COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 12 / 04 / 2007 * * * No RG : 05 / 03957 Jugement (No 2002 / 3820) rendu le 26 Mai 2005 par le Tribunal de Grande Instance de LILLE REF : DS / VC APPELANTE
Madame Arlette X... veuve Y... née le 01 Août 1931 à VITTEL (88800) demeurant :... BASEL SUISSE
Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Me Martin MEYER, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMÉS
Monsieur Jean A... demeurant :... 67150 ERSTEIN
Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assisté de Me PEYRON, avocat au barreau de PARIS
Monsieur Philippe C... demeurant :... 59200 TOURCOING
Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assisté de Me PEYRON, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
M. SCHAFFHAUSER, Président de chambre M. BOUGON, Conseiller Mme CONVAIN, Conseiller---------------------GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DESBUISSONS
DÉBATS à l'audience publique du 16 Janvier 2007, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 AVRIL 2007 après prorogation du délibéré du 22 Mars 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par M. SCHAFFHAUSER, Président, et Mme DESBUISSONS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 14 DÉCEMBRE 2006
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Vu le jugement prononcé contradictoirement par le tribunal de grande instance de Lille, le 26 mai 2005 ;
Vu l'appel formé le 27 juin 2005 ;
Vu les conclusions déposées pour Mme Arlette X... veuve de Fritz Y..., appelante, le 30 octobre 2006 ;
Vu les conclusions déposées pour M Jean A... et M Philippe C..., intimés, le 23 mai 2006 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 14 décembre 2006 ;
Attendu que, par acte sous seing privé du 15 juillet 1976, Fritz et Hans Y..., tous deux décédés depuis, ont accepté " d'avancer sans intérêts, à Messieurs Emile et Philippe C... et M Jean Eloi A..., une somme totale de 2 400 000 FRANCS " dont le remboursement devait intervenir " dès que les trois débiteurs, Filature de laine peignée de Malmerpasch, Filature de laine peignée d'Erstein et F. LA. P. Gluck et Co, auront eux-même remboursé une somme supérieure à la totalité de la créance de Vandeputte Fils et Co, diminuée de la somme avancée au titre du prêt ci-dessus ", précision étant apportée que " si le remboursement de 100 % des créances est offert, mais sans intérêts, durant les 3 premières années, Messieurs Emile et Philippe C... et M Jean Eloi A... auront à rembourser la totalité du prêt comme prévu ci-dessus " ;
Attendu que le tribunal de grande instance de Lille, par le jugement visé ci-dessus, déclare Mme Arlette X..., veuve de Fritz Y..., recevable en son action en qualité d'héritière de son mari, la déboute de sa demande en remboursement de l'avance du 15 juillet 1976, faute pour elle d'établir le remboursement des dettes contractées envers la société C... Fils et Cie avant le 30 juin 1979 ;
Attendu que Mme Arlette X..., veuve de Fritz Y..., a interjeté appel de cette décision ; qu'à l'appui de ce recours, elle conteste l'interprétation faite par les premiers juges de la convention conclue entre les parties, soutenant qu'aucun délai n'est fixé pour le remboursement des dettes du groupe Y... ;
Attendu qu'elle conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable son action, à son infirmation pour le surplus, à la condamnation des intimés au paiement de la somme de 365 877,64 € (2 400 000 F) en remboursement de l'avance et d'une indemnité de 15 000 €, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que M Jean A... et M Philippe C... concluent à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Mme Arlette X... recevable en son action et à sa confirmation en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, à la condamnation de Mme Arlette X... au paiement d'une somme de 30. 000 € à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 10 000 €, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que d'après eux, d'une part l'acceptation sous bénéfice d'inventaire de Mme Arlette X... de la succession de Fritz et Hans Y... et leur engagement en qualité de dirigeant de leur entreprise rendent irrecevables les poursuites engagées par elle et contre eux personnellement et d'autre part la preuve du remboursement des sommes dues à leurs sociétés n'est pas rapportée ;
Sur la recevabilité :
Attendu que pour contester la recevabilité de l'action engagée par Mme Arlette X..., M Philippe C... et M Jean A... prétendent d'une part que l'acceptation sous bénéfice d'inventaire de la succession de Fritz et Hanz Y... l'empêcherait de poursuivre le recouvrement de cette créance non inscrite à cet inventaire et d'autre part qu'en raison de la nature de leur engagement, seules les sociétés dont ils sont les dirigeants peuvent être poursuivis en paiement ;
1. Sur l'acceptation sous bénéfice d'inventaire :
Attendu que Maître Gontran F..., notaire, a établi, le 16 octobre 1992, un acte de notoriété aux termes duquel Fritz Y... à son décès, le 18 avril 1992, a laissé, " s'agissant des biens mobiliers dévolus suivant la législation suisse, comme seule héritière légale, son épouse survivante " ;
Attendu que Fritz Y..., auparavant, avait lui-même hérité de son frère, Hans, prédécédé, ainsi qu'il résulte du certificat d'hérédité établi par le greffe des successions (Erbschaftsamt) du canton de Bale-Ville (Suisse) ;
Attendu que la créance découlant de l'acte du 15 juillet 1976 est donc entré dans le patrimoine de Mme Arlette X..., à la suite de cette dévolution successorale ;
Attendu que si Mme Arlette X... a accepté sous bénéfice d'inventaire la succession ainsi dévolue cela est sans effet sur son droit d'agir en recouvrement des créances dont elle a héritées ;
Attendu qu'en effet, une telle acceptation limite à l'actif successoral le droit de poursuite des créanciers de la succession sans autres conséquences quant aux droits de l'héritier, éventuellement déchu du bénéfice de l'inventaire en cas de dissimulation d'éléments de l'actif de la succession ;
Attendu qu'en conséquence, l'absence de preuve de l'inscription de la créance, objet du litige, à l'inventaire de la succession est sans influence sur la recevabilité de l'action de Mme Arlette X... qui du seul fait de sa qualité d'héritière a qualité à agir en paiement des créances de l'actif successoral ;
2. Sur l'absence de mise en cause de la société C... :
Attendu que pour contester être tenus personnellement au paiement des sommes réclamées, M Philippe C... et M Jean A... soutiennent n'avoir conclu l'acte du 15 juillet 1976 qu'en leur qualité de dirigeants de cette société ;
Attendu que, cependant, aux termes de l'acte du 15 juillet 1976, " Messieurs Emile et Philippe C... et Monsieur Jean Eloi A... s'engagent solidairement à effectuer le remboursement dans les conditions visées ci-dessus et la Maison C...Fils et Co se porte elle-même caution solidaire " ;
Attendu qu'il s'ensuit que l'obligation de remboursement a été pris par M Philippe C... et M Jean A... à titre personnel et non pour le compte de la société C... désignée à l'acte non comme débitrice principale mais comme caution solidaire de ses dirigeants ;
Attendu que l'exception d'irrecevabilité sera donc rejetée ;
Sur l'engagement souscrit :
Attendu que pour soutenir ne plus être tenus au remboursement du prêt, M Philippe C... et M Jean A... invoquent l'absence de règlement avant le 30 juin 1979 des sommes dues à la société C... Fils et Co par le groupe Y... ;
Attendu que, cependant, si le paiement de leurs dettes par les sociétés " Filature de laine peignée de Mamerspasch ", " Filature de laine peignée d'Erstein " et " F. A. L. P Gluck et Co " subordonne le remboursement du prêt consenti par Fritz Y... et Hans Y..., l'absence de règlement de ces dettes avant le 30 juin 1979 a pour seule conséquence de conditionner l'exigibilité du prêt au paiement non seulement du principal mais aussi des intérêts alors que jusque là le versement des sommes dues en principal seulement suffisait à faire naître l'obligation de remboursement ;
Attendu qu'en effet, l'accord conclu stipule " les intérêt perdus pendant les 3 premières années ne seront pas pris en charge par Messieurs Fritz et Hans Y... cela veut dire que si le remboursement de 100 % des créances est offert, mais sans intérêts, durant les 3 premières années, Messieurs Emile et Philippe C... et M Jean Eloi A... auront à rembourser la totalité du prêt comme prévu ci-dessus " ;
Attendu qu'ainsi, jusqu'au 30 juin 1979, le prêt devenait exigible dés le règlement par les sociétés " Filature de laine peignée de Mamerspasch ", " Filature de laine peignée d'Erstein " et " F. LA. P Gluck et Co " de la différence entre 2 400 000 F et le montant des sommes dues en principal alors qu'à compter du 30 juin 1979 ces sociétés devaient s'être acquittées en plus des intérêts exigibles ;
Attendu que dans le cadre de versement de la liquidation de biens de la société Filature de laine peignée de Malmerpasch une somme totale de 2 587 503,73 F a été versée au titre de la créance de Vandeputte Fils et Cie de juillet 1982 à janvier 1999 par maître J. F. G..., syndic que dans le cadre de la liquidation de biens de la société Gluck, Maître F Trenz, syndic, a effectué des versements à la société Vandeputte Fils et Cie d'un montant total de 705 023,87 F, du 15 janvier 1981 au 14 décembre 1998 ; que ces deux liquidations ont été clôturées par dissolution de l'union de sorte que l'intégralité de leur passif a été apuré ; que Maître Christian H..., administrateur judiciaire, a attesté de l'exécution du concordat accordé à la société " Filatures de laine peignée d'Erstein " ;
Attendu qu'il s'ensuit que l'intégralité des sommes dues aux établissements Vandeputte Fils et Cie, en principal et intérêts, après l'ouverture de leur procédure collective a été réglée ;
Attendu qu'ainsi, la condition posée par l'acte du 15 juillet 1976 pour le remboursement de la somme avancée par Fritz et Hans Y..., à savoir le paiement d'une somme supérieure à la totalité de la créance de C... Fils et C o diminuée de la somme avancée, a donc été remplie ;
Attendu que Mme Arlette X... peut donc demander remboursement de la somme prêtée par ses auteurs soit 2 400 000 F (365 877,65 €) ;
Attendu que M Philippe C... et M Jean A... se sont engagés solidairement de sorte que les intérêts moratoires au taux légal ont commencé à courir le 8 mars 2000, date de la sommation de payer effectuée à M A... ;
Sur les dommages et intérêts et frais :
Attendu que pour solliciter des dommages et intérêts pour procédure abusive, M Jean A... et M Philippe C... ne peuvent donc soutenir qu'en les poursuivant en justice pour obtenir paiement du prêt, Mme Arlette X... qui obtient gain de cause a agi de manière abusive ;
Attendu qu'il n'y a lieu à dommages et intérêts ;
Attendu que les intimés qui succombent en leurs prétentions seront condamnés aux dépens ;
Attendu qu'aucune circonstance ne justifie d'écarter l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que, sur ce fondement, tenus aux dépens, M Philippe C... seront condamnés au paiement d'une indemnité de 5 000 € à Mme Arlette X... ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort, Rejette les exceptions d'irrecevabilité
Infirme le jugement entrepris.
Condamne solidairement M Jean A... et M Philippe C..., à verser à Mme Arlette X... veuve de Fritz Y... la somme de 365 877,64 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 mars 2000 ainsi que d'une indemnité de 5 000 €, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Les Condamne aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.