu'ils sont en déplacement dans un autre établissement de la société alors que ces salariés ont accès à un restaurant d'entreprise dans les mêmes conditions que dans leur établissement d'affectation d'origine et que, si le repas est pris à l'extérieur de l'établissement dans lequel les salariés se déplacent, ils perçoivent en sus une allocation forfaitaire de repas. Elle en déduit que cette prime d'éloignement ne peut être qualifiée de frais professionnels, les salariés n'ayant pas à faire face à des dépenses supplémentaires dans les restaurants d'entreprise bénéficiant de la participation de l'employeur au prix des repas et la seule condition particulière de l'éloignement du lieu de travail habituel des salariés ne permettant pas de justifier que les salariés auraient à supporter des dépenses supplémentaires de nourriture.
DISCUSSION :
1. Compte tenu de l'appel limité, la cour n'est pas saisie du litige concernant le point de redressement 6 relatif à des prêts à taux zéro consentis par l'entreprise, point sur lequel les premiers juges ont rejeté la contestation de la société Renault.
2. Il résulte de l'article 2 de l'arrêté interministériel du 26 mai 1975 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale que les sommes destinées à indemniser les salariés des frais professionnels engagés pour leur alimentation ne sont réputées utilisées conformément à leur objet, dans la limite des montants fixés par ce texte, que si elles sont liées à des circonstances de fait entraînant des dépenses supplémentaires de nourriture. Il appartient, en outre, à l'employeur de rapporter la preuve de l'existence de ces circonstances de faits.
Il résulte des pièces versées aux débats que les inspecteurs du recouvrement ont constaté que l'employeur versait à ses salariés non cadres une prime d'éloignement forfaitaire lorsqu'ils étaient en déplacement dans un autre site appartenant à la société. Le versement de cette prime d'éloignement forfaitaire, celle-ci assimilée par l'employeur à des indemnités de panier, correspondait à une indemnisation des dépenses d'alimentation exposées par les salariés en déplacement alors que ces derniers bénéficiaient d'une indemnité de repas (en application des dispositions de la convention collective applicable) et avaient accès, lorsqu'ils se déplaçaient sur un autre site de l'entreprise, au restaurant d'entreprise du dit site de la même manière que s'ils étaient restés dans leur établissement d'origine.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les salariés bénéficiaient de cette prime dite d'éloignement alors qu'ils n'avaient pas à faire face à des dépenses supplémentaires de nourriture.
Il convient dès lors de considérer que l'arrêté interministériel du 26 mai 1975 ne peut être invoqué par la société Renault qui ne rapporte ni la preuve de l'existence de circonstances de fait entraînant des dépenses supplémentaires de nourriture pour les salariés en déplacement dans les circonstances sus-décrites ni du fait que le versement de l'allocation forfaitaire de repas ne concernait qu'une faible minorité des notes de frais traitées sur la période du redressement concerné.
3. Dans cette situation, la réintégration des primes dites "d'éloignement" - destinées à compenser les dépenses d'alimentation exposées par les salariés en déplacement sur un autre site de l'entreprise - dans l'assiette des cotisations a été opérée à bon droit par l'Urssaf de Douai.
PAR CES MOTIFS :
- constate que l'Urssaf d'Arras-Douai vient aux droits de l'Urssaf de Douai ;
- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
- rejette toutes autres prétentions plus amples ou contraires.