COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 28/09/2006 No RG : 05/02726 Jugement du Tribunal de Commerce de LILLE du 24 Février 2005 REF : TF/CD APPELANTS Monsieur Sed Ahmed X... né le 26 Septembre 1970 à MONTIGNY EN GOHELLE (62640) ... Représenté par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour Assisté de Me Jean-Luc DEVIGNES, avocat au barreau de BETHUNE Monsieur Bouziane Y... ... Représenté pa Me QUIGNON, avoué à la Cour Assisté de Me Bruno DUBOUT, avocat au barreau de BETHUNE INTIMÉE S.N.C. GE FACTOFRANCE prise e la personne de ses représentants légaux Ayant son siège social 18 rue Hoche 92988 LA DEFENSE PARIS Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Me Michel ROULOT, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS à l'audience publique du 26 Septembre 2006, tenue par Monsieur FOSSIER magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame NOLIN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Monsieur FOSSIER, Président de chambre Monsieur ZANATTA, Conseiller Madame NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement pa mise à
disposition au greffe le 28 Septembre 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président et Madame NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 22 septembre 2006
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La SARL GROUPE-THALÈS, fondée le 28 mars 2001, notamment par MM.X... et Y..., a contracté le 6 juin 2001 avec la SA FACTOFRANCE-HELLER. Ce même jour, MM.X... et Y..., agissant à titre personnel et par actes séparés, se sont portés caution des engagements de leur SARL GROUPE-THALÈS.
Le 3 juin 200, la société GE-FACTOFRANCE a absorbé la société FACTO FRANCE HELLER. Cette opération a été dénoncée aux cautions par courriers des 14 juin et 15 juillet 2002, auxquels il n'a pas été répondu.
La SARL GROUPE-THALÈS a été admise au bénéfice de la liquidation judiciaire par jugement rendu au tribunal de grande instance à compétence commerciale de BETHUNE le 17 juillet 2002. GE FACTOFRANCE, venant aux droits de FACTO FRANCE-HELLER, a déclaré sa créance, résultant d'un excédent des prélèvements de THALÈS et des non-valeurs, sur les remises de factures entre les mains de FACTO-FRANCE (arrêté de compte définitif : 7.663,10 ç au 23 septembre2003).
Toutes mises en demeure des cautions étant restées vaines, un jugement contradictoire en date du 24 février 2005 du tribunal de commerce de LILLE a condamné MM.X... et Y... à payer à la SNC GE FACTOFRANCE la somme de 7.663,10 ç avec intérêts au taux légal et la somme de 1.000 ç pour frais irrépétibles de procédure.
Par acte de leur avoué en date du 29 avril 2005, Sed Ahmed X... et Bouziane Y... ont interjeté appel principal et général de la décision intervenue.
A l'attention du second degré de juridiction, la partie appelante a déposé des conclusions conformes aux article s915 et 954 du nouveau code de procédure civile, dont les dernières en date du 10 février 2006 pour M. X... et du 25 octobre 2005 pour M. Y..., et dans lesquelles il est demandé à la Cour d'infirmer, de rejeter toute prétention de GE FACTOFRANCE et de condamner cette dernière à payer aux appelants 1.000 ç pour frais irrépétibles de procédure.
Les appelants soutiennent qu'en cas de substitution de créancier, notamment en cas de fusion ou absorption, le cautionnement souscrit au profit du créancier originaire ne peut, à défaut de manifestation de volonté de la part de la caution de s'engager envers le nouveau créancier, être étendu en faveur de ce dernier. Il n'en serait autrement que dans les hypothèses examinées récemment par la Cour de cassation (plén.6.12.2004, Com.8.11.2005), c'est-à-dire les cas dans lesquels le cautionnement porte sur une dette principale à exécution successive (dette de loyer, découvert en compte courant), ce que n'est pas le contrat d'affacturage, d'autant qu'en l'espèce celui-ci dégageait un solde positif au jour de la fusion-absorption.
La partie intimée, la société anonyme GE FACTOFRANCE, a conclu le 23 août 2006 à la confirmation mais, faisant appel incident, a demandé que les condamnations soient mieux précisées entre les deux débiteurs ( 7.663,10 ç pour M. X... et 6.895,97 ç pour M. Y..., le tout avec intérêts au taux tantôt légal tantôt conventionnel selon les périodes). L'intimée réclame en outre 3.000 ç pour frais de procédure.
GE FACTO-FRANCE fait valoir que la fusion-absorption entraîne la transmission universelle du patrimoine de l'absorbée, que l'article L 236-14 du code de commerce exclut même toute novation, que, comme l'a jugé l'assemblée plénière de la Cour de cassation en 2004, le cautionnement est transmis de plein droit à l'absorbante et qu'il n'y
a pas lieu de faire une différence à ce sujet entre les divers types de créances cautionnées, sauf à considérer que l'affacturage ne dégage un solde qu'in extremis et ne peut donc être arrêté à la date de la fusion-absorption.
Selon ce qu'autorise l'article 455 du nouveau code de procédure civile, il est renvoya aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.SUR QUOI LA COUR Moyen abandonné
Attendu que les conclusions de l'intimée développent des arguments en faveur de la validité des deux cautionnements litigieux ; que cependant, le moyen correspondant n'a pas été repris dans les écritures des appelants, en sorte qu'il sera réputé abandonné ;Au principal
Attendu que la vente ou cession d'une créance comprend les accessoires de la créance, tels que caution, privilège et hypothèque ;
Attendu que cette disposition du Code civil (article 1692) est la seule aussi générale qui ait figuré dans les visas de l'arrêt d'assemblée du 6 décembre 2004 ; que ce visa implique que le cédant, par exemple l'absorbé dans une opération de fusion, apporte au cessionnaire, en l'occurrence l'absorbant, les créances telles que des factures en circulation avec l'intégralité de leurs garanties ;
Que les articles 1844-4 du Code civil et L 236-14 du Code de commerce, qui régissent les fusions et sont cités occasionnellement par les parties au présent procès, complètent mais ne contredisent ni n'éclairent véritablement cette disposition première, applicable à tous les transports de créances ;
Que ni cette disposition légale ni l'arrêt solennel qui en a fait application, ne font de distinction selon la nature de la créance garantie, en sorte que le distingo opéré par les appelants enter le
bail, le crédit-bail, le compte courant et l'affacturage, n'est pas admis par la jurisprudence -dans son expression la plus puissante-, même si, par la force des choses, l'arrêt du 6 décembre 2004 a été rendu dans un contexte défini (celui du bail) différent de celui de l'espèce ; que les arrêts postérieurs, que M. X... tend à opposer à l'arrêt d'assemblée, sont au contraire au visa de dispositions particulières, qui en font des décisions spéciales à un type d'opération juridique et se prêtant de manière plus aléatoire aux analogies, ce que n'a pas manqué de souligner la littérature doctrinale reproduite par les parties ;
Que pas davantage, et pour la même raison de généralité du texte, la loi ou la jurisprudence ne distingue selon le montant exact de la créance garantie au jour de la cession, étant observé à titre superfétatoire que dans l'espèce, l'affacturage n'avait pas encore épuisé ses effets au jour de la fusion comme le montant de la créance litigieuse le démontre ; que là encore, l'argumentation des appelants pour stigmatiser l'erreur prétendue des premiers juges, apparaît infondée ;
Que de même et encore, l'arrêt d'assemblée ne laisse pas de place à l'argumentation, qui figurait pourtant aux moyens du pourvoi, selon laquelle la caution n'avait pas consenti à la fusion ou n'avait pas réitéré son engagement après celle-ci ; que cette prétention, avancée en l'espèce par M. X..., est donc inopérante ; que comme l'expose un commentateur de l'arrêt d'assemblée du 6 décembre 2004 (M. Z...), sensible au visa de l'article 2013, la caution ne s'engage en général pas en considération du bénéficiaire mais en considération de la créance garantie ; que la Cour en déduira ici que ce serait laisser une place indue au hasard et priver de son empire légitime l'article 1134, que de permettre à cette caution de se dérober à l'occasion d'un changement de créancier qui lui est étranger ;
Attendu que du tout il résulte que les premiers juges étaient fondés à statuer comme ils l'ont fait ;
Attendu cependant que, comme l'explique l'intimée, les sommes dues par les deux cautions ne sont pas exactement les mêmes et qu'en outre, il n'a pas été fait application, sans motif particulier, du taux d'intérêt conventionnel ; qu'il sera donc fait droit à l'appel incident, auquel d'ailleurs les appelants n'opposent pas d'arguments ;Accessoires
Attendu que les appelants supporteront les dépens d'appel ;
Qu'au titre des frais exposés pour le présent appel et non compris dans les dépens, la partie condamnée aux dépens paiera à l'autre par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile la somme de 1.800 ç ;
P A R C E S M O T I F S
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de LILLE sur le principe de condamnation de MM. X... et Y... et sur les dépens et frais irrépétibles de première instance ;
INFIRME sur le montant des condamnations et condamne :
- M.Sed Ahmed X... à payer à la SA GE FACTOFRANCE les sommes de 7.663,10 ç en principal ( dont 6.895,97 ç solidairement avec M. Y...), avec intérêts au taux de 10,5 % l'an du 1er septembre 2002 au 12 mars 2003 puis de nouveau après le 5 mars 2005 jusqu'à complet
paiement, et intérêts au taux légal du 13 mars 2003 au 4 mars 2005 ;
- M. Bouziane Y... à payer à la SA GE FACTOFRANCE les sommes de 6.895,97 ç (solidairement avec M. X...) avec intérêts au taux légal du 9 juillet 2002 au 4 mars 2005 et au taux de 10,5 % l'an du 5 mars 2005 jusqu'à complet paiement ;
CONDAMNE les mêmes, solidairement, aux dépens d'appel et à payer 1.500 ç pour frais irrépétibles à l'intimée ;
ACCORDE aux avoués constitués, le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le Greffier
Le Président
C.NOLIN
T.FOSSIER