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21/12/2007 | FRANCE | N°05/03156

France | France, Cour d'appel de Douai, 21 décembre 2007, 05/03156


ARRET DU
21 Décembre 2007

N 454- 07

RG 05 / 03156



JUGT
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LILLE
EN DATE DU
22 Septembre 2005



COUR D' APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale

- Sécurité Sociale-

APPELANT :

CPAMTS TOURCOING
2 Place Sébastopol
59200 TOURCOING
Représentée par Me Guy DRAGON (avocat au barreau de DOUAI)
Substitué par Me TONDELIER

INTIME :

Mme Thérèse Y... veuve Z...

Héritière de M. Jean- Marie Z...


...


...


M

. Emile Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z...


...


...


Mme Colette Z... épouse A...

Héritière de M. Jean- Marie Z...


...


...


M. Jean Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z.....

ARRET DU
21 Décembre 2007

N 454- 07

RG 05 / 03156

JUGT
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LILLE
EN DATE DU
22 Septembre 2005

COUR D' APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale

- Sécurité Sociale-

APPELANT :

CPAMTS TOURCOING
2 Place Sébastopol
59200 TOURCOING
Représentée par Me Guy DRAGON (avocat au barreau de DOUAI)
Substitué par Me TONDELIER

INTIME :

Mme Thérèse Y... veuve Z...

Héritière de M. Jean- Marie Z...

...

...

M. Emile Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z...

...

...

Mme Colette Z... épouse A...

Héritière de M. Jean- Marie Z...

...

...

M. Jean Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z...

...

...

Mme Marie- Thérèse Z... épouse B...

Héritière de M. Jean- Marie Z...

...

...

M. Olivier Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z...

...

...

Comparant en personne
M. David Z...

Héritier de M. Jean- Marie Z...

...

...

Mme Stéphanie Z...

Héritière de M. Jean- Marie Z...

...

...

Représentés par Me Michel LEDOUX (avocat au barreau de PARIS)
Substitué par Me ELBERRY

Société AHLSTROM DALLE
5 rue de la Papeterie
59166 BOUSBECQUE
Représentée par Me Alain DUMAS (avocat au barreau de LYON)
En présence de M. D..., Directeur de l' usine et des Ressources Humaines

DEBATS : à l' audience publique du 13 Novembre 2007

Tenue par N. OLIVIER
magistrat chargé d' instruire l' affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s' y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l' issue des débats que l' arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : V. GAMEZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

N. OLIVIER
: PRESIDENT DE CHAMBRE

R. DEBONNE
: CONSEILLER

T. VERHEYDE
: CONSEILLER

ARRET : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 21 Décembre 2007,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l' article 450 du nouveau code de procédure civile, signé par N. OLIVIER, Président et par A. LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur Jean- Marie Z..., né en 1930, a été salarié de la société AHLSTROM DALLE, anciennement dénommée PAPETERIE DALLE ET LECOMTE du 16 octobre 1951 au 11 mars 1990 en qualité de mécanicien.

Monsieur Jean- Marie Z... a régularisé une déclaration de maladie professionnelle no30 le 17 octobre 1996 sur la base d' un certificat médical initial établi le 15 octobre 1996 faisant état d' un mésothéliome pleural.

Le 17 février 1998, la maladie professionnelle a été prise en charge par la CPAMTS de Tourcoing ; un taux d' incapacité permanente partielle de 40 % était accordé à compter du 18 juin 1996, par décision du 26 mars 1998. La Commission Régionale d' Incapacité Permanente a porté ce taux à 100 % à la date du 18 juin 1996.

Par courrier du 17 mars 1998, Monsieur Jean- Marie Z... a introduit une action auprès de la CPAM de Tourcoing en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ; un procès- verbal de non- conciliation était établi le 29 octobre 1999.

Monsieur Jean- Marie Z... est décédé le 26 juin 1998 des suites de sa maladie professionnelle.

Suivant requête en date du 24 juillet 2000, les ayants- droit de Monsieur Jean- Marie Z... ont saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lille d' une action en reconnaissance de la faute inexcusable de la société AHLSTROM DALLE.

Après radiation et réinscription de l' affaire au rôle, le Tribunal a, par jugement du 22 septembre 2005 :
- dit l' action des consorts Z... recevable
- dit que la maladie professionnelle de Monsieur Jean- Marie Z... ayant entraîné son décès était la conséquence de la faute inexcusable de son employeur, la société AHLSTROM DALLE
- dit que la réparation des préjudices serait prise en charge par la CPAMTS de Tourcoing, branche accidents du travail et maladies professionnelles, sans possibilité d' action récursoire contre l' employeur
vu les articles L 452- 1 et suivants du code de la sécurité sociale
- fixé au maximum la majoration de rente prévue par la loi au bénéfice de Madame Z... sa veuve, conjoint survivant
- fixé comme suit l' indemnisation du préjudice personnel de Monsieur Jean- Marie Z... :
- pretium doloris : 80 000 €
- préjudice moral : 80 000 €
- préjudice d' agrément : 80 000 €
- fixé comme suit le préjudice moral des ayants droit de Monsieur Jean- Marie Z... :
Madame Thérèse Y... veuve Z... 70 000 €
Monsieur Emile Z..., son fils 30 000 €
Madame Colette Z..., sa fille 30 000 €
Madame Marie- Thérèse Z..., sa fille 30 000 €
Monsieur Jean Z..., son fils 30 000 €
Monsieur Olivier Z..., son fils 30 000 €
Monsieur David Z..., son fils 30 000 €
Madame Stéphanie Z..., sa fille 30 000 €
- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date du jugement
- dit n' y avoir lieu à application des dispositions de l' article 700 du nouveau code de procédure civile
- dit n' y avoir lieu à exécution provisoire
- rejeté toutes autres demandes.

Vu l' appel interjeté le 2 novembre 2005 par la CPAMTS de Tourcoing

Vu l' appel incident interjeté le 9 novembre 2005 par la société AHLSTROM DALLE

Vu les conclusions visées par le greffier le 21 novembre 2006 et soutenues oralement à l' audience par lesquelles la CPAMTS de Tourcoing demande à la Cour de statuer ce que de droit sur les mérites de l' appel interjeté par la société AHLSTROM DALLE, réformer le jugement entrepris en ce qu' il a déclaré la procédure de reconnaissance de maladie professionnelle inopposable à l' employeur, constater que cette inopposabilité a déjà été jugée par une décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lille du 14 août 2001 devenue définitive et de condamner la société AHLSTROM DALLE au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu' aux dépens, en exposant pour l' essentiel que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale saisi par la société AHLSTROM DALLE d' une demande en inopposabilité tant sur le fond que sur la forme a définitivement déclaré la reconnaissance de la maladie professionnelle de Monsieur Jean- Marie Z... opposable à l' employeur, qu' elle ne peut être remise en cause.

Vu les conclusions visées par le greffier le 22 octobre 2007 et soutenues oralement à l' audience par lesquelles la société AHLSTROM DALLE demande à la Cour de la recevoir en son appel, de dire que les consorts Z... n' apportent pas la preuve de la faute inexcusable, de confirmer le jugement sur l' inopposabilité, subsidiairement, de réduire au préjudice démontré les sommes revenant au titre de l' action successorale, dire n' y avoir lieu à distinguer le pretium doloris du préjudice moral, enfin réduire le préjudice moral personnel de Madame veuve Z... et de ses enfants, en exposant pour l' essentiel, sur l' inopposabilité, que la Caisse devait diligenter l' enquête légale en application de l' article L 442- 1 du code de la sécurité sociale, qu' elle ne l' a pas fait, que le jugement doit être confirmé sur ce point, qu' étant une entreprise simplement utilisatrice de l' amiante, elle ne pouvait avoir conscience du danger auquel était exposé Monsieur Jean- Marie Z..., lequel a quitté l' entreprise en 1990, celui- ci n' étant pas chargé de travaux sur l' amiante visés par le tableau no30 dans sa rédaction applicable à l' époque du risque, subsidiairement, que les sommes réclamées sont excessives.

Vu les conclusions visées par le greffier le 20 octobre 2007 et soutenues oralement à l' audience par lesquelles les consorts Z... demandent à la Cour de confirmer le jugement et y ajoutant de condamner la société AHLSTROM DALLE au paiement d' une somme de 2 000 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile, en exposant pour l' essentiel que Monsieur Jean- Marie Z..., employé comme mécanicien et affecté en 1956 au service entretien de la chaufferie jusqu' en 1990, devait procéder aux travaux de calorifugeage des chaudières, ballons d' eau chaude, surchauffeurs et tuyaux, qu' il intervenait dans la chaudière même, qu' il a ainsi manipulé et travaillé une grande quantité de matériaux composés d' amiante pour isoler et calorifuger, ce qui provoquait un empoussièrement massif de l' atmosphère, qu' à l' époque, les machines n' étaient pas équipées de système d' aspiration et aucune protection collective ou individuelle contre les poussières d' amiante n' existait, que la société AHLSTROM DALLE, qui était tenue de s' informer sur toutes les questions en relation avec ses activités avait nécessairement conscience du danger qu' elle faisait courir à son salarié, en le laissant intervenir sur ses installations massivement calorifugées à l' aide d' amiante sans la moindre protection respiratoire, qu' elle a commis une faute inexcusable à l' origine de la maladie professionnelle dont Monsieur Jean- Marie Z... est décédé, que les préjudices ont été correctement arbitrés par les premiers juges.

MOTIVATION :

Attendu que la disposition du jugement sur la recevabilité de l' action des consorts Z... n' est pas discutée, qu' elle sera confirmée ;

- sur la faute inexcusable :

Attendu qu' en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l' employeur est tenu envers ce dernier d' une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l' entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d' une faute inexcusable au sens de l' article L452- 1 du code de la sécurité sociale lorsque l' employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu' il n' a pas pris les mesures nécessaires pour l' en préserver ;

Attendu que les motifs des premiers juges qui ne sont pas utilement contredits par la société AHLSTROM DALLE qui s' en tient à des considérations générales pour sa défense sans produire le moindre élément concret ni témoignage de nature à combattre les pièces versées par les consorts Z..., sont pertinents, qu' ils seront adoptés en ce qu' ils ont retenu l' existence d' une faute inexcusable commise par l' employeur ;

- sur la majoration de la rente conjoint survivant :

Attendu qu' en l' absence de discussion sur ce point, il y a lieu de confirmer le jugement ;

- sur l' indemnisation des préjudices :

Attendu que selon les dispositions du premier alinéa de l' article L452- 3 du code de la sécurité sociale, la victime d' une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l' employeur a le droit de demander à celui- ci, indépendamment de la majoration de rente qu' elle perçoit en vertu de l' article précédent, la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d' agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ;

qu' il résulte des pièces versées au dossier (certificat médical initial, attestations des membres de sa famille...) que Monsieur Jean- Marie Z... a été exposé à l' amiante pendant 34 ans sur son lieu de travail, qu' il était âgé de 66 ans lors de la première constatation médicale de la maladie professionnelle- mésothéliome pleural- dont il est décédé le 26 juin 1998 ;

qu' eu égard à ces éléments, au taux d' incapacité fixé soit 100 % et au syndrome caractérisant la maladie qui a été diagnostiquée, la Cour dispose des éléments suffisants pour fixer ainsi qu' il suit le montant des réparations à allouer aux ayants droit de Monsieur Jean- Marie Z..., au titre de l' action successorale :

- pretium doloris : 60 000 €
- préjudice moral : 30 000 €
- préjudice d' agrément : 30 000 €

et au titre de leur préjudice moral :

- Madame Thérèse Y... veuve Z... : 35 000 €
- Mesdames Colette Z..., Marie- Thérèse Z..., Stéphanie Z..., Messieurs Emile Z..., Jean Z..., Olivier Z... et David Z..., filles et fils de Monsieur Jean- Marie Z... 15 000 € chacun

que la décision déférée sera réformée en ce sens ;

- sur l' opposabilité de la décision de reconnaissance de maladie professionnelle :

Attendu que la CPAM de Tourcoing oppose la fin de non recevoir tirée de la chose jugée par un jugement rendu par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lille en date du 14 août 2001 qui a, dans l' instance l' opposant à la société AHLSTROM DALLE à la suite du recours engagé par cette dernière sur précisément l' opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur Jean- Marie Z..., confirmé la décision de la Commission de Recours Amiable de la CPAMTS de Tourcoing en date du 24 novembre 1999 et déclaré la reconnaissance de la maladie professionnelle de Monsieur Jean- Marie Z... opposable à la société AHLSTROM DALLE ;

attendu que contrairement à ce que prétend la société AHLSTROM DALLE, le Tribunal a bien statué sur l' ensemble des moyens soulevés et notamment sur l' enquête légale prévue à l' article L 442- 2 du code de la sécurité sociale ainsi qu' il suit : " Attendu que le décès de Monsieur Z... étant intervenu le 26 juin 1998, postérieurement à la décision de prise en charge du 17 février 1998, l' enquête légale prévue à l' article L 442- 2 du code de la sécurité sociale est inapplicable " ;

que cette décision est devenue définitive à la suite du désistement de la société AHLSTROM DALLE de l' appel qu' elle avait interjeté et constaté par arrêt de cette Cour en date du 8 janvier 2003 ;

que le jugement sera réformé sur ce point qui ne pouvait être remis en cause ;

Attendu que la société AHLSTROM DALLE qui succombe sera condamnée à payer à la CPAMTS de Tourcoing la somme de 1 200 € et aux consorts Z... celle de 1 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile pour les frais exposés par eux pour l' ensemble de la procédure ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré sur la recevabilité de l' action des consorts Z..., sur la faute inexcusable de l' employeur et la majoration de la rente conjoint survivant ;
L' infirme pour le surplus et statuant à nouveau :
Fixe les préjudices subis au titre de l' action successorale et en réparation du préjudice moral des ayants droits de Monsieur Jean- Marie Z... ainsi qu' il suit :
- préjudice extra patrimonial de Monsieur Jean- Marie Z... :
- pretium doloris : 60 000 €
- préjudice moral : 30 000 €
- préjudice d' agrément : 30 000 €
- préjudice moral de :
- Madame Thérèse Y... veuve Z... : 35 000 €
- Monsieur Emile Z... 15 000 €
- Madame Colette Z... 15 000 €
- Madame Marie- Thérèse Z... 15 000 €
- Monsieur Jean Z... 15 000 €
- Monsieur Olivier Z... 15 000 €
- Monsieur David Z... 15 000 €
- Madame Stéphanie Z... 15 000 €
Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement
Constate que par jugement en date du 14 août 2001, la décision de prise en charge par la CPAM de la maladie professionnelle de Monsieur Jean- Marie Z... a été déclarée opposable à la société AHLSTROM DALLE
Dit que le paiement de la rente majorée et des indemnités ci- dessus énoncées sera avancé par la CPAMTS de Tourcoing qui pourra en poursuivre le recouvrement auprès de la société AHLSTROM DALLE
Condamne la société AHLSTROM DALLE à payer à la CPAMTS de Tourcoing la somme de 1 200 € et aux consorts Z... celle de 1 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 05/03156
Date de la décision : 21/12/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-12-21;05.03156 ?
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