COUR D'APPEL DE DOUAI TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 30 / 11 / 2006
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No RG : 05 / 07030
Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE
du 18 Octobre 2005
REF : JPK / MD
APPELANTE
S.A. AGF VIE
Ayant son siège social
87 rue Richelieu
75002 PARIS
représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour
assistée de Me X... de la SCP X...
E...
F..., avocats au barreau de DOUAI
INTIMÉ
Monsieur André Y...
né le 09 Décembre 1949 à SAINS EN GOHELLE (62114)
...
représenté par Me QUIGNON, avoué à la Cour
assisté de Me ROBILLARD substituant Me Jean-François PAMBO, avocat au barreau de BÉTHUNE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Monsieur VERGNE, Président de chambre
Madame BERTHIER, Conseiller
Monsieur KLAAS, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Melle HAINAUT
DÉBATS à l'audience publique du 19 Octobre 2006,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur VERGNE, Président, et Melle HAINAUT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 14 Septembre 2006
Sur le rapport de Monsieur KLAAS, Conseiller.
Le 5 août 1995 Monsieur André Y... a souscrit auprès de la Compagnie d'Assurances AGF un contrat d'assurance de prévoyance des salariés dans le cadre d'une assurance de groupe de son employeur, le cabinet juridique Jurisconseil Recouvrement JCR.
Aux termes de l'article 17 du chapitre 2 des conditions générales du contrat, la garantie a pour objet le service de prestations en cas d'incapacité et invalidité d'un assuré par suite de maladie ou d'accident constatés par un médecin ; et pour bénéficier de ces prestations contractuelles l'assuré doit être dans l'impossibilité physique totale ou partielle d'exercer normalement une activité professionnelle.
A la suite d'un arrêt maladie survenu le 9 septembre 1998 Monsieur Y... a demandé à la Compagnie AGF de lui régler l'indemnité quotidienne et la rente d'invalidité prévue au contrat d'assurance.
La compagnie AGF a fait examiner Monsieur Y... par son médecin conseil, le docteur B... qui a conclu que pour ce qui concerne l'arrêt de travail il s'agissait plus d'une inaptitude au poste de travail.
Estimant alors que les conditions de l'article 17 des conditions générales n'étaient pas réunies au profit de Monsieur Y..., la compagnie AGF a refusé de prendre en charge les conséquences de son arrêt de travail.
Monsieur Y... a saisi le juge des référés du tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE lequel, par ordonnance de 8 septembre 1999 a ordonné une mesure d'expertise médicale confiée au Docteur C....
Dans son rapport déposé le 7 février 2000 l'expert a conclu que Monsieur Y... était effectivement inapte à son poste de travail mais qu'il n'était pas inapte à tout travail.
La compagnie AGF a maintenu son refus de garantie.
Sur assignation de Monsieur Y... délivrée le 3 juin 2003, le Tribunal de Grande Instance BÉTHUNE, par jugement du 18 octobre 2005, a condamné la Compagnie AGF à assurer à Monsieur André Y... l'exonération du paiement des cotisations ainsi que le complet maintien des garanties dont le bénéfice est acquis le 5 août 1995 et à régler à Monsieur Y... la somme de 57. 128 € outre la somme de 719 € par mois au titre de la rente invalidité due à compter du 8 septembre 2001 et une somme de 763 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SA AGF Vie a interjeté appel le 6 décembre 2005.
Par conclusions signifiées le 5 avril 2006 elle demande à la Cour de réformer le jugement, de constater que la garantie n'est pas acquise au profit de Monsieur Y... à l'occasion de ce sinistre, de la mettre hors de cause, de débouter Monsieur Y... de toutes demandes et de le condamner au paiement d'une indemnité procédurale de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle fait valoir que les conditions générales de la police d'assurance indiquent clairement que pour bénéficier de la garantie contractuelle il faut être en état d'incapacité ou d'invalidité par suite de maladie ou d'accident et se trouver dans l'impossibilité d'exercer normalement une activité professionnelle ; que Monsieur Y... ne rapporte par la preuve de ce qu'il remplit les conditions contractuelles à son bénéfice et que la garantie ne lui est donc pas acquise.
Par conclusions signifiées le 14 juin 2006 Monsieur Y... demande à la Cour de confirmer le jugement.
Il soutient que la garantie souscrite n'est pas subordonnée à l'impossibilité d'exercer toute activité professionnelle mais se rapporte à une notion d'exercice normal d'une activité professionnelle et que, lors de la souscription du contrat, l'appréciation des parties de cet exercice normal ne pouvait se fonder que sur l'activité effective du souscripteur.
Il se porte en outre demandeur d'une somme de 2. 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendu le 14 septembre 2006.
SUR CE
Attendu qu'aux termes de l'article 17 des conditions générales du contrat de prévoyance dont il s'agit, la garantie souscrite a pour objet le service de prestations en cas d'incapacité ou d'invalidité par suite de maladie ou d'accident, constatées par un médecin et comporte, selon les dispositions fixées aux conditions particulières, le paiement d'une indemnité quotidienne en cas d'arrêt de travail et d'une rente d'invalidité, ce si l'assuré est dans l'impossibilité physique, totale ou partielle d'exercer normalement une activité professionnelle ;
Attendu que contrairement à ce qu'ont affirmé les premiers juges, cette clause est parfaitement claire et précise et ne comporte aucune ambiguïté ; que l'expression " impossibilité physique totale ou partielle d'exercer normalement une activité professionnelle " s'entend non pas comme l'impossibilité d'exercer les activités professionnelles antérieures ou précédentes du souscripteur mais uniquement comme l'impossibilité d'exercer toute activité quelle qu'elle soit, ainsi que le révèle clairement l'emploi des termes " une activité professionnelle " ;
Attendu dans ces conditions, que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la clause dont il s'agit n'a pas à faire l'objet d'une quelconque interprétation ni au regard des dispositions de l'article 1162 du code civil ni de celles de l'article L 133-2 alinéa 2 du code de la consommation ;
Attendu que le Docteur B... a examiné le 18 décembre 1998 à la demande des AGF, Monsieur Y... qui se plaignait essentiellement de cervicalgies supérieures à irradiation vers le pavillon de l'oreille gauche et le cuir chevelu ; qu'il a conclu que, pour l'arrêt de travail il s'agissait en réalité d'une inaptitude au poste de travail occupé jusqu'alors par André Y... ;
Attendu que l'expert judiciairement désigné, le Docteur C..., a examiné Monsieur Y... le 3 décembre 1999, qu'il a indiqué en conclusion que l'arrêt de travail n'était pas médicalement justifié et qu'il n'existait pas d'inaptitude à tout travail ; que sans aller au delà de ce qui lui était demandé puisqu'il avait aussi pour mission de formuler toutes observations techniques utiles à la solution du litige, le Docteur C... a précisé que pour les troubles allégués le jour de l'examen, savoir les douleurs latéro cervicales gauches hautes, Monsieur Y... se déclarait inapte à la conduite automobile prolongée mais qu'il s'agissait en fait d'une inaptitude à un poste de travail nécessitant la conduite automobile prolongée aux parcours éloignés ;
Attendu qu'il résulte de ces différents rapports que Monsieur Y..., s'il ne pouvait pas reprendre son activité antérieure en raison de cervicalgies rendant impossible la conduite automobile prolongée, n'était toutefois pas inapte même partiellement à toute activité professionnelle ; que les garanties contractuelles ne pouvaient donc lui être acquises ;
Attendu, certes, que le 4 janvier 2002 la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de LENS a avisé Monsieur Y... que, compte tenu qu'il présentait au 9 septembre 2001 date de la suppression des prestations maladie, une invalidité réduisant au moins de deux tiers sa capacité de travail ou de gain justifiant son classement dans la 2é catégorie définie à l'article L 314-4 du code de la sécurité sociale il lui était attribué à compter de cette date une pension d'invalidité ;
Mais attendu qu'il convient simplement de rappeler ici que les règles et critères selon lesquelles une CPAM peut être amenée à attribuer à un assuré social une pension d'invalidité constituent des règles et critères propres au régime résultant du code de la Sécurité Sociale, de sorte que le fait qu'en l'espèce Monsieur Y... soit aujourd'hui bénéficiaire d'une pension d'invalidité de 2é catégorie de la Sécurité Sociale ne saurait entraîner ipso facto l'obligation de mettre en oeuvre la garantie prévue par le contrat de prévoyance de droit commun objet du présent litige, lequel contrat ne prévoit donc la garantie de la Compagnie AGF Vie qu'en cas d'inaptitude à une activité professionnelle quelconque, condition dont les éléments médicaux ci-dessus analysés (rapport B... et expertise C...) qui sont les seuls éléments opposables à la Compagnie AGF Vie, démontrent qu'elle n'est pas en l'espèce
remplie ;
Attendu que pour être complet, il convient de souligner que le rapport du Docteur D...qui a diligenté une expertise ordonnée par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale dans un contentieux ayant opposé la CPAM à Monsieur Y... n'est en rien opposable à la Compagnie AGF Vie et qu'il a en outre été diligenté dans le cadre d'un contentieux dont l'objet était apparemment différent de l'objet du présent litige, et qu'il n'apparaît pas, au surplus, que le Docteur D...ait conclu à une inaptitude de Monsieur Y... à toute activité professionnelle ;
Attendu au total, que le jugement déféré doit être réformé et que Monsieur Y... doit être débouté de toutes ses demandes ;
Attendu qu'il apparaît équitable d'allouer à la Compagnie AGF Vie une indemnité de 1. 200 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique et contradictoirement,
Réformant en sa totalité le jugement déféré,
Déboute Monsieur André Y... de la totalité de ses demandes,
Condamne Monsieur André Y... à verser à la Compagnie AGF Vie une indemnité de 1. 200 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne Monsieur Y... aux entiers dépens et accorde à la SCP CARLIER-REGNIER qui le demande le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Greffier, Le Président,
M.M. HAINAUTV. VERGNE