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07/06/2007 | FRANCE | N°06/2892

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0094, 07 juin 2007, 06/2892


COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 07 / 06 / 2007
* * *

No RG : 06 / 02892

Jugement (No 05 / 00765) rendu le 30 Mars 2006 par le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES

REF : EM / MD

APPELANT

Monsieur Jean-Marc X... né le 14 Novembre 1950 à LILLE (59000) Demeurant... 59650 VILLENEUVE D'ASCQ

représenté par Me QUIGNON, avoué à la Cour assisté de Me DOMINGUEZ de la SCP TRUSSANT-DOMINGUEZ, avocats au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉS

S. C. P. DANIEL Z... SYLVIE NOIROT Ayant son siège social 8 rue

Ferrer 59155 FACHES THUMESNIL

représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me Bert...

COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 07 / 06 / 2007
* * *

No RG : 06 / 02892

Jugement (No 05 / 00765) rendu le 30 Mars 2006 par le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES

REF : EM / MD

APPELANT

Monsieur Jean-Marc X... né le 14 Novembre 1950 à LILLE (59000) Demeurant... 59650 VILLENEUVE D'ASCQ

représenté par Me QUIGNON, avoué à la Cour assisté de Me DOMINGUEZ de la SCP TRUSSANT-DOMINGUEZ, avocats au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉS

S. C. P. DANIEL Z... SYLVIE NOIROT Ayant son siège social 8 rue Ferrer 59155 FACHES THUMESNIL

représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me Bertrand MEIGNIE, avocat au barreau de DOUAI

Maître Daniel Z... Demeurant ... 59155 FACHES THUMESNIL

représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assisté de Me Bertrand MEIGNIE, avocat au barreau de DOUAI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Monsieur VERGNE, Président de chambre Madame BERTHIER, Conseiller---------------------GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ

DÉBATS à l'audience publique du 11 Avril 2007, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
OBSERVATIONS ÉCRITES DU MINISTÈRE PUBLIC : Visa du 23 mars 2007
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 22 Mars 2007

Sur le rapport de Madame MERFELD, Président de chambre.

Monsieur Jean-Marc X... est appelant d'un jugement rendu le 30 mars 2006 par le Tribunal de Grande Instance de VALENCIENNES qui l'a débouté de son action en responsabilité professionnelle contre la SCP Daniel Z... Sylvie NOIROT et Maître Z..., avocats au barreau de LILLE.
Par conclusions du 15 janvier 2007 il expose qu'il était employé comme fraiseur par la Société BOUSSEMART à WASQUEHAL et était également représentant du personnel, que le 11 septembre 1998 il a reçu notification de son licenciement pour inaptitude constatée par le médecin du travail après autorisation donnée par l'inspecteur du travail le 10 septembre 1998, que son recours hiérarchique contre l'autorisation de licenciement a été rejeté par décision du Ministre de l'Emploi et de la Solidarité en date du 3 mars 1999, que Maître Z... avait reçu mandat de déposer un recours en annulation contre cette décision devant le tribunal administratif de LILLE mais que le recours n'est jamais parvenu au greffe de la juridiction.
Il soutient à titre principal que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que ce recours n'avait aucune chance d'être accueilli alors que d'une part l'inspection du travail a totalement ignoré l'avis du médecin du travail du 9 septembre 1998 qui le déclarait apte à un poste au bureau d'études et que d'autre part la tentative de reclassement par l'employeur n'était ni sérieuse, ni concrète.
Subsidiairement si la Cour devait confirmer la décision du tribunal sur l'absence de chance d'obtenir l'annulation de la décision du ministre il soutient qu'en ne l'avisant pas du mal fondé de cette action Maître Z... a manqué à son " obligation d'information de résultat ".
Il demande à la Cour d'infirmer le jugement dont il relève l'insuffisance de motivation et de condamner la SCP Z... NOIROT à lui verser la somme de 50. 000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 24 février 2005 ainsi qu'une indemnité de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SCP Z... NOIROT et Maître Z... ont conclu le 15 novembre 2006 à la confirmation du jugement et au rejet de toutes les prétentions de Monsieur X.... Ils se portent demandeurs d'une somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils soutiennent comme en première instance que les chances de succès d'un recours contre la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité étaient inexistantes et affirment qu'aucun manquement au devoir d'information ne peut leur être reproché car Maître Z... avait indiqué oralement à Monsieur X... que son recours n'avait que peu de chance d'aboutir dans la mesure où l'inspecteur du travail avait suffisamment motivé sa décision.
Le dossier a été communiqué à Monsieur le Procureur Général qui y a apposé son visa.
SUR CE
1o) Sur la demande principale
Attendu que la SCP Z...-NOIROT reconnaît la faute qui lui est reprochée ; que le litige concerne le lien de causalité entre cette faute et le préjudice allégué par Monsieur X... qui soutient que si son recours devant le tribunal administratif avait été déposé dans les délais légaux, la décision du ministre aurait été annulée et en l'absence d'autorisation administrative, son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Attendu que la responsabilité de l'avocat suit les principes du droit commun ; qu'elle est exclue si la faute n'a pas eu de conséquence dommageable ; qu'il convient donc de rechercher si l'absence de saisine du tribunal administratif a fait perdre à Monsieur X... une chance réelle d'obtenir l'annulation de la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité qui a rejeté le recours hiérarchique contre l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ;
Attendu qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge des l'excès de pouvoir, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement du salarié, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise ;
Attendu que la décision du ministre a été rendue en considération :-de l'inaptitude de Monsieur X... au poste de fraiseur qu'il occupait précédemment, constatée le 2 février 1998, puis le 16 février 1998 pour tous les postes de l'entreprise,-du fait que l'employeur a accepté, après proposition de l'inspectrice du travail, que Monsieur X... effectue une période probatoire au bureau d'études du 1er au 10 septembre 1998, les deux postes de travail de ce bureau étant vacants à la suite de la démission et du licenciement de deux salariés et le médecin du travail ayant émis un avis d'aptitude à un tel poste,-du fait que la période probatoire n'a pas été concluante et que les difficultés économiques rencontrées par l'entreprise n'ont pas permis la pérennisation du bureau d'études, les missions qui lui étaient dévolues étant appelées à être réparties entre les opérateurs sur machines,-des efforts de reclassement tentés par l'employeur auprès d'entreprises extérieures,-de l'absence de lien entre la mesure de licenciement envisagée à l'encontre de Monsieur X... et l'exercice de son ancien mandat ;

Attendu que dans le recours en annulation de la décision ministérielle du 8 mars 1999 que Maître Z... avait préparé mais qui n'a pas été déposé devant le tribunal administratif, l'avocat de Monsieur X... invoquait : * l'erreur de fait : au motif que la décision de l'inspecteur du travail reposait sur l'avis du médecin du travail du 16 février 1998 qui était contestée alors qu'un nouvel avis était intervenu le 9 septembre 1998, * l'absence de tentative sérieuse de reclassement au motif qu'un essai de huit jours était trop court pour juger de la compétence de Monsieur X... dans son nouvel emploi ;

Attendu qu'une décision administrative ne peut être annulée dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir devant le juridiction administrative que si elle repose sur une illégalité ; que le contrôle qui a pour but de vérifier la conformité des actes administratifs au droit, n'interdit pas au tribunal de vérifier l'exactitude matérielle des motifs de fait mais le juge limite le contrôle de l'opportunité à la seule notion d'erreur manifeste d'appréciation ;
Attendu que contrairement à ce qu'il affirme Monsieur X... n'a pas contesté la décision d'inaptitude prise le 16 février 1998 par le médecin du travail ; qu'à défaut de recours l'avis du médecin sur l'inaptitude du salarié s'impose aux parties et le ministre de l'emploi et de la solidarité n'a donc commis aucune erreur en se référant à l'avis médical du 16 février 1998 ;

Qu'il n'a d'ailleurs pas occulté l'avis d'aptitude émis ultérieurement par le médecin du travail à un poste au bureau d'études mais, retenant que la période probatoire n'a pas été concluante et que les difficultés économiques de l'entreprise ne permettaient pas de conserver le bureau d'études, il a maintenu l'autorisation de licenciement ;
Que Monsieur X... conteste cette motivation mais ne justifie pas en quoi elle serait erronée ; que même si la période probatoire avait été prolongée son reclassement n'aurait pu intervenir puisque le bureau d'études était supprimé et que les tâches dévolues à ce service étaient réparties entre les opérateurs sur machines ;
Qu'il n'est valablement fait état d'aucune violation de la loi, erreur de fait ou erreur manifeste d'appréciation ; que dès lors le recours pour excès de pouvoir que Maître Z... aurait dû intenter contre la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité n'avait aucune chance d'être accueilli ;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement qui a débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts fondée sur le défaut de saisine du tribunal administratif ;

2o) Sur la demande subsidiaire

Attendu qu'il incombe au professionnel légalement ou contractuellement tenu d'un devoir d'information, d'apporter la preuve qu'il a exécuté cette obligation ; que la SCP Z...-NOIROT se contente d'affirmer qu'elle a indiqué oralement à Monsieur X... que son recours n'avait que peu de chance d'aboutir, ce que celui-ci conteste ;
Qu'en l'absence de preuve il doit donc être retenu que la SCP d'avocats a manqué à son devoir d'information ;
Attendu que Monsieur X... doit apporter la preuve du préjudice occasionné par ce défaut d'information sur les chances de succès de son action ; qu'il sollicite une somme de 50. 000 euros à titre de dommages et intérêts (montant identique à celui réclamé pour l'absence de dépôt du recours devant le tribunal administratif), en soutenant qu'il a été maintenu durant des années dans l'espoir erroné qu'il pourrait être indemnisé pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Que son argumentation ne peut être admise ; que même si Monsieur X... a pu penser que son recours contre la décision du ministre de l'emploi du 3 ars 1999 avait des chances d'aboutir, il a su dès le 18 août 1999, date du courrier de Maître Z... l'informant de l'absence de saisine du tribunal administratif, qu'il n'y avait plus espoir ;
Que Monsieur X... ne fournit aucun justificatif, ni même aucune explication sur l'existence d'un éventuel préjudice pour avoir cru en ses chances de succès durant cinq mois, de mars à août 1999 ; qu'il convient de le débouter de sa demande subsidiaire ;
* * *
Attendu qu'il serait inéquitable de prononcer une condamnation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à l'encontre de Monsieur X... ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique et contradictoirement,
Confirme le jugement,
Déboute Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour défaut d'information,
Condamne Monsieur X... aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP MASUREL-THERY-LAURENT avoués,
Déboute la SCP Z...-NOIROT et Maître Z... de leur demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0094
Numéro d'arrêt : 06/2892
Date de la décision : 07/06/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Valenciennes, 30 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2007-06-07;06.2892 ?
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