COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 29/11/2007
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No RG : 06/02126
Jugement (No 05/1045)
rendu le 22 Mars 2006
par le Tribunal d'Instance de LILLE
REF : MA/MD
APPELANTE
SCI LION DES FLANDRES
Ayant son siège social
25 place Delecroix
59175 TEMPLEMARS
représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Baptiste REGNIER, avocat au barreau de BETHUNE
INTIMÉE
Association LA MALTERIE
Ayant son siège social
42 rue Kulhmann
59000 LILLE
représentée par Me QUIGNON, avoué à la Cour
assistée de Me Olivier BERNE, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS à l'audience publique du 18 Octobre 2007, tenue par Madame ALVARADE magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DESFACHELLE adjoint administratif assermenté faisant fonction
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Madame MERFELD, Président de chambre
Monsieur KLAAS, Conseiller
Madame ALVARADE, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président et Mme DESFACHELLE, adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 6 septembre 2007
Sur le rapport de Madame ALVARADE, Conseiller.
Suivant acte sous seing privé du 9 juin 1995, la Société Civile Immobilière (SCI) LION DES FLANDRES a donné à bail à l'Association LA MALTERIE un ensemble immobilier sis à LILLE, 250 bis Boulevard Victor Hugo et angle des rues Kulman et du Docteur YERSIN. Aux termes de ce bail, le preneur s'interdisait tous travaux de démolition ou de construction, tout percement de murs ou de voûtes sans l'autorisation du bailleur. Ledit bail faisait l'objet de deux avenants aux fins de modification des lieux loués et de sa durée.
Suivant acte sous seing privé du 29 mai 2000 à effet au 1er janvier 2000, la SCI LION DES FLANDRES a consenti à l'Association LA MALTERIE un bail portant sur un ensemble immobilier d'environ 2.500 m², comprenant un rez-de-chaussée, cinq étages et deux sous-sols, pour une durée de 15 ans, un état des lieux ayant été établi le 10 janvier 2000 par acte de Maître B..., huissier de justice.
Suivant acte du 14 août 2003, la SCI LION DES FLANDRES a fait délivrer à l'Association LA MALTERIE un commandement par lequel elle rappelle la clause du bail selon laquelle « le preneur prend l'engagement de ne pouvoir faire dans les lieux loués aucune démolition, aucun percement de murs ou de voûtes, aucune construction sans l'autorisation du bailleur » et l'a mise en demeure de respecter ladite clause.
Sur assignation délivrée le 24 février 2005 à l'Association LA MALTERIE à la requête de la SCI LION DES FLANDRES, aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail, d'ordonner l'expulsion de l'Association LA MALTERIE et de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation égale au double du loyer, le Tribunal d'Instance de LILLE, par jugement du 22 mars 2006, a débouté la SCI LION DES FLANDRES de ses demandes et l'a condamnée au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La SCI LION DES FLANDRES a relevé appel du jugement le 5 avril 2006.
Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement, de constater l'acquisition de la clause résolutoire et subsidiairement, de prononcer la résiliation du bail du 29 mai 2000, d'ordonner l'expulsion, faute pour l'Association LA MALTERIE d'avoir libéré les lieux dans les délais impartis, de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation égale au double du loyer et d'une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L'Association LA MALTERIE demande à la Cour de confirmer le jugement, de débouter la SCI LION DES FLANDRES de ses demandes, et la condamner au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
SUR CE
Vu les conclusions signifiées par la SCI LION DES FLANDRES le 22 juin 2007,
Vu les conclusions signifiées par l'Association LA MALTERIE le 2 mai 2007,
Attendu qu'il est versé aux débats le bail initial signé entre les parties le 9 juin 1995, mentionnant à l'article 3.3 du paragraphe « entretien – travaux - réparations » que le preneur prend l'engagement de ne faire dans les lieux loués aucun changement de distribution, aucune démolition, aucun percement de murs ou de voûtes, aucune construction sans l'autorisation expresse et par écrit du bailleur, la formule «aucun changement de distribution » ayant par suite été rayée ;
Qu'à l'article 8-10, il est indiqué : « le présent local n'est pas soumis à la classification des établissements recevant du public…le bailleur autorise d'ores et déjà le preneur à faire exécuter à ses frais les travaux qui s'avéreraient nécessaires à ce titre et sous le contrôle de son architecte dans les conditions précédemment prévues » ;
Qu'il est en outre produit le nouveau bail signé entre les mêmes parties le 29 mai 2000, prenant en compte la volonté de l'Association LA MALTERIE, déjà inscrite au bail initial, d'aménager les locaux aux fins d'y recevoir le public ;
Qu'il est inséré un préambule, libellé comme suit : « L'Association LA MALTERIE a décidé, sous réserve de l'obtention des autorisations administratives et des subventions publiques, d'aménager les locaux dont elle dispose afin d'y recevoir du public…le présent bail a pour objet de prendre en considération cette situation nouvelle et d'en définir les modalités précises » ;
Que l'article 5 énonce : « l'association a pour objet la promotion de l' activité culturelle. A ce titre, elle consacrera les locaux du rez-de-chaussée à des activités de spectacle, concerts et expositions, et les autres surfaces louées à des ateliers d'artistes qu'elle concèdera, selon conventions dont le texte devra être approuvé par le bailleur…le tout sous peine de résiliation du bail en cas de contravention et de dommages et intérêts en cas de préjudice » ;
Qu'à l'article 6 consacré aux travaux, il est précisé : « LA MALTERIE envisage des travaux de mise en conformité du bâtiment afin de lui permettre la réception du public. Le preneur devra faire son affaire personnelle de l'obtention des autorisations administratives afférentes à l'utilisation des lieux loués et devra en justifier auprès du bailleur, sauf à encourir la résiliation du bail pour défaut de justification desdites autorisations… » ;
Que l'article 8-10 est rédigé dans les mêmes termes que le précédent bail et l'article 7.3.3 reprend l'interdiction de procéder à certains travaux sans l'autorisation expresse et par écrit du bailleur ;
Attendu que l'analyse desdites conventions permet de constater qu'excepté les modifications apportées relatives essentiellement au montant du loyer, à la durée du bail, quinze ans incompressible, et à l'organisation des travaux à entreprendre, les autres clauses du bail sont sensiblement identiques ;
Que l'esprit du bail initial demeure ; qu'il s'agissait en effet pour l'Association LA MALTERIE de s'ouvrir davantage au public et de rendre les lieux loués conformes à cet objet ;
Qu'à cette fin, autorisation générale était donnée par le bailleur aux termes de l'article 8-10 précité, le preneur faisant son affaire personnelle de l'obtention de toutes autorisations administratives nécessaires conformément à l'article 6 du contrat de bail ;
Attendu que l'Association LA MALTERIE verse aux débats :
- le permis de construire délivré le 26 juin 2000 aux fins d'aménagement d'une surface recevant du public au rez-de-chaussée,
- le permis de construire modificatif délivré le 13 avril 2001 ayant pour objet le bouchage en rez-de-chaussée de dix châssis dans le respect des règles acoustiques, suite à la délivrance du permis de construire concernant la création d'une salle de spectacle,
- une demande de permis de construire du 23 juillet 2001 relative à la construction d'un escalier côté boulevard Victor Hugo, pour laquelle aucun permis n'a été délivré, la Mairie de LILLE ayant par lettre du 19 septembre 2001, indiqué que les travaux envisagés n'étaient pas soumis à permis de construire,
- l'attestation du 27 mars 2000, établie par Monsieur Alain C..., ancien gérant de la SCI LION DES FLANDRES autorisant l'association " à effectuer les travaux nécessaires à la mise en conformité aux normes de sécurité du bâtiment selon les règlements et ordonnances en vigueur" ;
- l'attestation du 14 décembre 2000, établie par Monsieur Alain C..., autorisant l'association " à effectuer les travaux nécessaires à la mise en conformité aux normes de sécurité et acoustiques du bâtiment selon les règlements et ordonnances en vigueur, notamment le bouchage des fenêtres, l'aménagement intérieur et des issues de secours du rez-de-chaussée" ;
Attendu qu'il n'est pas discuté par la SCI LION DES FLANDRES que l'ensemble des travaux sus visés, qui avait pour objet de permettre l'accessibilité des lieux au public ou leur mise en sécurité, étaient autorisés ; que sont seuls contestés les travaux réalisés au 5ème étage de l'immeuble, ainsi qu'en toiture ;
Que ces travaux consistaient, selon l'attestation de Monsieur Christian D..., architecte, à rendre le cinquième étage utilisable pour les activités d'art plastique et d'expression corporelle, ainsi qu'en la mise en sécurité des ateliers par la pose généralisée de détecteurs d'incendie ;
Attendu que selon le procès-verbal de constat d'état des lieux dressé le 10 janvier 2000,
- le cinquième et dernier étage de l'immeuble est constitué d'un grand plateau, sans cloisonnement ,
- le sol est constitué d'un plancher en panneaux d'aggloméré fixés et posés sur une charpente de structure métallique, plusieurs éléments de plancher étant fortement usés ou rongés,
- les murs sont en maçonnerie de briques recouverts d'une peinture d'apprêt,
- le plafond est constitué du dessous de toiture en éternit, avec panneaux onduclair,
- les huisseries sont des châssis de fenêtre deux ouvrants, en état,
- l'installation électrique est très précaire, avec câblages fixés sur la structure métallique de charpente ;
Qu'aux termes du procès-verbal de constat établi le 11 juin 2003, l'huissier a constaté qu'une entreprise travaillait sur la charpente, la couverture étant quasiment inexistante, les anciennes gouttières démontées et posées sur le plancher, un châssis de toit neuf étant posé sur le plancher en attente de pose et l'une des charpentes métalliques ayant été retirée et remplacée par une charpente bois et tire-fond métal ;
Que selon le procès-verbal de constat du 27 novembre 2003 et les photographies qui y sont annexées, le sol du cinquième étage est constitué à l'entrée d'une dalle de béton peinte, recouverte d'un plancher de plaques d'aggloméré; au bout du plancher, existe une cloison séparative mobile, sur les parois en façade, il existe des châssis vitrés, neufs, sur le boulevard Victor Hugo une sortie de secours, la charpente est récente, ossature métallique et bois ( un élément étant neuf, les autres ayant été repeints ), dans la partie située près du boulevard Victor Hugo, il existe quatre compartiments fermés, les lieux sont équipés de commandes de désenfumage, d'extincteurs, d'aérothermes, de bacs avec alimentation en eaux chaude et froide ;
Qu'il apparaît que la charpente, dont les tôles étaient constituées en fibrociment contenant des fibres d'amiante ainsi que le révèle le dossier d'entreprise, a été remplacée ; que le plancher du 5ème étage, considéré comme inutilisable selon le rapport de visite du bureau de contrôle, la Société AEDIFIS CONTROL TECHNIC, du 23 juin 2003, a été déposé et remplacé, que des travaux de mise aux normes ont été réalisés au 5ème étage, ce en conformité avec les clauses du contrat de bail signé entre les parties, l'autorisation donnée par le bailleur à faire exécuter les travaux nécessaires à l'accueil du public, n'ayant aucunement été limitée et concernait le bâtiment en son entier ;
Qu'il n'est d'ailleurs pas démontré, au vu des éléments du dossier, que lesdits travaux nécessitaient des autorisations administratives ;
Que la SCI LION DES FLANDRES produit une lettre datée du 13 juin 2007 et émanant du service Urbanisme et Aménagement de la Mairie de LILLE, indiquant « suite à votre appel téléphonique, je vous confirme que la modification d'un élément extérieur d'une construction est soumise à autorisation préalable. En ce qui concerne les travaux dont vous m'avez livré les détails le dépôt d'une déclaration de travaux préalable est obligatoire » ;
Que cette correspondance est toutefois insuffisante à valoir preuve compte tenu de l'imprécision de ses termes ;
Attendu qu'en ce qui concerne les travaux d'aménagement intérieur, il n'est pas contestable qu'ils aient également été réalisés en conformité aux clauses du contrat qui n'interdit pas les modifications apportées à la distribution de l'immeuble ;
Attendu en conséquence qu'il conviendra de confirmer le jugement qui a retenu que la violation des clauses du bail n'était pas constituée et a rejeté la demande tendant à voir constater la résiliation du contrat ;
Que pour le même motif la SCI LION DES FLANDRES sera déboutée de sa demande subsidiaire aux fins de voir prononcer judiciairement cette résiliation ;
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Attendu que le Tribunal a fait une juste application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; qu'y ajoutant, il y a lieu de condamner la SCI LION DES FLANDRES à payer à l'Association LA MALTERIE la somme de 1.500 euros pour ses frais irrépétibles, en cause d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement,
Y ajoutant, déboute la SCI LION DE FLANDRES de sa demande tendant au prononcé judiciaire de la résiliation du bail,
Condamne la SCI LION DES FLANDRES aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître QUIGNON, avoué,
La condamne à payer à l'Association LA MALTERIE la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.