ARRET DU
31 Janvier 2008
N 22 / 08
RG 07 / 00941
CC / AG
JUGT
Conseil de Prud'hommes d'ARRAS
EN DATE DU
15 Mars 2007
NOTIFICATION
à parties
le 31 / 01 / 08
Copies avocats
le 31 / 01 / 08
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
-Prud'Hommes-
APPELANTE :
Mme Florence X...
...
62223 STE CATHERINE LES ARRAS
Représentant : M. Richard Z... Délégué syndical CGT régulièrement mandaté
INTIMEE :
SAS AGENCY STORE BUILDING (A. S. B.)
12 Avenue Jean Jaurès
78200 MANTES LA VILLE
Représentant : Me AUZANNEAU substituant Me Jérôme BIEN (avocat au barreau de NIORT)
DEBATS : à l'audience publique du 12 Décembre 2007
Tenue par C. CHAILLET
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : S. LAWECKI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE
C. CHAILLET
: PRESIDENT DE CHAMBRE
P. NOUBEL
: CONSEILLER
R. DELOFFRE
: CONSEILLER
ARRET : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2008,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du nouveau code de procédure civile, signé par C. CHAILLET, Président et par S. LOTTEGIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Florence X... a été embauchée par contrat à durée indéterminée en qualité de directeur opérationnel, catégorie cadre supérieur, à compter du 3 janvier 2005 par la Société AGENCY STORE AND BUILDING moyennant une rémunération fixe de 55 000 € par an, (revalorisé une rémunération en juin 2005 à 70 000 €) outre une rémunération variable.
Elle assurait la direction de l'Agence d'ARRAS.
Suite à des difficultés économiques, la Société diligenta un audit en septembre 2005 pour cibler les comptes et trouver les solutions nécessaires.
Elle procéda ensuite à la fermeture de deux agences dont celle d'ARRAS et supprima les postes dans cette agence, soit celui de Florence X... et de son assistance commerciale.
Par lettre du 13 octobre 2005, la Société proposa à cette dernière d'occuper le poste de directeur commercial au siège social situé à MANTES LA VILLE, proposition qu'elle a refusée par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 novembre 2005.
Le 28 février 2006, la Société l'a convoquée à un entretien préalable devant se tenir le 16 mars 2006.
Florence X... a adhéré à la convention de reclassement personnalisé le 31 mars 2006 ; la Société lui a notifié par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 avril 2006 une lettre de licenciement constatant la rupture d'un commun accord du contrat de travail.
Contestant le motif de son licenciement, Florence X... a saisi le 8 juin 2006 le Conseil de Prud'hommes d'ARRAS qui, dans un jugement rendu le 15 mars 2007, l'a déboutée de toutes ses demandes.
Par lettre recommandée du 12 avril 2007, elle a relevé appel de cette décision qui lui avait été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mars 2007.
Par conclusions développées oralement, Florence X... demande à la Cour, infirmant ce jugement, de :
-dire que son licenciement pour motif économique est injustifié ;
-condamner la SAS AGENCY STORE AND BUILDING à lui régler :
. la somme de 35 748 € net à titre de dommages et intérêts
. la somme de 52 950 € net au titre de la prime de résultat
. 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Elle conteste le motif économique de son licenciement en faisant valoir que son employeur n'a pas cherché à la reclasser alors qu'elle était d'accord pour travailler sur le site de POITIERS de la Société GATARD faisant partie du même groupe ; elle estime que les chiffres des bilans ont été tronqués ;
Par conclusions développées oralement, la SAS AGENCY STORE AND BUILDING sollicite la confirmation du jugement critiqué et la condamnation de l'appelante à lui régler 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Elle fait valoir que Florence X... ayant accepté une convention de reclassement personnalisée ne peut plus contester le motif économique de la rupture puisque son contrat de travail a, de ce fait, été rompu d'un commun accord, le licenciement n'ayant pas existé juridiquement.
Subsidiairement, elle soutient que le motif économique du licenciement est parfaitement établi et qu'elle a rempli son obligation de recherche de reclassement.
SUR CE :
A) Sur la qualification de la fin du contrat de travail :
Attendu que l'article L 321-4-2 du Code du Travail issu de la loi du 18 janvier 2005 prévoit en son alinéa 5 qu'en cas d'accord du salarié (pour bénéficier de la convention de reclassement personnalisé), le contrat de travail est réputé rompu d'un commun accord.
Qu'en l'espèce, Florence X... a été convoquée à un entretien préalable le 16 mars 2006 qui a eu lieu à cette date.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 mars 2006, la Société AGENCY STORE AND BUILDING a adressé à cette dernière les informations du contrat de la convention de reclassement personnalisée qui n'avaient pu être remises le 16 mars 2006, de sorte que le délai de réflexion prenait effet à compter du 21 mars 2006.
Le 31 mars 2006, Florence X... acceptait cette convention de reclassement personnalisée.
Le contrat de travail, conformément à l'article sus-visé, est donc réputé rompu d'un commun accord le 31 mars 2006 ;
Que cependant, cette rupture du contrat de travail doit avoir une cause économique et sérieuse ;
qu'en effet, à défaut de cause réelle et sérieuse de licenciement, la convention de reclassement personnalisé se trouve privée de cause ; que par ailleurs, l'accord National Interprofessionnel du 5 avril 2005, concrétisant les négociations entre partenaires sociaux pour déterminer avec les organismes d'assurance chômage certaines des modalités de mise en oeuvre du dispositif instituant la convention de reclassement personnalisé, démontre que les partenaires sociaux ont compris ce dispositif (création du CRP), non pas comme un mode autonome de rupture du contrat de travail, mais comme une simple modalité de licenciement économique permettant aux salariés visés de bénéficier, dans ce cadre d'un meilleur reclassement ; que interdire au salarié adhérent la remise en cause de la légitimité du licenciement économique reviendrait à réserver un sort différent et moins favorable au salarié ayant opté pour une telle convention ;
Attendu que l'appréciation par le juge de cette cause économique et sérieuse ne peut résulter que des motifs, économiques énoncés par l'employeur, soit dans le document remis au salarié lui proposant la CRP soit dans la lettre de licenciement ;
Attendu qu'en l'espèce la Société AGENCE STORE AND BUILDING n'a, dans la lettre de convocation à l'entretien préalable datée du 28 février 2006 fourni aucun élément permettant de justifier le licenciement économique ;
que cependant la lettre de licenciement du 10 avril 2006 est ainsi libellée
(causes du licenciement économique) :
"-développement de l'activité non conforme aux précisions et objectifs
-absence d'activité de la région Nord
-frais de structure et de déplacements élevés
-management de l'agence difficile du fait de l'éloignement
Il en résulte que notre société ne justifie plus d'avoir une agence à ARRAS.
De même nous devons restructurer nos effectifs pour les adapter au nouveau marché et aux nouvelles données économiques. Pour les raisons qui viennent d'être exposées, votre poste de directeur opérationnel est désormais supprimé ".
Attendu que même si le licenciement économique apparaît justifié au vu des pièces versées aux débats et pour des motifs évoqués par le Conseil de Prud'hommes notamment la nécessité de fermer les agences d'ARRAS et de MARSEILLE, que la Cour adopte, il n'en résulte pas moins que le licenciement pour motif économique d'un salarié n'a de cause réelle et sérieuse que si l'employeur s'est trouvé dans l'impossibilité de le reclasser et pour ce faire, de justifier lui avoir fait des offres de reclassement précises, concrètes et personnalisées ; qu'en l'espèce l'employeur ne justifie pas avoir fait dans le cadre de ce licenciement économique et au niveau du groupe des propositions de reclassement au profit de Florence X... ; qu'en effet le compte rendu de l'entretien préalable établi par le conseiller de cette dernière, dont le contenu n'est pas contesté par l'employeur, précise qu'à aucun moment, il n'y a fait de réelles propositions de reclassement ;
que d'ailleurs l'employeur ne le conteste pas mais explique que Florence X... avait le 29 novembre 2005 refusé le poste par lui proposé le 13 octobre 2005 de directrice commerciale AGENCE STORE AND BUILDING au siège social ;
que cependant, comme le précise Jean-Claude
D...
, directeur du Groupe D... GROUP HOLDING dans une présentation du groupe versé aux débats, celui-ci est constitué par cinq sociétés et l'employeur à cet égard ne justifie pas, à suffisance, qu'aucun emploi de reclassement au sein du groupe ne pouvait être offert à Florence X... dans l'une ou l'autre de ces sociétés, notamment le poste sur le site de POITIERS évoqué par la salariée qui existait dans la société GATARD qui emploie 80 salariés ;
qu'à défaut de proposition en ce sens, le licenciement apparaît dépourvu de cause réelle et sérieuse et justifie l'allocation au profit de la salariée, au visa de l'article L 122-14-5 du Code du Travail, de la somme de 10 000 € ;
B) Sur la prime de résultat :
Attendu qu'à cet égard, le jugement déféré sera confirmé par motifs adoptés ;
C) Sur les demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Attendu que sur ce fondement, seule la demande présentée par Florence X... sera accueillie à concurrence de la somme de 1 000 € ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par dispositions confirmatives, réformatives et nouvelles ;
Dit que le licenciement de Florence X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En conséquence, condamne la Société à lui régler la somme de 10 000 € (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts ;
Déboute Florence X... de sa demande en paiement de prime de résultat ;
Condamne la Société AGENCE STORE AND BUILDING aux dépens et à régler à Florence X... la somme de 1 000 € (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.